Test Blu-ray / Usurpation, réalisé par Jonathan Baker

USURPATION (Inconceivable) réalisé par Jonathan Baker, disponible en DVD et Blu-ray le 5 septembre 2017 chez Condor Entertainment

Acteurs : Nicolas Cage, Gina Gershon, Nicky Whelan, Faye Dunaway, Natalie Eva Marie, Leah Huebner, Jonathan Baker, James Van Patten…

Scénario : Chloe King

Photographie : Brandon Cox

Musique : Kevin Kiner

Durée : 1h42

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Brian mène une vie paisible et confortable avec sa femme Angela et leur fille. Le jour où leur voisine est retrouvée noyée, leur quotidien semble irrémédiablement déraper : Angela échappe de peu à un accident mortel, et des objets disparaissent de la villa. Brian sombre peu à peu dans la paranoïa : que cache l’intrigante jeune femme qui vient de s’installer dans leur guest house ? Leur cauchemar aurait-il un lien avec une mystérieuse série de meurtres remontant à plusieurs années ?

Les Direct To Video avec Nicolas Cage se suivent et ne se ressemblent pas ! UsurpationInconceivable est déjà le cinquième film avec le comédien à débarquer dans les bacs en France cette année. Après les excellents USS Indianapolis de Mario Van Peebles et Dog Eat Dog de Paul Shrader, le passable Arsenal et le raté Vengeance, Usurpation s’avère une série B plutôt réussie qui fleure bon les années 1990 et qui lorgne plus particulièrement sur le grand classique de Curtis Hanson, La Main sur le berceau.

En dehors de Dog Eat Dog, Nicolas Cage apparaissait plutôt comme un second rôle dans ses derniers films, laissant la place à ses partenaires, ce qui lui laissait probablement le temps de faire la navette entre ses divers tournages simultanés et ses joggings matinaux. Il n’est pas mauvais ici, très sobre et donc bon et attachant. Il retrouve Gina Gershon à qu’il avait déjà donné la réplique il y a vingt ans dans Volte-Face, le chef d’oeuvre de John Woo. Les années ont passé, la comédienne a vraisemblablement eu recours à quelques injections, ce qui ne l’empêche pas d’être avant tout excellente, charismatique et toujours aussi sexy. Visiblement très complice, le couple fonctionne très bien à l’écran.

Mais le réalisateur Jonathan Baker, dont il s’agit du premier long métrage, donne le beau rôle à la méconnue Nicky Whelan, blonde incendiaire aux yeux bleus perçants, qui campe une redoutable garce et dont le personnage fait donc sérieusement penser à celui campé par la sulfureuse Rebecca De Mornay dans La Main sur le berceau. Habituée des séries télévisées, elle fait une prestation remarquée – surtout par la gent masculine – en 2011 dans B.A.T (bon à tirer) des frères Farrelly face à un Owen Wilson bouleversé par ses charmes. Ses autres apparitions à l’écran demeurent discrètes et oubliables. Elle faisait également partie du catastrophique Le ChaosLeft Behind de Vic Armstrong, l’un des pires films avec Nicolas Cage sorti en 2014. Après un petit détour chez Terrence Malick dans Knight of Cups et également au générique de Dog Eat Dog, Nicky Whelan retrouve donc Nicolas Cage pour la troisième fois de sa carrière. Elle est impeccable dans le rôle de la détraquée Katie, devenue stérile après un problème médical, qui décide de « reprendre ses droits » sur les enfants nés grâce à ses derniers ovules qui avaient pu être sauvés. Après avoir kidnappé une petite fille et tué le père de cette dernière, elle parvient à s’incruster dans la vie d’un couple de médecins, Brian et Angela (Cage et Gershon), qui ont eu leur enfant par insémination artificielle, mais dont ils ignorent la provenance de l’ovule. Katie sombre de plus en plus dans la folie, tandis que Brian et Angela se sentent de plus en plus menacés.

Comme au bon vieux temps de la saga Hollywood Night qui a fait les belles soirées de TF1 le samedi de 1993 à 1999, Usurpation distille une petite dose de venin souvent jubilatoire, teinté d’érotisme soft, mais plaisant. La mise en scène de Jonathan Baker est soignée, tout comme le cadre et la direction d’acteurs. S’il n’est évidemment pas inoubliable, ce thriller où même Faye Dunaway vient faire un petit coucou s’avère fort sympathique, divertissant, en aucun cas un navet et encore moins un nanar, mais il est souvent utile de le préciser à certains spectateurs qui croient encore que Nicolas Cage demeure uniquement abonné aux deux catégories. Usurpation remplit parfaitement son contrat, sans se forcer certes, mais avec efficacité et un sens du travail bien fait.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’Usurpation, disponible chez Condor Entertainment, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical. Le visuel de la jaquette est soigné et saura attirer l’oeil des admirateurs de Nicolas Cage les plus fervents. Il y en a encore. Aucun supplément.

L’Image et le son

Condor Entertainment livre un beau master HD d’Usurpation, même si le Blu-ray est au format 1080i. Le cadre large et les contrastes sont plutôt ciselés, les détails agréables, la colorimétrie chaude côtoie un léger grain cinéma flatteur. Si le piqué est sans doute un peu doux à notre goût, les noirs sont denses, le relief et la profondeur de champ sont éloquents, l’encodage AVC est solide comme un roc, excepté sur quelques séquences en extérieur. Signalons divers moirages constatables sur les surfaces rayées.

Du côté acoustique, les mixages français et anglais DTS-HD Master Audio 5.1 créent un espace d’écoute suffisamment plaisant en faisant la part belle à la musique et à quelques effets latéraux. Des ambiances naturelles percent les enceintes arrière avec une efficacité chronique. Le doublage français est convaincant et par ailleurs le mixage s’avère plus dynamique dans la langue de Molière qu’en version originale. Les sous-titres français ne sont pas imposés et le changement de langue n’est pas verrouillé pendant le visionnage.

Crédits images : © Condor Entertainment / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Replicant, réalisé par Ringo Lam

REPLICANT réalisé par Ringo Lam, disponible en DVD et Blu-ray le 8 juillet 2017 chez Metropolitan Video

Acteurs : Jean-Claude Van Damme, Michael Rooker, Catherine Dent, Brandon James Olson, Pam Hyatt…

Scénario : Lawrence Riggins, Les Weldon

Photographie : Mike Southon

Musique : Alex Khaskin, Guy Zerafa

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 2001

LE FILM

Depuis longtemps, Garrotte, le tueur en série surnommé la Torche, hante les jours et les nuits de Jake Riley, un inspecteur de police qui s’est juré de l’arrêter. Les victimes de Garrotte ne cessent de s’accumuler et l’enquête de Jake piétine même si l’assassin l’a choisi pour confident. Ecœuré, Jake donne sa démission au moment même où le département secret du gouvernement, la NSA, lui demande de se joindre à ce projet top secret visant à arrêter Garrotte. La NSA crée un «Replicant», un clone issu de l’ADN de Garrotte, doté de capacités télépathiques.

Pour les plus grands fans du comédien, mais aussi pour la critique aujourd’hui quasi-unanime, Replicant, réalisé par le cinéaste chinois Ringo Lam en 2001, est probablement le meilleur film avec Jean-Claude Van Damme. Remarquable film d’action, thriller violent et nerveux, cet opus marque la deuxième sur les trois grandes collaborations entre « les Muscles de Bruxelles » et le metteur en scène, après Risque maximum (1996), dont la sortie avait été gâchée par un montage charcuté par la Columbia, et avant le formidable In Hell (2003). Non seulement Replicant vaut pour son histoire passionnante menée de main de maître par Ringo Lam, mais le film vaut aussi et surtout pour l’interprétation exceptionnelle de JCVD dans un double-rôle où il démontre toute une palette d’émotions qu’on ne lui prêtait pas forcément, ou à de très rares occasions comme dans Timecop de Peter Hyams.

D’un côté, il interprète un tueur redoutable, brutal, impitoyable, glacial, cheveux longs et gras, lunettes teintées, qui s’en prend aux femmes, les bat avant de les arroser d’alcool et de les brûler, parfois devant les yeux de leurs propres enfants. De l’autre, il incarne son clone, enfant dans un corps d’adulte, qui vient d’être « mis au monde » et apprend à marcher, à s’asseoir, à manger. Il se déplace comme un animal craintif, Ringo Lam ayant par ailleurs demandé à JCVD de visionner des documentaires animaliers pour se préparer. Ses regards, sa gestuelle, son jeu n’ont jamais été aussi intenses et habités que dans Replicant et le comédien émeut comme jamais auparavant.

L’aspect buddy-movie avec l’imposant, teigneux et tout aussi génial Michael Rooker fonctionne alors à plein rendement du début à la fin. Un tueur en série assassine des mères de famille et les enflamme avant de disparaître, ce qui lui vaut le surnom de La Torche. Après trois ans et onze victimes, Jake Riley alors chargé d’une enquête qui ne progresse toujours pas, décide de tout abandonner et de quitter la police. Autrefois idéaliste et large d’esprit, Jake en a suffisamment appris sur la nature humaine pour devenir cynique, cachant ses désillusions sous un humour caustique. C’est à ce moment qu’il est contacté par la NSA qui lui propose de continuer la traque avec de nouvelles méthodes, tandis que de son côté Garrotte, qui l’a choisi pour confident et qui l’appelle à chaque nouveau crime, continue de le harceler. Le département des services secrets du gouvernement a enfin peut-être trouvé la solution afin d’arrêter le tueur en série, grâce à un Replicant, c’est-à-dire un clone génétique, créé au moyen du sang de Garrotte trouvé non loin d’un de ses meurtres. Ce Replicant, dont la croissance a été accélérée afin qu’il atteigne l’âge biologique du tueur, double parfait de Garrotte, permettra à Jake de retrouver le meurtrier en question grâce aux dons télépathiques dont il est doté. Mais le Replicant manque de toute l’expérience d’une vie. Tandis que l’officier de police gère les émotions et les souvenirs de ce clone naïf et juvénile, il développe avec lui une relation étrange, se demandant constamment si ce Replicant est aussi dangereux que Garrotte, ou s’il peut lui faire confiance.

Alors que Replicant aurait pu refaire JCVD au box-office américain, où ses films sortaient directement en DTV depuis quelques années, le film de Ringo Lam n’a finalement pas été exploité dans les salles suite au désistement du distributeur Artisan Entertainment après l’échec commercial de Blair Witch 2 : Le Livre des ombres. Le film sort au cinéma dans le reste du monde, mais JCVD alors au sommet de son addiction à la drogue, rate complètement la promotion de Replicant, à l’instar de sa participation à l’émission Loft Story. Replicant n’attirera en France qu’un peu plus de 100.000 spectateurs, un bide vraiment pas mérité. Plus de quinze après, Replicant est et demeure un chef d’oeuvre du genre, probablement l’un des meilleurs thrillers des années 2000. Avec son intrigue mêlant film policier, élément fantastique, dédoublement (thème très prisé par Ringo Lam et JCVD lui-même), on pense fortement au bancal À l’aube du sixième jour de Roger Spottiswoode avec Arnold Schwarzenegger, mais plus encore à Volte/Face, autre référence, également mise en scène par un réalisateur chinois, John Woo. Les deux films se ressemblent tout en étant bien différents, mais bien qu’il ne bénéficie pas de la même reconnaissance internationale, Replicant n’a absolument rien à envier à Volte/Face.

LE BLU-RAY

Replicant fait partie d’un combo Blu-ray spécial Van Damme / Ringo Lam, aux côtés de l’édition HD de In Hell. A l’instar des éditions combo Black Eagle – L’arme absolue + Full Contact et The Order + Le Grand tournoi sorties en 2016, et comme celle récemment consacrée au cinéaste Albert Pyun, Mean Guns + Nemesis, Metropolitan Video fait ainsi le bonheur des fans de la star belge. Le test a été réalisé à partir d’un check-disc. Une fois le disque inséré, le spectateur est invité à sélectionner le film de son choix. Dans les deux cas, le menu principal est fixe et muet, minimaliste, sans chapitrage. Seuls l’envoi du film, la sélection de la langue et le choix des suppléments sont proposés.

L’historien du cinéma et expert en cinéma d’arts martiaux, sujet auquel il a consacré quelques ouvrages, l’excellent Christophe Champclaux présente Replicant en avant-programme (4’). C’est une véritable déclaration d’amour au film de Ringo Lam, qu’il considère comme le meilleur film avec Jean-Claude Van Damme. Il revient rapidement sur cette deuxième rencontre entre le comédien et le réalisateur, replace Replicant dans la filmographie de JCVD, croise le fond et la forme, tout en saluant la double performance d’acteur de l’acteur belge. Néanmoins, pas un mot sur Michael Rooker.

Hormis une (mythique) interview française de JCVD donnée lors de la promotion du film, le storyboard de la naissance du Replicant et les filmographies, l’éditeur reprend les suppléments disponibles sur l’édition DVD sortie en avril 2002. Quinze années déjà !

Le commentaire audio de Michael Rooker et de Jean-Claude Van Damme (en anglais) est disponible en version originale sous-titrée en français. Ne vous réjouissez pas trop vite car les deux comédiens ont été enregistrés séparément, l’éditeur ayant ensuite relié leurs deux interventions. JCVD intervient finalement peu. Visiblement spectateur de son propre film, il revient de temps en temps pour parler de son partenaire, de la direction d’acteur de Ringo Lam, sur la façon dont il a pu enrichir son propre jeu grâce au cinéaste, sur le tournage des scènes d’action. Quand il ne paraphrase pas ce qui se déroule à l’écran, JCVD sort quelques phrases valent le détour : « Aller, on s’éclate et on regarde Replicant, yeaaah ! », « C’est cool, c’est Replicant, yeeeah ! », « Le public aime voir JCVD faire son grand écart alors on allait pas s’en priver, à plus ! », « Il est trop fort ce film et vous savez quoi ? Je suis là avec mes potes à enregistrer ce commentaire et j’ai rien à dire sur ce film alors que c’est un des meilleurs que j’ai faits ! ». De son côté, Michael Rooker est très généreux et revient sur beaucoup d’aspects du film, sur son investissement dans les séquences d’action, sur le jeu de son partenaire (on apprend qu’ils désiraient tourner ensemble depuis pas mal de temps), le tournage à Vancouver, le travail avec Ringo Lam, etc. Un commentaire sympathique à défaut d’être réellement enrichissant.

Le making of d’époque (2001 – 23’) est très bon et donne la parole aux acteurs Michael Rooker, Jean-Claude Van Damme (« le plus beau cadeau que m’ait fait Ringo Lam, c’est de me rendre meilleur ») et Catherine Dent, au producteur John Thompson, au coordinateur des cascades Mike Crestejo, au chef décorateur Andrew Neskoromny, tous en mode promotionnel (l’histoire, les personnages…), mais dont les propos ne manquent pas d’intérêt, surtout lorsqu’ils évoquent la méthode de tournage de Ringo Lam. Si celui n’intervient pas face caméra, quelques images le montrent sur le plateau avec ses comédiens. Diverses images des prises de vues, ainsi que des répétitions complètent ce documentaire bien fichu, surtout lorsqu’il dévoile l’envers du décor des confrontations de JCVD face à lui-même.

S’ensuivent quelques scènes coupées, certaines rallongées (21’) ou alternatives, à l’instar du premier meurtre. Dans le montage cinéma, le corps en train de brûler de la victime se reflète dans les lunettes de JCVD, alors que la séquence tournée à l’origine montrait frontalement le corps en feu. Les séquences de Michael Rooker avec sa mère d’un côté, et celle avec Catherine Dent ont été raccourci, tout comme celle de la fête de son départ à la retraite.

L’Image et le son

A l’instar de l’édition HD d’In Hell et malgré un léger manque de concision sur certains plans, le Blu-ray de Replicant (1080p, AVC) dépasse toutes les espérances. Toutefois, l’élévation HD s’avère moins flagrante que pour In Hell. Les contrastes sont plutôt beaux, mais la photographie grisâtre gâche un peu l’ensemble. Les ambiances nocturnes sont soignées, les teintes froides excellemment restituées. Les séquences en extérieur manquent cependant de clarté. Si l’on constate quelques points blancs, la propreté est évidente, les détails sont parfois précis, d’autres fois plus riches, les partis pris esthétiques originaux sont respectés, tout comme le léger grain heureusement conservé lors du transfert, mais plus appuyé sur les scènes sombres, qui entraînent un léger bruit vidéo. Le piqué est également un peu doux à notre goût. Mais le résultat vaut le détour et cette édition HD rend caduque la pourtant solide édition DVD.

Replicant bénéficie de pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio 5.1. Dans les deux cas, la spatialisation s’avère agréable, les enceintes latérales délivrent un lot fort appréciable d’ambiances naturelles, d’effets palpables, sans oublier la musique en soutien. Les explosions, poursuites, coups de feu et coups de poing sont exsudés avec force par la centrale, la balance frontales-latérales est intelligemment équilibrée, l’ensemble est toujours dynamique et les basses interviennent à bon escient avec quelques pics remarquables. Dans les deux cas, aucun souffle n’est à déplorer, l’écoute demeure franche, puissante et limpide. Evitez tout de même la version française qui vous fera perdre le timbre inimitable de Michael Rooker.

Crédits images : © Millenium Films / Metropolitan Filmexport / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Miss Sloane, réalisé par John Madden

MISS SLOANE réalisé par John Madden, disponible en DVD le 11 juillet 2017 chez Rimini Editions

Acteurs : Jessica Chastain, Mark Strong, Sam Waterston, Gugu Mbatha-Raw, John Lithgow, Alison Pill, Michael Stuhlbarg, Jake Lacy…

Scénario : Jonathan Perera

Photographie : Sebastian Blenkov

Musique : Max Richter

Durée : 2h12

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Elizabeth Sloane est une femme d’influence brillante et sans scrupules qui opère dans les coulisses de Washington. Face au plus grand défi de sa carrière, elle va redoubler de manigances et manipulations pour atteindre une victoire qui pourrait s’avérer éclatante. Mais les méthodes dont elle use pour parvenir à ses fins menacent à la fois sa carrière et ses proches. Miss Sloane pourrait bien avoir enfin trouvé un adversaire à sa taille…

Peu d’actrices rivalisent aujourd’hui avec Jessica Chastain. Depuis son explosion en 2011 avec Take Shelter de Jeff Nichols, The Tree of Life de Terrence Malick, Killing Fields d’Ami Canaan Mann et La Couleur des sentiments de Tate Taylor, la flamboyante comédienne n’a eu de cesse de surprendre en passant d’un genre à l’autre, de Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow, des Hommes sans loi de John Hillcoat, à Mama d’Andrés Muschietti, Interstellar de Christopher Nolan ou bien encore Crimson Peak de Guillermo del Toro. Mais avant tous ces films et d’être reconnue, Jessica Chastain avait tourné L’Affaire Rachel SingerThe Debt, film d’espionnage coécrit par Matthew Vaughn et sous la direction de John Madden, réalisateur de Shakespeare in love et Capitaine Corelli. Sept ans après, ce dernier retrouve l’actrice rousse incendiaire pour Miss Sloane, savoureux thriller politique, dans lequel Jessica Chastain crève l’écran une fois de plus et dont l’absence à la dernière cérémonie des Oscar demeure incompréhensible.

A Washington, Elizabeth Sloane est la lobbyiste du moment, celle qu’il faut connaître et qui connaît tout le monde, celle qui orchestre avec rigueur un système de corruption pour lui donner des airs de campagne de com’. Elle est ainsi capable de sauver ses riches clients des lois qui veulent prévenir la déforestation ou l’obésité. La défense des armes à feu, en revanche, sera la mission de trop. Étonnamment, Miss Sloane semble avoir des principes. Elle va donc passer dans le camp d’en face, celui des idéalistes, sans pour autant abandonner ses habitudes. Miss Sloane rappelle les grands films d’investigation et de procès des années 1990, La Firme, L’Affaire Pélican, Le Droit de tuer ?, qui avaient tous comme dénominateur commun d’être l’adaptation d’un roman de John Grisham. Il n’est donc pas étonnant de retrouver Elizabeth Sloane étendue sur son canapé en train de lire un des romans de l’écrivain ! Dense, le film dure près de 2h15 et ne laisse aucun répit aux spectateurs.

Jessica Chastain livre une prestation exceptionnelle. Quasiment de tous les plans, véritable tornade humaine montée sur des talons de quinze centimètres et vêtue chez les plus grands couturiers, l’actrice campe un personnage aussi fascinant que détestable, glaciale et implacable, n’hésitant pas à sacrifier ses soutiens et partenaires pour aller jusqu’au bout de son combat. Sans enfants, retrouvant un escort-boy de temps en temps dans sa chambre, marchant à la benzédrine afin de ne pas dormir et de bénéficier ainsi de plus de temps que ses adversaires, Elizabeth Sloane agit dans son milieu comme un véritable et impitoyable rouleau compresseur, tout en ayant parfois recours à des méthodes répréhensibles comme l’espionnage audiovisuel grâce à d’anciens membres de la National Security Agency.

Si Miss Sloane est un film très bavard, au point que certaines répliques peuvent souvent nous échapper tant elles se chevauchent sur un rythme effréné, le scénario de Jonathan Perera, ancien avocat, ne perd jamais le spectateur et parvient toujours à le remettre sur le circuit. Le monde des lobbyistes est rare dans le cinéma, on se souvient du sympathique Thank You for Smoking de Jason Reitman, mais le sujet du film, le soutien d’une loi limitant le port d’armes à feu aux Etats-Unis et donc la remise en question du deuxième amendement de la Constitution l’est encore plus. Miss Sloane a entraîné beaucoup de débats sur le sol de l’Oncle Sam, ainsi qu’une riposte virulente de la toute-puissante NRA, ce qui a probablement causé en grande partie le grave échec commercial du film et entraîné une distribution médiocre dans le reste du monde. Pourtant, Miss Sloane est une grande réussite.

Aux côtés de l’impériale Jessica Chastain, nommée pour le Golden Globe de la meilleure actrice dans un film dramatique, on retrouve également l’excellent Mark Strong et toute une bande d’acteurs aussi talentueux que charismatiques, Gugu Mbatha-Raw, Michael Stuhlbarg, Alison Pill, John Lithgow, Sam Waterston, un casting de luxe qui n’est pas là pour servir la soupe à la comédienne principale, mais qui ont tous leur partition à jouer dans cette chorale sociale et politique menée de main de maître par un John Badden en très grande forme. Filmé comme un vrai film de guerre, Miss Sloane parvient à divertir et à captiver malgré ses sujets casse-gueules (trafic d’influence et tractations politiques dans les coulisses de Washington) et qui peuvent tout d’abord laisser perplexes, mais c’était sans compter sur l’intelligence d’un scénario qui ne prend pas les spectateurs de haut, sans oublier un montage percutant, une mise en scène au cordeau et l’éminence de ses interprètes.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Miss Sloane, disponible chez EuropaCorp, repose dans un boîtier classique de couleur bleue. Après son passage éclair dans les salles, l’éditeur a préféré miser sur un nouveau visuel, assez sombre, plutôt que de reprendre celui de l’affiche. Le menu principal est sobre, animé et musical.

EuropaCorp joint un petit making of de 11 minutes, classique, composé d’entretiens intéressants avec l’équipe (réalisateur, acteurs, scénariste, producteur), d’images de tournage et des coulisses. Les intervenants s’expriment sur les thèmes et les conditions de prises de vue.

Le deuxième et déjà dernier supplément est un module de 2 minutes constitué d’images de la présentation de Miss Sloane par le réalisateur John Madden et de la comédienne Jessica Chastain (la spécialiste des selfies avec ses fans) à l’UGC Normandie, le 2 mars 2018.

L’Image et le son

Si l’on excepte deux ou trois plans plus doux et des séquences sombres moins définies, la copie HD du film de John Madden se révèle irréprochable. Que l’histoire se déroule en extérieur ou bien dans des bureaux froids et aseptisés, le master restitue brillamment la belle photographie du chef opérateur Sebastian Blenkov (Les Bouchers verts, The Riot Club). Le relief est omniprésent, la colorimétrie est vive, le piqué aiguisé comme une lame de rasoir, la clarté de mise et les contrastes d’une densité indiscutable. Le cadre large est magnifiquement exploité, les détails sont légion et la profondeur de champ impressionnante.

Le film profite à fond de l’apport HD pour en mettre plein les oreilles grâce à deux pistes DTS-HD Master Audio 5.1 spectaculaire. Le score très présent de Max Richter (Valse avec Bachir, Perfect Sense) est délivré par l’ensemble des enceintes, les basses sont sollicitées, tout comme les latérales qui créent un environnement acoustique percutant. Les dialogues sont dynamiques et solidement délivrés par la centrale, jamais noyés par les effets sonores et la musique. L’éditeur joint également une piste Audiosdescription ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant. Les sous-titres français sont imposés sur la version originale et le changement de langue verrouillé à la volée.

Crédits images : © KERRY HAYES / 2016 EUROPACORP – FRANCE 2 CINÉMA – TOUS DROITS RÉSERVÉS / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / La Maison rouge, réalisé par Delmer Daves

LA MAISON ROUGE (The Red House) réalisé par Delmer Daves, disponible en DVD le 11 juillet 2017 chez Rimini Editions

Acteurs : Edward G. Robinson, Lon McCallister, Judith Anderson, Rory Calhoun, Allene Roberts, Julie London, Ona Munson…

Scénario : Delmer Daves d’après le roman de George Agnew Chamberlain

Photographie : Bert Glennon

Musique : Miklós Rózsa

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 1947

LE FILM

Pete vit dans une ferme isolée avec sa sœur Ellen et sa fille adoptive Meg. Les parents de Meg ont disparu il y a quelques années dans des conditions mystérieuses. Il embauche comme aide de ferme Nath, un jeune homme qui tombe bientôt amoureux de Meg. Nath et Meg tentent de savoir quel secret se cache derrière la maison rouge, une demeure enfouie dans la forêt. Mais Pete leur interdit formellement de s’y rendre, en leur expliquant que cette maison est hantée…

La Maison rougeThe Red House (1947) n’est que le cinquième long métrage de Delmer Daves (1904-1977), réalisateur souvent oublié et sous-estimé, qui a pourtant signé de nombreux classiques tels que Les Passagers de la nuit (1947) aka Dark Passage avec Humphrey Bogart, qui est resté célèbre pour son usage de la caméra subjective, La Flèche brisée (1950) le premier western pro-indien, et 3h10 pour Yuma (1957), superbe western adapté d’une nouvelle écrite par l’immense et prolifique écrivain Elmore Leonard parue en mars 1953. Adapté du roman de George Agnew Chamberlain, La Maison rouge demeure méconnu dans la grande filmographie de Delmer Daves qui compte une trentaine de longs métrages réalisés entre 1973 et 1965. Quatre ans après ses débuts derrière la caméra avec Destination Tokyo, Delmer Daves livre un film dramatique teinté de fantastique.

La Maison rouge est une oeuvre à part dans la carrière du réalisateur, même si l’on retrouve ce qui a toujours fait la force de son cinéma, son attachement aux personnages, masculins comme féminins, plutôt que le contexte et le genre, même s’il affectionnait tout particulièrement le western puisqu’il en a réalisé près d’une dizaine. Remarquablement photographié par Bert Glennon (La Chevauchée fantastique, Sur la piste des Mohawks) qui s’inspire de l’expressionnisme allemand, et souligné par la partition toujours inspirée de Miklós Rózsa (L’Espion noir, Le Voleur de Bagdad, Assurance sur la mort), La Maison rouge plonge le spectateur dans une atmosphère trouble. Le malaise s’installe rapidement après une ouverture pourtant lumineuse, qui présente le décor bucolique et quelques jeunes étudiants qui respirent la jeunesse et l’insouciance. Après ce prologue, nous rencontrons alors Pete Morgan, austère et invalide, qui vit dans une ferme située à l’écart de la ville et bordée d’une épaisse forêt, avec sa soeur Ellen (Judith Anderson, la gouvernante Mrs Denvers de Rebecca d’Alfred Hitchcock) et sa fille adoptive Meg dont les parents ont mystérieusement disparu quinze ans auparavant. Pour l’aider dans les tâches quotidiennes, le vieil homme loue les services d’un aide de ferme, Nath Storm (Lon McCallister), camarade de classe de Meg, et le met vivement en garde de ne pas aller fouiner dans les bois situés aux alentours, et surtout pas aux abords de la maison rouge qu’il prétend maudite. Mais la curiosité du jeune homme est trop forte, et accompagné de Meg, il s’aventure dans les bois pour découvrir quel horrible secret entoure cette maison rouge.

La Maison rouge joue avec les genres pour mieux déstabiliser les spectateurs. Ce drame psychologique et angoissant, mais également thriller sentimental et récit d’émancipation (!) traite à la fois du sentiment de culpabilité, de la folie amoureuse et surtout de la perte de la virginité ainsi que de l’éveil sexuel. Qui a peur du Grand Méchant Loup ? Si l’on devine rapidement ce qui s’est déroulé dans cette forêt interdite quinze ans avant, ce lieu est aussi avant tout une métaphore sur le premier rapport sexuel, un chemin que l’on convoite, que l’on redoute, que l’on souhaite franchir malgré les interdits. C’est ainsi que la douce et innocente Meg, superbe et lumineuse Allene Roberts, qui contraste avec la sulfureuse et plantureuse Tibby (Julie London), la copine de Nath, se sent de plus en plus « attirée » par cette étrange maison rouge, comme si elle « en faisait partie ». Elle décide de s’y rendre et désobéit donc pour la première fois à son père adoptif, Edward G. Robinson qui prouve une fois de plus qu’il reste l’un des plus grands acteurs de l’histoire du cinéma, qui de son côté commence sérieusement à perdre les pédales, en appelant Meg par le prénom Jeannie.

Difficile d’évoquer l’histoire plus longuement sans en révéler davantage. Mieux vaut en savoir le moins possible sur La Maison rouge, drame intense et anxiogène magnifiquement réalisé, écrit et interprété, qui rappelle parfois La Féline et Vaudou de Jacques Tourneur, et qui s’avère un véritable trésor caché pour qui s’intéresse – avec raison – au cinéma de Delmer Daves.

LE DVD

Le DVD de La Maison rouge, disponible chez Rimini Editions, repose dans un boîtier classique de couleur noire. La jaquette saura attirer les fans de films noirs et classiques. Le menu principal est élégant, animé et musical.

Juste avant le film, l’historien du cinéma Christophe Champclaux, fidèle à Rimini Editions, nous propose une introduction très rapide (30 secondes) de La Maison rouge en indiquant notamment que Martin Scorsese en rappelait l’existence dans son Voyage avec à travers le cinéma américain (1995). Christophe Champclaux explique également que le négatif original ayant été perdu, ce film méconnu ne circulait que dans une copie fortement dégradée. Celle proposée par Rimini Editions est un nouveau master Haute-Définition entièrement restauré.

Nous retrouvons l’historien pour un retour plus complet sur le film et sur son réalisateur dans un module de sept minutes. Sur quelques bandes-annonces et photographies, Christophe Champclaux propose une rapide mais pertinente analyse de La Maison rouge, en croisant habilement le fond avec la forme.

L’interactivité se clôt sur un montage qui présente l’image avant/après la restauration.

L’Image et le son

La Maison rouge avait bénéficié d’une édition DVD chez Bach Films en 2005. Le master était alors horrible, fait uniquement de scratchs, de rayures, de points et même d’images manquantes avec des sous-titres qui apparaissaient sur un écran noir. Autant dire que Rimini Editions propose une image diamétralement opposée avec ce nouveau master Haute-Définition. On ne s’attendait pas à un rendu aussi lisse pour un film qui fête cette année ses soixante-dix ans. Alors certes, quelques puristes risquent de crier au scandale devant la quasi-absence du grain original mais force est de constater que ce master 1.33 renaît littéralement de ses cendres. La copie est étincelante, stable, les noirs denses côtoient des blancs immaculés et la palette de gris est largement étendue, restituant ainsi les contrastes du directeur de la photographie Bert Glennon, sans la patine argentique malheureusement. La restauration a sans doute été trop poussée, aucune scorie n’a survécu au nettoyage numérique et le piqué est acceptable. Certes, il faut accepter des noirs bouchés et un aspect quelque peu artificiel, mais ce nouveau master surpasse celui de Bach en tout point, sans aucune commune mesure.

L’éditeur ne propose que la version originale de La Maison rouge. Dynamique, nettoyée, homogène et naturelle, sans souffle parasite, cette piste offre un confort acoustique solide et restitue admirablement la musique de Miklós Rózsa et les effets sonores. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Rimini Editions / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / In Hell, réalisé par Ringo Lam

IN HELL réalisé par Ringo Lam, disponible en DVD et Blu-ray le 8 juillet 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Jean-Claude Van Damme, Lawrence Taylor, Marnie Alton, Malakai Davidson, Billy Rieck, Lloyd Battista, Carlos Gómez, Manol Manolov, Chris Moir

Scénario : Eric James Virgets, Jorge Alvarez

Photographie : John B. Aronson

Musique : Alexander Bubenheim

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2003

LE FILM

Kyle LeBlanc est un travailleur américain émigré en Russie. Après un coup de téléphone de sa femme, visiblement agressée, il se précipite chez lui, mais arrive trop tard. La loi niant l’évidence, il décide de se faire justice lui-même, et tue le meurtrier de sa femme. Il est alors envoyé dans une des plus dures prisons de Russie. La seule occupation des détenus est l’organisation de combats…

Ceux qui prétendent que Jean-Claude Van Damme n’est pas un bon comédien, n’ont sûrement pas vu les bons films. Et dans la filmographie de l’acteur belge il y a surtout un réalisateur qui a su tirer le maximum des capacités de JCVD, Ringo Lam. Né à Hong Kong, mais ayant fait ses études de cinéma à l’Université York à Toronto, le cinéaste aura tourné trois films avec Jean-Claude Van Damme, Risque maximum (1996), Replicant (2001) et In Hell (2003). Trois films prisés par les fans du comédien. Pourtant, si les deux premiers restent très célèbres, la troisième et à ce jour dernière association JCVD/Ringo Lam est tout aussi réussie et s’avère même un des meilleurs films de Van Damme des années 2000. Contrairement aux deux précédents, In Hell n’a pas bénéficié d’une sortie dans les salles françaises et a débarqué directement dans les bacs en 2004.

Dans la prison la plus corrompue et impitoyable de toute l’Europe de l’est, les prisonniers se battent les uns contre les autres lors de combats très violents organisés par le directeur et ses gardes. Kyle LeBlanc, condamné depuis peu pour avoir tué l’assassin de sa femme, devient, dans l’enceinte de la prison, un sauvage assoiffé de sang, une bête de combats déshumanisée. In Hell contient évidemment son lot de bastons, extrêmement brutales et chorégraphiées par David Leitch. Célèbre cascadeur et coordinateur, ce dernier a participé à la création des combats de Fight Club, de Matrix Reloaded / Matrix Revolutions, de 300, de La Vengeance dans la peau, tout en assistant le réalisateur ou même en dirigeant la seconde équipe sur Le Flingueur de Simon West, Wolverine : Le Combat de l’immortel de James Mangold, ou bien encore Captain America: Civil War d’Anthony et Joe Russo. Dernièrement, il était le coréalisateur du chef d’oeuvre John Wick, aux côtés de Chad Stahelski. Dans In Hell, ses chorégraphies sèches, réalistes, percutantes et ultra-violentes participent à la grande réussite du film, mais pas seulement.

JCVD signe une de ses meilleures prestations. En Russie, Kyle LeBlanc, un franco-américain expatrié voit sa femme violée et assassinée. L’assassin est arrêté, jugé, mais de bonne famille et le juge ayant été soudoyé, l’homme est acquitté. En sortant du tribunal, LeBlanc sort une arme et descend le meurtrier. La suite est racontée un peu plus haut. Jean-Claude Van Damme ne joue pas avec ses muscles dans le film de Ringo Lam, il s’en prend d’ailleurs plein la tronche à plusieurs reprises. In Hell est bien plus un drame qu’un véritable film d’action. Il n’est donc pas étonnant que certains aient pu être déroutés par la tournure que prend le film, puisque Van Damme, s’il joue effectivement des poings (mais jamais des pieds) dans la deuxième partie du film, passe la première à observer, le regard usé d’un homme abattu, la démarche lente et les épaules voutées. Il est absolument formidable, brillant, épatant du début à la fin, d’une sobriété exemplaire. Les séquences où son personnage se retrouve seul dans son cachot dégueulasse où l’eau des chiottes coule à côté de lui, sont incroyables, puisque le réalisateur crée de vrais instants poétiques et émouvants, comme lorsque Kyle retrouve la force de vivre grâce à un papillon de nuit.

De son côté, Ringo Lam instaure un climat oppressant, étouffant et sa prison glauque et paumée au milieu de nulle part en Russie – très bon décor – fait vraiment son effet. Certes, le film n’évite pas certains écueils liés au film de prison, comme le jeune prisonnier qui sert de chair fraîche aux plus déments, mais In Hell parvient sans mal à contourner les clichés grâce à un scénario très intelligent, une solide direction d’acteurs et une mise en scène toujours inspirée. Ainsi, aux côtés de JCVD, se démarque Lawrence Taylor, ancien joueur de football américain, 1m91, qui en impose dans le rôle du détenu 451. Présenté comme une bête féroce, qui arrache la langue de ses co-détenus à l’aide d’une pince, sous prétexte qu’ils sont trop bavards et qu’ils perturbent sa concentration pendant qu’il lit des ouvrages de philosophie, 451 se dévoile au fur et à mesure du film jusqu’à devenir un des personnages principaux, au même titre que JCVD.

In Hell n’est donc pas un remake de Coups pour Coups (Death Warrant) comme on pouvait le penser au départ, mais un film d’action divertissant, un thriller sombre et tendu, mais aussi un vrai drame qui démontre comment les conditions d’incarcération peuvent déshumaniser les êtres humains. In Hell est un des plus grands films avec Jean-Claude Van Damme, au même titre que Replicant.

LE BLU-RAY

In Hell fait partie d’un combo Blu-ray spécial Van Damme / Ringo Lam, aux côtés de l’édition HD de Replicant, qui sera chroniqué dans un second temps. A l’instar des éditions combo Black Eagle – L’arme absolue + Full Contact et The Order + Le Grand tournoi sorties en 2016, et comme celle récemment consacrée au cinéaste Albert Pyun, Mean Guns + Nemesis, Metropolian Video fait ainsi le bonheur des fans de la star belge. Le test a été réalisé à partir d’un check-disc. Une fois le disque inséré, le spectateur est invité à sélectionner le film de son choix. Dans les deux cas, le menu principal est fixe et muet, minimaliste, sans chapitrage. Seuls l’envoi du film, la sélection de la langue et le choix des suppléments sont proposés.

L’historien du cinéma et expert en cinéma d’arts martiaux, sujet auquel il a consacré quelques ouvrages, l’excellent Christophe Champclaux présente In Hell en avant-programme (3’). S’il déclare que le scénario n’est sans doute pas aussi original ou travaillé que celui de Replicant, Christophe Champclaux ne tarit pas d’éloges sur In Hell, « un film formidable, très bien écrit et à la brutalité inouïe ». Notre interlocuteur donne quelques informations intéressantes sur la production du film qui nous intéresse, notamment en ce qui concerne la chorégraphie des combats et la mise en scène de Ringo Lam.

S’ensuit un making of d’époque (16’), mal réalisé, marqué par une musique irritante et constante. Heureusement, quelques propos des comédiens sur les personnages, du coordinateur des cascades et des combats, du producteur sur les conditions de tournage et du directeur de la photographie sur la photogénie de Jean-Claude Van Damme, sans oublier des images du plateau et de la conception des effets visuels (le papillon de nuit) donnent un véritable intérêt à ce module promotionnel dans lequel JCVD indique que « ce film va cartonner et devenir culte […] ce sera mon meilleur film ».

L’Image et le son

Malgré un léger manque de concision sur certains plans, le master HD de In Hell (1080p, AVC) dépasse toutes les espérances. Les contrastes sont denses et très beaux, les ambiances nocturnes soignées, les teintes froides excellemment restituées, sans oublier les séquences en extérieur lumineuses. La propreté est évidente, les détails précis et riches, la colorimétrie respecte les partis pris esthétiques originaux, tout comme le léger grain heureusement conservé lors du transfert, mais plus appuyé sur les scènes sombres, qui entraînent un léger bruit vidéo. Enfin, n’oublions pas la profondeur de champ toujours appréciable, un relief omniprésent sur les séquences diurnes (aiguisées) ainsi qu’un piqué acéré.

In Hell bénéficie de pistes anglaise et française DTS-HD Master Audio 5.1. Dans les deux cas, la spatialisation s’avère agréable, les enceintes latérales délivrent un lot fort appréciable d’ambiances naturelles (l’orage en début de film), d’effets palpables, sans oublier la musique en soutien. Les bruitages lors des combats sont exsudés avec force par la centrale, la balance frontales-latérales est intelligemment équilibrée, l’ensemble est toujours dynamique et les basses interviennent à bon escient avec quelques pics remarquables. Dans les deux cas, aucun souffle n’est à déplorer, l’écoute demeure franche, puissante et limpide.

Crédits images : © Millenium / Metropolitan Filmexport / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / A la recherche du plaisir, réalisé par Silvio Amadio

A LA RECHERCHE DU PLAISIR (Alla ricerca del piacere) réalisé par Silvio Amadio, disponible en Édition Collector limité (1000ex) Blu-ray + DVD + CD le 15 juin 2017 chez Le Chat qui fume

Acteurs : Barbara Bouchet, Farley Granger, Rosalba Neri, Nino Segurini, Dino Mele, Umberto Raho, Patrizia Viotti

Scénario : Silvio Amadio

Photographie : Aldo Giordani

Musique : Teo Usuelli

Durée : 1h40

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Greta Franklin s’établit sur une île près de Venise et entre en contact avec Richard Stuart, qui vit dans une magnifique maison en compagnie de son épouse Elonora. Elle est engagée comme nouvelle secrétaire par Richard, la précédente ayant disparu dans d’étranges circonstances. Richard et Eleonora ignorent que Greta a une bonne raison d’accepter ce job : elle connaissait personnellement Sally…

L’oeuvre éclectique du réalisateur italien Silvio Amadio (1926-1995) n’est pas restée dans la mémoire des cinéphiles. Il faut dire que ses derniers films aux titres fleuris et explicites comme Comment faire cocu les maris jaloux, Les Polissonnes excitées, Si douce, si perverse ou bien encore La Lycéenne a grandi ont souvent éclipsé d’autres opus nettement plus intéressants. C’est le cas d’A la recherche du plaisir Alla ricerca del piacere (1972), également connu sous le titre américain Amuck ! ou bien encore Maniac Mansion, superbe variation du giallo, qui s’avère avant tout un drame-thriller psychologique et érotique brillant et passionnant. La sublime Barbara Bouchet, au sommet de sa carrière (la même année que La Longue nuit de l’exorcisme de Lucio Fulci) et de sa beauté, qui enchaînait alors les tournages en Italie depuis la fin des années 1960, porte le film sur ses belles épaules – et quelle chute de reins mamma mia ! – et inspire Silvio Amadio.

Greta Franklin (Barbara Bouchet) part en Italie suite à son embauche comme secrétaire auprès de l’écrivain notoire Richard Stuart (Farley Granger), qui possède un vaste domaine isolé sur une île aux alentours de Venise. Mais son but premier est de retrouver Sally, son amie, son amante, disparue alors qu’elle occupait le même poste. Eleonora (Rosalba Neri), la femme de Stuart, bisexuelle, lui fait bientôt des avances, puis la drogue pour assouvir ses désirs. Lors d’une soirée décadente, Stuart diffuse un petit film amateur dans lequel Greta reconnaît Sally. Décidée à enquêter sur ce couple sulfureux, elle ne s’aperçoit pas qu’elle tombe dans le piège qu’il lui tend. Un piège dangereux, peut-être même mortel.

A la recherche du plaisir n’est pas un énième film de genre, bâclé et réalisé à la va-vite. Certes, nous sommes en plein cinéma d’exploitation, mais Silvio Amadio soigne chaque plan, instaure une atmosphère trouble et troublante du début à la fin, pour ne pas dire jusqu’à la toute dernière seconde. Dès le générique, le cinéaste transporte le spectateur à Venise, avec Barbara Bouchet qui découvre la ville. Puis, le personnage s’en éloigne pour finalement débarquer sur une petite île près de la Sérénissime, dans une grande demeure. En quelques minutes, le réalisateur a donc dressé le tableau et isole cette jeune secrétaire. A la recherche du plaisir s’avère un véritable jeu de pistes, reposant sur la mise en scène (toute l’investigation de Greta est vraiment une référence), l’étrangeté et la beauté des décors, sans oublier la peur distillée par celles et ceux qui gravitent autour de Greta.

Découvert chez Alfred Hitchcock dans La Corde (1948) et L’Inconnu du Nord-Express (1951), premier rôle chez Luchino Visconti dans Senso en 1954, Farley Granger sort de quinze ans d’apparitions à la télévision, avant d’être à nouveau appelé par le cinéma italien au début des années 1970. Il apporte à Amuck ! son charme venimeux, suintant et semble se délecter de ce personnage ambigu et machiavélique. N’oublions pas la sensuelle Rosalba Neri (La Polak dans la saga Angélique, Lady Frankenstein, cette obsédée sexuelle, Les Vierges de la pleine Lune) et son regard troublant, peu avare de ses charmes, dont la scène saphique avec Barbara Bouchet, tournée au ralenti sur une musique envoûtante de Teo Usuelli (Le Lit conjugal, Dilinger est mort) reste probablement la plus célèbre du film.

A la recherche du plaisir combine de façon assez virtuose le film d’enquête et l’histoire d’amour, en jouant avec les codes du giallo sans pour autant entrer dans cette catégorie puisqu’il n’y a ici aucun tueur ganté, ni crime à l’arme blanche réalisé en caméra subjective, juste une brute épaisse au cerveau en compote qui utilise ses mains pendant une partie de jambes en l’air qui tourne mal. Ce qui n’empêche pas A la recherche du plaisir d’être une immense réussite, anxiogène, culte auprès des amateurs, aussi rare que précieux, d’autant plus que le film n’est jamais sorti en France.

LE BLU-RAY

Que dire si ce n’est que Le Chat qui fume nous offre une nouvelle fois un magnifique objet qui devrait intégrer la DVD-Bluraythèque de tout cinéphile qui se respecte ! Le combo Digipack à trois volets de ce nouveau titre « Exploitation italienne », renferme à la fois le DVD du film, le Blu-ray et également le CD de la bande originale de Teo Usuelli, que l’auteur de ces mots écoute d’ailleurs en fond pendant qu’il écrit cette chronique. Sur le verso des volets, nous trouvons l’affiche américaine du film (Amuck !), ainsi que deux visuels provenant de l’exploitation italienne. L’ensemble se glisse dans un fourreau cartonné du plus bel effet, au visuel superbe, jaune « giallo » et attractif. Cette édition collector est limitée à 1000 exemplaires. Le menu principal est élégant, animé et musical.

Après avoir écouté ces 52 minutes de musique enivrante, regardons ce que le Chat nous propose en guise de suppléments.

On commence par l’excellente interview de la comédienne Rosalba Neri (16’). Visiblement heureuse et émue de partager ses souvenirs liés à A la recherche du plaisir, l’actrice évoque le tournage à Venise et dans ses environs, y compris dans la villa de la styliste Roberta di Camerino. Rosalba Neri en vient ensuite à sa collaboration avec le réalisateur Silvio Amadio, « un homme et cinéaste très dur, qui inspirait la crainte », parle de son personnage et de ses partenaires, sans oublier les conditions des prises de vues de la célèbre séquence saphique avec Barbara Bouchet.

Cette dernière prend ensuite la parole dans un entretien (19′) plus détaché que celui de Rosalba Neri, comme si la comédienne gardait un souvenir amer de « jouer à peu près toujours le même personnage » et qu’elle voulait être mieux considérée que pour sa participation aux films d’exploitation. En italien, la comédienne indique que l’année 1972 fut pourtant la plus intense de sa carrière – « Souvent, je ne savais même pas dans quel film j’étais en train de jouer ! » – avec plus de 8 films tournés quasi-simultanément. Barbara Bouchet ne parvient pas à réaliser que « ce genre de film » ait pu traverser les décennies et déclare que c’est à Quentin Tarantino – qui avait voulu la rencontrer lors de sa venue au Festival de Venise – que l’on doit entre autres ce regain de popularité. Contrairement à sa partenaire, l’actrice décrit Silvio Amadio comme un homme assez calme et doux, qui ne s’agitait jamais, toujours très gentil et aimable, dont elle garde un très bon souvenir. Barbara Bouchet parle ensuite du travail du réalisateur, du tournage à Venise et des scènes érotiques, de ses partenaires.

Nous passons à l’entretien avec Stefano Amadio (22’), fils du réalisateur Silvio Amadio, qui propose un portrait de son père et un panorama de sa carrière. Son enfance, ses débuts dans le cinéma grâce à son beau-frère Massimo Girotti et à Luchino Visconti, ses premières mises en scène, ses succès et les genres abordés (péplum, western, policier, comédie) sont évoqués. Puis Stefano Amadio aborde A la recherche du plaisir à travers des anecdotes amusantes (celle sur Barbara Bouchet nue sur le plateau, devant le regard médusé des techniciens) et souvenirs divers. Quand on lui demande quelle empreinte  a laissé son père dans le cinéma italien, Stefano Amadio répond « une petite empreinte, mais son sérieux et son professionnalisme demeurent auprès de ceux qui ont travaillé avec lui ».

Le supplément qui suit donne la parole à l’excellent Philippe Chouvel, journaliste chez Psychovision, qui propose une présentation d’A la recherche du plaisir (« pas un des meilleurs gialli, mais un thriller de bonne facture qui possède de nombreuses qualités »), tout en revenant sur l’ensemble de la carrière de Silvio Amadio (24’). Ce bonus complète parfaitement ce qui a déjà été entendu précédemment et propose de nombreux éléments pertinents, d’autant plus que l’énumération des films du cinéaste (dont les quatre comédies grivoises avec Gloria Guida) donne sérieusement envie de redécouvrir cette oeuvre. Philippe Chouvel s’extasie – on le comprend – sur la scène saphique entre Barbara Bouchet et Rosalba Neri et se dit ravi que le film soit enfin disponible dans les meilleures conditions possibles.

Le dernier bonus de cette section est désormais le rendez-vous incontournable où l’éditeur demande à un invité de donner ses trois gialli préférés. C’est au tour du directeur de la Cinémathèque Jean-François Rauger de s’y coller (12’), d’expliquer sa vision du giallo et de parler de l’évolution du genre. L’intéressé donne plus que trois titres, à savoir Les Frissons de l’angoisseProfondo Rosso de Dario Argento (dont il défend la version courte), Six femmes pour l’assassinSei donne per l’assassino, Cinq filles dans une nuit chaude d’été5 bambole per la luna d’agosto et La Baie sanglanteReazione a catena de Mario Bava, L’Emmurée vivanteSette note in nero de Lucio Fulci, Les Rendez-vous de SatanPerché quelle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer ? de Giuliano Carnimeo.

L’interactivité se clôt sur un lot de bandes-annonces de films disponibles ou prochainement prévus chez Le Chat qui fume. Par ailleurs, le trailer d’A la recherche du plaisir vaut le coup d’oeil pour son (faux ?) micro-trottoir de spectateurs (« Ceux qui ont fait ce film devraient être arrêtés ! », « Je n’ai jamais vu autant de sexe et de nudité dans un film ! ») réalisé après une projection du film de Silvio Amadio. Certains jubilent, d’autres sont choqués. La bande-annonce insiste bien sur le caractère sexuel du film pour appâter, tandis qu’une voix annonce que des coupes ont dû être faites (malgré un aperçu de la scène saphique), mais que le film sera bien présenté dans sa version intégrale dans les salles. « Un film si réaliste et troublant, que vous aurez envie de quitter la salle, mais vous n’en serez pas capable ! ».

L’Image et le son

L’élévation HD (1080p) magnifie les partis pris esthétiques de la photographie signée Aldo Giordani, chef opérateur culte à qui l’on doit les images de On l’appelle Trinita et de sa suite, ou bien encore Dommage que tu sois une canaille et Moi, moi, moi et les autres d’Alessandro Blasetti. La photo éthérée d’A la recherche du plaisir baigne dans des teintes brunes du plus bel effet. Le piqué dépend des volontés artistiques originales et s’avère plus incisif sur toutes les lumineuses séquences tournées en extérieur. La copie est très propre, la restauration est superbe, aucune poussière n’est à signaler, les contrastes sont concis, les noirs souvent denses, les couleurs éclatantes. La gestion du grain original est équilibrée mais tend à être plus appuyé sur les scènes sombres et nocturnes. Mais le codec AVC consolide l’ensemble avec brio, les arrière-plans sont stables, la profondeur de champ est indéniable et les détails d’une richesse incontestée sur le magnifique cadre large. Un très beau Blu-ray qui permet de (re)découvrir totalement le film, présenté en version intégrale, de Silvio Amadio !

Comme pour l’image, le son a également été restauré. Résultat : aucun souci acoustique constaté sur ce mixage italien DTS-HD Master Audio Mono, pas même un souffle parasite. Le confort phonique de cette piste unique est total, les dialogues sont clairs et nets, même si les voix des comédiens, enregistrées en postsynchronisation, peuvent parfois saturer ou apparaître en très léger décalage avec le mouvement des lèvres. La composition de Teo Usuelli est excellemment délivrée. Notons que les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Le Chat qui fume / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Tuez Charley Varrick !, réalisé par Don Siegel

TUEZ CHARLEY VARRICK ! (Charley Varrick) réalisé par Don Siegel, disponible en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre le 28 juin 2017 chez Wild Sild Vidéo.

Acteurs : Walter Matthau, Joe Don Baker, Felicia Farr, Andrew Robinson, Sheree North, Norman Fell, Jacqueline Scott

Scénario : Howard Rodman, Dean Riesner d’après le roman de John Reese, Les Pillards (The Looters)

Photographie : Michael C. Butler

Musique : Lalo Schifrin

Durée : 1h50

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

Au Nouveau Mexique. Charley Varrick, sa femme et deux complices braquent une petite banque locale. Le hold-up tourne mal et des coups de feu sont échangés entre les bandits et la police. Réalisant qu’ils ont dérobé une somme colossale, disproportionnée par rapport à la modestie de l’établissement, Charley Varrick soupçonne aussitôt l’argent d’appartenir à la mafia…

C’est un film qui n’avait pas fait grand bruit à sa sortie en 1973 et qui est aujourd’hui devenu très prisé par les cinéphiles. Tuez Charley Varrick !Charley Varrick en version originale et un temps envisagé sous le titre The Last of the Independents, renvoyant au slogan de l’entreprise du personnage principal (et finalement utilisé comme tagline de l’affiche principale), est réalisé par Don Siegel (1912-1991) après le triomphe international de L’Inspecteur Harry. Polar violent, drôle et émouvant, Tuez Charley Varrick ! offre à Walter Matthau un de ses rôles emblématiques, même si très éloigné des comédies qui ont fait sa renommée aux côtés de son comparse Jack Lemmon. Loin d’être un contre-emploi puisque l’acteur avait déjà participé à quelques drames et films sombres, le personnage de Charley Varrick n’est pas immédiatement attachant, mais la bonhommie naturelle et le visage buriné de Walter Matthau emportent l’adhésion par petites touches.

Antihéros comme les affectionnait Don Siegel, Charley Varrick n’est qu’un bonhomme dans la foule qui a décidé d’en venir au braquage pour s’en sortir. Ancien cascadeur de métier avec sa femme Nadine, devenu un modeste chef d’entreprise d’épandage d’insecticides, il décide d’attaquer une petite banque au Nouveau-Mexique avec l’aide de plusieurs complices, dont Harman, un jeune homme nerveux et porté sur la bouteille. Mais l’opération tourne au désastre : Nadine est tuée, ainsi qu’un autre de la bande. Les rescapés prennent la fuite. A leur grande surprise, Charley et Harman découvrent que le magot empoché va bien au-delà des quelques milliers de dollars envisagés. Le total se porte à 750.000 dollars, en réalité dérobés à la pègre qui utilisait la banque comme tirelire. L’organisation criminelle lance à leurs trousses une impitoyable brute, Molly. Pour sauver sa peau, Varrick se met en tête de restituer l’argent, ce qui ne plaît évidemment pas à Harman.

Tuez Charley Varrick ! est une course contre la montre menée à cent à l’heure, du moins dans sa première partie, véritable leçon de mise en scène, de montage, de cadrage et de rythme. Du générique, superbe, estampillé « A Siegel Film », montrant la petite vie qui s’anime à l’aube, dans une petite bourgade, en passant à l’introduction des personnages, la tension qui monte, le braquage, la poursuite, l’adieu à Nadine, les spectateurs en prennent plein les yeux. Après, Tuez Charley Varrick ! adopte un rythme plus apaisé, malgré une tension maintenue. Sous ses airs patauds, taiseux et détachés, la bouche ruminant sans cesse un chewing-gum, Varrick renferme une volonté de s’en sortir et s’avère même un froid calculateur, n’hésitant pas à se servir de son dernier acolyte comme appât (excellent Andrew Robinson, le mythique Scorpio de L’Inspecteur Harry), afin d’attirer le mercenaire Molly, campé par un Joe Don Baker (Luke la main froide, Demain ne meurt jamais) complètement allumé, vicieux et glaçant, avec sa pipe vissée à la bouche et le stetson sur la tête. Tuez Charley Varrick ! prend ensuite la forme d’une succession de rencontres, donnant au film un aspect documentaire de la vie rurale. Chaque personne vers qui se tourne Charley Varrick, s’avère ambitieuse, attirée par le fric, prête à dénoncer s’il y a quelques dollars à se faire. C’est le cas du vieil armurier handicapé ou encore de la photographe sexy qui fabrique à l’occasion des faux papiers. Pris au dépourvu par le magot emporté, Charley Varrick va être obligé d’improviser. C’est là le génie de Don Siegel d’avoir confié le rôle à Walter Matthau, dont la trogne ne laisse rien passer en apparence, mais dont on ne doute jamais du bouillonnement intérieur.

En fait, Don Siegel parvient à faire perdre ses repères aux spectateurs en adoptant un rythme plus posé, tout en renforçant la menace qui pèse sur Varrick et son complice avec le personnage de Molly qui se rapproche petit à petit de leur caravane, grâce aux appels passés à la mafia par ceux qui ont croisés la route du braqueur. On ne comprend pas ce que Varrick prépare ou même s’il possède une porte de sortie. Il faut pour cela attendre le dernier acte hallucinant de la poursuite entre une voiture et un biplan pulvérisateur dans le décor d’une casse de bagnoles. Don Siegel agrippe alors le spectateur et parvient à renverser la vapeur en découpant son film de façon plus brutale, tandis que la partition de l’immense Lalo Schifrin s’emballe et se décompose même en deux temps. Jusqu’au dénouement complètement inattendu et qui boucle la boucle en se terminant sur la même image qui ouvrait alors le film, tandis que le dernier des indépendants perd définitivement son identité pour pouvoir survivre. Chaque élément du scénario, du plan de Varrick donc, était à sa place.

Rollercoaster cinématographique et Rolls-Royce de la série B, souvent cachée dans l’ombre de L’Inspecteur Harry, Tuez Charley Varrick ! est une œuvre riche, captivante et intelligente, qu’on a beau connaître par coeur, mais qu’on a de cesse de redécouvrir avec toujours autant de plaisir.

LE BLU-RAY

Le test a été réalisé sur un check-disc. Cette édition de Tuez Charley Varrick ! se compose du Blu-ray et du DVD du film, ainsi que d’un livre exclusif de 180 pages, spécialement écrit par Doug Headline (co-fondateur de la revue Starfix), illustré de photos d’archives rares. Le menu principal est animé et musical.

Pour accompagner le film, l’éditeur propose un formidable documentaire rétrospectif intitulé Le Dernier des indépendants (2014, 72’), qui croise les interventions du compositeur Lalo Schifrin, Kristoffer Tabori (fils de Don Siegel), Howard A. Rodman (fils du coscénariste Howard Rodman), des comédiens Andrew Robinson (Harman) et Jacqueline Scott (Nadine), ainsi que du cascadeur Craig R. Baxley. Ces témoignages passionnants permettent d’en savoir évidemment plus sur les conditions de tournage et de production de Tuez Charley Varrick !, mais aussi sur la méthode de Don Siegel. Un portrait franc et nuancé du cinéaste se dessine tout au long de ces 72 minutes, bien illustré par quelques photos de plateau et portraits. Chaque intervenant s’exprime sur leur collaboration avec Don Siegel et Walter Matthau, la mise en scène, les thèmes du film, et bien d’autres éléments qui devraient ravir les cinéphiles.

Que ceux qui possèdent l’ancienne (et très bonne) édition DVD sortie chez Bac Films la conservent, puisque nous ne retrouvons pas l’excellente analyse du film par le regretté Alain Corneau sur ce Blu-ray.

L’Image et le son

Ce nouveau master restauré HD de Tuez Charley Varrick ! brille souvent de mille feux et s’impose comme une grande réussite technique à ajouter au palmarès de l’éditeur. Le cadre offre une profondeur de champ très plaisante, le piqué est acéré, la stabilité jamais démentie, les contrastes soignés. Si les noirs manquent parfois de stabilité et la définition vacille quelque peu sur les séquences sombres, la colorimétrie retrouve un éclat et une chaleur bienvenus sur les scènes diurnes. Les gros plans sont souvent épatants (les traits creusés de Walter Matthau entre autres), les détails abondent et la gestion du grain est épatante. C’est beau, c’est carré, c’est élégant.

Les mixages anglais et français DTS-HD Master Audio 2.0 Surround sont propres et distillent parfaitement la musique de Lalo Schifrin. La piste anglaise (avec les sous-titres français imposés) est la plus équilibrée du lot avec une homogénéité entre les dialogues et les bruitages. Au jeu des différences, la version française s’avère plus chuintante et couverte, avec certaines ambiances et d’autres effets annexes qui peinent à se faire entendre quand on compare avec la piste anglaise. Le changement de langue est impossible à la volée et nécessite le retour au menu contextuel.

Crédits images : © Wild Side / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / John Wick 2, réalisé par Chad Stahelski

JOHN WICK 2 (John Wick : Chapter 2) réalisé par Chad Stahelski, disponible en DVD et Blu-ray le 22 juin 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Keanu Reeves, Common, Laurence Fishburne, Riccardo Scamarcio, John Leguizamo, Franco Nero, Ruby Rose, Bridget Moynahan, Ian McShane, Peter Stormare, Claudia Gerini

Scénario : Derek Kolstad

Photographie : Dan Laustsen

Musique : Tyler Bates, Joel J. Richard

Durée : 2h03

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

John Wick est forcé de sortir de sa retraite volontaire par un de ses ex-associés qui cherche à prendre le contrôle d’une mystérieuse confrérie de tueurs internationaux. Parce qu’il est lié à cet homme par un serment, John se rend à Rome, où il va devoir affronter certains des tueurs les plus dangereux du monde.

John Wick premier du nom, avait créé la surprise en 2014. Tourné pour un budget de 20 millions de dollars, le film, parfaite synthèse du cinéma, du roman-graphique et du jeu vidéo, en rapporte 106 millions dans le monde et attire même plus de 400.000 spectateurs dans les salles françaises. Galvanisés par ce succès, Keanu Reeves et le réalisateur Chad Stahelski remettent le couvert trois ans après pour une suite démentielle, encore plus fun, encore mieux réalisée, encore plus « tout ». Si deux ans se sont écoulés entre les deux tournages, l’intrigue de ce second opus, ou « chapitre deux » comme l’indique le titre original, reprend là où le premier s’était arrêté, après l’implacable vengeance de l’ancien tueur à gages contre les mafieux russes qui avaient tué son chien et volé sa voiture.

John Wick compte profiter de sa retraite. Mais il est contacté par Santino D’Antonio, un gangster italien qui a besoin de ses services. Il souhaite prendre la place de sa soeur dans son organisation mafieuse. Wick est obligé d’accepter en raison d’une dette importante envers D’Antonio. A Rome, il approche Gianna, la soeur de Santino, dans une boîte de nuit. Se sentant prise au piège, la jeune femme préfère se suicider plutôt qu’être abattue. Mais Cassian, son garde du corps, jure alors de la venger.

Toutes les qualités professionnelles de l’ancien assassin explosent littéralement dans ce deuxième épisode, comme si le premier, pourtant très généreux, n’avait été qu’une mise en bouche. Parallèlement aux fusillades, bastons, règlements de comptes en tous genres et poursuites à pied ou en voiture, le metteur en scène, le comédien principal et le scénariste Derek Kolstad créent une vraie mythologie à partir de ce qui avait été annoncé dans le premier. Le monde souterrain de John Wick s’étend, prend une ampleur inespérée, répondant à tous les fantasmes et espoirs des fans, suite à l’excellent bouche-à-oreille qui a largement contribué au succès critique et commercial du premier chapitre.

Ancien cascadeur et coordinateur, assistant réalisateur, Chad Stahelski commence sa carrière en doublant Brandon Lee après l’accident qui a coûté la vie au jeune comédien sur le tournage de The Crow. Après avoir oeuvré sur Los Angeles 2013, Alien, la résurrection, il fait la rencontre de Keanu Reeves en 1999 sur Matrix, où il officie comme doublure officielle de la star. Ils se retrouveront sur les deux autres volets de la trilogie. Ce triomphe international fait de Chad Stahelski un des cascadeurs les plus demandés par Hollywood (Van Helsing, Spider-Man 2, 300, Die Hard 4: Retour en enfer, les deux premiers Expendables) jusqu’à ce qu’il décide de passer lui-même derrière la caméra pour John Wick, avec l’aide de David Leitch, co-réalisateur non crédité. Le succès ayant été au rendez-vous, la suite de John Wick est lancée en même temps qu’une trilogie est annoncée. Chad Stahelski se retrouve cette fois seul aux commandes.

John Wick 2 est un vrai torrent d’action et de violence chorégraphiée, ponctué par un humour noir percutant. Du point de vue visuel, le film est absolument remarquable. La photographie stylisée de Dan Laustsen (Silent Hill, Crimson Peak) ainsi que la mise en scène virtuose et le montage toujours lisible, subjuguent et mettent en valeur chaque affrontement, tout comme le soin apporté aux décors et aux costumes. Keanu Reeves assure le show. Spectaculaire, très investi, charismatique, il trouve à plus de cinquante ans un des rôles qui marqueront sa carrière, au même titre que celui de Neo dans la trilogie Matrix. Par ailleurs, John Wick 2 joue avec le spectre des films des Wachowski, dans la rigueur des combats, mais aussi dans son atmosphère et ses partis pris. On a même souvent l’impression que les personnages s’avèrent reliés à une matrice. Le lien méta se fait encore plus évident avec l’apparition de Laurence Fishburne, dans un rôle pas si éloigné de celui de Morpheus qu’il tenait dans la trilogie. N’oublions pas la participation de Riccardo Scamarcio (classe et venimeux), Ian McShane (impérial), l’incroyable Ruby Rose, Common, John Leguizamo et même Franco « Django » Nero qui complètent ce casting idéal. Les fans apprécieront.

D’une suprême élégance, John Wick 2 – qui a plus que doublé le score du premier au box-office américain – repousse donc toutes les limites et peut se targuer d’être une des meilleures suites jamais proposées au cinéma. C’est peu dire que nous attendons le troisième avec impatience, surtout après ce que le fascinant et ambitieux épilogue met en place.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de John Wick 2, disponible chez Metropolitan Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est dynamique, animé et musical.

Attention, grande édition ! Assurément l’un des Blu-ray de l’année pour Metropolitan. Voilà ce que réserve la section des suppléments.

On commence par un commentaire audio en version originale sous-titrée en français de Chad Stahelski et de Keanu Reeves. Les deux complices ne sont pas avares en anecdotes, s’avèrent à l’aise dans l’exercice et parviennent à maintenir l’intérêt pendant les 123 minutes du long métrage. Le comédien relance sans arrêt le réalisateur sur la fabrication de telle ou telle scène, le casting est passé au peigne fin, tout comme la préparation des acteurs, le tournage des cascades, les répétitions, sans oublier l’écriture du scénario, les éléments apportés pour ce second volet et les bases posées pour le troisième. Tous les sujets abordés durant ce commentaire sont illustrés en images dans les bonus suivants, mais ne manquez pas ce moment très sympa.

L’éditeur présente ensuite près d’1h15 de featurettes promotionnelles, de scènes coupées et même une bande-annonce parodique.

Les séquences laissées sur le banc de montage (8’), montées mais non mixées, montrent l’introduction originale de Santino D’Antonio (Riccardo Scamarcio), qui vient tout d’abord s’en prendre de manière violente à Aurelio (John Leguizamo) avec ses sbires, pour savoir où se trouve la voiture de John Wick. Une autre scène se focalise sur D’Antonio, prenant un peu trop ses aises à l’hôtel Continental devant un Winston (Ian McShane) outré. La dernière séquence montre John Wick qui se présente face à un cardinal.

Les modules suivants, Retro Wick : le succès surprise de John Wick (4 min 30), L’entraînement (12’), Prévisualisations des scènes d’action (5’), Keanu & Chad (10’), Le monde souterrain (5’), En voiture ! (5’), La conception d’une scène (10’), Les outils de John (8’) dissèquent chaque scène d’action à travers de très nombreuses images de Keanu Reeves à l’entraînement, des répétitions, de tournage, le tout largement commenté par les comédiens, le réalisateur, les responsables des cascades, des producteurs, et de tout ce petit monde visiblement heureux de faire partie du projet.

Ces segments insistent sur la performance physique de Keanu Reeves. L’acteur est montré pendant ses semaines d’immersion auprès des frères Machado qui lui ont enseigné leur forme de jiu-jitsu brésilien. On y voit Keanu Reeves, déjà rompu à de nombreux styles d’arts martiaux, transpirant à grosses gouttes dans son kimono, mais toujours le sourire aux lèvres avec une visible soif d’apprendre et de se perfectionner. Sa formation intensive, y compris le maniement des armes – à balles réelles – auprès de Taran Butler, véritable tireur d’élite, aura duré 5 mois à raison de cinq heures par jour. Très impressionnant.

Le tournage à Rome au sein des Thermes de Caracalla, l’engouement suscité par le premier volet, l’investissement des comédiens, les armes du personnage, les costumes et bien d’autres éléments sont abordés au fil de ces suppléments absolument passionnants.

L’interactivité se clôt sur un montage compilant toutes les victimes de John Wick dans ce second volet (on vous dit le résultat : 116), ainsi qu’une bande-annonce parodique de John Wick premier du nom, intitulée Dog Wick, dans laquelle le chien venge la mort de son maître en prenant les armes et en piégeant sa niche. Oui. D’autres bandes-annonces, présentant les films disponibles chez Metropolitan Vidéo, sont disponibles en fin de parcours.

L’Image et le son

John Wick 2 a été intégralement tourné en numérique et cela se voit. L’édition Blu-ray est donc tout indiquée et même indispensable pour (re)découvrir le film de Chad Stahelski, d’autant plus que cette édition HD est en tout point renversante de beauté. Les partis pris stylisés de la photographie signée Dan Laustsen, chef opérateur danois qui a marqué les cinéphiles pour son travail sur Le Veilleur de nuit (et son remake) d’Ole Bornedal, ou bien encore Le Pacte des loups et Silent Hill de Christophe Gans, sont magnifiquement restitués à travers ce transfert qui s’impose comme un disque de référence. Le cadre large fourmille de détails, les contrastes sont spectaculairement denses, le relief omniprésent, le piqué acéré comme la lame d’un scalpel (ou la mine d’un crayon) et l’étalonnage spécifique des couleurs est conservé. Le codec AVC consolide tout cela avec une belle fermeté y compris sur les nombreuses séquences agitées ou sombres. Resplendissant.

Attention les oreilles ! John Wick 2 va mettre à mal votre installation ainsi que vos murs, votre sol et vos rapports avec vos voisins. On espère que vos murs sont bien insonorisés ! Passés les logos des maisons de production, les enceintes explosent littéralement et rien ne s’arrêtera plus jusqu’au générique de fin. Les déflagrations, crépitations, désintégrations et d’autres mots en « tions » sont ardemment réparties aux quatre coins cardinaux grâce à l’ébouriffant mixage anglais Dolby Atmos et au DTS-HD Master Audio 5.1 français, avec un net avantage dans la langue de Shakespeare. La musique de Tyler Bates et Joel J. Richard souligne l’ensemble avec fracas et le caisson de basses se déplace tout seul sur le sol. Ex-plo-sif !

Crédits images : © Niko Tavernise – Metropolitan FilmExport / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Arsenal, réalisé par Steven C. Miller

ARSENAL réalisé par Steven C. Miller, disponible en DVD et Blu-ray le 14 juin 2017 chez Marco Polo Production

Acteurs : Nicolas Cage, John Cusack, Adrian Grenier, Johnathon Schaech, Lydia Hull, Heather Johansen

Scénario : Jason Mosberg

Photographie : Brandon Cox

Musique : Ryan Franks, Scott Nickoley

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Quand Mikey, toujours fourré dans les mauvais plans, disparaît et qu’une grosse rançon est demandée, tout le monde pense qu’il a lui-même monté le coup pour récupérer l’argent… surtout qu’il a déjà travaillé dans le passé pour le mafieux Eddie King. Seul JP, son frère, reste persuadé qu’il est réellement en danger et abandonne alors tous ses principes pour tenter de le sauver.

Depuis les grandes réussites de Joe et de Suspect, Nicolas Cage a encore plus accéléré la cadence déjà folle de ses tournages. Depuis ces deux excellents crus, le comédien qui tourne plus vite que son ombre a joué dans 18 films. Dans cette liste, nous sauverons La Sentinelle de Paul Schrader, même si le cinéaste l’a renié pour cause de différends avec le studio LionsGate, The Runner d’Austin Stark, Le Casse des frères Brewer, Dog Eat Dog également de Paul Schrader, Snowden d’Oliver Stone dans lequel le comédien fait une petite participation, USS Indianapolis de Mario Van Peebles. A l’heure où cet article est rédigé, Nicolas Cage a déjà emballé quatre autres longs métrages actuellement en post-production, dont le très attendu Mom and Dad de Brian Taylor. Autant dire que l’acteur n’a pas chômé, en raison de grands problèmes d’argent, de problèmes avec le fisc, d’un comptable véreux, d’un divorce difficile, anyway, Nicolas Cage est obligé de tourner et dans le lot, forcément, certains films s’avèrent particulièrement mauvais. Toutefois, Arsenal parvient à échapper à cette catégorie, même si le film est avant tout une série B.

Dans Arsenal, il n’y joue qu’un rôle secondaire, mais alors quel personnage ! Prothèse nasale, lunette de soleil, peau grêlée, moustache épaisse, moumoute improbable, il y est absolument remarquable et disons-le, on ne voit que lui. Arsenal est un petit thriller bien emballé par Steven C. Miller, réalisateur né en 1981, devenu un spécialiste des films d’action à petit budget. On lui doit un The Aggression Scale avec Ray Wise, Silent Night – sorti en France sous le titre Bloody Christmas – avec Malcolm McDowell et Jaime King, Extraction, First Kill et Marauders avec Bruce Willis. Il vient tout juste de terminer la suite d’Evasion, intitulée Escape Plan 2 : Hades, avec Sylvester Stallone, Dave Bautista, Jaime King et 50 Cent. Autant dire que le metteur en scène ne fait pas dans la dentelle, mais que son efficacité a été remarquée. C’est le cas pour Arsenal.

Sur une trame archi-rabattue, Steven C. Miller soigne sa photographie et sa mise en scène avec des couleurs cramées inspirées des films de Michael Bay et des ralentis stylisés parfois proches du bullet-time. On ne s’ennuie pas devant Arsenal, grâce à ses acteurs, en particulier Nicolas Cage comme nous le disions précédemment dans le rôle d’Eddie King. Survolté, enflammé, le comédien joue ici un immonde salopard cocaïné et psychotique. Extrêmement violent – le film a d’ailleurs été interdit aux moins de 17 ans aux Etats-Unis – son personnage de boss de la pègre nous est présenté en train de passer à tabac une pauvre victime à coups de batte de baseball, en lui fracassant les dents, devant les yeux d’un gamin. Bien que peu présent à l’écran durant la première heure, Nicolas Cage porte le troisième acte de manière percutante, notamment lors d’une baston sanglante avec son frère, interprété par un certain Christopher Coppola…le propre frangin de l’acteur ! A voir pour le croire et surtout pour se rendre compte encore une fois à quel point Nicolas Cage est toujours immense. D’ailleurs, Arsenal apparaît comme une suite non officielle de Deadfall, réalisé par Christopher Coppola en 1993, dans lequel Nicolas Cage arborait déjà le même look et interprétait le personnage d’Eddie !

Au générique, John Cusack, également spécialiste des DTV entre deux belles performances au cinéma (Love & Mercy, Maps to the Stars), qui est ici plus discret et moins présent à l’écran. Contrairement à l’excellent Suspect, il ne donne pas la réplique à Nicolas Cage ici et se contente de jouer le flic de service en apportant son nom porteur au projet. Arsenal est surtout porté par Adrian Grenier, connu pour avoir joué le boyfriend d’Anne Hathway dans Le Diable s’habille en Prada et surtout Vince dans la série Entourage, ainsi que par Johnathon Schaech, le Jonah Hex de la série DC : Legends of Tomorrow. Tout ce beau petit monde cohabite, fait le job, conscient de ne pas participer au film du siècle, mais au service d’un réalisateur qui fait du bon boulot en s’inspirant parfois de l’univers du roman graphique et qui possède donc un atout majeur avec la présence d’un Nicolas Cage inspiré et explosif dans le rôle du badguy. Sa prestation, qui rappelle à quel point le bougre est sublime dans les rôles de pourris, vaut bien qu’on accorde 1h35 à Arsenal !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray d’Arsenal, disponible chez Marco Polo Production, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est fixe et muet. Le visuel de la jaquette fait la part belle aux deux têtes d’affiche les plus célèbres, entourant ici Adrian Grenier. Dommage que l’éditeur n’ait pas repris l’affiche originale. Aucun supplément, ni de chapitrage d’ailleurs.

L’Image et le son

Le Blu-ray est au format 1080p – AVC. L’éditeur prend soin du thriller de Steven C. Miller et livre un master HD très convaincant et au transfert soigné. Respectueux des volontés artistiques originales, la copie se révèle solide, probablement une des plus belles éditions HD de Marco Polo Production, alliant des teintes chaudes, ambrées et dorées (des filtres jaunes-orangés pour résumer) avec les bleus électriques du ciel. Le piqué est parfois doux en raison des partis pris esthétiques, les blancs sont cramés, les arrière-plans manquent de profondeur, mais ces légers bémols n’entravent en rien les conditions de visionnage. Les contrastes sont tranchants, la colorimétrie joliment laquée, le relief omniprésent et les visages, en particulier la trogne de Nicolas Cage avec son faux nez, sont détaillés à souhait.

Du côté acoustique, les mixages français et anglais DTS-HD Master Audio 5.1 créent un espace d’écoute suffisamment plaisant en faisant la part belle à la musique et à quelques effets latéraux. Des ambiances naturelles percent les enceintes arrière sans se forcer mais avec une efficacité chronique. Sans grande surprise, la version originale se révèle plus naturelle et riche que la piste française. C’est assez rare pour qu’on le signale, Nicolas Cage n’est pas doublé en français par l’excellent Dominique Collignon-Maurin. Autant vous dire que la surprise est de taille… mauvaise même. A éviter donc. Les sous-titres français sont imposés sur la version originale, et le changement impossible à la volée.

Crédits images : © Marco Polo Production / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Revenger, réalisé par Walter Hill

REVENGER (The Assignment) réalisé par Walter Hill, disponible en DVD et Blu-ray le 6 juin 2017 chez TF1 Vidéo

Acteurs : Michelle Rodriguez, Sigourney Weaver, Tony Shalhoub, Caitlin Gerard, Terry Chen, Anthony LaPaglia

Scénario : Walter Hill, Denis Hamill

Photographie : James Liston

Musique : Giorgio Moroder, Raney Shockne

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Une chirurgienne brillante et manipulatrice décide de se venger du meurtre de son frère. Elle est prête à tout pour retrouver le tueur et lui faire payer son crime….au-delà de l’imaginable.
Frank Kitchen est un tueur sans pitié qui pourchasse ses proies et les abat froidement pour éxécuter ses contrats. Mais cette fois ci, le contrat, c’est lui. Un contrat motivé par un puissant désir de vengeance qui doit le mener sur le chemin de la rédemption. Après s’être fait kidnapper, Frank se réveille avec un nouveau visage…
Comprenant qu’il est l’objet d’une terrible manipulation, c’est à son tour de mettre en œuvre sa vengeance : elle sera redoutable !

Si Du plomb dans la tête avait marqué le retour de Walter Hill derrière la caméra dix ans après Un seul deviendra invincible, le cinéaste n’aura pas attendu aussi longtemps pour livrer son nouveau film Revenger, The Assignment en version originale. Comme pour son précédent long métrage, Walter Hill adapte une bande dessinée, publiée en France sous le titre Corps et Ame (chez Rue de Sèvres), cosignée par le réalisateur lui-même avec Matz et Jef. Revenger reprend la même intrigue. Frank n’est pas un type bien. Des hommes, il en a descendus des dizaines, proprement, sans histoires, un vrai pro. Pourtant, il aurait pu se douter que cette affaire payée le double était louche. Mais le réveil est bien plus rude que tout ce qu’il pouvait imaginer : si son âme est toujours homme, son corps, lui, est devenu femme. Une vengeance pour un crime passé. Sa vengeance à lui commence, et elle ne laissera personne indemne. Walter Hill ne le cache pas, Revenger, dont le script initial – sous le titre Tomboy – remonte aux années 1970, est une pure série B tournée avec un budget très restreint (on parle de 2,5 millions de dollars) et une intrigue réduite au plus simple.

Le plus amusant du film car le plus improbable, c’est bien évidemment la performance de Michelle Rodriguez, qui n’est certes pas la plus sobre des comédiennes, mais qui a l’air de s’amuser à jouer un tueur à gages, avec la barbe qui n’a d’égale que la perruque de Christophe Lambert dans Vercingétorix : la légende du druide roi et le service trois-pièces en latex, qui subit une vaginoplastie comme représailles après un contrat qui a mal tourné. Autant dire que le réveil est difficile pour ce mec macho qui lève des nanas dans les bars éclairés aux néons. Mais s’il doit dorénavant prendre des hormones et « accepter » sa nouvelle situation, il, ou elle désormais, est bien décidée à retrouver celle qui est responsable de cette nouvelle identité, tout en flinguant les sbires qui se mettront sur sa route. Michelle Rodriguez en fait des tonnes, fronçant les yeux et en faisant la moue, pétoires à la main et démarche de camionneuse. Ça défouraille pas mal, mais malheureusement le récit ne suit pas une seconde.

Revenger qui se complaît dans une esthétique craspec avec une nonchalance assumée, tout en plagiant l’idée centrale du chef d’oeuvre de Pedro Almodóvar, La Piel que habito, avec un zest de Sin City avec cette voix-off omniprésente. Entre Michelle Rodriguez d’un côté en mode bulldozer, et Sigourney Weaver sanglée dans une camisole de force qui tape la discute avec son toubib Tony Shalhoub, Revenger est un film qui adopte un rythme de croisière avec le frein à main serré, tandis que le spectateur attend toujours la scène d’action qui viendra un peu remuer tout ça. Peine perdue.

Revenger est un thriller pulp, mâtiné de plans directement issus de la BD avec des arrêts sur image « comics » qui tentent de donner une identité à l’ensemble. Ce n’est pas déplaisant, surtout avec ce personnage principal qui tente de renouer avec son identité, ce qui vaut quelques réflexions sur le genre, mais Revenger est tellement lent, lambda et déjà-vu, qu’il ne se distingue jamais du tout-venant. Et qu’est-ce que c’est bavard ! C’est vraiment dommage, surtout que Walter Hill avait prouvé avec le réjouissant Du plomb dans la tête, buddy movie renvoyant directement à ceux réalisés dans les années 80, qu’il en avait encore sous le capot.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Revenger, disponible chez TF1 Vidéo après un passage en VOD, a été réalisé à partir d’un check disc. Le menu principal est animé et musical.

Edition minimaliste pour Revenger puisque l’éditeur ne livre qu’un petit entretien de Walter Hill et de Michelle Rodriguez (12’), visiblement réalisé à l’occasion de la promotion du film par le journaliste Didier Allouch. Dans un premier temps, le réalisateur monopolise la parole tandis que la comédienne se contente d’acquiescer et de renifler dans le micro Studiocanal. Walter Hill revient sur la genèse de Revenger, sur le budget restreint et le fait de réaliser une série B, sur les partis pris et la BD à l’origine du film. Michelle Rodriguez sort ensuite de sa torpeur et de son rhume pour indiquer à quel point elle s’est sentie femme en incarnant un homme. Merci Michelle.

L’Image et le son

Le master HD (1080p) français de Revenger édité par TF1 Vidéo restitue habilement les volontés artistiques du chef opérateur James Liston (Lost Identity) en conservant un très léger grain cinéma, des couleurs à la fois chaudes et froides, des contrastes léchés ainsi qu’un relief constamment palpable. La compression AVC consolide l’ensemble avec brio, les détails sont légion sur le cadre large et les visages des comédiens, le piqué est aiguisé, les noirs denses, les blancs cramés et la copie éclatante. Les très nombreuses séquences nocturnes jouissent également d’une belle définition, même si les détails se perdent quelque peu.

Pour un film de ce genre, nous nous attendions à un mixage DTS-HD Master Audio 5.1 plus ardent. En français comme en anglais, la scène latérale distille ses effets avec une étonnante parcimonie et il faut véritablement attendre les quelques séquences d’action pour que la spatialisation se fasse enfin concrète et que le caisson de basses se réveille. Sans grande surprise, la version originale se révèle plus naturelle et riche que la piste française. Les dialogues manquent de punch et d’intelligibilité sous la percutante balance frontale.

Crédits images : © TF1 Vidéo / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr