Test Blu-ray / Le Baron Rouge, réalisé par Roger Corman

LE BARON ROUGE (Von Richthofen and Brown) réalisé par Roger Corman, disponible en DVD et Blu-ray le 23 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : John Phillip Law, Don Stroud, Barry Primus, Corin Redgrave, Karen Ericson, Hurd Hatfield, Stephen McHattie

Scénario : John William Corrington, Joyce Hooper Corrington

Photographie : Michael Reed

Musique : Hugo Friedhofer

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1971

LE FILM

En 1916, dans la France occupée, une forte rivalité oppose d’un côté le baron von Richthofen, surnommé le « Baron Rouge », qui est à la tête de l’escadrille allemande et de l’autre l’as canadien Roy Brown.

Découvreur de talents (Martin Scorsese, Francis Ford Coppola, Joe Dante, Ron Howard, Jonathan Demme, Jack Nicholson, Monte Hellman, Curtis Hanson), Pape de la série B, le prolifique Roger Corman (né en 1926), aujourd’hui producteur de plus de 400 films, a réalisé près d’une cinquantaine de longs métrages de 1955 à 1990. Mis en scène en 1971, Le Baron RougeVon Richthofen & Brown est rétrospectivement un de ses derniers films en tant que réalisateur. Quand il entreprend ce drame de guerre, Roger Corman a déjà 45 films derrière-lui – tournés en 15 ans donc, un record – et se trouve dans un état de fatigue extrême. Le cinéaste avoue d’ailleurs avoir souffert pendant les prises de vues du Baron Rouge, surtout en raison des pressions de la United Artists qui ne lui laisse pas entièrement carte blanche. A l’issue du tournage, suite à cette expérience, Roger Corman crée sa propre société de production et de distribution, New World Pictures, décide d’arrêter la mise en scène et prend même une année sabbatique. Il y reviendra toutefois en 1978 avec Les Gladiateurs de l’an 2000 puis en 1980 avec Les Mercenaires de l’espace, bien qu’il ne soit pas crédité, avant un dernier baroud d’honneur à la caméra en 1990 avec La Résurrection de Frankenstein. Le film qui nous intéresse, Le Baron Rouge, est un formidable opus et typique de l’école Corman.

Le cinéaste fait fi d’un budget somme doute modeste (sa spécialité), moins d’un million de dollars, pour livrer un film de guerre généreux en scènes d’affrontements, qui sont restés célèbres pour ses très nombreuses séquences de combats aériens. En embarquant réellement ses comédiens (et ses caméras) dans les avions d’époque, sans utiliser de transparences qui auraient ruiné l’ensemble, Roger Corman obtient un réalisme inattendu. Une bonne moitié du film se déroule dans les airs où les prestations demeurent particulièrement bluffantes, authentiques et impressionnantes.

1916. Le baron Manfred von Richthofen rejoint le major Oswald Boelcke et son escadrille en France occupée. Cet homme, à la volonté farouche de gagner la guerre et âgé de 23 seulement, appartient pourtant à la vieille école : il se montre chevaleresque et aristocrate dans sa façon de mener le combat. Son attitude est plutôt mal ressentie par plusieurs de ses compagnons, dont Hermann Goering. Dès son arrivée, von Richthofen fait repeindre l’escadrille en couleurs vives, ce qui lui vaut le surnom de «Baron Rouge». Bientôt, la rivalité entre le pilote canadien Roy Brown et le baron se transforme en véritable massacre. Les deux hommes iront jusqu’au bout et n’hésiteront pas à se battre par armées interposées.

L’acteur américain John Phillip Law (Barbarella) campe un Baron Manfred von Richthofen froid voire glacial, mais parvient à rendre son personnage humain, sans pour autant le rendre attachant. Véritable machine de guerre, qui agit pour son pays et qui prend soin des hommes de son escadrille, il imprime la pellicule de ses traits figés et de son regard perçant. Son adversaire, le canadien Roy Brown est interprété par l’Hawaïen Don Stroud, grand habitué des séries B, vu dernièrement dans Django Unchained de Quentin Tarantino et le chef d’oeuvre de la saga James Bond, Permis de tuer. Evidemment plus « détendu » que son homologue allemand, Roy Brown n’en demeure pas moins aussi dangereux une fois installé aux commandes de son avion. Ce qui fait la particularité du Baron Rouge, c’est que Roger Corman n’appuie pas le côté « méchant » des allemands ou au contraire le côté « héroïque » des Alliés, comme certains de ses confrères. Les deux camps sont montrés à égalité. Patriotes, engagés dans cette guerre qu’ils espèrent gagner, les allemands et les anglais subissent autant de pertes et prennent conscience que la mort peut frapper à n’importe quel moment.

Roger Corman soigne sa mise en scène, enchaîne les rebondissements, les scènes de fusillades et d’explosions avec une redoutable efficacité, sans aucun temps mort, même si le film prend beaucoup de libertés avec la véritable histoire, en privilégiant l’action. Alors embarquez sans hésiter dans ce duel sans merci entre deux pilotes légendaires, car Le Baron Rouge reste un formidable spectacle !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray du Baron Rouge, disponible chez Movinside, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobre, animé sur une séquence du film. L’éditeur inaugure ici une nouvelle collection consacrée aux films de guerre.

Aucun supplément sur cette édition. Néanmoins, signalons que Le Baron Rouge est le premier Blu-ray d’un film réalisé par Roger Corman édité en France !

L’Image et le son

Movinside présente Le Baron Rouge en Blu-ray au format 1080p et dans son cadre respecté 1.85. Le générique aérien est marqué par un grain très prononcé, quelques instabilités et une colorimétrie terne. Dès la fin des credits, la copie retrouve une nouvelle fraîcheur. La propreté est de mise, toutes les poussières ont disparu, ainsi que les dépôts résiduels et autres scories. La stabilité est indéniable et les teintes s’avèrent plus naturelles du début à la fin. Mention spéciale au ballet des avions fraîchement repeints, dont le zinc rouge du Baron, particulièrement éclatant. Les divers plans flous sont d’origine et la gestion des contrastes renforcée par la Haute-Définition.

La bande-son semble avoir été restaurée. Les dialogues, tout comme la musique, demeurent propres et distincts sur les pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio Mono 2.0. Certains échanges sont peut-être plus étouffés que d’autres, sauf sur la version française où les voix sont trop mises en avant, un très léger souffle est parfois audible, mais le confort acoustique est appréciable. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © United Artists / Movinside / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Le Port de la drogue, réalisé par Samuel Fuller

LE PORT DE LA DROGUE (Pickup on South Street) réalisé par Samuel Fuller, disponible en DVD et Blu-ray le 9 mai 2017 chez ESC Editions

Acteurs : Richard Widmark, Jean Peters, Thelma Ritter, Murvyn Vye, Richard Kiley, Willis Bouchey

Scénario : Samuel Fuller d’après une histoire originale de Dwight Taylor

Photographie : Joseph MacDonald

Musique : Leigh Harline

Durée : 1h17

Date de sortie initiale : 1953

LE FILM

Dans le métro, Candy se fait voler son portefeuille par Skip Mc Coy, un pickpocket aguerri. Des policiers qui suivaient la jeune femme soupçonnée d’être une agent de liaison communiste, assistent à la scène sans pouvoir intervenir. De retour chez lui, Mc Coy découvre que le portefeuille contient un microfilm. Policiers et communistes vont essayer de le récupérer.

Chef d’oeuvre absolu et inoubliable de l’histoire du cinéma et du film noir, Le Port de la droguePickup on South Street est réalisé par Samuel Fuller (1912-1997) en 1953, qui signe ici son sixième long métrage. Si les cinéphiles qui visionneront le film pour la première fois en version originale se demandent d’où provient la signification du titre français alors que l’intrigue ne mentionne jamais de trafic de stupéfiant, la réponse est politique. La version française du film ne parle plus de vilains espions communistes (alors à la mode dans le genre), mais de trafiquants de drogue. A l’époque, le Parti Communiste français représentait un électorat très important, qu’il ne fallait pas effaroucher. D’où cette adaptation qui a également eu lieu en Allemagne. Concentrons-nous alors sur Pickup on South Street plutôt que sur “Le Port de la drogue”.

Le film plonge immédiatement le spectateur dans le métro bondé et étouffant de New York à l’heure de pointe. Un pickpocket vole le portefeuille de Candy – scène à l’érotisme trouble, sans aucun dialogue, une pure leçon de cadre et de montage – une jeune femme soupçonnée par la police de faire partie d’un réseau d’agents communistes. Candy, affolée, se précipite dans une cabine téléphonique pour prévenir son patron, Joey. Elle apprend que le portefeuille contient un microfilm, dont les informations, ultra-secrètes, sont de première importance. Joey donne à Candy l’adresse d’une indicatrice, Moe Williams, qui connaît bien la pègre new-yorkaise. De son côté, la police tente de récupérer le document et d’identifier le voleur à la tire. Il s’agit d’un certain Skip McCoy.

Tourné en trois semaines, Pickup on South Street, inspiré d’une intrigue de Dwight Taylor, est sans doute le plus grand, le plus beau, le plus intense (on peut continuer longtemps comme ça) des films de Samuel Fuller. La mise en scène virtuose et lyrique, les dialogues percutants, la splendide photographie de Joe MacDonald, la musique jazzy et syncopée de Leigh Harline, son rythme effréné et nerveux (77 minutes sans aucun temps mort) et bien sûr l’immense interprétation subjuguent du début à la fin. L’insolent personnage de Skip McCoy, c’est bien évidemment le grand Richard Widmark, galurin vissé sur la tête, sourire en coin et moqueur, qui crève ici l’écran. Découvert en 1947 dans Le Carrefour de la mortKiss of death de Henry Hathaway, Richard Widmark a ensuite très vite enchaîné avec La Ville abandonnée de William Wellman, La Furie des tropiques d’André De Toth, Okinawa de Lewis Milestone, La Porte s’ouvre de Joseph L. Mankiewicz, Panique dans la rue d’Elia Kazan. Il a également retrouvé Henry Hathway deux fois (Les Marins de l’Orgueilleux et La Sarabande des pantins) avant de se voir offrir le premier rôle dans Pickup on South Street. Sa démarche décontractée, sa facilité à jouer des poings (même avec les femmes), son répondant mordant, contrastent avec la personnalité en réalité complexe de son personnage Skip McCoy. Comme les autres protagonistes du film, Skip n’aspire qu’à survivre et pour lui, le seul moyen d’y parvenir est de détrousser celles et ceux qu’il croise dans les transports en commun. Déjà condamné trois fois, il sait qu’il risque gros s’il est à nouveau arrêté. Autant dire que son dernier larcin qui pouvait paraître “innocent” au premier abord va le conduire là où il était loin de l’imaginer.

Loin d’être “une oeuvre de propagande” – ce que la critique américaine lui a reproché – et plutôt que de se focaliser sur un seul personnage, Samuel Fuller passe de protagoniste en protagoniste, pour finalement dresser le portrait de marginaux et de laissés pour compte dans un quartier pauvre de New York où la violence est omniprésente. Ancien journaliste qui a largement écumé les bas fonds de la Grosse Pomme, le réalisateur prend tout autant de soin pour montrer les rues crasseuses – en s’inspirant ouvertement du néoréalisme de Rome ville ouverte de Roberto Rossellini – que pour décrire le quotidien de Skip McCoy dans sa cahute minable au bord de la rivière, qui lorgne sur le réalisme poétique. Même chose pour Candy, sensuelle Jean Peters, dont on aimerait également caresser l’ovale du visage, prostituée en quête d’indépendance et pour Moe, merveilleusement interprétée par Thelma Ritter, très justement nommée pour l’oscar du meilleur second rôle. Cette femme d’un certain âge, si elle n’a pas réussi sa vie en vendant quelques cravates, souhaite réussir sa mort. Grâce aux indices qu’elle donne à la police, elle se constitue une petite épargne – le coût de ses renseignements suit l’inflation – pour pouvoir se payer un caveau de luxe où elle pourra reposer en paix. Mais au-delà des destins individuels, la solidarité entre démunis et le sens de l’honneur existent. Alors quand quelque chose arrive à Moe, McCoy change de ton.

C’est là l’immense réussite de Pickup on South Street. Une histoire d’espionnage avec des personnages ambigus, on ne peut plus humains, sans jamais omettre l’émotion, l’humour (grinçant) et l’étude sociale, tout cela en faisant battre le coeur des cinéphiles désarmés devant tant de beauté, d’invention et de modernité. La perfection.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray du Port de la drogue, disponible chez ESC Editions, repose dans un très élégant boîtier classique de couleur noire. La jaquette estampillée « Hollywood Legends » ne manque pas de classe. Le menu principal est animé et musical.

L’éditeur joint une présentation et une analyse du film qui nous intéresse par Mathieu Macheret, critique cinéma pour Le Monde (21’). S’il n’évite pas quelques redondances, l’intervenant décortique habilement le chef d’oeuvre de Samuel Fuller. Mathieu Macheret replace le film dans la carrière du cinéaste (le troisième pour la Fox), évoque la raison de l’adaptation française, avant de se focaliser sur la forme et les personnages. Notre interlocuteur ne manque pas de qualificatifs – sensuel, magnifique, incroyable, dynamique, inventif, percutant, violent – et d’arguments, même s’il paraphrase parfois certaines séquences clés, pour défendre une œuvre qui lui tient particulièrement à coeur. On le comprend !

L’Image et le son

Le Port de la drogue avait bénéficié d’une édition DVD chez Carlotta Films en 2004, avant de ressurgir dans le même format chez ESC Editions en novembre 2015. Le même éditeur propose cette fois le film en Haute-Définition avec un Blu-ray au format 1080p. Sublime ! Ce master restauré 4K par la Fox est présenté au format respecté 1.33 est on ne peut plus flatteur pour les mirettes. Tout d’abord, le splendide N&B de Joseph MacDonald (La Poursuite infernale, Niagara, La Lance brisée, La Maison de bambou) retrouve une densité inespérée dès l’ouverture. La restauration est indéniable, aucune poussière ou scorie n’a survécu au scalpel numérique, l’image est d’une stabilité à toutes épreuves. Les contrastes sont fabuleux et le piqué n’a jamais été aussi tranchant. Le grain original est présent, sans lissage excessif, ce qui devrait rassurer les puristes. Hormis quelques plans plus flous, le cadre fourmille de détails, les fondus enchaînés n’entraînent pas de décrochages et cette superbe copie participe à la redécouverte de ce chef d’oeuvre de Samuel Fuller. Une des éditions incontournables de l’année 2017 !

L’éditeur nous propose les versions anglaise et française du Port de la drogue, disponibles en DTS HD Master Audio 2.0. Passons rapidement sur cette dernière, beaucoup moins dynamique, plus étouffée, qui a semble-t-il été sauvée et proposée en guise de curiosité pour les cinéphiles. Un panneau en introduction indique d’ailleurs que la qualité demeure médiocre. La version originale, évidemment plus homogène et naturelle, très propre, est disponible sans souffle parasite et le confort acoustique est largement assuré. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Twentieth Century Fox Film Corporation / ESC Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Silence, réalisé par Martin Scorsese

SILENCE réalisé par Martin Scorsese, disponible en DVD et Blu-ray le 15 juin 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Andrew Garfield, Adam Driver, Liam Neeson, Tadanobu Asano, Ciarán Hinds, Issei Ogata

Scénario : Jay Cocks, Martin Scorsese d’après le roman de Shûsaku Endô

Photographie : Rodrigo Prieto

Musique : Kathryn Kluge, Kim Allen Kluge

Durée : 2h40

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

XVIIème siècle, deux prêtres jésuites se rendent au Japon pour retrouver leur mentor, le père Ferreira, disparu alors qu’il tentait de répandre les enseignements du catholicisme. Au terme d’un dangereux voyage, ils découvrent un pays où le christianisme est décrété illégal et ses fidèles persécutés. Ils devront mener dans la clandestinité cette quête périlleuse qui confrontera leur foi aux pires épreuves.

Dire que Silence s’avère le projet le plus personnel de Martin Scorsese depuis des années, serait un vrai raccourci et de toute façon un argument irrecevable. Son merveilleux épisode pilote de la série Vinyl, Le Loup de Wall Street, Hugo Cabret, Shutter Island ont tous démontré que Martin Scorsese s’est toujours impliqué personnellement dans ses projets, même les plus « commerciaux » et qu’il demeure l’un des plus grands réalisateurs en activité. D’autant plus que le cinéaste a toujours su se remettre en question, tout en avouant apprendre encore aujourd’hui de nouvelles choses sur son métier. Silence est l’adaptation du roman du même nom écrit en 1966 par Shūsaku Endō, écrivain catholique japonais, basé sur des faits historiques réels, qui avait déjà été transposée au cinéma par Masahiro Shinora en 1971 et sélectionné à Cannes l’année suivante. Le « silence » éponyme, renvoie à celui de Dieu face aux souffrances vécues en son nom.

Au XVIIe siècle, les jésuites Rodrigues et Garupe sont envoyés au Japon afin de retrouver le père Ferreira, leur mentor qui les a guidés sur le chemin de la spiritualité. Celui-ci se cache-t-il, a-t-il été exécuté, s’est-il marié ou alors s’est-il converti au bouddhisme ? Rodrigues et Ferreira vont devoir le découvrir, à leurs risques et périls. Sur place, c’est un choc pour eux. Ils affrontent des seigneurs féodaux qui voient d’un mauvais oeil l’arrivée des deux hommes d’Eglise. Au moindre faux pas, Rodrigues et Garupe risquent de mourir noyés, brûlés ou crucifiés. C’est le sort funeste qu’ont déjà subi les Japonais convertis. Depuis 1988, Martin Scorsese essayait de porter ce projet à l’écran. Tout d’abord annoncé avec les comédiens Daniel Day-Lewis, Gael García Bernal, Ken Watanabe et Benicio Del Toro, Silence, avant que le projet soit suspendu, annulé, repris pour être encore reporté, réunit finalement Liam Neeson (sublime), Andrew Garfield, Adam Driver, Issey Ogata (l’empereur Hirohito dans Le Soleil d’Alexander Sokurov, incroyable ici dans le rôle du vieil Inquisiteur), Yosuke Kubozuka et Tadanobu Asano. Après de multiples réécritures et plusieurs tentatives jusqu’alors avortées de rentrer en production faute de financements, Silence a enfin pu voir le jour.

Ce n’est évidemment pas la première fois que Martin Scorsese se penche sur la question de la foi et de la religion. Si les thèmes apparaissent souvent en filigrane, y compris dans ses films sur la mafia, ils demeurent essentiels et le fondement de La Dernière tentation du Christ (1988) et de Kundun (1997). Silence apparaît comme étant un troisième volet d’une trilogie sur le sujet. Animé par la force et la virtuosité de son metteur en scène, ainsi que sur l’investissement viscéral de ses comédiens, Silence, drame historique d’une beauté visuelle incomparable, ne peut laisser le spectateur indifférent. Certes, le sujet peut ne pas créer d’empathie, mais la beauté souvent irréelle des images (tournées en 35mm), des décors, des costumes, laisse pantois d’admiration. Après avoir incarné un homme animé par la parole du Christ dans l’incroyable film de Mel Gibson, Tu ne tueras point Hacksaw Ridge, Andrew Garfield récidive ici et interprète un prêtre jésuite. Quelque peu illuminé, le comédien s’est longuement préparé pour son rôle en s’isolant au Pays de Galles pour une retraite spirituelle et en faisant vœu de silence durant une semaine. Durant près d’un an, il a également étudié le jésuitisme, tout en perdant beaucoup de poids, comme son partenaire Adam Driver.

Silence est une œuvre complexe, difficile d’accès de par son sujet, à la fois universel et hermétique (la persécution des missionnaires jésuites dans le Japon du XVIIème siècle), très lente et qui peut mettre à rude épreuve la patience des spectateurs. Mais chaque plan, chaque seconde est d’une beauté à couper le souffle et emporte l’adhésion, d’autant plus que le sujet abordé est atypique et porté par un Scorsese littéralement habité. Sa passion s’avère contagieuse et le spectateur qui saura pleinement plonger dans cette histoire connaîtra une véritable et unique expérience physique (les séquences de tortures et de crucifixion sont viscérales) et sensorielle. Si l’on excepte l’improbable coupe de cheveux d’Andrew Garfield (et sa tendance à avoir l’air ahuri), visiblement prise en charge par David Beckham, Silence foudroie et le spectateur est placé en tant que troisième témoin de cette histoire dense, aux côtés des personnages interprétés par Andrew Garfield et Adam Driver.

Silence est un film que s’approprie le spectateur, qui parlera différemment à chacun, qui interroge sur la définition de la foi, sur le doute et la croyance. Ce 24e long métrage de fiction de Martin Scorsese est aussi et surtout une extraordinaire leçon de cinéma qui touche à la fois le coeur, l’âme et l’esprit.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Silence, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobre, légèrement animé et musical.

On pouvait s’attendre à plus, mais le seul supplément disponible sur cette édition, le making of de 24 minutes, s’avère excellent, très bien réalisé et documenté. De nombreuses images montrent Martin Scorsese à l’oeuvre avec ses comédiens et son équipe technique. Un metteur en scène qui doute, anxieux derrière son combo, mais aussi heureux sur le plateau et qui s’avère toujours autant passionné, voire transcendé par le cinéma. De multiples interventions de l’équipe (réalisateur, acteurs, directeur de la photographie, monteuse, producteurs, scénariste, historiens, un prêtre jésuite) s’entrecroisent. La genèse et la longue gestation de Silence sont abordées, tout comme les conditions des prises de vues, le casting, la préparation des comédiens, les personnages, les partis pris, les thèmes sont passés au peigne fin.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces et des liens internet.

L’Image et le son

L’univers visuel foisonnant de Martin Scorsese sied à merveille au support Blu-ray. Metropolitan livre un magnifique master HD. Les sublimes partis pris esthétiques du chef opérateur mexicain Rodrigo Prieto (8 mile, 21 grammes, Argo, Le Loup de Wall Street) passent remarquablement le cap du petit écran et les détails foisonnent aux quatre coins du cadre large. Les contrastes affichent une densité impressionnante, le piqué est tranchant comme un scalpel y compris sur les scènes sombres habituellement plus douces. La profondeur de champ demeure abyssale, les détails se renforcent et abondent en extérieur jour, la colorimétrie est vive, bigarrée et étincelante dès la première séquence, le relief demeure palpable tout du long. Un transfert estomaquant de beauté, un léger grain cinéma respecté (tournage en 35mm), une clarté voluptueuse, le tout conforté par un encodage AVC solide comme un roc, voilà un nouveau Blu-ray de démonstration. Le label rouge Metropolitan en quelque sorte.

Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre deux mixages DTS-HD Master Audio 5.1 français et anglais d’une très grande finesse. La balance des frontales comme des latérales est impressionnante, les effets annexes sont omniprésents dès l’ouverture, les voix solidement exsudées par la centrale (le timbre unique de Liam Neeson), tandis que le caisson de basses souligne efficacement chacune des actions au moment opportun (le fracas des vagues), tout comme celles de l’hypnotique et envoûtante bande originale. La spatialisation est luxuriante. Metropolitan livre également une piste française Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.

Crédits images : © Kerry Brown / Metropolitan FilmExport / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Arsenal, réalisé par Steven C. Miller

ARSENAL réalisé par Steven C. Miller, disponible en DVD et Blu-ray le 14 juin 2017 chez Marco Polo Production

Acteurs : Nicolas Cage, John Cusack, Adrian Grenier, Johnathon Schaech, Lydia Hull, Heather Johansen

Scénario : Jason Mosberg

Photographie : Brandon Cox

Musique : Ryan Franks, Scott Nickoley

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Quand Mikey, toujours fourré dans les mauvais plans, disparaît et qu’une grosse rançon est demandée, tout le monde pense qu’il a lui-même monté le coup pour récupérer l’argent… surtout qu’il a déjà travaillé dans le passé pour le mafieux Eddie King. Seul JP, son frère, reste persuadé qu’il est réellement en danger et abandonne alors tous ses principes pour tenter de le sauver.

Depuis les grandes réussites de Joe et de Suspect, Nicolas Cage a encore plus accéléré la cadence déjà folle de ses tournages. Depuis ces deux excellents crus, le comédien qui tourne plus vite que son ombre a joué dans 18 films. Dans cette liste, nous sauverons La Sentinelle de Paul Schrader, même si le cinéaste l’a renié pour cause de différends avec le studio LionsGate, The Runner d’Austin Stark, Le Casse des frères Brewer, Dog Eat Dog également de Paul Schrader, Snowden d’Oliver Stone dans lequel le comédien fait une petite participation, USS Indianapolis de Mario Van Peebles. A l’heure où cet article est rédigé, Nicolas Cage a déjà emballé quatre autres longs métrages actuellement en post-production, dont le très attendu Mom and Dad de Brian Taylor. Autant dire que l’acteur n’a pas chômé, en raison de grands problèmes d’argent, de problèmes avec le fisc, d’un comptable véreux, d’un divorce difficile, anyway, Nicolas Cage est obligé de tourner et dans le lot, forcément, certains films s’avèrent particulièrement mauvais. Toutefois, Arsenal parvient à échapper à cette catégorie, même si le film est avant tout une série B.

Dans Arsenal, il n’y joue qu’un rôle secondaire, mais alors quel personnage ! Prothèse nasale, lunette de soleil, peau grêlée, moustache épaisse, moumoute improbable, il y est absolument remarquable et disons-le, on ne voit que lui. Arsenal est un petit thriller bien emballé par Steven C. Miller, réalisateur né en 1981, devenu un spécialiste des films d’action à petit budget. On lui doit un The Aggression Scale avec Ray Wise, Silent Night – sorti en France sous le titre Bloody Christmas – avec Malcolm McDowell et Jaime King, Extraction, First Kill et Marauders avec Bruce Willis. Il vient tout juste de terminer la suite d’Evasion, intitulée Escape Plan 2 : Hades, avec Sylvester Stallone, Dave Bautista, Jaime King et 50 Cent. Autant dire que le metteur en scène ne fait pas dans la dentelle, mais que son efficacité a été remarquée. C’est le cas pour Arsenal.

Sur une trame archi-rabattue, Steven C. Miller soigne sa photographie et sa mise en scène avec des couleurs cramées inspirées des films de Michael Bay et des ralentis stylisés parfois proches du bullet-time. On ne s’ennuie pas devant Arsenal, grâce à ses acteurs, en particulier Nicolas Cage comme nous le disions précédemment dans le rôle d’Eddie King. Survolté, enflammé, le comédien joue ici un immonde salopard cocaïné et psychotique. Extrêmement violent – le film a d’ailleurs été interdit aux moins de 17 ans aux Etats-Unis – son personnage de boss de la pègre nous est présenté en train de passer à tabac une pauvre victime à coups de batte de baseball, en lui fracassant les dents, devant les yeux d’un gamin. Bien que peu présent à l’écran durant la première heure, Nicolas Cage porte le troisième acte de manière percutante, notamment lors d’une baston sanglante avec son frère, interprété par un certain Christopher Coppola…le propre frangin de l’acteur ! A voir pour le croire et surtout pour se rendre compte encore une fois à quel point Nicolas Cage est toujours immense. D’ailleurs, Arsenal apparaît comme une suite non officielle de Deadfall, réalisé par Christopher Coppola en 1993, dans lequel Nicolas Cage arborait déjà le même look et interprétait le personnage d’Eddie !

Au générique, John Cusack, également spécialiste des DTV entre deux belles performances au cinéma (Love & Mercy, Maps to the Stars), qui est ici plus discret et moins présent à l’écran. Contrairement à l’excellent Suspect, il ne donne pas la réplique à Nicolas Cage ici et se contente de jouer le flic de service en apportant son nom porteur au projet. Arsenal est surtout porté par Adrian Grenier, connu pour avoir joué le boyfriend d’Anne Hathway dans Le Diable s’habille en Prada et surtout Vince dans la série Entourage, ainsi que par Johnathon Schaech, le Jonah Hex de la série DC : Legends of Tomorrow. Tout ce beau petit monde cohabite, fait le job, conscient de ne pas participer au film du siècle, mais au service d’un réalisateur qui fait du bon boulot en s’inspirant parfois de l’univers du roman graphique et qui possède donc un atout majeur avec la présence d’un Nicolas Cage inspiré et explosif dans le rôle du badguy. Sa prestation, qui rappelle à quel point le bougre est sublime dans les rôles de pourris, vaut bien qu’on accorde 1h35 à Arsenal !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’Arsenal, disponible chez Marco Polo Production, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe et muet. Le visuel de la jaquette fait la part belle aux deux têtes d’affiche les plus célèbres, entourant ici Adrian Grenier. Dommage que l’éditeur n’ait pas repris l’affiche originale. Aucun supplément, ni de chapitrage d’ailleurs.

L’Image et le son

Le Blu-ray est au format 1080p – AVC. L’éditeur prend soin du thriller de Steven C. Miller et livre un master HD très convaincant et au transfert soigné. Respectueux des volontés artistiques originales, la copie se révèle solide, probablement une des plus belles éditions HD de Marco Polo Production, alliant des teintes chaudes, ambrées et dorées (des filtres jaunes-orangés pour résumer) avec les bleus électriques du ciel. Le piqué est parfois doux en raison des partis pris esthétiques, les blancs sont cramés, les arrière-plans manquent de profondeur, mais ces légers bémols n’entravent en rien les conditions de visionnage. Les contrastes sont tranchants, la colorimétrie joliment laquée, le relief omniprésent et les visages, en particulier la trogne de Nicolas Cage avec son faux nez, sont détaillés à souhait.

Du côté acoustique, les mixages français et anglais DTS-HD Master Audio 5.1 créent un espace d’écoute suffisamment plaisant en faisant la part belle à la musique et à quelques effets latéraux. Des ambiances naturelles percent les enceintes arrière sans se forcer mais avec une efficacité chronique. Sans grande surprise, la version originale se révèle plus naturelle et riche que la piste française. C’est assez rare pour qu’on le signale, Nicolas Cage n’est pas doublé en français par l’excellent Dominique Collignon-Maurin. Autant vous dire que la surprise est de taille… mauvaise même. A éviter donc. Les sous-titres français sont imposés sur la version originale, et le changement impossible à la volée.

Crédits images : © Marco Polo Production / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / L’Enfer au-dessous de zéro, réalisé par Mark Robson

L’ENFER AU-DESSOUS DE ZÉRO (Hell Below Zero) réalisé par Mark Robson, disponible en DVD le 23 mai 2017 chez Sidonis Calysta

Acteurs : Alan Ladd, Joan Tetzel, Basil Sydney, Stanley Baker, Joseph Tomelty, Niall MacGinnis

Scénario : Alec Coppel, Max Trell, Richard Maibaum d’après le roman de Hammond Innes

Photographie : John Wilcox

Musique : Clifton Parker

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 1954

LE FILM

Lorsque son père capitaine est porté disparu en Antarctique, sa fille Judie Nordhall part immédiatement à sa recherche. En chemin, elle rencontre un ancien officier de la Navy, Duncan Craig. Ce dernier, qui tombe immédiatement sous le charme de la jeune femme, s’engage comme matelot sur le baleinier qui doit effectuer les recherches.

Entre Les Bérets rouges de Terence Young et La Brigade héroïque de Raoul Walsh, Alan Ladd trouve le temps de tourner un petit film d’aventures bien connu des cinéphiles, L’Enfer au-dessous de zéroHell Below Zero, produit par Albert R. Broccoli, bien avant qu’il ne lance la saga James Bond. Au sommet de sa carrière, le comédien sort du triomphe du western L’Homme des vallées perduesShane de George Stevens. En dehors de ses deux collaborations avec le cinéaste Delmer Daves sur L’Aigle solitaire (1954) et L’Or du Hollandais (1958), Alan Ladd ne parviendra jamais à retrouver les faveurs du public. Il sombre progressivement dans l’alcool et les médicaments jusqu’à sa mort prématurée en 1964 à l’âge de 50 ans.

L’Enfer au-dessous de zéro est un divertissement désuet réalisé par le canadien Mark Robson (1913-1978), ancien monteur de Jacques Tourneur sur La Féline et Vaudou, mais aussi d’Orson Welles sur La Splendeur des Amberson. Eclectique, mais aussi inégal, on lui doit Le Champion avec Kirk Douglas (1949), Le Procès avec Glenn Ford (1955), Plus dure sera la chute avec Humphrey Bogart (1956), ainsi que deux films de guerre très célèbres, L’Express du colonel Von Ryan avec Frank Sinatra (1965) et Les Centurions avec Anthony Quinn et Alain Delon (1966). L’un de ses derniers films, Tremblement de terre (1974) demeure l’un des fleurons du genre catastrophe. Bon technicien, Mark Robson s’en tire honorablement derrière la caméra sur L’Enfer au-dessous de zéro, même s’il n’est pas aidé par des transparences omniprésentes et surtout très mal fichues, ainsi que par l’utilisation de maquettes visibles et rudimentaires, sans oublier des décors en carton-pâte supposés représenter l’Antarctique. Tout est fait pour nous faire croire qu’Alan Ladd déambule sur le pont d’un baleinier, mais malgré les efforts de l’équipe des effets spéciaux, cela ne fonctionne pas. Mark Robson incruste des images très impressionnantes, pour ne pas dire horribles, provenant d’un documentaire sur la chasse à la baleine, qui pourraient encore heurter les défenseurs de la cause animale et les spectateurs les plus sensibles.

L’histoire ne manque pas d’attraits. Le Baker, un navire de Bland Nordhal Whaling company signale la disparition en mer de son capitaine, Bernd Nordhah, qui se serait suicidé. Aussitôt informés, Judie, la fille du disparu et son associé John Bland s’envolent pour l’Antarctique dans l’espoir de retrouver sa trace. Sur le chemin Judie fait la connaissance de Duncan Craig, un ancien officier de la Navy à qui elle confie sa crainte que son père ait pu être assassiné. Séduit, Duncan se fait embaucher comme premier matelot sur le baleinier où Judie embarque. Le médecin du bord, que l’ivresse rend bavard, lui raconte que Nordhal a très certainement été victime de son associé et ancien fiancé de Judie. La magie du Technicolor opère, mais L’Enfer au-dessous de zéro vaut essentiellement pour la prestation d’Alan Ladd, élégant, sourire en coin, regard de velours, qui n’hésite pas à donner du poing et qui s’en sort d’ailleurs pas mal dans les bagarres. A ses côtés, l’actrice Joan Tetzel, vue dans Le Procès Paradine d’Alfred Hitchcock, qui a peu tourné pour le cinéma, se révèle charmante et l’alchimie fonctionne avec son partenaire. Le badguy, c’est le vénéneux Stanley Baker avec sa trogne taillée à la serpe, qui tient la dragée haute à Alan Ladd et qui s’avère parfait en salaud de service.

L’Enfer au-dessous de zéro reste un spectacle agréable, qui se laisse agréablement suivre grâce au talent de ses comédiens, à ses nombreuses péripéties sur les eaux glacées de l’Antarctique et à son petit souffle romanesque.

LE DVD

Le DVD de L’Enfer au-dessous de zéro, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur la musique du film.

Comme pour ses titres western et polars, l’éditeur a confié la présentation de L’Enfer au-dessous de zéro à l’imminent Patrick Brion (7’). L’historien du cinéma évoque le tournage du film en Angleterre et ne cache pas son plaisir d’avoir revu Alan Ladd à l’écran en avouant que cela faisait longtemps qu’il n’avait pas visionné un long métrage avec le comédien. Brion revient rapidement sur le statut de star de l’acteur, tout en donnant quelques indications sur le réalisateur Mark Robson et l’usage des stockshots.

Sidonis nous gratifie ensuite d’un documentaire rétrospectif sur Alan Ladd réalisé en 1998 et intitulé Le Véritable homme tranquille (57’). Constitué d’archives personnelles, de photos, de films de famille, d’extraits, de bandes-annonces d’époque, ce module croise également les interventions – doublées par une voix-off française – de quelques acteurs (Lizabeth Scott , Mona Freeman, Peter Hansen, Paricia Medina), réalisateurs (Edward Dmytryk), d’historiens du cinéma et de proches (David Ladd, le fils du comédien). La réalisation est classique, comme une illustration en images de la fiche Wikipédia d’Alan Ladd (on y brasse son enfance, le trauma avec le suicide de sa mère devant ses yeux, ses débuts, ses premiers succès, ses problèmes avec l’alcool et les médicaments, sa vie de famille, son rapport avec les femmes), mais l’ensemble est suffisamment intéressant et n’est pas avare en images rares voire inédites.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos et d’affiches d’exploitation.

L’Image et le son

Si L’Enfer au-dessous de zéro a un temps été annoncé en Haute-Définition par Sidonis Calysta, force est de constater que l’éditeur a dû revoir ses ambitions puisqu’il ne propose le film de Mark Robson qu’en DVD. Vu l’état de la copie, cela semble plus raisonnable. Non pas que le master 1.33 (16/9) soit « ultra » mauvais, mais en raison de l’étalonnage des couleurs qui laisse parfois vraiment à désirer, tout comme le lissage vraiment trop important du grain original ! A tel point que les transparences, déjà mauvaises à la base, donnent à l’ensemble un côté artificiel assez laid. La gestion des contrastes est elle aussi aléatoire, parfois pendant une même séquence. Un effet de pompage n’a pu être équilibré, quelques scories demeurent, tâches, points, fils en bord de cadre et rayures verticales, les stockshots sont tout de suite visibles (ou moins, puisqu’ils sont souvent flous), bref, ce n’est pas très reluisant tout ça.

Que votre choix se porte sur la version originale (avec sous-titres français imposés) ou la version française, la restauration est en revanche fort satisfaisante ici. Aucun souffle constaté sur les deux pistes, l’écoute est claire, frontale et riche, dynamique et vive. Les effets annexes et la musique sont plus conséquents sur la version originale que sur la piste française, moins précise, mais le confort acoustique est assuré sur les deux options. Le changement de langue est verrouillé à la volée et les sous-titres français imposés sur la version originale.

Crédits images : © Columbia / Sidonis Calysta / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / La Famille Fang, réalisé par Jason Bateman

LA FAMILLE FANG (The Family Fang) réalisé par Jason Bateman, disponible en DVD le 22 juin 2017 chez Metropolian Vidéo

Acteurs : Nicole Kidman, Jason Bateman, Christopher Walken, Kathryn Hahn, Marin Ireland, Michael Chernus, Harris Yulin, Alexandra Wentworth

Scénario : David Lindsay-Abaire d’après le roman de Kevin Wilson

Photographie : Ken Seng

Musique : Carter Burwell

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2015

LE FILM

De retour dans la maison familiale, Baxter et Annie soignent les cicatrices d’une éducation qui échappe aux conventions. Lorsque leurs parents, des artistes célèbres pour élaborer des canulars en public, disparaissent dans des circonstances troublantes, le frère et la soeur mènent l’enquête, indécis quant à la raison de cette disparition : est-ce un jeu stupide ou une ruse élaborée ? Rien ne pouvait les préparer à ce qu’ils vont finir par découvrir.

Comédien aussi talentueux qu’attachant, Jason Bateman demeure pourtant méconnu dans nos contrées. Les spectateurs français l’ont néanmoins vu dans de nombreuses comédies à succès, Dodgeball – Même pas mal !, Starsky et Hutch, La Rupture, Juno, Paul, Hancock, les deux Comment tuer son boss ?, sans toutefois parvenir à retenir son nom, pourtant facile à mémoriser. Ayant commencé sa carrière quand il avait une dizaine d’années, notamment dans La Petite maison dans la prairie dans le rôle de James Cooper Ingalls, Jason Bateman n’a jamais arrêté de tourner pour le cinéma et la télévision. Parallèlement à sa carrière d’acteur, il a également fait ses premiers pas derrière la caméra en réalisant quelques épisodes des séries Valerie, La Vie de famille, Un frère sur les bras, Les Jumelles s’en mêlent, avant de mettre en scène son premier long métrage pour le cinéma avec Bad Words, sorti directement en DVD et Blu-ray en France en 2014. En 2015, il signe son deuxième film La Famille Fang, toujours inédit en France, adaptation du roman éponyme de Kevin Wilson.

Caleb (Christopher Walken) et Camille Fang (Maryann Plunkett) sont des artistes qui ont dédié leur vie à la performance et aux happenings. Annie (Nicole Kidman) et Buster (Jason Bateman), leurs deux enfants, ont toujours fait partie – parfois contre leur gré – de leurs œuvres filmées à l’insu des passants choqués. Pas facile de grandir avec des parents pareils. Une fois adultes, ils s’aperçoivent que le chaos de leur enfance les a rendus quelque peu inadaptés à la société. Annie est une comédienne qui enchaîne les mauvais films, qui doit se résoudre à tourner topless pour relancer sa carrière, tandis que Buster est un écrivain raté en manque d’inspiration. Le poids des parents pèse sur ces deux quadras. Alors quand Baxter a un petit accident de pomme de terre – lancée dans la figure par un patator – et qu’il apprend que son père et sa mère débarquent pour le soutenir, les souvenirs d’une enfance marquée par l’excentricité de leurs parents artistes, qui les utilisaient comme cobayes et complices malgré eux de leurs performances, reviennent vite à la surface. La Famille Fang est un film délicat et amer sur l’héritage et les relations familiales. Formidablement interprétée, notamment par Jason Bateman lui-même et Nicole Kidman (productrice et qui a acquis les droits du livre pour le cinéma), capable d’illuminer le moindre petit film de sa présence malgré son visage quelque peu figé en raison de chirurgie plastique, cette comédie-dramatique est typique du cinéma indépendant américain.

On connaît la musique, mais La Famille Fang fonctionne grâce à son approche mélancolique et à la complexité des personnages. Jusqu’où des artistes peuvent-ils aller pour l’amour de leur art et pour faire bouger les consciences ? Doivent-ils mettre en péril leur propre famille ? Et comment les enfants peuvent-ils accepter de passer au second plan dans la vie de leurs parents ? La Famille Fang passe du passé au présent, montrant les parents et leurs rejetons dans leurs performances, entre amusement pour le « bien-être personnel » et la « révolution » pour inciter les témoins de leurs happenings à réfléchir sur la condition humaine. Le malaise s’installe quand les parents organisent un nouveau coup fourré en obligeant A et B (surnoms des gamins en raison de la première lettre de leurs prénoms respectifs, encore une blague) à jouer Roméo et Juliette, où les deux ados doivent alors s’embrasser sur scène.

Sur un scénario écrit par David Lindsay-Abaire (l’excellent Rabbit Hole de John Cameron Mitchell, avec Nicole Kidman), La Famille Fang ne joue pas sur l’empathie immédiate et montre les fêlures de ses personnages, qui se dévoilent par strates. C’est là toute la réussite du film difficile à cerner de Jason Bateman, qui mérite vraiment d’être découvert.

LE DVD

Le test du DVD – pas d’édition HD pour ce titre – de La Famille Fang, disponible chez Metropolitan, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobre, animé et musical.

Aucun supplément en dehors d’un lot de bandes-annonces de titres disponibles chez l’éditeur.

L’Image et le son

Pour son second long-métrage, Jason Bateman jouit d’un atout de taille en la personne de Ken Seng, directeur de la photographie de Deadpool, Projet X et Disconnect. Le master SD concocté par Metropolitan restitue joliment la colorimétrie originale, même si les contrastes auraient gagné à être plus renforcés. Un très léger grain se fait ressentir, les scènes diurnes sont claires mais le piqué n’est pas aussi ciselé qu’espéré. Signalons quelques artefacts de compression visibles durant les scènes se déroulant en intérieur, sans toutefois que les conditions de visionnage s’en trouvent affectées. La définition n’est certes pas optimale, mais solide et largement suffisante pour découvrir ce film singulier.

En anglais comme en français, les pistes Dolby Digital 5.1 remplissent aisément leur office et même, plongent le spectateur dans une ambiance musicale inattendue. D’entrée de jeu, les effets naturels se font entendre sur l’ensemble des enceintes et bénéficient d’une belle ouverture frontale et latérale. Les voix sont solidement plantées sur la centrale et le confort acoustique est assuré du début à la fin.

Crédits images : © Metropolitan Vidéo / Captures du DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Revenger, réalisé par Walter Hill

REVENGER (The Assignment) réalisé par Walter Hill, disponible en DVD et Blu-ray le 6 juin 2017 chez TF1 Vidéo

Acteurs : Michelle Rodriguez, Sigourney Weaver, Tony Shalhoub, Caitlin Gerard, Terry Chen, Anthony LaPaglia

Scénario : Walter Hill, Denis Hamill

Photographie : James Liston

Musique : Giorgio Moroder, Raney Shockne

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Une chirurgienne brillante et manipulatrice décide de se venger du meurtre de son frère. Elle est prête à tout pour retrouver le tueur et lui faire payer son crime….au-delà de l’imaginable.
Frank Kitchen est un tueur sans pitié qui pourchasse ses proies et les abat froidement pour éxécuter ses contrats. Mais cette fois ci, le contrat, c’est lui. Un contrat motivé par un puissant désir de vengeance qui doit le mener sur le chemin de la rédemption. Après s’être fait kidnapper, Frank se réveille avec un nouveau visage…
Comprenant qu’il est l’objet d’une terrible manipulation, c’est à son tour de mettre en œuvre sa vengeance : elle sera redoutable !

Si Du plomb dans la tête avait marqué le retour de Walter Hill derrière la caméra dix ans après Un seul deviendra invincible, le cinéaste n’aura pas attendu aussi longtemps pour livrer son nouveau film Revenger, The Assignment en version originale. Comme pour son précédent long métrage, Walter Hill adapte une bande dessinée, publiée en France sous le titre Corps et Ame (chez Rue de Sèvres), cosignée par le réalisateur lui-même avec Matz et Jef. Revenger reprend la même intrigue. Frank n’est pas un type bien. Des hommes, il en a descendus des dizaines, proprement, sans histoires, un vrai pro. Pourtant, il aurait pu se douter que cette affaire payée le double était louche. Mais le réveil est bien plus rude que tout ce qu’il pouvait imaginer : si son âme est toujours homme, son corps, lui, est devenu femme. Une vengeance pour un crime passé. Sa vengeance à lui commence, et elle ne laissera personne indemne. Walter Hill ne le cache pas, Revenger, dont le script initial – sous le titre Tomboy – remonte aux années 1970, est une pure série B tournée avec un budget très restreint (on parle de 2,5 millions de dollars) et une intrigue réduite au plus simple.

Le plus amusant du film car le plus improbable, c’est bien évidemment la performance de Michelle Rodriguez, qui n’est certes pas la plus sobre des comédiennes, mais qui a l’air de s’amuser à jouer un tueur à gages, avec la barbe qui n’a d’égale que la perruque de Christophe Lambert dans Vercingétorix : la légende du druide roi et le service trois-pièces en latex, qui subit une vaginoplastie comme représailles après un contrat qui a mal tourné. Autant dire que le réveil est difficile pour ce mec macho qui lève des nanas dans les bars éclairés aux néons. Mais s’il doit dorénavant prendre des hormones et « accepter » sa nouvelle situation, il, ou elle désormais, est bien décidée à retrouver celle qui est responsable de cette nouvelle identité, tout en flinguant les sbires qui se mettront sur sa route. Michelle Rodriguez en fait des tonnes, fronçant les yeux et en faisant la moue, pétoires à la main et démarche de camionneuse. Ça défouraille pas mal, mais malheureusement le récit ne suit pas une seconde.

Revenger qui se complaît dans une esthétique craspec avec une nonchalance assumée, tout en plagiant l’idée centrale du chef d’oeuvre de Pedro Almodóvar, La Piel que habito, avec un zest de Sin City avec cette voix-off omniprésente. Entre Michelle Rodriguez d’un côté en mode bulldozer, et Sigourney Weaver sanglée dans une camisole de force qui tape la discute avec son toubib Tony Shalhoub, Revenger est un film qui adopte un rythme de croisière avec le frein à main serré, tandis que le spectateur attend toujours la scène d’action qui viendra un peu remuer tout ça. Peine perdue.

Revenger est un thriller pulp, mâtiné de plans directement issus de la BD avec des arrêts sur image « comics » qui tentent de donner une identité à l’ensemble. Ce n’est pas déplaisant, surtout avec ce personnage principal qui tente de renouer avec son identité, ce qui vaut quelques réflexions sur le genre, mais Revenger est tellement lent, lambda et déjà-vu, qu’il ne se distingue jamais du tout-venant. Et qu’est-ce que c’est bavard ! C’est vraiment dommage, surtout que Walter Hill avait prouvé avec le réjouissant Du plomb dans la tête, buddy movie renvoyant directement à ceux réalisés dans les années 80, qu’il en avait encore sous le capot.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Revenger, disponible chez TF1 Vidéo après un passage en VOD, a été réalisé à partir d’un check disc. Le menu principal est animé et musical.

Edition minimaliste pour Revenger puisque l’éditeur ne livre qu’un petit entretien de Walter Hill et de Michelle Rodriguez (12’), visiblement réalisé à l’occasion de la promotion du film par le journaliste Didier Allouch. Dans un premier temps, le réalisateur monopolise la parole tandis que la comédienne se contente d’acquiescer et de renifler dans le micro Studiocanal. Walter Hill revient sur la genèse de Revenger, sur le budget restreint et le fait de réaliser une série B, sur les partis pris et la BD à l’origine du film. Michelle Rodriguez sort ensuite de sa torpeur et de son rhume pour indiquer à quel point elle s’est sentie femme en incarnant un homme. Merci Michelle.

L’Image et le son

Le master HD (1080p) français de Revenger édité par TF1 Vidéo restitue habilement les volontés artistiques du chef opérateur James Liston (Lost Identity) en conservant un très léger grain cinéma, des couleurs à la fois chaudes et froides, des contrastes léchés ainsi qu’un relief constamment palpable. La compression AVC consolide l’ensemble avec brio, les détails sont légion sur le cadre large et les visages des comédiens, le piqué est aiguisé, les noirs denses, les blancs cramés et la copie éclatante. Les très nombreuses séquences nocturnes jouissent également d’une belle définition, même si les détails se perdent quelque peu.

Pour un film de ce genre, nous nous attendions à un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 plus ardent. En français comme en anglais, la scène latérale distille ses effets avec une étonnante parcimonie et il faut véritablement attendre les quelques séquences d’action pour que la spatialisation se fasse enfin concrète et que le caisson de basses se réveille. Sans grande surprise, la version originale se révèle plus naturelle et riche que la piste française. Les dialogues manquent de punch et d’intelligibilité sous la percutante balance frontale.

Crédits images : © TF1 Vidéo / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

 

 

Test Blu-ray / The Bye Bye Man, réalisé par Stacy Title

THE BYE BYE MAN réalisé par Stacy Title, disponible en DVD et en Blu-ray (version non censurée) le 22 juin 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Douglas Smith, Lucien Laviscount, Cressida Bonas, Carrie-Anne Moss, Faye Dunaway, Doug Jones, Jenna Kanell, Michael Trucco

Scénario : Jonathan Penner d’après la nouvelle The Bridge to Body Island de Robert Damon Schneck

Photographie : James Kniest

Musique : The Newton Brothers

Durée : 1h36 (version cinéma) 1h39 (version non censurée)

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Lorsque trois étudiants s’installent dans une vieille maison aux abords de leur campus, ils libèrent inconsciemment le Bye Bye Man, une entité surnaturelle qui ne hante que ceux qui découvrent son nom. Les amis comprennent alors qu’il n’y a qu’un moyen d’échapper à sa malédiction et d’éviter qu’elle ne se propage : ne pas le dire, ne pas y croire. Quand le Bye Bye Man arrive à s’immiscer dans vos pensées, il prend le contrôle et vous fait commettre l’irréparable…

The Bye Bye Man marque le retour au cinéma de la réalisatrice Stacy Title, révélée en 1995 avec L’Ultime souper. Attirée par l’épouvante, la cinéaste a également signé Let the Devil Wear Black en 1999 et Hood of Horror en 2006. A part une participation à un show collectif réalisé pour la télévision, The Greatest Show Ever, nous étions sans nouvelles de Stacy Title. The Bye Bye Man est l’adaptation d’une nouvelle de Robert Damon Schneck intitulée The Bridge to Body Island. Le film aurait dû être distribué dans les salles françaises l’été 2016, sortie finalement annulée en raison du report de l’exploitation américaine (dans une version finalement tronquée) et surtout des critiques très négatives. Pourtant cela partait bien.

On est tout d’abord happé par un prologue filmé en plan-séquence, d’une incroyable brutalité sèche. En octobre 1969, un homme débarque dans une petite bourgade du Wisconsin. Armé d’un fusil, il demande à l’une de ses connaissances si « elle connaît son nom ou l’a dit à quelqu’un ? » avant de lui tirer à bout portant. D’autres meurtres suivent rapidement après, un homme handicapé qui rampe sur le sol, les voisins alertés par les détonations, tandis que l’homme au fusil n’arrête pas de répeter « N’y pense pas. Ne dis pas son nom ». Quoi ? Encore Voldemort ? Passée cette formidable introduction, l’action se déroule de nos jours où nous suivons un jeune couple d’étudiants et leur ami, qui viennent de louer une maison – quelque peu délabrée – en dehors du campus afin d’y être plus tranquilles. C’est alors que The Bye Bye Man adopte un rythme de croisière tout aussi peinard et s’enlise rapidement dans tous les clichés du genre.

Les étudiants restent dans cette baraque qui s’avère évidemment très vite hantée ou tout du moins le lieu de phénomènes paranormaux. Les visions cauchemardesques se multiplient, notamment celle du fameux Bye Bye Man interprété par l’incroyable Doug Jones, qui prête une fois de plus sa longue silhouette filiforme à un personnage fantastique après avoir marqué les cinéphiles dans Le Labyrinthe de Pan, les deux Hellboy et même Gainsbourg (Vie héroïque). Mais à côté de ça, les jeunes comédiens, la mannequin Cressida Bonas (l’ex du prince Harry pour les plus people), Douglas Smith (la série Vinyl, Miss Sloane) et Lucien Laviscount font ce qu’ils peuvent pour rendre leurs personnages bébêtes un peu attachants. S’ils y arrivent au départ, la direction d’acteurs va à vau-l’eau dès que le fantastique s’immisce. Constamment au bord de l’apoplexie, les yeux écarquillés, les comédiens en font trop, des tonnes même et il faut attendre l’apparition inattendue de l’excellente Carrie-Anne Moss pour redonner un peu d’intérêt à l’ensemble. Trop rare, l’actrice canadienne vole les deux scènes où elle apparaît. Un peu plus tard dans le film, on est encore plus surpris de voir, ou plutôt de reconnaître non sans difficulté, Faye Dunaway, dont le visage ravagé par la chirurgie esthétique fait vraiment peine à voir.

The Bye Bye Man se contente de plagier ouvertement Candyman, Wishmaster, Sinister et autres films convoquant un boogeyman, de mélanger tout cela dans un shaker et de déverser ce cocktail dans le bec des spectateurs en essayant d’adopter la forme du merveilleux It Follows de David Robert Mitchell, en espérant que ceux-ci ne voient pas trop l’entourloupe. Non seulement le film cumule les poncifs comme des perles sur un collier (l’amie médium qui organise une séance de spiritisme), mais en plus la réalisatrice ne parvient jamais à instaurer de suspense, les jumpscares ne fonctionnent jamais car trop attendus, le croquemitaine et son clebs en (mauvaises) images de synthèse ne possèdent aucune aura et les quelques scènes « choc » semblent tirées d’un ersatz de Destination Finale. Déception donc.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de The Bye Bye Man, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobrement animé et musical.

Aucun supplément en dehors d’un lot de bandes-annonces et du montage non censuré (3 minutes en plus) uniquement disponible sur l’édition Blu-ray.

L’Image et le son

The Bye Bye Man, DTV dans nos contrées, est proposé en HD dans un format 1080p. Si l’on est d’abord séduit par le rendu de la colorimétrie et de la luminosité durant le prologue, force est de constater que la définition chancelle à plusieurs reprises, avec un piqué trop doux à notre goût et un manque de détails, notamment au niveau des visages des comédiens. Le codec tente de consolider certains plans avec difficulté, surtout sur les nombreuses séquences sombres. De plus, la profondeur de champ est décevante, quelques légers fourmillements s’invitent à la partie, la gestion des contrastes étant au final aléatoire. Toutefois, certains plans sortent aisément du lot avec un relief indéniable.

Vous pouvez compter sur les mixages DTS-HD Master Audio 5.1 anglais et français pour vous plonger dans l’ambiance du film, bien que l’action demeure souvent réduite. La bande originale est la mieux lotie. Toutes les enceintes sont exploitées, les voix sont très imposantes sur la centrale et se lient à merveille avec la balance frontale, riche et dense, ainsi que les enceintes latérales qui distillent gentiment les jumpscares. Le caisson de basses se mêle également à la partie. Notons que la version originale l’emporte sur la piste française (au très mauvais doublage), se révèle plus naturelle et homogène, y compris du point de vue de la spatialisation musicale. La version non censurée est uniquement disponible en version anglaise avec les sous-titres français imposés.

Crédits images : © STX Productions, LLC. All rights reserved / Metropolitan FilmExport / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / Le Cynique, l’Infâme et le Violent, réalisé par Umberto Lenzi

LE CYNIQUE, L’INFÂME, LE VIOLENT (Il Cinico, l’infame, il violento) réalisé par Umberto Lenzi, disponible en combo DVD/Blu-ray le 18 mars 2017 chez The Ecstasy of Films

Acteurs : Maurizio Merli, Tomás Milián, John Saxon, Renzo Palmer, Gabriella Lepori, Claudio Undari, Bruno Corazzari

Scénario : Ernesto Gastaldi, Dardano Sacchetti, Umberto Lenzi d’après une histoire originale de Sauro Scavolini

Photographie : Federico Zanni

Musique : Franco Micalizzi

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1977

LE FILM

Luigi Maietto, dit   »le Chinois » , jeune truand cynique et ambitieux, vient de s’évader de prison. Son premier souhait est de faire mordre la poussière au responsable de sa condamnation à vie, l’ex-commissaire de police Leonardo Tanzi, en lui envoyant deux tueurs. En dépit de graves blessures, il se fait passer pour mort et se cache à Rome pour y donner la chasse à son persécuteur. Le Chinois, qui se croit débarrassé, a repris son activité au sein de la pègre organisée, en s’associant au « boss » italo-américain Frank Di Maggio pour mieux régner en maître sur la Mafia romaine. Tanzi monte un plan machiavélique pour anéantir Le Chinois en l’opposant à Di Maggio. Une guerre sans merci va débuter.

Au cours des années 70, l’Italie subit les revendications politiques des Brigades Rouges et vit ce que l’on appellera plus tard ses « années de plomb » . Reflet social, le cinéma va exprimer cette violence dans une vague de polars urbains âpres et cruels. Fortement inspirés par des films comme L’inspecteur Harry (1971), Un justicier dans la ville (1974) ou encore French Connection (1971), les réalisateurs Enzo G. Castellari, Fernando Di Léo, Umberto Lenzi, et bien d’autres, vont faire mettre en images violence, vengeance et justice. Franco Nero, Tomás Milián, Fabio Testi, ou Maurizio Merli, vont camper les flics, voyous, mafieux, escrocs ou justiciers, pour le plus grand bonheur des spectateurs.

Celui qui nous intéresse ici est Le Cynique, l’Infâme et le Violent Il cinico, l’infame, il violento (et même The Cynic, the Rat and the Fist en anglais !) réalisé par le prolifique Umberto Lenzi (Maciste contre Zorro, Kriminal, Le tueur à l’orchidée) avec le mythique Tomás Milián, comédien cubain qui alternait les séries B lucratives et les films d’auteur chez Mauro Bolognini, Alberto Lattuada, Valerio Zurlini, Liliana Cavani, Bernardo Bertolucci, Michelangelo Antonioni. A l’heure où certaines villes italiennes sont ratissées par certains gangs organisés et les petits commerçants pillés de toutes parts, Le Cynique, l’Infâme et le Violent agit comme un véritable défouloir dans les salles de cinéma en 1977.

Triomphe public, ce thriller violent n’a sans doute pas l’audace de Big Racket d’Enzo G. Castellari, mais n’en demeure pas moins un reflet de l’Italie d’alors et n’a rien perdu de sa férocité aujourd’hui. Porté par le charisme animal de Tomás Milián d’un côté, de Maurizio Merli de l’autre et du comédien italo-américain John Saxon entre les deux, Le Cynique, l’Infâme et le Violent est un véritable festival de bastons aux bruitages à la Terence Hill / Bud Spencer, de répliques cinglantes (en version originale tout du moins), de règlements de comptes (on y casse des jambes avec un cric, on jette de l’acide au visage d’une femme, on défonce la tête d’un homme à l’aide de balles de golf avant de le donner à bouffer à des dogues allemands), ça défouraille sévère. Le tout en gardant l’air décontracté, la chemise au col pelle à tarte bien ouvert sur le torse poilu où brillent les chaînes en or.

Après La rançon de la peurMilano odia : la polizia non può sparare, Bracelets de sangIl giustiziere sfida la città, Opération casseur Napoli violenta, Le Cave sort de sa planqueIl trucido e lo sbirro, Le Clan des pourrisIl trucido e lo sbirro et surtout Brigade spécialeRoma a mano armata dont il s’agit d’une suite (mais contrairement à Merli, Milian n’incarne pas le même personnage), Umberto Lenzi réunit ses précédentes têtes d’affiche pour Le Cynique, l’Infâme et le Violent, même si Tomás Milián et Maurizio Merli, qui ne se supportaient plus au point d’en venir aux mains, n’apparaissent jamais dans le même plan, y compris lors de l’affrontement final, grâce à un montage malin et très découpé.

Maurizio Merli traverse le film en singeant Franco Nero, au point d’y ressembler de façon troublante sur certains plans, comme si rien ne pouvait l’atteindre, en mettant un coup de poing d’abord et en discutant après. L’intrigue est typique du néo-polar italien aka poliziesco, avec quelques ingrédients directement issus du western et même de Mission Impossible lors d’un casse réalisé à l’aide de quelques gadgets (dont des lunettes à infrarouges pour passer à travers des lasers), et l’on suit avec délectation ces trois intrigues en parallèle, jusqu’à ce que le destin réunisse les trois personnages principaux sur la même scène.

Quarante ans après, Le Cynique, l’Infâme et le Violent demeure un savoureux divertissement, un pur plaisir de cinéma Bis, un petit bijou de l’Eurocrime fait évidemment pour remplir le tiroir-caisse, mais avec une redoutable efficacité doublé d’un vrai sens du spectacle populaire.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray et le DVD du Cynique, l’Infâme et le Violent, disponible chez The Ecstasy of Films, repose dans un élégant boîtier classique de couleur noire. L’élégante jaquette (réversible) saura immédiatement taper dans l’oeil des cinéphiles passionnés de cinéma Bis, et des autres, puisqu’elle reprend l’un des visuels originaux. Le menu principal est animé et musical. La tranche de la jaquette indique que ce titre est le numéro 1 de la collection Eurocrime et la sérigraphie du disque arbore les couleurs du drapeau italien.

Pour cette édition limitée, The Ecstasy of Films propose 1h45 de suppléments ! Autant dire que les fans vont être ravis !

On commence par l’entretien avec le réalisateur Umberto Lenzi (22’). Né en 1931, le cinéaste revient tout d’abord sur son amour du film noir américain, ses études au Centro Sperimentale di Cinematografia, ses débuts au cinéma dans le péplum et dans les films de pirates. Puis, Lenzi aborde son travail dans le giallo et le polizieco avec quelques-uns de ses plus grands succès. Le metteur en scène est visiblement heureux de partager ses souvenirs et de revenir sur la période la plus glorieuse de sa carrière. Evidemment, il n’oublie pas de mentionner les acteurs qu’il a fait tourné à plusieurs reprises, Maurizio Merli et Tomás Milián (« qui avait besoin de se charger avant de tourner »), en insistant sur le fait que les deux comédiens, qui ne pouvaient pas se supporter, ne se sont pas croisés une seule fois sur le plateau du Cynique, l’Infâme et le Violent. Le titre original du film « Insieme per una grande rapina » (Ensemble pour un grand casse), utilisé sur le plateau et même pour la bande-annonce, est gentiment moqué de la part de Lenzi puisque cette idée des producteurs ne correspondait pas du tout au film qu’il était en train de tourner. C’est le réalisateur lui-même qui a ensuite trouvé le titre définitif en s’inspirant bien sûr de Sergio Leone. Ne manquez pas ce rendez-vous bourré d’anecdotes intéressantes.

Réalisée peu de temps avant sa disparition, l’interview de Tomás Milián (13’) est également au programme. Aux côtés d’un chat tranquillement endormi, le comédien passe pas mal de temps à parler (en anglais) de son statut d’immense star en Italie, sur ses collaborations avec les plus grands et son triomphe dans les séries B. Milián s’attarde surtout sur ses diverses collaborations avec Umberto Lenzi, « un réalisateur qui avait besoin de travailler avec moi, car il était sûr de gagner de l’argent ». L’acteur se penche notamment sur sa relation avec le cinéaste, « un rapport amour-haine, car je refusais de faire ce qui ne me plaisait pas ». Dans la dernière partie de cet entretien, Tomás Milián aborde le côté défouloir d’incarner des salauds à l’écran, « cela permet de vider son sac et c’est donc plutôt relaxant », ainsi que sa participation aux dialogues pour ses personnages, en indiquant que chacune de ses trouvailles faisait le bonheur des spectateurs.

C’est avec une grande joie que nous découvrons ensuite un entretien avec le grand John Saxon (16’). Visiblement réalisée pour la télévision allemande, cette interview est étrangement présentée, mais les propos n’en demeurent pas moins spontanés, drôles et toujours intéressants. Tenant toujours la forme à 80 ans, le comédien évoque sa collaboration avec Tomás Milián (« avec qui cela s’est très bien passé »), Maurizio Merli (« qui parlait de lui à la troisième personne  et qui était très satisfait de lui-même […] une grande star, mais qui planait un peu »), Umberto Lenzi (« qui criait beaucoup et qui maudissait tout ce qu’il pouvait »). John Saxon se dit surpris par le regain d’intérêt pour le sous-genre polizieco, dont il savait le succès colossal dans les salles, mais qu’il n’allait pas voir au cinéma, préférant les films d’auteurs dans les petites salles souvent éloignées de la ville. Le comédien revient également sur sa carrière en Italie (dont son premier film La Fille qui en savait trop de Mario Bava en 1963) et son attachement pour le pays et sa culture, étant lui-même d’origine italienne.

Le plus long supplément de cette interactivité s’avère l’entretien avec Franco Micalizzi (36’). Le compositeur à qui l’on doit les thèmes de On l’appelle Trinita, Brigade spéciale, Le Cynique, l’Infâme, le Violent, Quand faut y aller, faut y aller et Attention les dégâts revient ici sur l’ensemble de sa carrière et ses rencontres déterminantes. Sa passion pour la musique, ses débuts, ses influences, sa passion pour le jazz, son travail à la maison de disques R.C.A., son arrivée dans l’industrie du cinéma, tous ces sujets sont abordés avec passion par Franco Micalizzi.

Le dernier bonus est une présentation du Cynique, l’Infâme et le Violent par Mike Malloy (11’). S’il recoupe l’essentiel des modules précédents, notre interlocuteur ne manque pas d’imagination pour parler du film qui nous intéresse avec notamment l’apparition d’un fan de Tomás Milián qui tente d’imposer le portrait de son comédien favori au moment où Malloy évoque Merli et Saxon.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale.

L’Image et le son

Alors là, chapeau ! Jusqu’alors inédit en DVD et Blu-ray, Le Cynique, l’Infâme et le Violent déboule en version restaurée et Haute-Définition chez The Ecstasy of Films. Dès le générique d’ouverture (en français), l’image, au format respecté 2.35, affiche une propreté remarquable et une stabilité jamais prise en défaut, la clarté est de mise, les couleurs sont restituées pimpantes, le grain cinéma bien géré, les contrastes riches, le piqué agréable. La définition flatte les mirettes, la compression demeure discrète. C’est superbe ! Le Blu-ray est au format 1080p.

Propre et dynamique, le mixage italien DTS HD Master Audio Mono ne fait pas d’esbroufe et restitue parfaitement les dialogues, laissant une belle place à la musique de Franco Micalizzi . Elle demeure la plus dynamique du lot, mais également la plus virulente et la plus frontale dans ses dialogues par rapport à son homologue à l’adaptation plus « légère ». La version française DTS HD Master Audio Mono pousse un peu trop les dialogues, légèrement chuintants, au détriment des effets annexes. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © OB Films / The Ecstasy of Films / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Ssssnake le cobra, réalisé par Bernard L. Kowalski

SSSSNAKE LE COBRA (Sssssss) réalisé par Bernard L. Kowalski, disponible en DVD et Blu-ray le 9 mai 2017 chez Movinside

Acteurs : Strother Martin, Dirk Benedict, Heather Menzies-Urich, Richard B. Shull, Tim O’Connor, Jack Ging, Kathleen King, Reb Brown

Scénario : Hal Dresner d’après une idée originale de Daniel C. Striepeke

Photographie : Gerald Perry Finnerman

Musique : Patrick Williams

Durée : 1h39

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

David, un jeune étudiant, est engagé comme assistant de laboratoire par le docteur Stoner, un herpétologiste spécialisé dans les serpents. Il ne tarde pas à tomber amoureux de la fille du docteur, tandis que ce dernier décide d’utiliser sur lui un sérum secret, destiné à créer un hybride homme-serpent.

Connu en France sous le titre SSSSnake le cobra ou tout simplement SSSSnake, Sssssss (titre original) est réalisé par Bernard L. Kowalski (1929-2007) en 1973. Oeuvrant habituellement pour la télévision sur des séries aussi diverses que variées que M Squad, Perry Mason, Les Incorruptibles, Rawhide, le metteur en scène signe avec ce petit film d’horreur une de ses rares incursions au cinéma. Après Night of the Blood Beast (1958) et Attack of the Giant Leeches (1959) – ou L’Attaque des sangsues géantes – qui lui avaient déjà donné l’occasion de toucher à l’horreur, Bernard L. Kowalski livre une formidable série B qui risque de donner quelques sueurs froides à ophiophobes, aux spectateurs qui ont peur des serpents.

Le docteur Stoner, herpétologiste réputé, conduit des recherches dont l’audace amène ses confrères et commanditaires à s’éloigner de lui. C’est ainsi qu’il a mis au point un sérum, dérivé de venin de cobra, qui peut transformer un homme en serpent. Tout cela dans le but de créer l’espèce parfaite et ultime. Mais sa première victime, Tim, n’est pas devenu tout-à-fait un serpent, et on le montre désormais comme attraction dans les foires. Après avoir refusé d’appuyer ses demandes de subventions, le docteur Daniels, qui ne se doute pas des véritables recherches de Stoner, lui recommande de prendre comme nouvel assistant un de ses étudiants, David Blake. Dans son laboratoire rempli de serpents, Stoner débute sa nouvelle expérience en lui injectant un sérum de son invention, supposé l’immuniser contre le venin. David commence alors à changer.

Produit par la jeune société Zanuck / Brown Productions (qui se préparait à financer un petit film intitulé Les Dents de la mer) pour Universal avec un budget d’un million de dollars, SSSSnake adopte un rythme lent, mais maîtrisé et repose sur un excellent casting, véritablement investi puisque plus de 150 véritables serpents – certains encore venimeux – ont été utilisés et manipulés par les comédiens pour les besoins du film. Bernard L. Kowalski fait preuve de rigueur dans sa mise en scène et sa direction d’acteurs, tout en distillant une tension maintenue pendant plus d’1h30. Le scénario d’Hal Dresner (Luke la main froide et Folies d’avril de Stuart Rosenberg, The Extraordinary Seaman de John Frankenheimer) joue avec les codes du genre en vigueur à l’époque et parvient à rendre réaliste une histoire extraordinaire.

Connu comme étant l’un des éternels seconds couteaux, le comédien Strother Martin, vu chez John Huston, Robert Aldrich, Delmer Daves, John Ford, Sam Peckinpah et George Roy Hill, accède ici au premier rôle. Peu habitué à cet événement, il porte néanmoins le film en créant un décalage intéressant et en rendant son personnage de savant fou inquiétant, qui tombe de plus en plus dans la démence au fil du récit. A ses côtés, les nostalgiques de la série L’Agence tous risques reconnaîtront Dirk Benedict qui interprétait Futé pendant les six saisons. Dans SSSSnake, c’est lui qui incarne le cobaye malgré-lui et qui va voir son corps se transformer, jusqu’à devenir un véritable cobra aux yeux bleus de plus de deux mètres.

Entre Frankenstein et L’Ile du Docteur Moreau, avec une petite touche de Freaks, la monstrueuse parade, SSSSnake s’avère une excellente surprise, récompensée par le Saturn Award du meilleur film de science-fiction en 1975 et sélectionnée en compétition au Festival international du film fantastique d’Avoriaz en 1974. Il n’est pas anodin de penser que SSSSnake ait ensuite largement influencé la série éphémère mais culte Manimal (1983), dans laquelle Simon MacCorkindale possédait la faculté de se transformer en panthère noire, en faucon et même en serpent. Si la mutation est définitive dans SSSSnake, celles dans Manimal font sérieusement penser à la séquence finale du film de Bernard L. Kowalski, par ailleurs la seule à utiliser les effets spéciaux. Le maquillage de Dirk Benedict est par ailleurs très réussi.

Au final, malgré une conclusion quelque peu décevante car trop expédiée, SSSSnake demeure une excellente récréation, relativement ambitieuse et continue de faire le bonheur des adeptes d’histoires horrifiques bien troussées.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de SSSSnake, disponible chez Movinside dans une collection dirigée par Marc Toullec et Jean-François Davy, repose dans un boîtier classique classe de couleur noire. L’élégante jaquette saura immédiatement taper dans l’oeil des cinéphiles passionnés de fantastique, et des autres, puisqu’elle reprend l’un des visuels originaux. Le menu principal est tout aussi classe, animé et musical.

Dans sa présentation du film (13’30), Marc Toullec rapproche judicieusement SSSSnake de Willard de Daniel Mann, réalisé deux ans plus tôt, et revient sur la genèse du long métrage de Bernard L. Kowalski. Notre spécialiste en films fantastiques évoque ensuite le casting, le producteur Richard D. Zanuck, les effets spéciaux, les maquillages, l’utilisation de véritables serpents sur le plateau, les thèmes et les conditions de tournage. Une introduction simple, concise, bourrée d’anecdotes, enjouée et très sympathique.

L’Image et le son

Fort d’un master au format respecté 1.85 et d’une compression AVC qui consolide l’ensemble avec brio, ce Blu-ray au format 1080p permet de (re)découvrir SSSSnake dans de très bonnes conditions techniques. Malgré de légères scories, la restauration est souvent impressionnante, les contrastes bien équilibrés, la copie est propre, stable et lumineuse. Les détails étonnent souvent par leur précision, notamment sur les gros plans, détaillés à souhait (la sueur qui brille sur le front de Dirk Benedict au fil du traitement), les couleurs retrouvent un éclat inespéré à l’instar des credits verts. En revanche, certains risquent de tiquer devant le lissage parfois excessif du grain argentique original, du manque de relief et du piqué trop doux à notre goût.

Les versions originale et française bénéficient d’un mixage Dolby Digital 2.0 Mono. Pas de HD ici donc. Cependant, le confort acoustique est malgré tout assuré dans les deux cas. L’espace phonique se révèle probant et les dialogues sont clairs, nets, précis, même si l’ensemble manque de vivacité sur la piste française. Que vous ayez opté pour la langue de Shakespeare (conseillée) ou celle de Molière, aucun souffle ne vient parasiter votre projection et l’ensemble reste propre. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © Movinside / Universal / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr