Test Blu-ray / Sanctuaire, réalisé par Michele Soavi

SANCTUAIRE (La Chiesa) réalisé par Michele Soavi, disponible en combo Blu-ray/DVD chez Le Chat qui fume

Acteurs :  Hugh Quarshie, Tomas Arana, Fedor Chaliapine Jr., Barbara Cupisti, Giovanni Lombardo Radice, Asia Argento, Roberto Caruso, Roberto Corbiletto, Alina De Simone, John Karlsen

Scénario : Franco Ferrini, Michele Soavi

Photographie : Renato Tafuri

Musique : Keith Emerson, Fabio Pignatelli, Philip Glass

Durée : 1h42

Année de sortie : 1989

LE FILM

Moyen Âge. Accusés de servir le Diable, les habitants d’un village sont massacrés par des chevaliers. Afin d’enrayer la propagation du mal, une église est érigée sur le charnier. De nos jours, lors des travaux de restauration qu’elle dirige, Lisa découvre un parchemin dissimulé dans la paroi des sous-sols de l’église. Elle s’empresse d’en faire part à Ewald, le nouveau bibliothécaire. Imprégné des théories de l’alchimiste Fulcanelli, Ewald, bien résolu à percer le secret du parchemin, va, bien malgré lui, réveiller des forces obscures et malveillantes… qui bientôt vont se déchaîner en se propageant à tous ceux présents dans l’édifice.

Né en 1957, Michele Soavi débute au cinéma en tant qu’assistant-réalisateur de Dario Argento sur Ténèbres (1982), Phenomena (1985) et Opéra (1987). Il seconde également Lamberto Bava sur Démons (1985), coécrit et produit par le même Dario Argento. Il fait ses premiers pas derrière la caméra avec Bloody Bird, slasher, giallo, film d’horreur qui remporte un vrai succès et se voit même primé au Festival d’Avoriaz. Alors qu’un troisième volet de la franchise Démons (au succès international) est abandonné durant l’écriture du film, Michele Soavi reprend le travail des scénaristes Franco Ferrini, Lamberto Bava, Dardano Sacchetti et Dario Argento pour le remanier, afin d’en faire son second long métrage en tant que réalisateur. Ce travail donnera naissance à SanctuaireLa Chiesa, aka The Church dans les pays anglo-saxons, formidable film d’épouvante et fantastique qui contient son lot d’émotions fortes, tout en offrant à la jeune Asia Argento, âgée de 13 ans, son premier vrai rôle au cinéma.

Durant le Moyen-Age, des chevaliers teutoniques éliminent tout un village accusé d’hérésie et de sorcellerie. Pour purifier le lieu, une cathédrale est bâtie sur les cadavres de ces villageois considérés comme possédés et soupçonnés d’être des partisans de Satan. Cette construction est censée enterrer les forces du Mal pour l’éternité. Des siècles plus tard, alors que des travaux de rénovation sont engagés dans l’édifice, une jeune femme, Lisa, fait la découverte d’un parchemin dissimulé dans une fissure du bâtiment et contacte un jeune bibliothécaire, Evan, pour qu’il le déchiffre. Ce dernier tente de le décrypter mais il délivre, sans le savoir, des esprits maléfiques. Alors que le bâtiment religieux enferme un groupe de visiteurs à cause d’un mécanisme accidentellement déclenché par Evan, autrefois pensé par l’architecte de la cathédrale, les démons s’échappent du charnier pour prendre le contrôle de leurs corps et les poussent à commettre des atrocités entre eux.

Passionné par la peinture et les grands maîtres, Michele Soavi imprègne Sanctuaire de références picturales (Jérôme Bosch notamment) et concocte de vrais tableaux gothiques absolument remarquables. Du point de vue visuel, on en prend plein les mirettes durant 1h40. Sa mise en scène étonnamment virtuose pour un deuxième film, ses décors impressionnants et la photo riche et contrastée de Renato Tafuri, font de Sanctuaire l’un des films de genre italiens des années 1980 les plus recherchés sur la forme. Le prologue médiéval étonne par sa violence graphique qui peut faire penser à quelques séquences de la série Game of Thrones avant l’heure, toutes proportions gardées bien sûr. Si certains trouveront à redire sur un dernier acte qui part un peu dans tous les sens dans le but sans doute d’épater la galerie, Sanctuaire est une œuvre très généreuse, qui reflète l’amour du cinéaste pour le genre, soucieux d’offrir aux spectateurs un spectacle riche en émotions fortes et en hémoglobine.

Du point de vue interprétation, hormis le plaisir de suivre les premiers pas d’Asia Argento devant la caméra, nous retiendrons surtout la tronche incroyable de Fedor Chaliapine Jr. (Le nom de la rose) qui campe un évêque qui ne semble pas très catholique, la beauté de Barbara Cupisti (L’éventreur de New York) et l’excellent Hugh Quarshie. Sur un rythme plutôt lent, mais très maîtrisé, Sanctuaire enchaîne les morceaux de bravoure (un coït avec un démon), entre effets gores très réussis (un suicide au marteau piqueur), huis clos dégénéré (coucou [REC] !) possessions démoniaques, humour noir (les vieux qui fêtent leur anniversaire de mariage), dans une recherche formelle, baroque, constante et omniprésente, avec en fond les compositions de Keith Emerson, Philip Glass et le groupe incontournable Goblin.

Tous ces ingrédients en apparence hétérogènes, contribuent à la singularité et surtout à la belle réussite de Sanctuaire.

LE BLU-RAY

Sanctuaire est disponible dans les bacs grâce aux bons soins de ce cher Chat qui fume. Un sublime combo Blu-ray/DVD, trois disques, un Digipack trois volets quadri avec un étui cartonné du plus bel effet et au visuel intrigant. Les menus principaux sont animés sur la musique du film.

C’est devenu une habitude, mais nous ne pouvons que saluer une fois de plus le travail acharné de l’éditeur griffu qui ne vient pas les pattes vides, puisque près de 90 minutes de suppléments accompagnent le film de Michele Soavi !

Et c’est Asia Argento qui ouvre le bal de cette interactivité, à travers une interview (8’30) au cours de laquelle la comédienne se souvient du tournage de l’un de ses premiers films. Un module un peu trop court, mais être en compagnie d’Asia ne se refuse évidemment pas.

Ensuite, c’est au tour de Michele Soavi de prendre la parole (20’). le réalisateur se remémore sa rencontre Dario Argento, dont le cinéma lui a donné la passion pour le genre quand il avait 12 ans. Le destin a finalement réuni les deux hommes qui sont rapidement devenus amis, jusqu’à ce que Dario Argento lui propose d’être son assistant sur Ténèbres (1982). Ce dernier a ensuite produit son second long métrage en tant que metteur en scène, Sanctuaire. Michele Soavi en vient ensuite plus précisément sur le film qui nous intéresse. La genèse, les conditions des prises de vues, ses inspirations (les peintures de Jérôme Bosch), le casting, la bande originale et l’accueil du public.

Passons maintenant à l’entretien avec Franco Casagni (10’). Le créateur des maquillages et effets spéciaux aborde les débuts de sa carrière dans Les Barbarians (1987) puis sa collaboration avec Dario Argento sur Opéra (1987), qui l’a conduit à travailler pour Michele Soavi sur Sanctuaire. Cette fois encore, diverses anecdotes de tournage s’enchaînent pour notre plus grand plaisir.

Place au comédien Giovanni Lombardo Radice, qui interprète le Révérend dans Sanctuaire (14’30). Le « Père Giovanni » revient surtout sur son amitié avec Michele Soavi, sur Dario Argento à la production, sur ses partenaires à l’écran, sur son personnage et le tournage à Budapest.

L’intervention la plus dense et la plus complète de cette édition reste celle du chef décorateur Massimo Antonello Geleng (21’). D’emblée, ce dernier indique être très heureux d’évoquer Sanctuaire, pour lequel il a toujours une grande affection. L’association avec Michele Soavi qui lui a permis de travailler également sur La Secte et Dellamorte Dellamore du même metteur en scène, mais également sur divers films de Dario Argento dont Le syndrome de Stendhal (1996) et Le Fantôme de l’Opéra (1998). Massimo Antonello Geleng mentionne également les difficultés rencontrées pour éclairer le plateau, notamment en raison des vitraux de la cathédrale qui servait alors de décor à Budapest.

Le dernier invité de cette édition n’est autre que Franco Ferrini (13’), scénariste de Sanctuaire, Phenomena de Dario Argento, mais aussi des deux Démons, réalisés par Lamberto Bava en 1985 et 1986. Alors que les producteurs désiraient surfer sur les succès de ces deux précédents films, Lamberto Bava décline finalement cette proposition. Dario Argento et Franco Ferrini ayant déjà bien avancé le script pour un troisième volet de Démons, l’histoire est ensuite reprise pour aboutir finalement à ce que deviendra Sanctuaire. Le casting est également passé au peigne fin.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce (anglaise) du film et d’autres trailers de films prévus chez l’éditeur.

L’Image et le son

Nous ne sommes pas déçus ! C’est avec un plaisir immense que nous découvrons ce film de Michele Soavi dans de pareilles conditions ! D’emblée, la colorimétrie s’impose par sa tenue, le relief est très appréciable et le piqué est souvent tranchant pour un film qui a déjà près de trente ans. Le chef-opérateur Renato Tafuri (Bloody Bird), voit sa photo – légèrement ouatée dans son prologue médiéval et plus contrastée par la suite – restituée et offre un lot de détails conséquents. Si la profondeur de champ n’est guère exploitée, certains gros plans étonnent par leur précision, la clarté est de mise sur quelques scènes, la copie stable (merci au codec AVC), le grain bien géré et les noirs denses. N’oublions pas non plus la vertueuse restauration et la propreté de la copie, débarrassée de toutes les scories possibles et imaginables. Ce Blu-ray est en format 1080p et l’apport HD loin d’être négligeable.

Trois versions DTS-HD Master Audio 2.0 disponibles sur cette édition ! Quitte à choisir, sélectionnez la piste anglaise, plus dynamique, aérée, percutante que les versions française et italienne. Cette dernière s’en tire néanmoins avec les honneurs, du moins bien mieux que la langue de Molière au spectre réduit. Les sous-titres français sont imposés.

Crédits images : © Le Chat qui fume, 1994 Mario et Vittorio Cecchi Gori – Silvio Berlusconi Communications Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Les Dents, pipi et au lit, réalisé par Emmanuel Gillibert

LES DENTS, PIPI ET AU LIT ! réalisé par Emmanuel Gillibert, disponible en DVD et Blu-ray le 1er août 2018 chez M6 Vidéo

Acteurs :  Arnaud Ducret, Louise Bourgoin, Timéo Bolland, Saskia Dillais de Melo, Laurent Ferraro, Michaël Cohen, Colette Kraffe, Hervé Masquelier…

Scénario : Emmanuel Gillibert, Marion Thièry

Photographie : Jérôme Alméras

Musique : Martin Rappeneau

Durée : 1h45

Année de sortie : 2018

LE FILM

Antoine est un célibataire endurci, fêtard et séducteur. Il vit dans un magnifique appartement Parisien avec Thomas, son colocataire, où les soirées arrosées battent son plein toutes les semaines. Lorsque Thomas part vivre à Los Angeles, il trouve à Antoine un nouveau colocataire pour le remplacer… « Jeanne, 1m70, yeux bleus ». Si la description fait saliver Antoine, il ne sait pas encore que la charmante Jeanne n’emménage pas seule… Mais accompagnée de ses deux enfants : Théo, 8 ans, et Lou, 5 ans !
Antoine, qui est loin d’être un papa poule, va goûter bien malgré lui aux joies de la vie de famille…

Certains diront qu’il est facile de s’en prendre aux comédies françaises, mais que « ce genre n’a pour prétention que de faire rire les spectateurs ». Certes, nous n’allons pas contredire ces ardents défenseurs, il y en a, de ces films qui sortent quasiment chaque semaine avec sur l’affiche les protagonistes mis en avant sur fond bleu, avec le titre écrit en jaune. Mais tout de même, il y a un minimum, ce que Les Dents, pipi et au lit ne se contente pas même de proposer au public. Ecriture paresseuse, dialogues au rabais, mise en scène inexistante, direction d’acteurs poussive, comédiens exténuants, en un mot gênant.

Fils de Michel Gillibert, écrivain et Secrétaire d’État à la Formation professionnelle sous le deuxième mandat de François Mitterrand, frère du producteur Charles Gillibert, qui a entre autres financé Mia Hansen-Løve, Gus Van Sant, Olivier Assayas et Xavier Dolan, Emmanuel Gillibert n’a donc pas eu beaucoup de soucis à se faire pour lancer son premier film en tant que scénariste et réalisateur. Ainsi, débarque Les Dents, pipi et au lit, énième « cocasserie », foncièrement embarrassante du début à la fin, qui surfe sur le thème visiblement à la mode de la colocation et surtout de l’éternel adulescent parigo, qui préfère se biturer au champagne, s’enfiler des ecsta comme des smarties et jouer à la Playstation, plutôt que de s’investir.

« Alors elle est bonne ? », « Elle est trop bonne ! », « Qu’est-ce qu’elle est bonne ! ». On repassera sur la qualité des répliques. D’ailleurs en parlant de repasser, cela ne fait pas un pli, ce premier long métrage compile toutes les tares d’un cinéma français sans ambition et opportuniste, dans le sens où l’ensemble surfe sur la pseudo-popularité d’un acteur de seconde zone, Arnaud Ducret. Ce dernier interprète ici un rôle que Franck Dubosc n’aurait pas renié il y a quinze ans. Seulement Ducret n’est pas Dubosc. Là où ce dernier a toujours su insuffler une réelle humanité dans ses personnages de tocard pour créer l’empathie, Arnaud Ducret campe ici un gros con, un beauf, immature, vulgaire, misogyne et obsédé sexuel. Autant dire qu’on ne croit pas une seconde au revirement d’Antoine, au contact de deux gamins de 5 et 8 ans, et de leur mère tout juste divorcée. Bon, on comprend qu’il ait envie tout de suite de prendre cette dernière dans ses bras puisqu’elle est incarnée par Louise Bourgoin, mais tout de même, l’évolution du personnage se fait en un clin d’oeil.

L’actrice est décidément, pour ne pas dire malheureusement, cantonnée à la comédie bas de gamme. En l’espace d’un an et demi, elle est apparue dans une sorte de trilogie avec Sous le même toit de Dominique Farrugia, L’Un dans l’autre de Bruno Chiche et Les Dents, pipi et au lit. Elle vaut pourtant bien mieux que ça, comme elle l’avait déjà prouvé chez Anne Fontaine (La Fille de Monaco), Gilles Marchand (L’Autre Monde) ou Guillaume Nicloux (La Religieuse). Toutefois, elle est ici le clown blanc et la sobriété de son jeu est ce qu’on peut sauver de ce marasme. Malheureusement, Arnaud Ducret, qui fait également le lien avec Adopte un veuf (succès surprise de l’année 2016) est à l’écran du début à la fin. Alors qu’il cartonne à la télévision dans la série Parents mode d’emploi depuis 2013, il commence sérieusement à enchaîner les navets au cinéma. L’Oncle Charles, Les Profs, Les Profs 2, L’Embarras du choix, Les Nouvelles Aventures de Cendrillon, Gaston Lagaffe, cela commence à faire un C.V. bien chargé et même beaucoup pour un seul homme. S’il n’est guère aidé par l’indigence du scénario (qui convoque Herbert Léonard comme guest de luxe, trop la classe), une musique pouêt-pouêt qui surligne chaque gag et une photo passe-partout, on se lasse très vite de ses grimaces outrancières, de ses gueulantes à répétition, de son absence de charisme tout simplement. Le bilan est donc très lourd pour Les Dents, pipi et au lit, qui s’en est pourtant plutôt pas mal tiré au box office avec près de 450.000 spectateurs.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Les Dents, pipi et au lit, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Comme souvent, l’éditeur a préféré miser sur un autre visuel, plutôt que de reprendre celui de l’affiche d’exploitation, pourtant plus attractif. Le menu principal est animé sur quelques séquences du film.

En plus de la bande-annonce, M6 Vidéo propose les interviews croisées du réalisateur Emmanuel Gillibert et des comédiens Louise Bourgoin et Arnaud Ducret. Les trois intervenants parviendraient presque à rendre le film intéressant avec leurs arguments bien trouvés et leurs sourires naturels. Le metteur en scène ne cache pas qu’il n’avait aucune ambition en écrivant ce film, tandis que les deux acteurs ne tarissent pas d’éloges envers leur partenaire.

L’Image et le son

L’apport HD pour ce film peut d’abord paraître limité. Mais c’était sans compter sur les quelques séquences en extérieur donnant un peu d’air à l’ensemble. Le relief est indiscutable, la texture flatteuse et la colorimétrie pimpante. Après, il est vrai que l’action se situe essentiellement dans l’appartement et qu’aucune profondeur de champ n’est exploitée. Mais le réalisateur a opté pour le cadre large et le spectateur aura l’impression d’être plongé au beau milieu de cette colocation forcée. Notons toutefois un encodage AVC un peu feignant qui consolide l’ensemble comme il le peut mais qui donne à la photo un aspect parfois légèrement téléfilm.

La piste DTS-HD Master Audio 5.1 offre une belle spatialisation ponctuelle de la bande-son, caisson de basses compris. Outre la spatialisation musicale, certaines ambiances naturelles parviennent à percer sur les quelques séquences en extérieur mais finalement, l’ensemble demeure axé sur les frontales, dynamiques et fluides, tandis que la centrale exsude les dialogues avec efficacité. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © SND / M6 Vidéo Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / À armes égales, réalisé par John Frankenheimer

À ARMES ÉGALES (The Challenge) réalisé par John Frankenheimer, disponible en DVD et Blu-ray le 25 juillet 2018 chez Carlotta Films

Acteurs :  Scott Glenn, Toshiro Mifune, Donna Kei Benz, Atsuo Nakamura, Calvin Jung, Sab Shimono, Kenta Fukasaku, Yoshio Inaba…

Scénario : Richard Maxwell, John Sayles

Photographie : Kozo Okazaki

Musique : Jerry Goldsmith

Durée : 1h49

Année de sortie : 1982

LE FILM

Kyoto, 1945, une cérémonie de la plus haute importance a lieu : le chef du clan Yoshida se retire et laisse sa place à son fils aîné, Sensei, et lui remet deux épées ancestrales,  symboles du pouvoir. Jaloux, le cadet tue son père avant de s’enfuir avec les précieuses armes. Plusieurs décennies passent, les enfants de Sensei apprennent que l’une des épées a été retrouvée à Los Angeles. Ils proposent alors à un boxeur en fin de carrière de la leur ramener. Un chemin périlleux l’attend.

Alors que les films de ninja commencent à se multiplier à Hollywood, surtout grâce à la Cannon avec L’Implacable NinjaEnter the Ninja réalisé en 1980 par l’illustre Menahem Golan lui-même et sa suite Ultime Violence – Ninja 2 Revenge of the Ninja mis en scène par Sam Firstenberg, certains cinéastes de renom prennent le train en marche pour surfer sur cette nouvelle vague. C’est le cas de John Frankenheimer (1930-2002). Oui, le cinéaste du Prisonnier d’Alcatraz (1962), Un crime dans la tête (1962), Le Train (1964), Grand prix (1966), French Connection 2 (1975) décide de s’y mettre aussi avec À armes égalesThe Challenge. Réalisé en 1982, ce film d’action de seconde zone contient tous les éléments installés dans les nanars qui commençaient alors à fleurir au cinéma, et ce jusqu’à la fin des années 1980. Difficile de trouver la griffe de John Frankenheimer dans À armes égales. Toutefois, cette série B, limite Z, a su devenir culte auprès des spectateurs adeptes du genre et reste un divertissement fort sympathique.

Los Angeles, 1982. Rick, un boxeur en fin de carrière, est recruté par Toshio et Akiko Yoshida pour rapporter clandestinement au Japon un sabre appartenant à leur père, le maître Yoshida. À peine arrivé à l’aéroport d’Osaka, il est kidnappé par les sbires de Hideo, puissant homme d’affaires mais aussi le frère et ennemi juré de maître Yoshida, prêt à tout pour récupérer le sabre…

« Il a été conditionné pour l’ultime défi » scandait l’affiche française du film. Et voilà notre pauvre américain quelque peu déglingué en route vers la rédemption. Ce boxeur miteux est interprété par Scott Glenn. Remarqué dans quelques séries (Les Rues de San Francisco, L’homme de fer, Baretta) puis au cinéma dans Apocalypse Now et Urban Cowboy, le comédien s’avère un étonnant mélange de David Carradine de la série Kung Fu et de Chuck Norris époque La Fureur du Dragon. Le premier pour la ressemblance physique, le second pour la coupe de cheveux du style baldaquin, mais aussi pour son non-jeu. Comme s’il portait tout le poids du monde sur ses épaules, Scott Glenn incarne péniblement Rick, à qui tous les malheurs arrivent. Lui qui désirait seulement se faire un peu de fric pour payer son loyer, se retrouve finalement au Japon au milieu d’une guerre fratricide.

Au programme, vengeance impitoyable, bastons, maniement du sabre, punchlines, fusillades. Sans oublier les rites d’initiation (un repas avec des anguilles vivantes à avaler) et les punitions où le héros se voit enterrer jusqu’au cou pendant cinq jours, obligé de gober les insectes qui s’approchent de lui. Le scénariste John Sayles (Piranhas, Hurlements) s’est fait plaisir.

Rick, tout d’abord vulgaire, égoïste, seulement préoccupé par l’argent qu’on lui doit, apprendra naturellement à faire le point sur sa vie, à écouter la personne en face de lui (surtout s’il s’agit d’une belle nana bad-ass), avant d’accepter son destin. Il est l’Elu, comme Néo dans Matrix, qui a quand même un peu plus de mal à lever la jambe pour affronter son adversaire, mais qui manie aussi bien la pétoire. À armes égales vaut donc pour son indéniable cachet nanar. Le film est correctement emballé, Scott Glenn est amusant (involontairement c’est vrai), Toshiro Mifune (Les Sept Samouraïs) cachetonne, la musique de Jerry Goldsmith est excellente et notre doublage français vaut son pesant avec notamment le gigantesque Richard Darbois qui prend un malin plaisir à doubler le personnage principal.

L’assaut final à la James Bond, on peut alors penser à celui d’On ne vit que deux fois, se tient grâce à l’indiscutable maîtrise technique de John Frankenheimer. Une petite réussite donc, efficace et récréative où les agrafeuses peuvent devenir des armes redoutables et où les têtes sont tranchées comme des pastèques.

LE BLU-RAY

Voilà deux ans que nous attendions impatiemment le retour de la Midnight Collection initiée par Carlotta Films en 2016 ! Pour cette co-édition avec L’Atelier d’images, nous retrouvons «  le meilleur de la VHS en Blu-ray et DVD  ». La jaquette, glissée dans un boîtier élégant de couleur noire et estampillée «  VHS  », est très sympa et reprend le style Vidéoclub des années 1980 avec le visuel original. Le menu principal est sobre, fixe et musical. Vivement les autres titres, en espérant ne pas attendre aussi longtemps !

Seule ombre au tableau de cette édition, le film n’est accompagné que de sa bande-annonce originale (non restaurée) et des credits habituels.

L’Image et le son

Disponible en France pour la première fois en version restaurée Haute Définition, le film de John Frankenheimer bénéficie d’un Blu-ray au format 1080p soigné. Un lifting numérique a visiblement été effectué, avec un résultat probant, même si des points et des tâches restent constatables (bien que rares). L’encodage AVC est de haute tenue et la promotion HD non négligeable. Les détails sont appréciables, le piqué et la clarté sont aléatoires mais plus nets sur les séquences diurnes, la colorimétrie retrouve une nouvelle jeunesse et les contrastes affichent une petite densité inattendue. L’ensemble est propre, stable en dehors de très légers fourmillements, le reste des scories demeure subliminal, et le grain est respecté. La première bobine et le générique de fin restent plus grumeleux avec une définition hasardeuse. Notons que les sous-titres anglais très encombrants sont incrustés sur l’image lors des échanges en japonais.

Sachant que les spectateurs français ont avant tout découvert ce film dans la langue de Molière, Carlotta Films livre un mixage français propre et respectueux de l’écoute originale avec bien sûr le doublage d’époque. Au jeu des comparaisons, la version originale s’en sort mieux avec des effets plus naturels et une dynamique plus marquée que la VF aux dialogues assez sourds. Les deux pistes sont proposées en DTS-HD Master Audio 1.0, qui ne peuvent évidemment pas rivaliser avec les standards actuels, mais l’éditeur permet de revoir ce « classique » dans de bonnes conditions techniques, sans craquement ni souffle. Le changement de langue est verrouillé à la volée, tout comme les sous-titres français.

Crédits images : © Carlotta Films / L’Atelier d’images / CBS Broadcasting INC. / CBS STUDIOS INC. Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Secret des Marrowbone, réalisé par Sergio G. Sánchez

LE SECRET DES MARROWBONE (El Secreto de Marrowbone ou Marrowbone) réalisé par Sergio G. Sánchez, disponible en DVD et Blu-ray le 18 juillet 2018 chez Metropolian Vidéo

Acteurs :  George MacKay, Anya Taylor-Joy, Charlie Heaton, Mia Goth, Matthew Stagg, Kyle Soller, Nicola Harrison, Tom Fisher…

Scénario : Sergio G. Sánchez

Photographie : Xavi Giménez

Musique : Fernando Velázquez

Durée : 1h51

Année de sortie : 2018

LE FILM

Pour ne pas être séparés, Jack, 20 ans, et ses frères et sœurs plus jeunes, décident de cacher à tout le monde le décès de leur mère qui les élevait seule. Ils se retrouvent livrés à eux-mêmes dans la ferme familiale isolée, mais bientôt, d’étranges phénomènes indiqueraient qu’une présence malveillante hante leur unique refuge…

Alors oui, bien sûr, on a déjà sûrement vu ça plusieurs fois au cinéma ces quinze dernières années, mais Le Secret des MarrowboneEl Secreto de Marrowbone ou tout simplement Marrowbone (titre international) est un film très prometteur. Même si le tournage s’est fait en langue anglaise, le titre espagnol renvoie à ses décors naturels (tout le film y a été tourné), mais aussi et surtout à son cinéaste et scénariste Sergio G. Sánchez. Né en 1973, il signe ici son premier long métrage en tant que réalisateur, après avoir écrit les deux premiers films de J.A. Bayona, L’Orphelinat (2007) et The Impossible (2012). D’ailleurs l’oeuvre de ce dernier, jusque dans la musique composée par Fernando Velázquez (Quelques minutes après minuit), imprègne chaque plan et même l’histoire du Secret des Marrowbone. C’est même ce qui en fait sûrement son relatif point faible, puisque le spectateur un tant soit peu intéressé par le cinéma de genre, surtout ibérique, parviendra à anticiper les rebondissements et le twist à la M. Night Shyamalan. Toutefois, la mise en scène, la beauté de la photographie et l’excellence de ses interprètes valent largement le déplacement.

Lorsque leur mère décède, Jack, ses deux frères et leur sœur se réfugient à Marrowbone, une ferme isolée abandonnée depuis des années et qui appartenait à leur grand-tante. Par peur d’être séparés et placés dans des foyers différents, ils décident d’enterrer le cadavre de leur mère dans le jardin et continuent à faire croire qu’elle est toujours vivante. Un jour, alors qu’ils sont isolés du monde extérieur, un notaire débarque chez eux pour demander à leur mère de signer un testament. La demeure est également hantée et renferme un secret dans le grenier…

En fait, raconter l’histoire du Secret des Marrowbone en dit déjà presque trop. Sans « singer » le cinéma de celui qui lui a donné sa chance dans le milieu, qui apparaît ici en tant que producteur et avec lequel il a fait ses premières armes sur des films importants, Sergio G. Sánchez démontre surtout ici un don pour le storytelling, pour la direction d’acteurs et pour instaurer une ambiance inquiétante, tout en privilégiant l’émotion et les liens entre les personnages. Pas étonnant que le metteur en scène se soit vu remettre le Prix Goya du meilleur nouveau réalisateur en 2018. En fait ce que l’on retient avant tout du Secret des Marrowbone, également influencé par les incontournables du genre (Les Innocents de Jack Clayton, Rebecca d’Alfred Hitchcock, Les Autres d’Alejandro Amenábar), c’est avant tout les comédiens.

Le rôle principal est tenu par le britannique George MacKay, l’une des révélations du magnifique Captain Fantastic de Matt Ross (2016), vu également dans la série 22.11.63 adaptée de l’oeuvre de Stephen King. Magnétique et à fleur de peau, George MacKay est assurément l’un des grands acteurs en devenir et porte admirablement le film de Sergio G. Sánchez. C’est aussi le cas de la désormais incontournable Anya Taylor-Joy. Après The Witch de Robert Eggers, Morgan de Luke Scott et Split de M. Night Shyamalan (bientôt dans Glass), la comédienne confirme son aura, son charisme et l’art d’inspirer les réalisateurs de genre. Le reste du casting est du même acabit avec Charlie Heaton (Stranger Things), Mia Goth (A Cure for Life) et Kyle Soller (la série Poldark), tous vraiment épatants.

Le Secret des Marrowbone a du mal à se sortir d’un certain cahier des charges. On sent le nouveau réalisateur appliqué, chaque plan étant particulièrement soigné, également soutenu par le travail du chef opérateur Xavi Giménez, ancien collaborateur de Jaume Balagueró sur La Secte sans nom ou de Brad Anderson sur The Machinist. Une pléthore de talents réunis à la fois devant et derrière la caméra. Si au final ce conte émeut bien plus qu’il donne les frissons, Le Secret des Marrowbone, présenté en ouverture de Gérardmer en 2018, qui mélange allègrement thriller, horreur, fantastique et histoire d’amour, n’est en aucun cas déplaisant et mérite l’attention des spectateurs et des cinéphiles.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Secret des Maroowbone, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est élégant, animé et musical.

Point de making-of à l’horizon, ni d’interviews, mais une grande quantité de scènes coupées (28’). Ces séquences prolongeaient notamment la relation entre Jack et Allie, ainsi que d’autres moments clés du film. Mais la plupart des scènes laissées sur le banc de montage dévoilaient également trop le twist final et l’on comprend aisément pourquoi le réalisateur les a écartées. On se demande également pourquoi elles avaient été écrites tant celles-ci paraissaient trop explicites. Une fin alternative, très jolie, est également disponible.

L’interactivité comporte également une bande-démo avant/après l’incrustation des effets visuels, ainsi que des bandes-annonces et des liens internet.

L’Image et le son

Metropolitan est synonyme d’excellence : relief, colorimétrie, piqué (acéré), contrastes (impressionnants), densité des noirs, on en prend plein les yeux. Les teintes sont chatoyantes et chaque détail aux quatre coins de l’écran est aussi saisissant qu’étourdissant. Ce transfert immaculé soutenu par un encodage AVC solide comme un roc laisse pantois d’admiration. Heureusement, les scènes sombres sont logées à la même enseigne. Ce master HD du Secret des Marrowbone permet de découvrir le film dans de superbes conditions. Le léger grain inhérent à la photo d’origine est respecté.

Le spectateur est littéralement plongé dans l’atmosphère du film grâce aux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 anglais et français. La composition de Fernando Velázquez est distillée par l’ensemble des enceintes. Nous sommes en plein conte et les latérales, ainsi que les frontales et le caisson de basses remplissent parfaitement leur fonction, à savoir distiller un lot conséquent d’effets qui font sursauter, même à bas volume. Les conditions acoustiques sont donc soignées, amples, précises, les voix des comédiens jamais noyées. Une piste Audiodescription est également disponible, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Metropolitan FilmExport Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Incidents de parcours, réalisé par George A. Romero

INCIDENTS DE PARCOURS (Monkey Shines) réalisé par George A. Romero, disponible en DVD et combo Blu-ray+DVD le 7 août 2018 chez ESC Editions

Acteurs :  Jason Beghe, John Pankow, Kate McNeil, Joyce Van Patten, Christine Forrest, Stephen Root, Stanley Tucci, Patricia Tallman…

Scénario : George A. Romero d’après le roman Monkey Shines de Michael Stewart

Photographie : James A. Contner

Musique : David Shire

Durée : 1h53

Année de sortie : 1988

LE FILM

Allan, jeune homme à l’avenir prometteur, est un jour victime d’un accident qui le paralyse totalement. Grâce à Ella, un singe capucin que lui a donné son ami Geoffrey, Allan reprend goût à la vie. Seulement Geoffrey est un génie de la recherche scientifique. Sa dernière trouvaille : augmenter l’intelligence des primates en leur injectant un sérum constitué de tissus du cerveau humain. Bien entendu, Ella n’a pas échappé à ses expériences.

Non, l’immense George A. Romero (1940-2017) n’est pas « que » le réalisateur de films de zombies. Incidents de parcours (1988), titre français idiot de Monkey Shines, est le dixième long métrage du cinéaste. Certes, les cinéphiles retiennent essentiellement La Nuit des morts-vivantsThe Night of the Living Dead (1968), Zombie (1978), Creepshow (1982) ou bien encore Le Jour des morts-vivantsDay of the Dead (1985), mais résumer la carrière du metteur en scène par ces films emblématiques serait – comme on le dit dans Last Action hero – une monumentale erreur. Incidents de parcours, réalisé trois ans après Le Jour des morts-vivants, est l’adaptation du roman de Michael Stewart, Monkey Shines. Comme il le fera en 1992 pour La Part des ténèbres, tiré du roman éponyme de Richard Bachman alias Stephen King, le réalisateur s’approprie le matériel original pour aborder les thèmes qui lui sont chers (ou « chairs » devrait-on dire), entre autres la part d’animalité présente en chaque être humain, les dérives de la science avec l’homme qui se prend pour Dieu. Méconnu en dehors du cercle de ses admirateurs, comme Knightriders (1981), Incidents de parcours mérite pourtant d’être reconsidéré et reste un sacré tour de force de George A. Romero.

Allan Mann est un brillant étudiant en droit. Il est jeune, sportif, le monde semble s’ouvrir à lui jusqu’au jour où, victime d’un accident, il devient tétraplégique. Son monde s’écroule et bientôt Allan ne voit plus que le suicide comme porte de sortie. Pour le sortir de sa dépression, Geoffrey, un ami chercheur, lui offre alors un petit singe capucin du nom d’Ella. Elle est dressée pour accompagner et aider les handicapés dans leurs vies quotidiennes. Ella se révèle extrêmement brillante et ingénieuse et bientôt une relation fusionnelle s’instaure entre elle et son maître. Relation qui devient exclusive, Ella ne supportant pas la présence de Mélanie, la kinésithérapeute d’Allan et plus généralement toute personne s’interposant entre elle et son maître.

Trente ans après sa discrète sortie dans les salles, Incidents de parcours demeure une vraie petite leçon de mise en scène. Le rythme est lent, mais toujours maîtrisé et le récit repose sur un montage percutant qui ne laisse aucun moment de répit au spectateur. Le cinéaste est en pleine possession de ses moyens et démontre son art du storytelling. Monkey Shines se déguste comme un roman que l’on dévorerait page après page. Par ailleurs, le film n’est certainement pas à classer dans le genre épouvante, mais se révèle être un drame intimiste parasité par l’incursion du fantastique et du thriller. On pense alors à David Cronenberg ou plus spécialement à Stephen King, ami du cinéaste. Un temps pressenti pour réaliser Les Vampires de Salem à la fin des années 1970, George A. Romero avait ensuite collaboré avec l’écrivain sur Creepshow, avant de travailler sur l’adaptation de Simetierre, qui ne verra finalement pas le jour. Les deux hommes se distinguent par leur capacité à rendre le surnaturel réaliste, qui s’immisce dans le quotidien le plus banal. C’est le cas dans Incidents de parcours, qui repose également sur un excellent casting de têtes méconnues, ce qui renforce l’empathie pour les personnages.

Jason Beghe, vu dans la série Californication, qui en dehors de sa barbe postiche digne d’un hérisson mort, parvient à rendre son personnage toujours attachant malgré son ambiguïté. A ses côtés, quelques têtes plus « reconnaissables » à inscrire dans la catégorie «On ne sait jamais comment ils s’appellent », comme celle de John Pankow (Police fédérale, Los Angeles) ou bien celle désormais plus célèbre de l’excellent Stanley Tucci dans une de ses premières apparitions au cinéma. Sans oublier le charme de Kate McNeil. Mais l’un des personnages principaux s’avère le capucin, seule « star » visible sur l’affiche du film. On imagine volontiers la patience nécessaire de la part de l’équipe pour obtenir les réactions désirées, surtout pour le dernier acte, énorme morceau de bravoure où les rebondissements s’enchaînent pendant près de vingt minutes, quand l’homme doit faire face à ses instincts primaires. L’ombre d’Alfred Hitchcock plane également sur Monkey Shines, et plus particulièrement de Psychose auquel on ne peut s’empêcher de penser pour la sous-intrigue avec la mère du personnage principal, qu’il appelle plusieurs fois « Mother ».

Produit et distribué par la société Orion Pictures (Terminator, RoboCop, Platoon, Le Silence des agneaux), Incidents de parcours fait partie de ce genre de films que l’on redécouvre avec un plaisir non dissimulé. D’une part en raison de la nostalgie que l’on peut avoir pour ce genre de productions typiques des années 80, d’autre part parce qu’il s’agit d’un vrai bon film, en dehors de son happy-end convenu imposé à Romero par le studio, que l’on déterre comme une pépite en ayant la conviction qu’il mériterait une audience bien plus large.

LE BLU-RAY

Jusqu’ici indisponible en France, Incident de parcours arrive dans les bacs en DVD et combo Blu-ray+DVD+livret exclusif (24 pages) écrit par Marc Toullec, en édition limitée, sous les couleurs de ESC Editions. Le menu principal est animé et musical.

En plus des bandes-annonces d’Incidents de parcours, de Jeu d’enfant et de Street Trash, ne manquez pas l’intervention de l’excellent Julien Sévéon (22’). L’auteur de l’ouvrage George A. Romero : Révolutions, Zombies et Chevalerie (Popcorn, 2017), propose une brillante et passionnante analyse du film qui nous intéresse ici. Monkey Shines est également replacé dans la filmographie du cinéaste, tout comme les thèmes abordés sont croisés avec ceux déjà présents dans les autres opus de George A. Romero. Le journaliste aborde les conditions de tournage d’Incidents de parcours (notamment avec les capucins), indique les différences avec le roman original (inédit en France) de Michael Stewart et comment le réalisateur a su s’approprier l’histoire originale pour y mettre ses propres obsessions, en dépit d’une fin optimiste imposée par le studio. Notons également que deux courts extraits d’interviews de George A. Romero se greffent à cet entretien.

L’Image et le son

Pour son trentième anniversaire, Incidents de parcours arrive dans un nouveau master Haute-Définition et nous ne sommes pas déçus ! Avec son format respecté 1.85 et une solide compression AVC, ce Blu-ray au format 1080p permet de (re)découvrir le film de George A. Romero dans de très bonnes conditions techniques. La copie est très propre, stable et lumineuse, la restauration impressionnante, les contrastes bien équilibrés. Les détails étonnent souvent par leur précision, notamment sur les gros plans détaillés à souhait (la sueur qui brille sur le front d’Allan), les couleurs retrouvent un éclat inespéré. Le grain argentique est également bien géré, même si plus épais sur les séquences sombres.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage DTS HD Master Audio 2.0. Le confort acoustique est assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle suffisant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste anglaise. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © ESC Editions / ESC Distribution / MGMCaptures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Les Tuche 3, réalisé par Olivier Baroux

LES TUCHE 3 réalisé par Oliver Baroux, disponible en DVD et Blu-ray le 2 juin 2018 chez Pathé

Acteurs :  Jean-Paul Rouve, Isabelle Nanty, Claire Nadeau, Sarah Stern, Pierre Lottin, Théo Fernandez, Scali Delpeyrat, Philippe Magnan, Nicolas Maury, Stephan Wojtowicz, Philippe Vieux, Yann Papin, Eric Kara, Olivier Baroux, Ralph Amoussou…

Scénario : Philippe Mechelen, Julien Hervé, Nessim Chikhaoui, Jean-Paul Rouve, Olivier Baroux

Photographie : Christian Abomnes

Musique : Martin Rappeneau

Durée : 1h32

Année de sortie : 2018

LE FILM

Jeff Tuche, se réjouit de l’arrivée du TGV dans son cher village. Malheureusement, le train à grande vitesse ne fait que passer, sans s’arrêter à Bouzolles. Déçu, il tente de joindre le président de la République pour que sa bourgade ne reste pas isolée du reste du territoire. Sans réponse de l’Élysée, Jeff ne voit plus qu’une seule solution pour se faire entendre : se présenter à l’élection présidentielle… Profitant de circonstances politiques imprévisibles, Jeff Tuche et toute sa famille vont s’installer à l’Élysée pour une mission à haut risque : gouverner la France.

Durant l’été 2011, Les Tuche obtient un joli succès dans les salles en attirant plus d’1,5 millions de spectateurs. Pas trop mal pour une comédie sortie de nulle part, mais reposant sur un casting sympathique, même si Safari du même Olivier Baroux avait fait quasiment deux millions d’entrées deux ans auparavant. Après le carton du film à la télévision et le relais sur les réseaux sociaux, le réalisateur décide de suivre à nouveau ses personnages, la famille Tuche donc, dans de nouvelles aventures et de les envoyer cette fois aux Etats-Unis. Les Tuche 2 – Le rêve américain sort en février 2016 et là le triomphe est aussi inattendu que conséquent : 4,6 millions d’entrées ! Olivier Baroux, Jean-Paul Rouve, Isabelle Nanty n’allaient pas en rester là puisque les français en redemandaient. Deux ans à peine après leur road-trip US, les Tuche sont déjà de retour et s’installent…à l’Elysée !

Si le premier volet était une comédie franchouillarde attachante dans laquelle Jean-Paul Rouve reprenait pour ainsi dire son personnage de Marcel dans les sketchs Télé Radio Bière Foot à l’époque des Robin des Bois, le second tirait sur la corde. Ce troisième opus corrige le tir et se focalise surtout sur le point fort de cette franchise, le personnage de Jeff Tuche. Les Tuche 3 s’apparente cette fois à une succession de vignettes, entièrement centrées sur le père de famille. Jean-Paul Rouve, qui a participé à l’écriture du scénario, tire allègrement la couverture. Il s’en donne à coeur joie dans un véritable one-man show. Du coup, le film est complètement déséquilibré, certaines séquences font mouche, toute la première partie du film en fait, d’autres tombent complètement à plat, comme tout ce qui concerne le reste de la famille. Par ailleurs, là où le comédien Théo Fernandez servait de narrateur pour les deux premiers épisodes, il est ici relayé au rang de faire-valoir et n’a plus rien à défendre, d’autant plus qu’il n’est quasiment jamais avec ses partenaires à l’écran.

Jeff Tuche, élu maire de Bouzolles, décide de se présenter à l’élection présidentielle car le TGV qui devait s’arrêter dans leur petite bourgade ne fera qu’y passer. Il ressort grand vainqueur de l’élection avec 57 % des voix. Le nouveau président de la République va devoir exercer son pouvoir sur la France. Voilà, l’histoire tient sur deux lignes. Deux lignes sur lesquelles les cinq scénaristes (!) ont greffé des gags pour atteindre difficilement 92 minutes. Mais honnêtement, toutes proportions gardées, le contrat est rempli. Les spectateurs aiment les Tuche, Jeff avec sa coiffure moussue, Cathy (Isabelle Nanty dans le rôle de sa vie ?) qui prépare toujours des frites pour la famille, Stéphanie (Sarah Stern) et ses histoires d’amour, Wilfried (Pierre Lottin) qui cultive son look de rappeur et le cadet Donald (Théo Fernandez), dont l’intelligence et le calme tranchent avec le reste de la famille, qui renonce à aller à Polytechnique. Ah oui il y a aussi la grand-mère, mamie Suze (Claire Nadeau, fantomatique), qui devient par ses excentricités l’égérie d’une marque de vêtements. Le premier acte fonctionne très bien car il reflète, inconsciemment ou pas, l’élection d’Emmanuel Macron à l’Elysée. Un candidat venu de nulle part, qui n’a fait que monter dans les sondages malgré son absence de programme, jusqu’à accéder à la Présidence. La campagne et le débat sont de très bons moments, ainsi que l’arrivée de la famille au Palais de l’Elysée. La suite est un peu plus chaotique, mais la photo très colorée fait ressembler le film à une BD filmée, comme si le spectateur découvrait un nouveau quiproquo en tournant la page suivante.

Il y a donc à boire et à manger dans Les Tuche 3, mais on ne pourra pas reprocher à Olivier Baroux de ne pas être généreux avec son public et de revendiquer un humour absurde. Au moment où cette chronique est réalisée, Les Tuche 3 est toujours numéro un du box office en 2018 avec 5,7 millions d’entrées, suivi de très près par La Ch’tite Famille (5,6 millions) et Avengers: Infinity War (5 millions). En attendant un probable quatrième opus, avec Jeff Tuche au Vatican ?

LE BLU-RAY

Les Tuche 3 est arrivé à petit prix dans les bacs en DVD et en Blu-ray, sous l’égide de Pathé. Le visuel de la jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend le visuel de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.

A l’instar de l’édition HD de La Ch’tite Famille, les suppléments sont ici peu conséquents.

Il faudra se contenter d’un making of (14’), classique, composé d’images de tournage et des propos de l’équipe. L’occasion de voir que les comédiens se connaissent par coeur et s’entendent à merveille.

On poursuit avec 4 minutes de scènes coupées, plus ou moins amusantes, surtout le débat présidentiel un peu plus rallongé.

L’interactivité se clôt sur un bêtisier amusant (8’).

L’Image et le son

Ce transfert HD s’avère soigné, avec une prédominance de couleurs vives et pétillantes, des contrastes au beau fixe et un piqué agréable. La définition est au top, les détails foisonnants sur le cadre large et ce master demeure un bel objet avec un relief omniprésent et des séquences diurnes aussi magnifiques qu’étincelantes.

Dès le générique, la piste DTS-HD Master Audio 5.1 sollicite l’ensemble des enceintes et offre une solide spatialisation. Ce mixage fait la part belle à la musique légère de Martin Rappeneau, présente pendant tout le film. Les dialogues se détachent sans mal sur la centrale, tandis que les ambiances naturelles en extérieur demeurent constantes. Le spectacle acoustique est assuré. L’éditeur joint également une piste DTS-HD Master Audio 2.0 de fort bon acabit, des sous-titres destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiovision.

Crédits images : ©  Pathé DistributionEskwad  / Arnaud Borrel / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Call Me by Your Name, réalisé par Luca Guadagnino

CALL ME BY YOUR NAME réalisé par Luca Guadagnino, disponible en DVD et Blu-ray le 4 juillet 2018 chez Sony Pictures

Acteurs :  Armie Hammer, Timothée Chalamet, Michael Stuhlbarg, Amira Casar, Esther Garrel, Victoire du Bois, Elena Bucci, Peter Spears …

Scénario : James Ivory d’après le roman d’André Aciman

Photographie : Sayombhu Mukdeeprom

Musique : Sufjan Stevens

Durée : 2h12

Année de sortie : 2018

LE FILM

Été 1983. Elio Perlman, dix-sept ans, passe ses vacances dans la villa du XVIIe siècle que possède sa famille en Italie, à jouer de la musique classique, à lire et à flirter avec son amie Marzia. Son père, éminent professeur spécialiste de la culture gréco-romaine, et sa mère, traductrice, lui ont donné une excellente éducation, et il est proche de ses parents. Sa sophistication et ses talents intellectuels font d’Elio un jeune homme mûr pour son âge, mais il conserve aussi une certaine innocence, en particulier pour ce qui touche à l’amour. Un jour, Oliver, un séduisant Américain qui prépare son doctorat, vient travailler auprès du père d’Elio. Elio et Oliver vont bientôt découvrir l’éveil du désir, au cours d’un été ensoleillé dans la campagne italienne qui changera leur vie à jamais.

Quel chef d’oeuvre ! Oui nous préférons le dire d’emblée car nous ne savons jamais jusqu’où les critiques sont lues, donc plutôt que de chercher un peu plus loin quel est notre avis, sachez que Call Me by Your Name est d’ores et déjà l’un des plus grands films de 2018. Ecrit par James Ivory, un temps envisagé à la mise en scène (les noms de Gabriele Muccino, Ferzan Ozpetek et Sam Taylor-Johnson ont également circulé), d’après le roman d’André Aciman paru en 2007 et traduit en France sous le titre Plus tard ou jamais, Call Me by Your Name est finalement réalisé par le cinéaste italien Luca Guadagnino, après dix années passées à trouver les financements. Alors que les cinéphiles ont les yeux tournés vers son remake de Suspiria de Dario Argento, le réalisateur du superbe Amore (2009) et A Bigger Splash (2015), formidable remake de La Piscine de Jacques Deray, clôt ici une trilogie consacrée au désir. Tourné intégralement dans les fabuleux décors naturels de la Lombardie en Italie du nord, ce merveilleux drame convoque à la fois L’Education sentimentale de Gustave Flaubert (on peut également penser à Proust) et Maurice d’Edward Morgan Forster qui avait d’ailleurs été transposé au cinéma en 1987 par…James Ivory. La boucle est bouclée.

Drame romantique, sensuel, psychologique, délicat, Call Me by Your Name est un film riche, malgré son budget restreint de 3,5 millions de dollars, qui privilégie les non-dits, les regards, les gestes esquissés. C’est le soleil ardent qui tombe sur des arbres fruitiers, qui fait mûrir trop vite les pêches et les abricots, qui fait aussi dorer la peau de ses protagonistes. Luca Guadagnino convoque un magnifique casting international, de Michael Stuhlbarg à Amira Casar, en passant par Armie Hammer (quel plaisir de le voir en dehors de ses superproductions habituelles), Esther Garrel et surtout Timothée Chalamet, l’immense révélation de Call Me by Your Name. Quasiment de tous les plans, le jeune comédien foudroie par sa maturité, son charisme et sa sensibilité.

Les langues française, italienne et anglaise se confrontent comme les corps qui se cherchent et qui s’attirent. Peu importent la culture, l’éducation, l’âge, le premier amour est universel et marque à jamais. On suit donc cette histoire sentimentale entre Elio, italo-américain de 17 ans et le doctorant américain de son père, Oliver, durant l’été moite et radieux de 1983. Alors que le livre épousait uniquement le point de vue du personnage principal, le film de Luca Guadagnino observe Elio. Le cinéaste n’hésite pas à avoir recours aux silences, observe son protagoniste lui-même en train de regarder l’objet de son affection, pris au doute alors qu’il entame une petite liaison avec Marzia (Esther Garrel) et découvre avec elle l’acte sexuel. En fait, Call Me by Your Name peut se voir comme les réminiscences du personnage principal, ce qui est d’ailleurs le cas dans le roman original. L’action se déroulant en 1983, avec quelques notes musicales replaçant le spectateur à cette époque comme le Words de F.R. David, Luca Guadagnino parvient à faire ressentir le vent dans les arbres, les odeurs d’un petit-déjeuner pris sur la terrasse, la fraîcheur d’un limoncello, la sueur qui perle sur les corps.

Profondément mélancolique, cette idylle de jeunesse s’adresse à tous les spectateurs et parvient à restituer l’authenticité de la première passion amoureuse. Parallèlement, Luca Guadagnino rend également un hommage à ses « pères » de cinéma, Eric Rohmer, Jacques Rivette, Bernardo Bertolucci et Jean Renoir, en ayant d’ailleurs recours à un tournage en 35 mm et un seul objectif. Un défi technique relevé par le virtuose directeur de la photographie Sayombhu Mukdeeprom, collaborateur d’Apichatpong Weerasethakul. L’ultime séquence du film s’imprime déjà dans toutes les mémoires, ainsi que les chansons Mystery of Love et Visions of Gideon de Sufjan Stevens, qui résonnent et obsèdent encore longtemps bien après. Il en est de même pour le poignant discours final de M. Perlman à son fils Elio, probablement l’une des plus grandes prestations de Michael Stuhlbarg. Absolument bouleversant.

Porté par une critique quasi-unanime à sa sortie, Call Me by Your Name obtient également un très beau succès commercial (près de 350.000 entrées en France, 18 millions de dollars de recette aux Etats-Unis), trois nominations aux Golden Globes, quatre aux BAFTA et aux Oscars. Si Timothée Chalamet est lui-même nommé pour celle du meilleur acteur, c’est James Ivory qui remporte la statuette convoitée pour le meilleur scénario adapté.

LE BLU-RAY

Call Me by Your Name arrive dans les bacs en DVD et Blu-ray chez Sony Pictures. La galette bleue (zones A, B et C) repose dans un boîtier classique, glissé dans un surétui cartonné. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation et le menu principal est fixe et musical.

Concernant les suppléments, n’hésitez pas à revoir le film avec les commentaires audio (vostf) des comédiens Michael Stuhlbarg et Timothée Chalamet. Visiblement complices, les deux comédiens reviennent calmement sur tous les aspects du tournage, sur le scénario, sur le livre d’André Aciman, sur la mise en scène et la direction d’acteurs de Luca Guadagnino, sur les partis pris et les intentions, sur l’évolution des personnages, les conditions de tournage. On apprend par exemple que le premier montage durait 4h15 et que les prises de vue ont été réalisées presque intégralement dans l’ordre chronologique de l’histoire. Un très bon moment où l’on regrettera juste l’absence du cinéaste.

Le making of (11’) compile quelques propos de l’équipe avec des photos du tournage. C’est le bonus le plus anecdotique, puisque ce qui est dit rapidement ici lors des interviews promotionnelles est plus étayé dans le segment suivant.

On retrouve donc Luca Guadagnino, Armie Hammer, Timothée Chalamet et Michael Stuhlbarg, invités à répondre aux questions d’un journaliste après la projection de Call Me by Your Name (25’). Les questions sont pertinentes, ainsi que les réponses apportées par l’équipe. Chacun intervient et défend ce film qui leur tient visiblement tous à coeur. De plus, ce module parvient à compléter le commentaire audio, en évitant la redite.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et surtout le clip Mystery of Love par Sufjan Stevens.

L’Image et le son

Sony Pictures livre un superbe master HD de Call me By Your Name. Tourné intégralement en 35mm avec un seul objectif, le film de Luca Guadagnino voit ses partis pris entièrement respectés avec un grain argentique visible. La copie est lumineuse, le piqué affûté sur les séquences diurnes, les couleurs fraîches et estivales. Quelques scènes sombres restent marquées par un très léger fourmillement et des noirs plus spongieux, mais dans l’ensemble l’image est de fort belle facture. Quant aux quelques plans flous, ils sont évidemment volontaires et d’origine.

Oublions la piste française qui, malgré une balance frontales-latérales équilibrée, demeure totalement anecdotique. N’hésitez pas à sélectionner directement la piste « multilangues » originale DTS-HD Master Audio 5.1 qui offre un réel confort acoustique, précis (les grillons, le vent, l’eau qui coule) et enveloppant (voir la scène de la danse d’Oliver), délivrant les dialogues avec éclat et des effets concrets. N’oublions pas l’apport musical avec surtout les titres magnifiques de Sufjan Stevens.

Crédits images : © Sony PicturesCaptures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Ch’tite Famille, réalisé par Dany Boon

LA CH’TITE FAMILLE réalisé par Dany Boon, disponible en DVD et Blu-ray le 30 juin 2018 chez Pathé

Acteurs :  Dany Boon, Line Renaud, Laurence Arné, Valérie Bonneton, Pierre Richard, Guy Lecluyse, François Berléand, Juliane Lepoureau …

Scénario : Dany Boon, Sarah Kaminsky

Photographie : Denis Rouden

Musique : Michaël Tordjman, Maxime Desprez

Durée : 1h46

Année de sortie : 2018

LE FILM

Valentin D. et Constance Brandt, un couple d’architectes designers en vogue préparent le vernissage de leur rétrospective au Palais de Tokyo. Mais ce que personne ne sait, c’est que pour s’intégrer au monde du design et du luxe parisien, Valentin a menti sur ses origines prolétaires et ch’tis. Alors, quand sa mère, son frère et sa belle-sœur débarquent par surprise au Palais de Tokyo, le jour du vernissage, la rencontre des deux mondes est fracassante. D’autant plus que Valentin, suite à un accident, va perdre la mémoire et se retrouver 20 ans en arrière, plus ch’ti que jamais !

Les comédies populaires réalisées par Dany Boon se suivent et se ressemblent, même si le comédien-metteur en scène-scénariste n’a jamais su retrouver la formule de Bienvenue chez les Ch’tis, 20,5 millions de spectateurs rien qu’en France. Rien à déclarer, probablement son meilleur film à ce jour, avait fait plus de huit millions d’entrées, Supercondriaque 5,3 millions « malgré » le retour du duo Boon-Merad, tandis que Raid dingue, son long métrage le plus irritant et usant, avait quand même emporté dans son sillage 4,5 millions de français et empoché en 2018 le nouveau César du public. Dix ans après son hit, osons dire le mot, son blockbuster qui aurait raporté près de 250 millions de dollars de recette, Dany Boon revient à son Ch’ti Cinematic Universe avec…bah la Ch’tite Famille, qui n’est pas une suite à Bienvenue chez les Ch’tis, mais qui en reprend allègrement la même recette, ainsi que l’esprit.

L’affiche convoque la bande à Boon, tous serrés sur le sempiternel fond bleu, comme ses quatre précédents longs métrages et même toutes les comédies françaises depuis quinze ans, tout est réuni pour un nouveau triomphe largement calculé. Avec 5,6 millions d’entrées, La Ch’tite famille a dépassé Raid dingue et ce sixième film de Dany Boon a une fois de plus confirmé l’aura indiscutable de son auteur-acteur auprès des français. Mais La Ch’tite famille est-il un bon film au fait ? Mieux que Raid dingue oui, assurément, faire pire aurait d’ailleurs été difficile à faire, mais l’ensemble reste malgré tout extrêmement poussif, platement réalisé, souvent surjoué et a trop souvent recours aux violons pour appuyer l’émotion.

Valentin (Dany Boon) et sa compagne Constance (Laurence Arné) sont tous deux des designers réputés. Jusqu’ici, Valentin a réussi à dissimuler ses origines. Issu d’une famille modeste du Nord de la France, il a prétendu que sa mère Suzanne (Line Renaud) l’a abandonné à sa naissance. Or, celle-ci, accompagnée de Gustave (Guy Lecluise), le frère de Valentin, de Louloute (Valérie Bonneton), sa belle-sœur et de sa nièce Britney (Juliane Lepoureau), arrivent sans crier gare dans la capitale le jour du vernissage de sa nouvelle exposition. C’est la confrontation entre deux mondes que tout oppose, surtout que Constance elle-même ignorait alors les origines de son époux. Peu après, Valentin, à la suite d’un accident causé par Alexander Brandt (François Berléand), le père de Constance, devient amnésique. A son réveil, Valentin oublie tout de sa vie parisienne, retrouve son accent à couper au couteau et ne se souvient plus de sa femme. Encore pire, il pense être revenu à l’époque où il s’apprêtait à quitter sa région natale, quand il avait 17 ans.

Si l’on regarde les six films mis en scène par Dany Boon, La Ch’tite famille surpasse donc ses deux précédents opus. Toutefois, le réalisateur ne parvient pas à restituer cette authenticité qui avait touché les spectateurs et fait l’immense succès de Bienvenue chez les Ch’tis. Son premier coup d’essai, La Maison du bonheur reposait également sur un montage vif, des répliques percutantes et une justesse comme qui dirait décontractée des comédiens, éléments totalement absents dans La Ch’tite Famille.

Dany Boon est devenu une véritable entreprise à lui seul. Son nom est synonyme d’une production au budget confortable, entre 20 à 25 millions, plus de 30 millions pour Supercondriaque et pour Raid dingue. On ne sait pas où passe l’argent, probablement dans le cachet des acteurs et du réalisateur, car La Ch’tite Famille s’apparente à un téléfilm de luxe, comprenez avec cadre large et photo clinquante. Les scènes s’enchaînent à la va comme je te pousse, sans rythme, avec des comédiens qui déclament leurs répliques comme pour une récitation, souvent filmés en champ-contrechamp. On sourit certes, encore heureux, devant l’abattage de certains, d’autant plus que Dany Boon a cette qualité de ne jamais tirer la couverture et d’offrir à ses partenaires l’occasion « d’exister » à ses côtés. La géniale Laurence Arné (qui avait donné la réplique à Dany Boon dans Radin ! de Fred Cavayé) s’en sort encore une fois avec un naturel comique irrésistible. Le couple Line Renaud-Pierre Richard aurait mérité bien mieux, Valérie Bonneton joue une fois de plus la nana quasi-hystérique, Guy Lecluyse la bonne pâte, François Berléand le bougon. Sans compter les apparitions des « amis » avec Arthur, Kad Merad, Julia Vignali, Pascal Obispo et Claire Chazal dans leur propre rôle.

On sent ce qui a pu donner envie à Dany Boon d’écrire ce film. Ou comment essayer de garder la tête froide après le succès et la renommée. Mais La Ch’tite famille, bien calibré pour sa future diffusion sur TF1, ne sort jamais du tout-venant de la comédie française. Aucun enjeu, une mise en scène fonctionnelle, un casting quatre étoiles, gags « hénaurmes », festival de mimiques et de grimaces, larmes factices et même un hommage à Johnny Hallyday (même si le film avait été filmé avant la mort du chanteur) avec un Pierre Richard entonnant Que je t’aime en Ch’ti, devant une Line Renaud au bord de l’apoplexie.

La Ch’tite Famille n’est pas « déshonorant » dans le sens où on voit souvent bien pire. C’est juste qu’il est totalement anecdotique, inoffensif, transparent.

LE BLU-RAY

Le DVD et le Blu-ray de La Ch’tite Famille sont disponibles chez Pathé. Le visuel de la jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend celui de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.

Vu le grand succès dans les salles, on pouvait s’attendre à une interactivité chargée, ou du moins digne de ce nom. Ce n’est pas le cas.

Il faudra se contenter de deux scènes coupées (3’), assez réussies et qui auraient mérité d’être intégrées au montage final. Dans la première, Valentin revient dans sa région natale et s’arrête à une baraque à frites dont il reconnaît le propriétaire, qu’il n’avait pas vu depuis vingt ans. La seconde est beaucoup plus burlesque. Au cours d’un repas, le mobile-home de la famille prend feu en raison d’une soupe concoctée par Louloute, qui semble avoir été coupée avec de l’essence.

Cette section se clôt sur un bêtisier (6’).

L’Image et le son

Les contrastes sont riches, la luminosité est omniprésente, les scènes nocturnes sont logées à la même enseigne et le relief est probant. Les visages sont détaillés à souhait, tout comme les décors, la colorimétrie est vive et chatoyante, ambrée, le piqué joliment aiguisé (surtout sur les scènes en extérieur), les détails foisonnent aux quatre coins du cadre large, le relief est indéniable et la photo élégante du chef opérateur Denis Rouden (Les vacances du petit Nicolas, Astérix & Obélix: Au service de sa Majesté, 36 Quai des Orfèvres) trouve en Blu-ray un écrin idéal.

Outre une piste Audiodescription et des sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant, la version DTS-HD Master Audio 5.1 parvient sans mal à instaurer un indéniable confort phonique. Les enceintes sont toutes mises en valeur et spatialisent excellemment les effets, la musique et les ambiances. Quelques séquences auraient peut-être mérité d’être un peu plus dynamiques ou les dialogues parfois quelque peu relevés quand la partition s’envole, mais l’immersion est fort probante, surtout lors de la séquence finale. De son côté, la DTS-HD Master Audio 2.0 se révèle également dynamique, percutante même.

Crédits images : © David Koskas / Pathé / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Une histoire simple, réalisé par Claude Sautet

UNE HISTOIRE SIMPLE réalisé par Claude Sautet, disponible en combo DVD/Blu-ray le 13 juin 2018 chez Pathé

Acteurs :  Romy Schneider, Bruno Cremer, Claude Brasseur, Arlette Bonnard, Roger Pigaut, Francine Bergé, Sophie Daumier, Éva Darlan…

Scénario : Claude Sautet, Jean-Loup Dabadie

Photographie : Jean Boffety

Musique : Philippe Sarde

Durée : 1h48

Année de sortie : 1978

LE FILM

Serge et Marie forment un couple ordinaire. Déjà mère d’un adolescent, Marie décide d’avorter de l’enfant qu’elle attend de Serge et de quitter ce dernier. Elle finit par se rapprocher de George, son ex-mari alors que parallèlement à ces soucis, les amis de Marie ont également des ennuis similaires.

En 1969, La Piscine de Jacques Deray est un tournant dans la carrière de Romy Schneider. Au revoir Sissi, les bluettes en costume aux titres explicites du style Jeunes filles en uniforme, La Belle et l’empereur, Katia, Christine et consorts. Dans les années 60, la comédienne aborde une nouvelle étape en passant devant la caméra de Luchino Visconti, Alain Cavalier, Orson Welles et Otto Preminger. Romy Schneider devient une véritable actrice et démontre une envie de s’éloigner à tout prix du rôle qui a fait d’elle une star. L’année 1970 est aussi et surtout le début d’une longue et fructueuse collaboration, sans doute la plus importante de sa vie. Elle rencontre le cinéaste Claude Sautet (1924-2000), avec qui elle tournera cinq films en huit ans, Les Choses de la vie (1970), Max et les ferrailleurs (1971), César et Rosalie (1972), Mado (1976) et Une histoire simple (1978). Ce dernier est comme qui dirait la résultante des précédents. Comme Claude Sautet disait à propos de Romy Schneider « Elle est la somme de toutes les femmes », le personnage de Marie dans Une histoire simple est un mélange d’Hélène (celle des Choses de la vie et de Mado) , de Lily, de Rosalie, mais c’est aussi et avant tout un portrait en filigrane de Romy Schneider elle-même. Si Une histoire simple n’est sans doute pas un chef d’oeuvre ou un sommet de la filmographie de Claude Sautet, le film n’en demeure pas moins fascinant sur de nombreux points.

Marie élève seule son fils de 16 ans, Martin, depuis qu’elle s’est séparée de Georges, son mari. Elle entretient avec Serge, son amant, de bons rapports, assez distants pour n’être pas encombrants. Elle profite d’une de ses absences pour se faire avorter d’un enfant qu’elle attend de lui. A son retour, elle lui apprend à la fois l’interruption de grossesse et leur rupture. Serge se rebelle un peu, suffisamment pour préserver sa dignité, mais point trop. En fait, il s’intéresse depuis quelque temps à Anna, une collègue de Marie. Celle-ci revoit Georges. Elle lui demande d’aider Jérôme, le mari de son amie Gabrielle, à garder son travail. Georges promet.

Projet initié à la demande de Romy Schneider elle-même, Une histoire simple peut à la fois se voir comme un portrait sur les quadras de la fin des années 1970, comme un drame social (on y parle de licenciements et de crise économique), comme un documentaire sur Romy Schneider, ses engagements et ses positions, ses combats, ses relations, sa liberté d’être et de penser. La première scène donne le ton avec la caméra centrée sur le visage de la comédienne, qui s’entretient avec une femme médecin sur sa demande d’avortement (Romy Schneider avait ouvertement milité pour ce droit et la loi Veil était encore récente), sur sa détermination, sur son choix. Puis on la retrouve très vite sur la table d’opération, avant de la voir rentrer chez elle où elle accueille son fils adolescent. Une histoire simple adopte la forme d’une chronique, une succession de tranches de vie. Celle d’une femme ordinaire, libérée de toutes contraintes, qui a décidé de vivre pour elle, comme elle l’entend.

La caméra s’attache au personnage de Marie, s’accroche à elle, la suit dans son travail, avec ses amis, au café, avec son fils, à la campagne, dans le lit avec son ex-mari. Visage fermé, Marie reprend son existence en main et décide de conduire sa vie selon des principes d’indépendance. De son regard déterminé quand elle apprend à Serge – via une lettre qu’elle lui a écrite – qu’elle vient d’avorter et qu’elle décide de rompre avec lui, jusqu’à son sourire qui renaît et enfin l’apaisement final au soleil, Une histoire simple est un récit initiatique. Les prénoms de Marie et de Romy s’imbriquent quasiment. Claude Sautet, toujours aussi fasciné par sa comédienne, et Jean-Loup Dabadie lui écrivent une dernière ode, un film presque testamentaire.

Avec tout cela on en oublierait presque d’évoquer les « monstres » qui entourent Romy Schneider. Claude Brasseur et Bruno Cremer campent des hommes rattrapés par les années qui ont passé et qui se trouvent souvent désarmés devant le mode de vie de Marie. Les hommes sont ici souvent les plus fragiles (certains se battent, se saoulent, tentent de se suicider), emportés par le tourbillon de la vie sans avoir réellement d’emprise sur elle, désemparés quand les femmes les quittent. A leurs côtés, les amis gravitent, interprétés par d’autres pointures comme Sophie Daumier, Eva Darlan, Arlette Bonnard, des femmes d’aujourd’hui, des femmes fortes.

Il y a du Bergman et du Antonioni chez Sautet, ou quand L’Attente des femmes (1952) rencontre Femmes entre elles (1957). En 1979, Romy Schneider obtient son second César de la meilleure actrice pour Une histoire simple.

LE BLU-RAY

Les deux disques de ce combo Pathé reposent dans un Digipack à deux volets, glissé dans un surétui cartonné au visuel très élégant. Le menu principal est animé sur la musique de Philippe Sarde.

Le seul supplément disponible sur cette édition est un entretien croisé (26’) entre Serge Bromberg, producteur et réalisateur avec Ruxandra Medrea, du long métrage L’Enfer d’Henri-Georges Clouzot, et la comédienne Eva Darlan. Le premier replace Une histoire simple dans la carrière de Claude Sautet et de Romy Schneider, détaille le casting, l’origine et l’écriture du scénario, la collaboration Sautet-Dabadie. La seconde, qui faisait alors ses débuts au cinéma, partage de nombreuses anecdotes liées au tournage, mais aussi sur Romy Schneider et Claude Sautet.

L’Image et le son

Il serait difficile de faire mieux que ce Blu-ray (Encodage MPEG 4 / AVC – Format du film respecté 1.66, 1080p) qui respecte les volontés artistiques originales dont le grain original, parfois très prononcé, tout en tirant intelligemment profit de l’élévation HD. La clarté est fort appréciable, notamment sur toutes les séquences en extérieur (voir la scène du repas à la campagne), la propreté du master est irréprochable, ainsi que la stabilité, le relief, la gestion des couleurs, contrastes et le piqué qui demeure souvent agréable. Les séquences sombres et nocturnes sont également excellemment conduites avec des noirs denses. Une histoire simple a été numérisé en 4K, puis restauré en 2K par les Laboratoires Eclair en 2017.

Ce mixage DTS-HD Master Audio Mono est de fort bon acabit et instaure un confort acoustique probant et solide. Les dialogues sont délivrés avec ardeur et clarté, mais sont également et volontairement mis en retrait parfois, la propreté est de mise et les silences sont denses. L’éditeur joint également les sous-titres anglais et français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Pathé / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Chasseuse de géants, réalisé par Anders Walter

CHASSEUSE DE GÉANTS (I Kill Giants) réalisé par Anders Walter, disponible en DVD et Blu-ray le 6 juin 2018 chez Lonesome Bear

Acteurs :  Zoe Saldana, Imogen Poots, Jennifer Ehle, Noel Clarke, Madison Wolfe, Rory Jackson, Ciara O’Callaghan, Sydney Wade, Aideen Wylde…

Scénario : Joe Kelly

Photographie : Rasmus Heise

Musique : Laurent Perez Del Mar

Durée : 1h46

Année de sortie : 2017

LE FILM

Barbara est une adolescente solitaire différente des autres, et en conflit permanent avec son entourage. Ses journées au collège sont rythmées par les allers-retours entre le bureau du proviseur et la psychologue. Aux sources de l’inquiétude des adultes qui veillent sur elle, il y a son obsession pour les Géants, des créatures fantastiques venues d’un autre monde pour semer le chaos. Armée de son marteau légendaire, Barbara s’embarque dans un combat épique pour les empêcher d’envahir le monde…

En l’espace d’un an et demi, trois films traitant peu ou prou du même sujet, le deuil vu à travers le regard d’un enfant, sont sortis à quelques mois d’intervalle. Il y a eu tout d’abord A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, réalisé par J.A. Bayona, qui a connu une exploitation dans les salles. Echec totalement injustifié, mais laissons le temps faire son office. Bien que datant de 2016, il aura fallu attendre plus d’un an pour découvrir également La Neuvième Vie de Louis DraxThe 9th Life of Louis Drax d’Alexandre Aja. Merveille visuelle, expérience sensorielle qui n’a absolument rien à envier à l’oeuvre de Bayona, ce drame à la frontière du fantastique interprété par Jamie Dorman et Sarah Gadon n’a été exploité qu’en DVD et Blu-ray en France. Pas de surprise donc pour Chasseuse de géants, qui arrive également dans les bacs, sans passer par la case cinéma.

Il s’agit de l’adaptation cinématographique du roman graphique (édité chez Image Comics) I Kill Giants de Ken Niimura et Joe Kelly, ce dernier s’occupant seul de la transposition. Chasseuse de géants est une production belgo-britannico-américano-chinoise, financée par Chris Colombus (un temps envisagé à la mise en scène) via sa société 1492 Pictures. C’est aussi le premier long métrage du réalisateur danois Anders Walter, lui-même ancien dessinateur de comics, remarqué en 2014 avec son magnifique court-métrage Helium, récompensé par un Oscar. Par ailleurs, Helium, ainsi que son précédent court métrage 9 meter (2012) étaient déjà très proches de Chasseuse de géants dans ses intentions. Ce film revenait donc « de droit » à Anders Walter, qui signe un drame à la photographie très soignée, formidablement interprété et à la mise en scène élégante. Ce qui est dommage, c’est que Chasseuse de géants arrive « après la bataille » et l’on ne peut s’empêcher de faire des comparaisons avec les œuvres de Bayona et d’Aja. Surtout qu’il partage beaucoup de points communs du point de vue visuel avec A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, notamment en ce qui concerne la représentation du monde intérieur de l’enfant. Anders Walter utilise également l’animation en images de synthèse pour évoquer l’origine de ses monstres. Des ressemblances particulièrement troublantes, mais on ne peut en aucun cas parler de plagiat puisque tous ces films ont été produits et mis en scène quasi-simultanément.

S’il ne possède pas la poésie de A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, ni la virtuosité de La Neuvième Vie de Louis Drax, on ne pourra pas reprocher à Chasseuse de géants son manque de rigueur (malgré une production particulièrement chaotique), sa belle réussite technique et surtout son irréprochable direction d’acteurs. La jeune Madison Wolfe campe un personnage attachant et s’acquitte admirablement de la double facette de Barbara. On comprend très vite que la jeune fille préfère se réfugier dans son imaginaire, plutôt que d’affronter un drame qui semble toucher toute sa famille, dont s’occupe Karen, incarnée par la lumineuse Imogen Poots. Le casting compte également dans ses rangs la sublime Zoe Saldana, parfaite en psychologue qui essaye de percer la carapace de Barbara.

L’affiche peut être trompeuse. Voir cette petite fille armée, qui fait face à une créature surdimensionnée, avec pour accroche « Par les producteurs de la saga Harry Potter » annonce un film de fantasy, ce qui n’est absolument pas le cas. Chasseuse de géants est un drame intimiste et psychologique, centré sur le déni d’une adolescente, qui préfère oublier le drame qui se joue dans sa famille en ayant recours au rêve. Ou comment se raccrocher au monde de l’enfance, en l’occurrence le jeu, en essayant de repousser le plus longtemps possible l’entrée dans le monde adulte, constitué entre autres de la maladie et de la mort. La peur d’affronter ses démons, au sens propre comme au figuré.

Chasseuse de géants n’est donc pas destiné au jeune public, du moins aux spectateurs dans l’attente d’un film de science-fiction. Mais le deuil est un événement personnel et chaque spectateur est invité à projeter son propre vécu et à réaliser sa propre interprétation de ce très beau premier long métrage finalement universel et prometteur.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Chasseuse de géants, disponible chez Lonesome Bear, a été réalisé à partir d’un check-disc. Comme nous le mentionnons dans la critique, le visuel de la jaquette est comme qui dirait une arnaque puisque l’ensemble est conçu pour faire croire aux spectateurs que le film d’Anders Walter est un blockbuster à la Jack et le chasseur de géants ! Veillez à bien vous renseigner sur le long métrage avant l’achat. Le menu principal est animé et musical.

Excellente initiative de la part de l’éditeur de nous faire profiter des deux superbes courts-métrages réalisés par Anders Walter, 9 meter (17’-2012) et Helium (23’-2013), dont les thèmes (la maladie, le deuil, l’imaginaire comme échappatoire) s’avèrent très proches de Chasseuse de géants, surtout le second, récompensé par l’Oscar du meilleur court métrage de fiction en 2014.

Le reste de l’interactivité est plus anecdotique avec d’un côté un clip d’une minute consacré à la création des monstres en images de synthèse, et de l’autre un mini-making of (5’) centré sur le tournage (en Belgique) de l’affrontement de Barbara avec le titan.

L’Image et le son

Tourné grâce aux caméras numériques Arri Alexa XT, Chasseuse de géants doit être découvert en Haute définition. Les quelques effets numériques sont très beaux, le piqué est affûté, les couleurs impressionnantes, les contrastes léchés, les noirs denses et la profondeur de champ omniprésente. Les détails sont légion à l’avant comme à l’arrière-plan, de jour comme de nuit, le relief ne cesse d’étonner et le rendu des textures est subjuguant. Le nec plus ultra pour apprécier toute la richesse de la photographie du chef opérateur Rasmus Heise. Quant aux diverses séquences réalisées en animation, elles sont tout simplement sublimes.

Les versions française et anglaise sont proposées en DTS-HD Master Audio 5.1. Dans les deux cas, les dialogues y sont remarquablement exsudés par la centrale, les frontales sont saisissantes, les effets et ambiances riches, les enceintes arrière instaurent constamment un environnement musical, tout comme le caisson de basses qui se mêle habilement à l’ensemble, notamment quand le géant se déplace. Un grand spectacle acoustique !

Crédits images : © The Jokers / Lonesome Bear / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr