Test Blu-ray / Et Dieu… créa la femme, réalisé par Roger Vadim

ET DIEU…CRÉA LA FEMME réalisé par Roger Vadim, disponible en DVD et Blu-ray le 5 septembre 2017 chez TF1 Studio

Acteurs :  Brigitte Bardot, Curd Jürgens, Jean-Louis Trintignant, Jeanne Marken, Jean Tissier, Christian Marquand, Marie Glory…

ScénarioRoger Vadim, Raoul Lévy

Photographie : Armand Thirard

Musique : Paul Misraki

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 1956

LE FILM

Juliette, une jeune femme d’une beauté redoutable, n’attire que convoitises autour de sa personne. Trois hommes se disputent son coeur indécis.

En 1956, une jeune femme du nom de Brigitte Bardot devient une star, l’emblème de l’émancipation féminine, un mythe vivant et un sex-symbol international. Âgée de 22 ans, elle a déjà plus d’une quinzaine de films à son actif. Remarquée dès son premier long métrage, l’excellente comédie Le Trou normand (1952) de Jean Boyer, dans lequel elle faisait tourner la tête à Bourvil, Brigitte Bardot enchaîne alors les petites apparitions chez Sacha Guitry (Si Versailles m’était conté…), Marc Allégret (Futures vedettes, En effeuillant la marguerite), René Clair (Les Grandes manœuvres), avant d’être propulsée au firmament des mythes grâce à son compagnon Roger Vadim, dans Et Dieu… créa la femme.

Elle y interprète Juliette, sublime de beauté et de sensualité, qui fait chavirer les cœurs dans le petit port traditionnel de Saint-Tropez. Trois hommes, un entrepreneur d’âge mûr (Curd Jürgens) et deux frères ouvriers, Michel (Jean-Louis Trintignant) et Antoine (Christian Marquand), se disputent l’amour de cette jeune orpheline dont la soif de liberté est très grande et qui redoute les lendemains. Juliette, c’est l’incarnation de la femme moderne. Celle qui décide de partir sur un coup de tête, parce qu’elle a le courage de faire ce qui lui plaît, quand ça lui plaît. Alors que la gent féminine la scrute d’un mauvais œil et la considère comme une simple dévergondée, mal élevée et paresseuse, les hommes lui tournent autour et ne cessent de la convoiter. « Cette fille-là est faite pour faire perdre les hommes… » dit d’ailleurs Eric Carradine, cet homme aisé et habitué à obtenir tout ce qu’il désire, qui va voir pour la première fois ses espoirs déçus.

Juliette n’est pas une femme que l’on appâte avec l’argent, Juliette a besoin de plus. Alors quand elle se retrouve face à tous ces prétendants, elle choisit celui qui apparaît le plus effacé, Michel, délicatement interprété par Jean-Louis Trintignant dans sa première apparition à l’écran. Brigitte Bardot enflamme les coeurs et la pellicule, tandis que son caractère insaisissable ne la rend que plus désirable. Conscient de la sexualité innocente (ou non) de sa compagne à l’écran, Roger Vadim la filme sous toutes les coutures. Tous les cinéphiles, même ceux qui n’ont pas vu le film, savent que cette scène où BB, couchée nue derrière un drap étendu, libre au vent, profitant de l’instant, est tirée de Et Dieu…créa la femme.

Ce premier long métrage de Roger Vadim est aussi un dernier cadeau pour la femme qu’il a aimée, puisque Brigitte Bardot tombe alors amoureuse de son partenaire Jean-Louis Trintignant. Le cinéaste et sa première épouse divorceront peu de temps après la sortie triomphale du film, accompagnée d’une interdiction aux moins de 16 ans en France et d’un parfum de scandale. Si Et Dieu…créa la femme paraît aujourd’hui « gentillet », il n’en demeure pas moins bourré de charme, bien réalisé (très beau CinemaScope) dans des décors soignés (aah ce petit village de Saint-Tropez !), représentatif d’une époque en plein bouleversement et surtout porté par des jeunes comédiens au charisme qui détonnait alors dans le panorama cinématographique français.

Certes, Jean-Louis Trintignant s’imposait déjà par sa sensibilité empathique et son phrasé si reconnaissable, mais nous n’avons d’yeux que pour Brigitte Bardot, dont le naturel à l’écran, ses répliques capricieuses, sa moue boudeuse et un corps qui transpire le sexe – le mambo lascif ! – font encore beaucoup d’effets soixante ans après ! A noter que Roger Vadim réalisera lui-même le remake américain de son propre film en 1988, And God Created Woman, avec Rebecca De Mornay et Frank Langella.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Et Dieu… créa la femme, disponible chez TF1 Studio, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur une des séquences du film.

Pour accompagner le film, l’éditeur propose un documentaire sur le cinéaste, scénariste, acteur, romancier et poète Roger Vadim, intitulé Vadim, Mister Cool (57’), narré par le comédien Gaspard Ulliel, réalisé par Olivier Nicklaus en 2016 et déjà diffusé sur Arte. Constitué d’archives exceptionnelles (les premiers pas de BB devant la caméra, la première interview de Catherine Deneuve), d’images de tournage souvent inédites (sur Barbarella, Et Dieu… créa la femme), d’interviews, vous saurez tout sur Roger Vladimir Plémiannikov (né Roger Vadim Ardilouze), né le 26 janvier 1928 et mort le 11 février 2000, son enfance, les fêtes à Saint-Germain-des-Prés, ses verres au Café de Flore, ses débuts dans le cinéma.

Ses films sont passés au peigne fin, tout comme la vie privée (et donc publique) du réalisateur, puisque le documentaire se plaît à revenir sur chacune des histoires d’amour de Roger Vadim avec Brigitte Bardot, Annette Stroyberg, Catherine Deneuve, Jane Fonda et Marie-Christine Barrault. Très bien réalisé, le film d’Olivier Nicklaus dévoile également des scènes coupées de Et Dieu…créa la femme, notamment une scène suggérée du personnage de Jean-Louis Trintignant faisant un cunnilingus à Brigitte Bardot. Pas étonnant que la censure ait vu rouge.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette édition HD ressuscite le flamboyant Eastmancolor de Et Dieu créa la femme…, qui bénéficie d’une restauration en 4K réalisée à partir du négatif image par Hiventy. Uune véritable splendeur ! Ce Blu-ray ne déçoit pas et profite de l’apport de la Haute-Définition. D’emblée, le générique d’ouverture illumine les rétines. Les teintes rouge, verte, bleue, jaune explosent à l’écran comme un feu d’artifice. Le codec AVC stabilise l’image à la perfection, le grain original est respecté sans utilisation outrancière de réducteur de bruit, la profondeur de champ est évidente et le cadre large est réhabilité et n’est pas avare en détails. La propreté demeure impressionnante tout du long, le piqué est joliment acéré, la copie demeure flatteuse et stable, la luminosité des séquences en extérieur est superbe. Malgré de légers décrochages sur les fondus enchaînés, ainsi que deux ou trois plans plus troubles et aux teintes fanées (les plans éthérés sur Trintignant durant le mambo de Juliette), l’ensemble reste d’un haut niveau et l’on redécouvre avec bonheur le film de Roger Vadim.

La musique jazzy de Paul Misraki donne le la. La bande-son a été restaurée de fond en comble, et le mixage DTS-HD Master Audio 2.0 mono s’en donne à coeur joie. Les dialogues n’ont jamais été aussi intelligibles et les effets annexes jouissent d’un coffre inédit. Aucun souffle constaté. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés aux spectateurs sourds et malentendants, ainsi qu’une piste Audioscription.

Crédits images : © TF1 Studio / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Phantasm V : Ravager, réalisé par David Hartman

PHANTASM V : RAVAGER réalisé par David Hartman, disponible en DVD et Blu-ray en coffret Intégrale Collector le 31 octobre 2017 chez ESC Editions et Sidonis Calysta

Acteurs :  A. Michael Baldwin, Reggie Bannister, Angus Scrimm, Bill Thornbury, Kathy Lester, Daniel Roebuck, Dawn Cody, Gloria Lynne Henry, Stephen Jutras…

ScénarioDon Coscarelli

Photographie : David Hartman

Musique : Christopher L. Stone

Durée : 1h27

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Reggie, désormais vieilli et mal en point, se trouve dans un institut médicalisé.
Il raconte son histoire à son meilleur ami Mike, avec qui il a traversé tant de périples face à L’Homme en Noir… mais qui semble ne pas le croire et qui annonce à Reggie qu’il a été déclaré dément !

Il aura fallu attendre presque vingt ans pour avoir des nouvelles de Reggie, de Mike, de Jody et bien sûr du Tall Man ! Le cinquième volet de la franchise Phantasm était inespéré. C’est peu dire que les fans attendaient ce grand retour de Don Coscarelli, de son boogeyman et de ses sphères perceuses de crânes ! Si Phantasm : Ravager n’est pas mis en scène par le cinéaste, qui laisse sa place à un dénommé David Hartman, touche à tout oeuvrant principalement pour la télévision, Don Coscarelli reste coscénariste et coproducteur. Tout le monde a bien évidemment pris de l’âge et de la bedaine depuis Phantasm IV : Aux sources de la Terreur (1998), et Phantasm : Ravager a visiblement bénéficié d’un budget anémique. Cependant, même si le film oscille souvent entre le navet fauché et le nanar sympathique, ce cinquième épisode demeure souvent attachant dans sa façon de se la jouer « plus grand » qu’il l’est en réalité, et surtout parce qu’il s’agit contre toute attente de l’opus le plus émouvant.

Si Reggie parvient, au terme d’une longue errance, à s’évader de la Vallée de la Mort, c’est pour découvrir que le monde a désormais plongé dans le chaos, contrôle par le Tall Man et une armée de sphères géantes. Seule une poignée de résistants poursuivent la lutte, menés par Mike. Si commencer le nouveau chapitre à partir de la fin du précédent pouvait jusque là passer avec beaucoup d’indulgence, c’est ici difficile d’accepter le fait que Reggie sorte du désert 18 ans après. Mais cela fait partie du truc « Phantasm » puisque les spectateurs sont au fait depuis le premier volet que ce qui est raconté peut-être de l’ordre du rêve, du fantasme, du cauchemar. Malin, Don Coscarelli, profite du vieillissement de ses acteurs, et donc de ses personnages, pour appuyer une nouvelle théorie : et si tout ce qui se déroulait depuis Phantasm n’était autre que le fruit de l’imagination de Reggie ? Le créateur de la saga nous le montre cloué sur un fauteuil, dans un institut psychiatrique, se perdant continuellement entre plusieurs dimensions, dont l’une qui lorgne sur Matrix, avec le héros branché malgré-lui sur une machine qui semble lui insuffler de faux souvenirs.

Difficile à résumer tant Don Coscarelli et David Hartman s’amusent à paumer les spectateurs, Phantasm : Ravager n’est pas avare en nouvelles idées, mais le film est souvent rattrapé par son manque d’argent. David Hartman tente de chiader l’image comme il le peut, mais le tournage en numérique trahit ses ambitions, la photographie est laide, les effets spéciaux du même acabit. On a souvent l’impression de visionner un film d’étudiant ou même un truc d’amateur – vous avez dit fan-made ? – filmé entre potes dans le jardin du caméraman, avec de la peinture à l’eau rouge en guise de faux sang. Mais après tout, le premier avait tourné dans des conditions à peu près similaires !

Angus Scrimm, 89 ans au moment du tournage, n’est plus que l’ombre de lui-même et fait beaucoup de peine à voir. Il s’agit d’ailleurs de son dernier tour de piste dans le costume sombre du Tall Man, puisque le comédien est décédé le 9 janvier 2016, après les prises de vue. Le film lui est évidemment dédié. Don Coscarelli et David Hartman resserrent l’histoire sur le but ultime du Tall Man, à savoir annihiler le monde grâce à ses sphères, qui ont ici pour certaines la taille d’une montgolfière capable de raser un building. L’apocalypse arrive ! Rempli de références aux quatre précédents chapitres, y compris dans l’apparition de certains personnages croisés autrefois, Phantasm V, qui n’a de « Ravager » que le titre, prend également parfois des allures de jeu vidéo dans quelques séquences réalisées en CGI au rabais, tandis que Reggie (Bannister) et Mike (A. Michael Baldwin) se la jouent soldats armés jusqu’aux dents.

Mais tout ceci n’est pas sérieux, rien n’est vraiment crédible et malgré toute l’affection que l’on peut avoir pour la mythologie Phantasm et toute la bonne volonté de l’équipe, ce cinquième épisode déçoit. Seuls les fans hardcore (ou les Phans devrait-on dire) apprécieront et pardonneront les nombreux défauts de cette ultime (?) aventure.

 

LE BLU-RAY

Phantasm: Ravager est donc disponible en Blu-ray, mais pour l’instant uniquement en coffret intégrale (5 films) édité par ESC Editions. Aujourd’hui, nous ne sommes pas en mesure de dire si ce titre sera édité à l’unité, mais puisque les deux premiers le sont déjà, il n’y a pas de raison d’en douter. Le menu principal est animé sur le célèbre thème du film, mis au goût du jour ici.

En ce qui concerne les suppléments présents sur ce disque, ils se résument à un documentaire sur le tournage du film (10’), constitué d’images du plateau et de propos de l’équipe, y compris de Don Coscarelli, jamais très loin de David Hartman. Ce making of dément donc les dires de certains fans déçus, comme quoi le créateur de la franchise n’aurait pas pris part à Phantasm: Ravager ! Mention spéciale au système D des effets spéciaux, notamment des sphères perceuses et du sang qui gicle partout !

En plus d’une vidéo amusante réalisée par David Hartman pour appâter les fans quant à la mise en route du cinquième volet (1’), nous trouvons également le teaser, la bande-annonce, un bêtisier (8’30) et une galerie de photos.

Ce coffret collector intégrale propose également un DVD Bonus, sans oublier un livre inédit de 152 pages par Marc Toullec sur la genèse et la réalisation de la saga. C’est donc enfin l’occasion de se pencher sur les suppléments présents sur la galette supplémentaire.

Le documentaire rétrospectif Phantasmagoria (98’), réalisé en 2005, propose un retour sur les quatre volets de la franchise, en compagnie des comédiens principaux, du réalisateur-scénariste Don Coscarelli, du coproducteur Paul Pepperman et des créateurs des effets visuels. De nombreuses images d’archives dévoilent l’envers du décor sur les quatre films, sur la préparation des scènes clés de chaque épisode, le tout ponctué par quelques savoureuses anecdotes de tournage.

Tout ce beau petit monde revient sur ce qui a fait le succès du premier film, mais aussi ce qui a créé l’attachement et la fidélité des spectateurs d’un opus à l’autre. Les clés de la mythologie sont passées en revue, ainsi que les influences de Don Coscarelli (Un chien andalou de Luis Buñuel) et même quelques fins alternatives sont rapidement montrées !

Le module Phantasmagorical Mystery Tour (2005-13′), s’apparente à un petit trip touristique sur les lieux de tournage du premier film, en compagnie de Reggie Bannister ! Une visite guidée fort sympathique, durant laquelle Don Coscarelli apparaît pour parler du tournage auprès de son ami.

L’interactivité se clôt sur des scènes coupées anecdotiques du premier épisode (3’).

L’Image et le son

Phantasm: Ravager bénéficie d’un master HD 1080p qui remplit son cahier des charges sans se forcer, mais avec efficacité. Le piqué est probant même si pas aussi acéré qu’espéré, les effets numériques paraissaient bien artificiels et passent difficilement le cap du plus petit écran et ressemblent à des animatiques figés et risibles. Les séquences en extérieur sont mieux définies avec une profondeur de champ palpable, une luminosité plaisante, des contrastes assurés et une colorimétrie riche. La photo paraît parfois vaporeuse, certaines pertes de la définition sont constatables sur quelques gros plans et séquences trop agitées. Ce Blu-ray n’est pas mauvais mais l’apport HD est finalement souvent limité.

Le mixage anglais DTS-HD Master Audio 5.1 crée un espace d’écoute suffisamment plaisant en faisant la part belle à la musique, aux passages des sphères et aux scènes d’affrontements. Quelques ambiances naturelles, explosions et déflagrations percent les enceintes latérales sans se forcer mais avec une efficacité chronique, tandis que le caisson de basses distille ses effets avec ardeur. Les sous-titres français ne sont pas imposés sur la version originale.

Crédits images : © ESC Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Phantasm IV : Aux sources de la Terreur, réalisé par Don Coscarelli

PHANTASM IV : AUX SOURCES DE LA TERREUR (Phantasm IV: Oblivion) réalisé par Don Coscarelli, disponible en DVD et Blu-ray en coffret Intégrale Collector le 31 octobre 2017 chez ESC Editions et Sidonis Calysta

Acteurs :  A. Michael Baldwin, Reggie Bannister, Angus Scrimm, Bill Thornbury, Heidi Marnhout, Bob Ivy…

ScénarioDon Coscarelli

Photographie : Chris Chomyn

Musique : Christopher L. Stone

Durée : 1h30

Date de sortie initiale : 1998

LE FILM

Séparément perdus dans l’immense Vallée de la Mort, Mike et Reggie tentent de percer les secrets du sinistre Tall Man. En franchissant les limites d’un portail spatio-temporel, Mike découvre que son ennemi juré n’est plus la créature démoniaque qu’il paraît être. Enfin, pas tout à fait…

Où en étions-nous ? Ne vous inquiétez pas, Don Coscarelli résume les trois épisodes précédents au moyen de quelques extraits et d’une voix-off, ici celle de Reggie (Reggie Bannister). Car oui, nous en arrivons au quatrième volet de la saga Phantasm. Phantasm IV : Aux sources de la TerreurPhantasm IV : Oblivion, le « IV » du sous-titre Oblivion marquant alors le 4e épisode. Et c’est dans cet excellent opus que le réalisateur-scénariste dévoile le passé et les origines de son boogeyman, le Tall Man, toujours interprété par Angus Scrimm, âgé ici de 72 ans. Bien que chaque histoire commence là où la précédente s’était arrêtée, Don Coscarelli ne s’est jamais préoccupé du fait que ses personnages prenaient un sacré coup de vieux entre deux chapitres. Rappelons tout de même que le premier Phantasm avait été réalisé en 1979, le second en 1988 et le troisième en 1994 ! Mais cela fait partie de la mythologie Phantasm, puisque Don Coscarelli s’amuse à jouer avec les dimensions et le vieillissement « accéléré » des protagonistes rajoute un côté fantastique à l’ensemble.

Le cinéaste se fait ici plaisir en signant un vrai western métaphysique et quasi-abstrait, qui encore une fois apporte de nombreuses réponses sur le Tall Man, mais qui pose de nouvelles bases pour ainsi relancer la machine. Ou ses sphères métalliques tueuses plutôt. On prend les mêmes alors et on recommence. Terrassé par le désespoir en apprenant qu’il est lui aussi devenu une créature au sang jaune du Tall Man, Mike a décidé de fuir loin de Reggie, son meilleur ami, par peur de ses propres réactions peut-être, mais aussi pour lui épargner d’être traqué comme il l’est lui-même. De son côté, Reggie est acculé par le Tall Man qui est une fois de plus revenu à la vie. Pour une raison connue de lui seul, le boogeyman décide d’épargner Reggie et même de le relâcher. Il semble que la partie ne fasse que commencer…Don Coscarelli sépare ses personnages pendant quasiment l’intégralité du film. Si la quête de Reggie, ancien vendeur de glaces devenu soldat par la force des choses, est somme toute classique et proche de celles des épisodes précédents, c’est ici Mike (A. Michael Baldwin) qui importe et le réalisateur ne s’en cache pas.

Phantasm IV : Aux sources de la Terreur déploie un nouvel univers, principalement en plein jour. Mike abandonne sa voiture dans la Vallée de la Mort (en fait les scènes ont été tournées à Lone Pine en Californie) et erre comme un zombie, qu’il est d’ailleurs devenu en partie, en tâchant de conserver son libre-arbitre et de ne pas devenir l’un des pantins et serviteurs du Tall Man. Les décors déserts sont magnifiques, excellemment filmés, ce décalage avec l’univers original du film emporte alors l’adhésion. Evidemment, les spectateurs qui s’attendaient à voir un nouveau spectacle avec de l’humour noir et des effets gore seront probablement déçus, mais Don Coscarelli, ambitieux, prend l’audience au dépourvu en privilégiant la psychologie et le côté introspectif de ses personnages. Il se rapproche ainsi du premier épisode et chef d’oeuvre de la franchise, ce qui est tout autant inattendu que bienvenue. De là à dire que Phantasm IV : Aux sources de la Terreur est le meilleur film de la franchise après le premier et l’aboutissement de cette longue histoire, il n’y a qu’un pas. Ceci d’autant plus que Coscarelli utilise des scènes coupées du premier film (ou filmées pour être utiliser plus tard), pour les intégrer ici sous forme de flashbacks.

Tandis que Reggie continue sa route et rencontre une mignonne petite blonde qui l’excite d’emblée et que Mike commence à prendre conscience que son suicide pourrait mettre fin aux noirs desseins du Tall Man, Don Coscarelli décide de dévoiler les origines du Tall Man, grâce aux passages entre deux mondes et deux époques disséminés sur Terre. Un Tall Man Begins en quelque sorte. Mais alors pourquoi Mike est-il persuadé d’avoir rencontré le Tall Man durant la Guerre de Sécession ? Comment son frère présumé décédé parvient-il à survivre entre deux univers et se transforme également en sphère ? Autant de nouvelles questions que l’on se pose à la fin de Phantasm IV : Aux sources de la Terreur et auxquelles Don Coscarelli ne répondra que…18 ans plus tard dans Phantasm V : Revenger, à ce jour le seul épisode non mis en scène par le cinéaste, mais pour lequel il signe néanmoins le scénario. Ce sera également le dernier tour de piste d’Angus Scrimm, décédé juste après le tournage à l’âge de 89 ans.

LE BLU-RAY

Phantasm IV : Aux sources de la Terreur est donc disponible en Blu-ray, mais pour l’instant uniquement en coffret intégrale (5 films) édité par ESC Editions. Aujourd’hui, nous ne sommes pas en mesure de dire si ce titre sera édité à l’unité, mais puisque les deux premiers le sont déjà, il n’y a pas de raison d’en douter. Le menu principal est animé sur le célèbre thème du film.

En plus de réunir les cinq films de la saga, ce coffret collector intégrale propose également un DVD Bonus, contenant un documentaire rétrospectif de la franchise “Phantasmagoria” (97’), Phantasmagorical Mystery Tour (14′), des scènes coupées de Phantasm (3′), sans oublier un livre inédit de 152 pages par Marc Toullec sur la genèse et la réalisation de la saga. Ces suppléments seront chroniqués ultérieurement.

Le Blu-ray de Phantasm IV : Aux sources de la Terreur contient également quelques bonus.

En plus de la bande-annonce et d’une galerie de photos, nous disposons ici d’un documentaire sur le tournage du film (11’), composé d’images de tournage, directement suivies par le résultat final à l’écran. A signaler que d’autres images du plateau se trouvent dans le documentaire proposé en bonus sur le Blu-ray de Phantasm III : Le Seigneur de la Mort !

L’Image et le son

Du point de vue qualité, le master HD de Phantasm IV : Aux sources de la Terreur est sans aucun doute le plus beau du coffret intégrale. Encore plus aiguisé que l’image du troisième épisode, celle-ci sublime les plans tournés dans le désert avec un ciel bleu immaculé, une profondeur de champ inouïe et une luminosité qui flatte les rétines. La texture argentique est heureusement préservée et excellemment gérée, la copie est d’une propreté immaculée, le cadre stable, les gros plans détaillés à souhait, bref c’est superbe. Le Blu-ray est au format 1080p (AVC).

Comme sur les précédents Blu-ray, la version originale bénéficie d’un mixage DTS-HD Master Audio 5.1. Cette option acoustique séduisante permet à la composition d’environner une fois de plus le spectateur pour mieux le plonger dans l’atmosphère du film. Les effets latéraux sont très convaincants, à l’instar des ambiances naturelles dans les paysages désertiques. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés et demeurent solides, la balance frontale assurant de son côté le spectacle acoustique, riche et dynamique, surtout lors du passage des sphères métalliques, évidemment toujours présentes dans ce quatrième épisode. Les fans de la version française devront se contenter d’une piste mono DTS-HD Master Audio 2.0. Cette version se révèle assez percutante et propre, mais certains dialogues s’avèrent sensiblement grinçants. Les sous-titres ne sont pas imposés sur la version originale. Aucun souffle constaté.

Crédits images : © ESC Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Phantasm III : Le Seigneur de la Mort, réalisé par Don Coscarelli

PHANTASM III : LE SEIGNEUR DE LA MORT (Phantasm III: Lord of the Dead) réalisé par Don Coscarelli, disponible en DVD et Blu-ray en coffret Intégrale Collector le 31 octobre 2017 chez ESC Editions et Sidonis Calysta

Acteurs :  Reggie Bannister, A. Michael Baldwin, Angus Scrimm, Bill Thornbury, Gloria Lynne Henry, Kevin Connors, Cindy Ambuehl…

ScénarioDon Coscarelli

Photographie : Chris Chomyn

Musique : Fred Myrow, Christopher L. Stone

Durée : 1h31

Date de sortie initiale : 1994

LE FILM

Après quatorze ans de lutte sans merci, Mike est de nouveau confronté au terrible croque-mort de Morningside, qui dirige une troupe de zombies, des nains composés de cadavres ressuscités, et à une armée de sphères meurtrières.

Six ans séparent Phantasm III : Le Seigneur de la Mort de Phantasm II. Réalisée en 1994 et directement sortie en VHS (énorme succès dans les bacs), cette deuxième séquelle au premier Phantasm (1979) fait oublier la déception du précédent volet. Don Coscarelli est de retour au scénario et à la mise en scène, mais ce troisième opus marque également celui d’A. Michael Baldwin dans le rôle de Mike, qui avait été provisoirement tenu par James LeGros dans Phantasm II. Quinze ans plus tard, le comédien retrouve donc son personnage créé dans le film original, ce qui apporte déjà une plus-value non négligeable. Phantasm III : Le Seigneur de la Mort s’apparente souvent à un remake des deux premiers, mais en constitue également (et heureusement) un prolongement fort sympathique, d’autant plus, et ce sera le cas pour chaque film de la saga, que l’histoire reprend là où celle du précédent s’était arrêtée.

Revenu de l’au-delà, le Tall Man kidnappe Mike dont il voudrait faire son successeur au terme d’une opération particulièrement douloureuse. C’est sans compter sur la détermination de Reggie d’arracher son ami à son emprise. Il est donc de retour (encore une fois) le célèbre Tall Man et il n’a jamais été aussi déterminé. Pour preuve, l’acteur Angus Scrimm, 68 ans au compteur, n’a jamais eu autant de dialogues que dans Phantasm III : Le Seigneur de la Mort et son célèbre « Booooooooy ! » fonctionne encore parfaitement. Durant le prologue, Don Coscarelli résume intelligemment les deux premiers volets, à travers la voix de Mike. Bien que son corps ait fondu à la fin deuxième film, le Tall Man traverse les dimensions pour se débarrasser de son propre cadavre et reprendre ainsi les affaires en cours. Le point central de ce troisième film est la mutation de Mike, désirée par le Tall Man, qui voit en lui celui qui le remplacera. Alors qu’il prend la fuite, son pote Reggie (Reggie Bannister), armé de son fusil de chasse à quatre canons, tente de le retrouver et traverse des villes désolées sur son chemin, laissées à l’abandon pour le plus grand plaisir des pilleurs.

Fans de westerns, Don Coscarelli pose les bases qui feront la belle réussite du quatrième Phantasm en 1998. Reggie rencontre un petit garçon, fils d’un shérif assassiné, qui a repris la pétoire de son paternel et qui s’en sert avec efficacité contre les zombies qui rôdent dans les parages. Plus tard, leur association sera renforcée par l’arrivée de Rocky, une militaire black spécialisée dans le maniement du nunchaku, très efficace contre les vigiles argentées du boogeyman. C’est alors que ressurgit Jody, le frère de Mick. Phantasm III : Le Seigneur de la Mort reprend donc ce qui a fait le succès des précédents volets, les nains monstrueux au service du Tall Man, le sang jaune et bien entendu les mythiques sphères métalliques perceuses de crânes (d’ailleurs le film s’ouvre sur le reflet du Tall Man dans une de ses créations), ici multipliées par cent. Les effets visuels sont plus modernes et donc plus réussis, le rythme plus maîtrisé, les scènes d’action bien emballées avec toujours ce côté foutraque et système D qui fait le charme de la franchise. L’humour noir crée un décalage bienvenu (l’oeil qui sort de la sphère, un frisbee muni de lames de rasoir, une sphère attrapée au vol avec un débouche chiotte), montrant que tout ceci n’est pas sérieux, tandis que le réalisateur s’amuse (et nous aussi) avec les effets gore (une gorge tranchée, un crâne traversé par une sphère) et l’obsession pour le sexe du personnage de Reggie.

Si le cinéaste répond à quelques questions posées par Phantasm et Phantasm II, cela ne fait qu’en engendrer de nouvelles qui relancent alors la saga. Ce que confirmera Phantasm IV : Aux sources de la Terreur, véritable western métaphysique.

LE BLU-RAY

Phantasm III : Le Seigneur de la Mort est donc disponible en Blu-ray, mais pour l’instant uniquement en coffret intégrale (5 films) édité par ESC Editions. Aujourd’hui, nous ne sommes pas en mesure de dire si ce titre sera édité à l’unité, mais puisque les deux premiers le sont déjà, il n’y a pas de raison d’en douter. Le menu principal est animé sur le célèbre thème du film.

En plus de réunir les cinq films de la saga, ce coffret collector intégrale propose également un DVD Bonus, contenant un documentaire rétrospectif de la franchise « Phantasmagoria » (97’), Phantasmagorical Mystery Tour (14′), des scènes coupées de Phantasm (3′), sans oublier un livre inédit de 152 pages par Marc Toullec sur la genèse et la réalisation de la saga. Ces suppléments seront chroniqués ultérieurement.

Le Blu-ray de Phantasm III : Le Seigneur de la Mort contient également quelques bonus.

On passera sur l’unique scène coupée (12 secondes !) sans intérêt (les personnages principaux sont poursuivis – au ralenti – par le Tall Man), pour se consacrer au petit module de 18 minutes consacré au tournage du film…ainsi que celui de Phantasm IV : Aux sources de la terreur ! Evitez donc de visionner ce documentaire si vous ne connaissez pas encore le quatrième épisode puisque certaines séquences sont révélées ! Quelques propos de Don Coscarelli, Reggie Bannister et A. Michael Baldwin ponctuent les images de tournage, surtout celles nécessitant des effets spéciaux ou bien encore les cascades.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos.

L’Image et le son

Voilà une très belle édition HD au format 1080p (AVC) ! Phantasm III : Le Seigneur de la Mort profite de cette élévation et offre aux fans de la franchise un superbe master qui participe à la redécouverte de cet opus souvent considéré comme étant le plus faible de la saga. Le grain original est respecté et excellemment géré, le piqué est pointu, la propreté indéniable, la stabilité de mise et les couleurs fraîches et saturées. L’image est tellement belle qu’on peut même apercevoir l’équipe de tournage dans le reflet des sphères ! Les contrastes sont à l’avenant, les séquences diurnes sont lumineuses, les détails riches, bref, en dehors d’un sensible fléchissement de la définition sur les scènes en intérieur, c’est vraiment très beau ! Aux oubliettes le DVD TF1 Vidéo sorti en 2000 !

La version originale bénéficie d’un remixage DTS-HD Master Audio 5.1. Au premier abord on pouvait craindre le pire. Il n’en est rien, bien au contraire. Cette option acoustique séduisante permet à la composition enivrante de Fred Myrow d’environner le spectateur pour mieux le plonger dans l’atmosphère du film. Les effets latéraux ajoutés ne tombent jamais dans la gratuité ni dans l’artificialité. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés et demeurent solides, la balance frontale assurant de son côté le spectacle acoustique, riche et dynamique, surtout lors du passage des sphères. Les fans de la version française devront se contenter d’une piste mono DTS-HD Master Audio 2.0. Cette version se révèle assez percutante et propre, mais certains dialogues s’avèrent sensiblement grinçants. Les sous-titres ne sont pas imposés sur la version originale. Aucun souffle constaté.

Crédits images : © ESC Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / La Sarabande des pantins, réalisé par Jean Negulesco, Henry Hathaway, Howard Hawks, Henry King, Henry Koster

LA SARABANDE DES PANTINS (O. Henry’s Full House) réalisé par Jean Negulesco, Henry Hathaway, Howard Hawks, Henry King, Henry Koster, disponible en DVD et Blu-ray le 26 septembre 2017 chez ESC Editions

Acteurs :  Fred Allen, Anne Baxter, Jeanne Crain, Farley Granger, Charles Laughton, Oscar Levant, Marilyn Monroe, Jean Peters, Gregory Ratoff, Dale Robertson…

ScénarioLamar Trotti, Richard L. Breen, Ivan Goff, Ben Roberts, Walter Bullock

Photographie : Lloyd Ahern Sr., Lucien Ballard, Milton R. Krasner, Joseph MacDonald

Musique : Alfred Newman

Durée : 1h57

Date de sortie initiale : 1952

LE FILM

Film à sketchs inspiré de cinq nouvelles de l’auteur O.Henry, allant du polar au drame.

Imaginez un peu cette affiche ! Fred Allen, Anne Baxter, Jeanne Crain, Farley Granger, Charles Laughton, Oscar Levant, Marilyn Monroe, Jean Peters, Gregory Ratoff, Dale Robertson, David Wayne, Richard Widmark, Richard Garrick, Kathleen Freeman, Philip Tonge, réunis devant les caméras de cinq illustres cinéastes hollywoodiens, Jean Negulesco, Henry Hathaway, Howard Hawks, Henry King et Henry Koster ! Tout ce beau monde réuni par la 20th Century Fox avait répondu présent pour rendre hommage à l’écrivain américain O. Henry (1862-1910), de son vrai nom William Sidney Porter.

Journaliste et auteur d’une multitude de nouvelles humoristiques et dramatiques, O. Henry avait fait sa spécialité de raconter des histoires avec pour personnages principaux des gens de tous les jours, de condition modeste et les laissés-pour-compte. Ayant lui-même bourlingué dans les années 1880, tour à tour employé de banque, pharmacien et petite reporter, O. Henry commence sa carrière de journaliste et chroniqueur pour le Houston Post. Mais avant cela, il est accusé de fraudes par la banque pour laquelle il travaille et écope d’une peine de prison de trois ans. Cette expérience le marquera à vie et l’inspirera pour quelques-unes de ses nouvelles. Libéré en 1901, sa carrière d’écrivain démarre enfin et O. Henry (surnom qu’il reçoit en prison) s’installe à New York avec son épouse. Plus de 400 nouvelles plus tard, la plupart se déroulant dans les quartiers pauvres de la Grosse Pomme, O. Henry devient un auteur populaire et incontournable aux Etats-Unis. Alors qu’il aurait fêté ses 90 ans, le monde du cinéma décide de réunir une pléiade de stars et cinq grands réalisateurs pour un film à sketches très réussi, O. Henry’s Full House, sorti en France sous le titre La Sarabande des pantins.

Chaque partie du film est présentée par l’illustre John Steinbeck en personne, qui à l’instar de Walt Disney qui proposait son émission assis dans son bureau, se place devant sa bibliothèque et sort le volume correspondant à l’histoire qui va nous être racontée. La Sarabande des pantins s’avère très réussi du début à la fin et même si certaines parties peuvent paraître moins inspirées que d’autres, il n’en demeure pas moins que ces cinq courts-métrages reliés par le fil rouge Steinbeck sont de très bonne qualité et merveilleusement interprétés.

Le premier segment réalisé par Henry Koster (Harvey, M. Hobbs prend des vacances, La Tunique), Le Policier et le MotetThe Cop and the Anthem, est porté par l’immense Charles Laughton. Il incarne ici Soapy, un clochard de New York qui va tout entreprendre pour se faire emprisonner afin de se mettre à l’abri d’un froid hiver, mais aussi du vent et des coups de matraque, le tout aux frais de la princesse. Il accoste ainsi une femme dans la rue en espérant qu’elle appellera la police mais il s’agit d’une prostituée. Cette dernière est interprétée par Marilyn Monroe en personne, qui fait une savoureuse apparition de deux minutes. Soapy ne se laisse pas abattre et s’avère prêt à tout pour se faire emprisonner. Le ton est évidemment comique et Charles Laughton livre une grande et hilarante prestation.

Le second sketch, L’Appel du claironThe Clarion Call, est mis en scène par l’immense Henry Hathaway (Niagara, Le Plus grand cirque du monde) et le ton est ici dramatique et tire sur le polar. Le policier Barney (Dale Robertson) doit de l’argent à un mauvais garçon, Johnny (Richard Widmark), qui avait épongé une de ses dettes au poker, et se trouve plus qu’embarrassé pour dénoncer un crime commis par celui-ci puisqu’il s’agit d’un ami d’enfance. Ce récit vaut essentiellement pour la performance de Richard Widmark, exceptionnel dans la peau d’une petite frappe au rire sardonique. Monstre de charisme, galurin sur la tête et capable de fusiller son adversaire d’un simple regard, le comédien est une fois de plus fascinant.

On passe ensuite au segment mélodramatique du film avec La Dernière FeuilleThe Last Leaf, réalisé par Jean Negulesco (Comment épouser un millionnaire, Papa longues jambes). Toujours à New York, Greenwich Village, Joanna (Anne Baxter) tombe malade en raison du froid et sa sœur Susan (Jean Peters) prend soin d’elle. Le voisin et peintre Behrman (Gregory Ratoff) vient apporter son aide en vendant une de ses toiles. La chute ou non de la dernière feuille d’un arbre que Joanna aperçoit de sa fenêtre sera un présage pour sa guérison. Si cette partie est sans doute la plus classique sur la forme et le final largement prévisible, les beaux sentiments qui animent ce court métrage, ainsi que la beauté de la photo, des décors et le jeu très émouvant des comédiens emportent facilement l’adhésion.

Après les larmes, voici la partie la plus burlesque de La Sarabande des pantins avec La Rançon du chef rougeRandsom of Red Chief, réalisé par l’immense Howard Hawks ! Direction l’Alabama ! Sam (Fred Allen) et Bill (Oscar Levant), deux escrocs recherchés pour détournement de fonds, enlèvent un petit garçon pour demander une rançon à ses parents. Mais celui-ci se révèle être bien plus malin qu’eux et les deux compères se retrouvent pris à leur propre piège. Avec sa mise en scène dynamique, ses gags visuels et verbaux, son rythme trépident et son petit garnement qui n’est pas sans rappeler Denis la Malice, Howard Hawks signe un vrai bijou, réalisé entre Chérie, je me sens rajeunir et Les Hommes préfèrent les blondes. En 1959, Henri Verneuil adaptera à son tour la même nouvelle d’O. Henry pour Le Grand chef, avec Fernandel.

La Sarabande des pantins se clôt sur un superbe segment, Le Cadeau des rois magesThe Gift of the Magi, réalisé cette fois par Henry King (Le Cygne noir, La Cible humaine). Retour dans un quartier modeste de New York. Della (Jeanne Crain) et Jim (Farley Granger) sont très amoureux l’un de l’autre et n’ont pas sou qui vaille. Néanmoins, pour prouver son inconditionnel amour, chacun est prêt à tous les sacrifices. Porté par le talent, la beauté et la sensualité de Jeanne Crain, Le Cadeau des rois mages est un conte typique de Noël, très efficace et surtout très émouvant.

Toutes ces histoires élégantes et très plaisantes ont bien vieilli et le charme opère toujours autant. La Sarabande des pantins est le film parfait pour les soirées d’hiver qui approchent à grands pas.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de La Sarabande des pantins, disponible chez ESC Editions, a été réalisé à partir d’un check-disc. L’éditeur a misé sur un visuel uniquement centré sur Marilyn Monroe alors qu’elle n’apparaît que deux minutes sur un film de près de deux heures…Le menu principal est animé et musical.

Cela devient récurrent chez l’éditeur, mais c’est un rendez-vous que l’on apprécie. ESC Editions joint une présentation et une analyse du film qui nous intéresse par Mathieu Macheret, critique cinéma pour Le Monde (17’). Très inspiré, ce dernier détaille chaque partie du film à sketches, présente à la fois les réalisateurs et les comédiens, les thèmes explorés, tout en donnant quelques indications sur la carrière et les écrits de O. Henry.

L’interactivité se clôt sur une vidéo comparative avant/après la restauration (4’).

L’Image et le son

Une question : où est passé le grain original, visible dans le second supplément ? Cette belle patine argentique a subi un sacré lissage pour l’arrivée de La Sarabande des pantins dans les bacs. Les puristes risquent de faire la grimace avec raison. Bon, sinon la copie présentée vaut quand même le déplacement et l’apport HD est omniprésent. Disponible pour la première fois en France, en DVD et en Blu-ray, ce film à sketches dispose d’un master solidement restauré, présenté au format respecté 1.37 et on ne peut plus flatteur pour les mirettes. Tout d’abord, le travail des quatre chefs opérateurs (Joseph MacDonald ayant opéré sur deux segments) s’accorde parfaitement dans un superbe N&B qui trouve une densité inespérée dès l’ouverture. La restauration est indéniable, aucune poussière ou scorie n’a survécu au scalpel numérique, l’image est d’une stabilité à toutes épreuves. Les contrastes sont fabuleux et le piqué n’a jamais été aussi tranchant. Le cadre fourmille de détails, les fondus enchaînés n’entraînent pas de décrochages et ce master participe à la redécouverte de ce film collectif.

L’éditeur nous propose uniquement la version originale (aux sous-titres français non imposés) de La Sarabande des pantins, disponible en DTS HD Master Audio 2.0. Dynamique, clair, homogène et naturel, très propre et sans souffle, ce mixage installe un confort acoustique très plaisant.

Crédits images : © Fox / ESC Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / L’Héritier, réalisé par Philippe Labro

L’HÉRITIER réalisé par Philippe Labro, disponible en Blu-ray le 5 septembre 2017 chez Studiocanal

Acteurs :  Jean-Paul Belmondo, Carla Gravina, Jean Rochefort, Charles Denner, Maureen Kerwin, Jean Desailly, Jean Martin, François Chaumette, Maurice Garrel…

ScénarioJacques Lanzmann, Philippe Labro

Photographie : Jean Penzer

Musique : Michel Colombier

Durée : 1h52

Date de sortie initiale : 1973

LE FILM

Fils à papa et playboy renommé, Bart Cordell se retrouve à la tête d’un véritable empire à la mort de son père. Pas vraiment préparé pour être un homme d’affaires, Cordell va devoir faire ses preuves, tout en prouvant que l’accident d’avion de son père a été provoqué…

« Montrez-moi un héros et je vous écrirai une tragédie. » Francis Scott Fitzgerald

A la fin des années 1960 – début 1970, Jean-Paul Belmondo est l’un des comédiens qui règnent sur le cinéma français. Le comédien oscille alors entre comédies populaires et films d’auteurs. Bebel passe allègrement d’un genre à l’autre, de Gérard Oury à François Truffaut, en passant par Louis Malle, Robert Enrico, Claude Lelouch, Jacques Deray, Jean-Paul Rappeneau, Claude Chabrol, Henri Verneuil et José Giovanni. Tout cela en l’espace de cinq ans. En allant rendre visite à sa compagne, la magnifique Laura Antonelli, sur le tournage de Sans mobile apparent, Jean-Paul Belmondo observe la méthode Labro. Conforté par son complice de toujours Jean-Pierre Marielle, qui joue également dans le film, sur le professionnalisme du metteur en scène, Bebel fait part à Philippe Labro qu’il souhaiterait collaborer avec lui. Il n’en fallait pas plus à ce dernier et à son coscénariste Jacques Lanzmann pour lui écrire un thriller dramatique sur mesure. Ce sera donc L’Héritier.

Hugo Cordell, grand patron de la presse et de l’industrie, trouve la mort dans l’explosion de son avion, entre Genève et Paris. L’examen des débris de l’appareil ne permet pas d’établir avec certitude les causes de l’accident. À Paris, les dirigeants de Globe, l’hebdomadaire français du groupe Cordell, attendent avec anxiété l’arrivée de Barthelemy, dit Bart, l’héritier de l’empire Cordell (vous avez dit Largo Winch ?), qui a émis le désir de prendre connaissance du dernier numéro avant son impression. Dans l’avion qui le ramène des États-Unis, Bart flirte avec la séduisante Lauren, qui glisse dans sa poche un ticket de bagage. À l’aéroport, Bart est accueilli par le staff directorial du Globe et des reporters de la télévision. Le ticket de bagage trouvé par un douanier correspond à une mallette remplie de drogue et on accuse Bart de se livrer à un trafic de stupéfiants. Il comprend alors que son arrivée à la tête de l’empire Cordell qui pèse 150 millions de dollars, n’est pas du goût de tout le monde. Aidé de son fidèle ami, David, il décide de mener son enquête.

« Je ne cherche pas à me faire aimer, je cherche à me faire comprendre. »

La carrière cinématographique de Philippe Labro a toujours été influencée par le polar américain, son genre de prédilection. L’Héritier ne fait pas entorse à la règle puisqu’on y retrouve l’atmosphère, le cadre et les décors propres au thriller US. A la limite de l’expérimental, le cinéaste joue avec le montage et notamment les ruptures. Ces intentions et partis pris n’ont pas eu que du bon pour la postérité de L’Héritier, qui a pris pas mal de rides, contrairement à la partition toujours inspirée de Michel Colombier. Dépourvu d’humour, froid, le troisième long métrage de Philippe Labro offre néanmoins à Jean-Paul Belmondo un rôle atypique, peu attachant et qui ne fait d’ailleurs rien pour créer une once d’empathie en faisant la tronche et en plissant le front pendant près de deux heures, mais qui demeure au final curieux du début à la fin.

Grand succès public en mars 1973 avec plus de 2 millions d’entrées, L’Héritier se voit aujourd’hui comme une curiosité dans la filmographie de Bebel, ainsi que pour son casting quatre étoiles puisque la divine Carla Gravina (L’Antéchrist d’Alberto De Martino), Jean Rochefort, Charles Denner, Jean Desailly, Michel Beaune, François Chaumette, Maurice Garrel, Jean Martin gravitent autour du comédien principal, droit comme un i et corseté dans des costumes trois-pièces. Philippe Labro parle du monde impitoyable et cynique de la presse, le sien, par ailleurs le personnage de Liza Rocquencourt, interprété par Carla Gravina, n’est pas sans rappeler Françoise Giroud, mais également de celui de l’entreprise, où les concurrents sont prêts à tout pour devenir le leader européen. Récit initiatique, polar, drame, L’Héritier touche à tout, c’est sans doute ce qui fait sa faiblesse puisque le récit part dans tous les sens et sans gestion du rythme, mais c’est aussi ce qui fait aussi sa force puisque Labro ne donne pas toutes les clés de ses personnages et son film paraît même parfois quasi-inclassable. Son épilogue inoubliable pour les fans de Bebel a largement contribué à conférer à L’Héritier un statut culte.

LE BLU-RAY

L’édition HD de L’Héritier est disponible chez Studiocanal. Le DVD du film était déjà disponible chez le même éditeur depuis 2007. Le menu principal est fixe et muet, triste…

Comme pour l’édition HD de L’Alpagueur, Philippe Labro présente L’Héritier (29’) à travers un entretien souvent passionnant. Le réalisateur s’attarde sur la genèse de son troisième long métrage et troisième collaboration avec Jacques Lanzmann, sur l’écriture du scénario, les thèmes abordés, ses intentions et ses inspirations (l’ascension et l’assassinat de JFK, le cinéma de Jean-Pierre Melville, Bas les masques de Richard Brooks), sa collaboration avec Jean-Paul Belmondo (qui se demandait si les spectateurs allaient l’accepter dans la peau de ce personnage), l’épilogue (tourné à 5 caméras et inspiré de l’assassinat de Lee Harvey Oswald par Jack Ruby), l’accueil et la postérité de son film. S’il s’égare parfois en parlant longuement de son amitié avec Jean-Pierre Melville, qui l’a beaucoup conseillé pour le tournage de Sans mobile apparent (qui au passage n’est jamais sorti en DVD et qu’on attend toujours !), Philippe Labro replace brillamment L’Héritier dans sa filmographie et dans son contexte politico-financier, le tout agrémenté d’anecdotes de tournage.

L’Image et le son

L’apport HD pour L’Héritier est ici moins flagrant que pour L’Alpagueur. Le générique est marqué par un grain très imposant et le reste du film restera du même acabit avec un piqué émoussé et un manque de définition récurrent. La gestion des contrastes est correcte, la copie affiche une solide stabilité et la propreté de la copie est indéniable. Quelques plans sombres et flous semblent inhérents aux conditions de tournage, tandis que les partis pris esthétiques froids du chef opérateur Jean Penzer (Le Diable par la queue de Philippe de Broca, Préparez vos mouchoirs de Bertrand Blier) sont ici respectés dans la mesure du possible.

Le mixage français DTS-HD Master Audio Mono 2.0 instaure un honnête confort acoustique, même si certains échanges paraissent parfois étouffés et sourds. La propreté est de mise, les silences denses, sans aucun souffle. La composition de Michel Colombier est quant à elle la mieux lotie. Mauvais point en revanche pour l’absence de sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, tout comme celle d’une piste Audiodescription qui manque à l’appel.

Crédits images : © Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test DVD / Freud, passions secrètes, réalisé par John Huston

FREUD, PASSIONS SECRÈTES (Freud: The Secret Passion) réalisé par John Huston, disponible en DVD le 12 septembre 2017 chez Rimini Editions

Acteurs :  Montgomery Clift, Susannah York, Larry Parks, Susan Kohner, Eileen Herlie, Fernand Ledoux, David McCallum…

ScénarioWolfgang Reinhardt, Charles Kaufman

Photographie : Douglas Slocombe

Musique : Jerry Goldsmith

Durée : 2h15

Date de sortie initiale : 1962

LE FILM

1885. Sigmund Freud, 29 ans, est neurologue à l’hôpital général de Vienne. Confronté à des cas pathologiques qui défient la médecine traditionnelle, il n’hésite pas à faire appel à l’hypnose pour essayer de comprendre le mal dont souffrent les patients. Au fur et à mesure de ses expériences, Freud perçoit qu’il est tout proche de l’une des découvertes majeures de l’histoire de la science.

« Il est préférable de laisser les scorpions dans l’obscurité… »

Freud, passions secrètes, Freud: The Secret Passion ou tout simplement Freud est un chef d’oeuvre caché de John Huston. Sorti en 1962, ce film admirable et pourtant oublié est aussi l’avant-dernier long métrage du comédien Montgomery Clift, éblouissant dans le rôle-titre. Plus qu’un biopic, John Huston met en scène la découverte de la psychanalyse et de l’inconscient. La passion du réalisateur pour ce sujet remonte à la Seconde Guerre mondiale. Mobilisé dans l’équipe des cinéastes militaires de l’U.S. Army, sous la direction de Frank Capra, John Huston est appelé à réaliser quelques documentaires auprès des soldats. C’est le cas du méconnu Que la lumière soitLet there be light (1946) qui suit une équipe de psychiatres tenter de soigner des rescapés, victimes de chocs traumatiques. Certains présentent des troubles de la vue, d’autres sont visiblement handicapés ou angoissés, persuadés qu’une bombe va leur tomber dessus. John Huston observe ces médecins avoir recours à la psychanalyse et à l’hypnose. Fasciné, il sait qu’il réalisera plus tard un film tournant autour de Freud. Considéré comme un film capital sur le traitement psychiatrique des blessés de guerre, Que la lumière soit est néanmoins interdit par le Pentagone et restera inédit jusqu’en 1981. Sélectionné dans la section Un certain regard au Festival de Cannes cette année-là, les spectateurs découvrent des images insoutenables. Après son film maudit Les DésaxésThe Misfits (1961) et suite à de longues recherches sur Freud durant lesquelles il s’initie même aux techniques de l’hypnose, John Huston entreprend enfin ce projet qui lui tenait à coeur depuis une quinzaine d’années.

Le jeune Sigmund Freud se rend à Paris pour rencontrer le professeur Charcot, dont les travaux sur l’hypnose l’intéressent depuis longtemps. Revenu à Vienne, il poursuit ses propres recherches sur l’hystérie, malgré l’opposition de son entourage. Seul le docteur Breuer le soutient et l’encourage dans ses recherches. Au contact de patients névrosés, Freud découvre le rôle prépondérant de la sexualité dans les mécanismes de l’inconscient et, malgré la désapprobation collective de ses collègues psychiatres, en vient à élaborer une théorie sur l’origine sexuelle des névroses.

« Quelle magnificence d’éclairer les ténèbres de vos lumières ! »

Dans un premier temps, en 1958, John Huston avait demandé au philosophe et écrivain Jean-Paul Sartre d’écrire le scénario. Ce dernier n’avait pas pris la chose à la légère et avait finalement remis au réalisateur un scénario documenté de plus de 400 pages, uniquement concentré sur les débuts de Freud en tant que neurologue. Après avoir décliné poliment ce travail de titan, John Huston se tourne vers un scénariste plus « expérimenté », Wolfgang Reinhardt. Freud, passions secrètes est le fruit de toutes ces études poussées. Souvent filmé comme un thriller, le récit est haletant et le cinéaste parvient à mettre en scène la passion d’un homme, qui vit littéralement pour son travail. Montgomery Clift, bien qu’extrêmement souffrant sur le tournage et au plus mal avec ses problèmes d’alcool – Huston, excédé, pense sérieusement le remplacer par Eli Wallach – incarne Freud à la perfection. Avec son regard perçant, à tel point que ses yeux bleus illuminent la superbe photographie N&B crépusculaire du chef opérateur Douglas Slocombe (Gatsby le magnifique, les trois premiers Indiana Jones), le comédien restitue tout le feu qui anime son personnage, un foyer sans cesse attisé par de nouvelles découvertes. Bien que marié à la jeune Martha (magnifique Susan Kohner, la Sarah Jane de Mirage de la vie de Douglas Sirk), Freud se lance seul dans cette aventure. John Huston a recours à quelques plans hérités de l’expressionnisme allemand pour renforcer l’aspect « monstre » de Freud, dont la silhouette se dessine dans la pénombre, quand celui-ci entreprend de rendre visite à ses patients cobayes (dont la divine Susannah York), avant de réaliser sa propre analyse pour affronter ses démons. Cette impression quasi-fantastique est par ailleurs renforcée par la composition angoissante de Jerry Goldsmith.

John Huston filme ensuite son personnage, seul contre tous, annoncer à ses confrères l’aboutissement de son travail. Freud est filmé de dos, comme jeté dans une arène où l’ambiance est effervescente, comme si les spectateurs étaient prêts à le lyncher. Cela ne manque pas d’arriver au moment où Freud leur présente ce qui l’avait effrayé dans un premier temps, puis ce qui allait alors devenir un concept central dans la psychanalyse, le complexe d’Oedipe. Drame psychologique, biopic et même parfois inclassable quand le cinéaste a recours au rêve et aux fantasmes pour montrer – et c’est ce qui l’intéresse le plus – la pensée à l’oeuvre chez son personnage principal, Freud, passions secrètes est un chef d’oeuvre trépidant, magistral et remarquablement documenté. Enfin, notons qu’à sa sortie, les distributeurs ont imposé à John Huston de couper une demi-heure de son film, jugé alors trop austère. S’il restera très attaché à Freud, passions secrètes tout au long de sa vie, il reniera en revanche le montage sorti dans les salles.

LE DVD

Le DVD de Freud, passions secrètes, disponible chez Rimini Editions, repose dans un boîtier classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné. Visuel attractif centré sur Montgomery Clift. Le menu principal est animé et musical.

Pour cette édition, l’éditeur est allé à la rencontre de Marie-Laure Susini, psychanalyste et écrivain, membre de l’École de La Cause Freudienne de 1981 à 1991, puis de l’École de Psychanalyse Sigmund Freud de 1993 à 2010. Dans le premier segment intitulé Freud, le film oublié (22’), notre interlocutrice se penche sur la genèse du film de John Huston et déclare « c’est un chef d’oeuvre, mais même les plus grands fans de John Huston le connaissent peu ». Marie-Laure Susini évoque les ouvrages sur la vie de Freud (dont une biographie écrite par Stefan Zweig, Sigmund Freud : La guérison par l’esprit), les raisons qui ont poussé John Huston à réaliser un film sur la découverte de la psychanalyse (qui découle du documentaire Que la lumière soit, dont on nous présente un extrait), l’évolution du scénario (dont l’épisode Jean-Paul Sartre), le casting (Montgomery Clift est selon elle parfait), les conditions de tournage et les intentions du cinéaste. Dommage que cette intervention soit sans cesse entrecoupée d’extraits du film, de la bande-annonce ou de photos de moyenne qualité.

Dans un second module (Freud, secrets d’adaptation, 12’), Marie-Laure Susini se concentre sur le fond du film et la façon dont John Huston a abordé l’inconscient dans Freud, passions secrètes. Elle déclare que tous les dialogues sont « incroyablement construits et totalement au service de la psychanalyse », que les séquences de rêve imaginées par le cinéaste sont formidables et précises et que John Huston a parfaitement retranscrit le travail méticuleux et complexe, ainsi que l’aventure intérieure d’un homme seul pendant plus de dix ans.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

On ne sait pas où Rimini Editions est allé chercher cette copie, toujours est-il que le master présenté ici a semble-t-il connu quelques heures de vol. Dès la première séquence, les fourmillements s’invitent, ainsi que des points blancs, de nombreuses rayures verticales, des pixels, des plans flous. Il faut attendre quelques minutes pour que la copie au dégrainage assez conséquent, trouve enfin une certaine stabilité, même si les défauts ont tendance à réapparaître tout au long de ces 135 minutes. Les séquences de rêves sont les plus abimées du lot, les noirs sont charbonneux, le manque de piqué est conséquent, quelques séquences paraissent surexposées et la définition chancelle à plusieurs reprises. Il faudra se contenter de cette image, car soyons honnêtes, découvrir Freud, passions secrètes en DVD en 2017 était quasi-inespéré.

L’éditeur ne propose que la version originale du film de John Huston. Plutôt dynamique, nettoyée, homogène et naturelle, sans souffle parasite, cette piste Dolby Digital 1.0 offre un confort acoustique solide et restitue admirablement les somptueux dialogues et la musique de Jerry Goldsmith. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Universal Studios. Renewed 1990 Universal Studios. All Rights Reserved. TM & © 2017 Universal Studios All Rights Reserved . Rimini Editions / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / De toutes mes forces, réalisé par Chad Chenouga

DE TOUTES MES FORCES réalisé par Chad Chenouga, disponible en DVD le 5 septembre 2017 chez Ad Vitam

Acteurs :  Khaled Alouach, Yolande Moreau, Laurent Xu, Daouda Keita, Aboudou Sacko, Jisca Kalvanda…

Scénario :  Chad Chenouga, Christine Paillard

Photographie : Thomas Bataille

Durée : 1h34

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Nassim est en première dans un grand lycée parisien et semble aussi insouciant que ses copains. Personne ne se doute qu’en réalité, il vient de perdre sa mère et rentre chaque soir dans un foyer. Malgré la bienveillance de la directrice, il refuse d’être assimilé aux jeunes de ce centre. Tel un funambule, Nassim navigue entre ses deux vies, qui ne doivent à aucun prix se rencontrer.

De toutes mes forces est le second long métrage de Chad Chenouga, quinze ans après 17, rue Bleue (2001). Réalisateur de nombreux courts-métrages, Chad Chenouga s’inspire ici de sa propre enfance. Né de père inconnu et confié à la DDASS après le décès de sa mère alors qu’il était encore adolescent, le cinéaste (également comédien et animateur d’ateliers dans des prisons et des foyers) avait déjà abordé ce thème dans son premier film. Il reprend ici la trame de sa pièce intitulée La Niaque, jouée au Théâtre des Amandiers à Nanterre en 2011, replacée à l’époque contemporaine alors que l’histoire originale se déroulait dans un foyer non mixte dans les années 1970. Drame social animé par une sensibilité à fleur de peau, De toutes mes forces révèle un jeune acteur très prometteur, Khaled Alouach. Une voix, un charisme, une force et une fragilité qui l’imposent d’emblée comme l’un des sérieux prétendants au César du meilleur espoir masculin en 2018.

Nassim vient de perdre sa mère qui s’est suicidée. Sa vie de lycéen insouciant bascule. Sa proche famille ne peut pas le prendre chez elle. Il est donc pris en charge par Madame Cousin, qui l’accueille dans son foyer de jeunes. Nassim, bouleversé par la mort de sa mère, ne veut pas s’intégrer au groupe. Il s’enferme dans son chagrin, ses notes dégringolent et il tente de faire le mur pour retrouver sa petite-amie à qui il a caché la vérité. Quand celle-ci l’apprend, elle ne comprend pas l’attitude de Nassim. Soutenu par Madame Cousin, le jeune homme tente de remonter la pente. Chad Chenouga, aidé de sa coscénariste Christine Paillard, suivent le personnage de Nassim à un carrefour décisif de son existence. De rencontre en rencontre, le jeune homme qui voit alors sa vie partir en éclats, doit parvenir à faire le deuil de sa mère (il écoute sans cesse son dernier message laissé sur son répondeur), dépressive, dépendante aux médicaments, cloîtrée dans un appartement aux fenêtres closes, surmonter sa culpabilité (il l’a laissée seule pour partir en week-end avec des amis), tout en prenant des décisions capitales pour son avenir professionnel.

De toutes mes forces est animé d’une énergie contagieuse, d’une rage et même d’une fureur de (sur)vivre qui foudroient du début à la fin, autant par la mise en scène que par la musique électro ou au banjo du compositeur Thylacine. Sans clichés, Chad Chenouga rend attachants Nassim et les personnages secondaires qui gravitent autour de lui comme des électrons, Moussa, Brahim, Zawady (Jisca Kalvanda, vue dans Divines), Kevin, Mina, Ryan (épatants et naturels jeunes comédiens trouvés au terme d’un casting sauvage) qui essayent de comprendre, d’apprivoiser ce monde difficile et qui n’est pas prêt à leur faire de cadeaux. Un combat souvent trop pesant pour ces jeunes personnes, qui ne sont guère armées pour affronter et surmonter leurs peurs et leurs doutes. Ils sont pris en charge par la directrice, Mme Cousin, merveilleusement interprétée par Yolande Moreau, qui doit maintenir la discipline dans son établissement, mais qui ne peut s’empêcher de leur montrer quelques signes d’affection. Les pensionnaires tentent de refermer leurs blessures, mais certaines plaies restent ouvertes et le besoin de communiquer, ou tout au moins de se faire comprendre n’est que plus vital. Si certains y parviennent au moyen de la danse, le groupe peut effrayer et chacun se renferme sur lui-même.

Récit initiatique, portrait sans pathos et même avec un peu d’humour d’un adolescent dont le calme apparent dissimule en réalité un tempérament volcanique, De toutes mes forces est un très beau film, élégant, chaleureux et optimiste. Du cinéma français délicat comme en voit finalement rarement.

LE DVD

Le test du DVD de Toutes mes forces, disponible chez Ad Vitam, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

L’éditeur livre quelques suppléments de très courte durée, mais plutôt plaisants. C’est le cas des scènes coupées (3’30) qui prolongent le quotidien de Nassim dans son foyer, ainsi que la rencontre avec Ryan.

Un petit module de cinq minutes compile quelques entretiens avec le réalisateur et les comédiens, ainsi que des images de tournage, du plateau et de l’avant-première en présence de l’équipe à l’UGC Ciné Cité Bercy suivie de l’avis des spectateurs.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et un bêtisier (2’) où l’on remarque que le titre de travail était encore La Niaque.

L’Image et le son

Quelques petites pertes de la définition sur les scènes sombres et un piqué manquant parfois de mordant sont à déplorer. Néanmoins, ce master demeure fort plaisant et n’a de cesse de flatter les yeux avec une belle restitution de la colorimétrie à la fois chatoyante et froide. Les contrastes sont denses et élégants, la gestion solide, le relief palpable, les détails précis sur les gros plans et les partis pris esthétiques du chef opérateur Thomas Bataille sont bien respectés.

Le mixage français Dolby Digital 5.1 parvient à créer une spatialisation musicale probante. En revanche, les ambiances naturelles viennent souvent à manquer sur les séquences en extérieur et l’ensemble se révèle souvent timide. Le report des voix est solide, la balance frontale fait gentiment son boulot, mais beaucoup de scènes reposent essentiellement sur les enceintes avant. À titre de comparaison, la version Stéréo finit par l’emporter sur la 5.1 du point de vue fluidité et homogénéité des voix avec les effets et la musique. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription pour aveugles et malvoyants.

Crédits images : © Ad Vitam / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Sept morts sur ordonnance, réalisé par Jacques Rouffio

SEPT MORTS SUR ORDONNANCE réalisé par Jacques Rouffio, disponible en DVD et Blu-ray le 5 septembre 2017 chez TF1 Vidéo

Acteurs :  Michel Piccoli, Gérard Depardieu, Jane Birkin, Marina Vlady, Charles Vanel, Michel Auclair…

Scénario :  Jacques Rouffio, Georges Conchon, Jean-Louis Chevrier

Photographie : Andréas Winding

Musique : Philippe Sarde

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 1975

LE FILM

Le docteur Losseray, chirurgien talentueux, est victime d’un infarctus. Il s’en remet doucement. Mais son arrêt de travail réjouit le vieux professeur Brézé, qui dirige avec ses fils une clinique concurrente. Plusieurs fois, Brézé pousse Losseray à prendre sa retraite. Des années auparavant, soumis à une pression similaire de la famille Brézé, le docteur Berg, flambeur et brillant, avait assassiné sa famille avant de se suicider.

C’est un film qui fait froid dans le dos, qui donne la sensation qu’une main se referme progressivement sur votre gorge. Sept morts sur ordonnance est le second long métrage de Jacques Rouffio (1928-2016), réalisé neuf ans après son premier film L’Horizon, échec cinglant. S’il a peu tourné avec huit films mis en scène de 1967 à 1989 (dont Violette et François, Le Sucre et La Passante du Sans-Souci), Jacques Rouffio, ancien assistant de Jean Delannoy, Henri Verneuil et Georges Franju, s’est toujours démarqué par ses sujets atypiques. Comme l’indique une voix-off en guise d’épilogue, l’histoire de Sept morts sur ordonnance est inspirée par des événements réels qui se sont produits dans une même ville de France, un tragique double fait divers survenu à Reims dans les années 1960, à quelques années d’intervalle. Chef d’oeuvre du cinéma français des années 1970, bijou noir, Sept morts sur ordonnance demeure un vrai film coup de poing.

Losseray (Michel Piccoli), un brillant chirurgien, s’installe dans une ville de province. Son talent fait bientôt ombrage au clan des Brézé, réuni autour de son patriarche (Charles Vanel) et rassemblé par la gestion de quelques cliniques privées dont s’éloignent peu à peu les patients. Harcelé par ses concurrents, poussé à bout, Losseray est contraint de prendre un congé après un infarctus. Il s’intéresse à l’affaire Berg (Gérard Depardieu), un excellent médecin qui, quinze ans plus tôt, s’était suicidé après avoir tué sa femme (Jane Birkin) et ses trois enfants. Losseray retourne à sa clientèle mais, de plus en plus obsédé par la fin tragique de son prédécesseur et toujours soumis aux pressions des Brézé, il enquête parallèlement sur l’affaire Berg. Comme sur L’Horizon, Jacques Rouffio écrit le scénario avec Georges Conchon et s’attaquent cette fois aux notables de province et plus particulièrement ceux du monde médical. Tourné à Clermont-Ferrand et à Madrid (pour des raisons de coproduction), Sept morts sur ordonnance instaure d’emblée un malaise avec la composition envoûtante et funèbre de Philippe Sarde (qui rappelle le thème de Police Python 357 de Georges Delerue) et la photo froide, pour ne pas dire « clinique » (sans faire de jeux de mots) du chef opérateur Andréas Winding (Playtime, Le Passager de la pluie, Le Trio infernal).

Le spectateur est ensuite invité à suivre l’itinéraire de deux personnages, deux éminents chirurgiens, dont les destins vont être tragiquement liés. Ainsi, Losseray mène son enquête comme un flic et le spectateur découvre alors via quelques flashbacks la vie et la tragique disparition de Berg, médecin peu orthodoxe, interprété par un immense Gérard Depardieu qui sortait à peine des Valseuses de Bertrand Blier. Ce qui relie les deux est la pression exercée par les Brézé, clan familial de médecins composé du père, de ses trois fils et de son gendre, qui règnent en « maîtres » comme une vraie mafia sur la ville, notamment le père incarné par un vénéneux et monstrueux Charles Vanel qui ne pense qu’à s’enrichir sur le dos de ses patients, et qui voient d’un mauvais œil la renommée de leurs confrères, surtout quand ceux-ci déclinent leur proposition d’intégrer leur établissement. D’où un affrontement générationnel particulièrement violent, représenté par un Depardieu qui se permet de gifler Vanel, son aîné, en le remettant à sa place. Mais la vengeance et le harcèlement psychologique exercés par le second auront finalement raison du premier qui franchira le point de non-retour dans une séquence de carnage insoutenable, puisqu’il assassinera ses trois enfants et sa femme avant de se tuer.

Quinze ans plus tard, quand un nouveau chirurgien appartenant à une clinique concurrente en vient à s’occuper d’un quart des patients, les Brézé voient rouge – « Ça va au-delà de l’argent, il a un problème moral ! » – et l’histoire de se répéter. Drame chabrolien très dérangeant, tendu comme un thriller, ouvertement politique, redoutablement pessimiste, cruel, sombre et malgré tout divertissant, Sept morts sur ordonnance est non seulement l’un des meilleurs films de Jacques Rouffio, mais demeure également une référence du cinéma français quand il savait encore allier le cinéma populaire et le cinéma d’auteur, divertir tout en invitant le spectateur à la réflexion.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Sept morts sur ordonnance, disponible chez TF1 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur une des séquences du film.

Le premier supplément est une interview de Jacques Rouffio réalisée par Jérôme Wybon en 2009 (7′). Le cinéaste revient sur sa collaboration et son amitié avec Georges Conchon, la genèse de Sept morts sur ordonnance et le casting. Michel Piccoli et Charles Vanel apparaissent également à travers quelques images d’archives. Les comédiens s’expriment sur le travail avec Jacques Rouffio et sur les thèmes de Sept morts sur ordonnance.

L’éditeur joint également deux reportages télévisés d’époque, le premier centré sur le tournage à Clermont-Ferrand (3’30, JT FR3 Auvergne, 30 juin 1975) alors que le film s’intitulait encore « Chers vieux », le second concentré essentiellement sur les comédiens Charles Vanel, Jane Birkin et Michel Piccoli, enregistrés séparément (4’, JT FR3 Auvergne, 14 août 1975). Dans le premier module, durant une pause cigarette, Jane Birkin, Gérard Depardieu et Michel Piccoli partagent leurs impressions de tournage et le travail avec Jacques Rouffio, tandis que ce dernier se penche sur l’histoire.

Dans le second reportage, Jane Birkin répond entre autres aux questions du journaliste avec son sourire contagieux et évoque ses prochains tournages, La Course à l’échalote de Claude Zidi et Je t’aime moi non plus de Serge Gainsbourg.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale constituée de prises alternatives.

L’Image et le son

Fort d’une promotion numérique et d’une restauration 4K réalisée à partir du négatif original par Mikros Image, Sept morts sur ordonnance est enfin proposé dans un master HD de très haut niveau, qui permet d’apprécier enfin la photographie d’Andréas Winding comme il se doit. Bien qu’elles demeurent froides et presque cotonneuses sur les séquences sombres, les scènes extérieures sont les mieux loties avec un relief plus probant, un piqué plus acéré et des détails plus nombreux. Les séquences nocturnes ne sont pas pour autant dédaignées avec une jolie restitution des matières, le grain cinéma est respecté, la copie affiche une stabilité jamais prise en défaut (on oublie quelques minimes fourmillements), la copie demeure impressionnante, la propreté est indéniable (toutes les scories ont disparu) et les contrastes assurés avec des noirs solides. Vous pouvez d’ores et déjà mettre votre DVD (édité en 2009) à la poubelle !

Le mixage DTS-HD Master Audio Mono instaure un réel confort acoustique. Les dialogues sont ici délivrés avec ardeur et clarté, la propreté est de mise, les effets riches et les silences denses, sans aucun souffle. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © TF1 Vidéo / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Plus dure sera la chute, réalisé par Mark Robson

PLUS DURE SERA LA CHUTE (The Harder They Fall) réalisé par Mark Robson, disponible en DVD et Blu-ray le 10 octobre 2017 chez Sidonis Calysta

Acteurs :  Humphrey Bogart, Rod Steiger, Jan Sterling, Mike Lane, Max Baer, Jersey Joe Walcott, Edward Andrews…

Scénario :  Philip Yordan d’après le roman d’après le roman « Plus dure sera la chute » (The Harder They Fall) de Budd Schulberg

Photographie : Burnett Guffey

Musique : Hugo Friedhofer

Durée : 1h49

Date de sortie initiale : 1956

LE FILM

Eddie Willis, journaliste sportif au chômage, accepte l’offre de Benko, un manager de boxe corrompu, pour monter une combine qui les rendra riches. Ils profitent de la naïveté de Toro Moreno, un boxeur lourd et pataud, pour abuser du public auquel ils le présentent comme une force de la nature. Match après match, Toro écrase ses adversaires et gagne la sympathie du public qui, comme lui, ignore que chaque rencontre est truquée. Après avoir accepté toutes les compromissions, Eddie finira par écrire un article sur le racket dans le milieu de la boxe.

Plus dure sera la chuteThe Harder They Fall est le dernier long métrage tourné par le mythique Humphrey Bogart. Agé de 56 ans, le comédien était alors souffrant depuis plusieurs mois et se savait condamné par un cancer de l’oesophage. La maladie l’emportera en janvier 1957. Depuis 1951, Humphrey Bogart souhaite se diriger vers des rôles qui diffèrent de ceux qui l’ont rendu célèbre. Le tournant arrive en 1951 avec African Queen de John Huston, pour lequel il obtient l’Oscar du meilleur acteur. Après Bas les masques de Richard Brooks, Sabrina de Billy Wilder et La Comtesse aux pieds nus de Joseph L. Mankiewicz, Humphrey Bogart retrouve le réalisateur Edward Dmytryk, qui l’avait dirigé dans Ouragan sur le Caine, pour La Main gauche du Seigneur, The Left Hand of God. Si le film n’est pas un chef-d’oeuvre, il vaut encore largement le coup pour admirer les comédiens, notamment la magnifique Gene Tierney. Bogart tourne ensuite La Maison des otages sous la direction de l’immense William Wyler, avant de s’engager sur Plus dure sera la chute. Une œuvre quasi-testamentaire.

Mis en scène par le canadien Mark Robson (1913-1978), ancien monteur de Jacques Tourneur sur La Féline et Vaudou, mais aussi d’Orson Welles sur La Splendeur des Amberson, Plus dure sera la chute offre à Bogey l’un de ses plus beaux rôles. Eclectique, mais aussi inégal, on doit à Mark Robson Le Champion avec Kirk Douglas (1949), déjà un film sur le milieu de la boxe, Le Procès avec Glenn Ford (1955), ainsi que deux films de guerre très célèbres, L’Express du colonel Von Ryan avec Frank Sinatra (1965) et Les Centurions avec Anthony Quinn et Alain Delon (1966). L’un de ses derniers films, Tremblement de terre (1974) demeure l’un des fleurons du genre catastrophe. Bon technicien, il signe avec Plus dure sera la chute un de ses meilleurs films, peut-être même son chef d’oeuvre.

Humphrey Bogart incarne Eddie Willis, journaliste sportif en quête d’un scoop, contacté par le manager et chef du «syndicat» de la boxe, Nick Benko (Rod Steiger, monumental), qui lui propose de contribuer à la promotion d’un jeune boxeur argentin, Toro Moreno. Espérant découvrir un futur champion, Willis accepte l’offre. Il ne tarde pas à déchanter. En effet, bien qu’impressionnant à première vue, Moreno boxe à peine mieux qu’un débutant. Willis comprend vite que ses combats sont truqués. Pour son dernier baroud d’honneur, Humphrey Bogart ne pouvait espérer plus beau personnage. Critique virulente du milieu sportif, Plus dure sera la chute montre un monde pourri, régi par des salopards véreux qui ne pensent qu’à l’argent et qui traitent les hommes comme des animaux, comme s’ils dirigeaient des combats de coqs, en ayant recours à des combines infâmes, tout en convoitant le pactole. S’il est étrange, pour ne pas dire invraisemblable, que le personnage incarné par Bogey paraisse crédule au début du film et semble ne pas se douter autant des agissements que des desseins de Benko, le comédien lui apporte une impressionnante ambiguïté qui fait passer la pilule. Ou quand le jeu sobre et tout en retenue de Bogart (impérial) contraste merveilleusement avec celui de la méthode de Rod Steiger, déchaîné, qui ne tient pas en place, qui vocifère et jure en se retenant continuellement de taper du poing sur la table.

Face à ce manager corrompu et magouilleur, Eddie Willis devra faire un choix entre préserver son intégrité ou s’enrichir au détriment de toutes déontologies. Se prenant d’affection pour ce grand colosse aux pieds d’argile qu’il est supposé vendre à la presse comme étant le futur champion du monde, Eddie doit bien admettre que Toro (inspiré du boxeur Primo Carnera, 1,97 m pour 122 kg, champion du monde des poids lourds en 1933) ne sait pas se battre et que seule sa taille hors normes impressionne le milieu et les lecteurs de ses articles. Jusqu’à ce que Benko et ses hommes aillent trop loin en envoyant Toro à l’abattoir dans un match final violent et d’une rare brutalité, remarquablement filmé caméra à l’épaule, dans un N&B charbonneux (sublime photo de Burnett Guffey, chef opérateur de Tant qu’il y aura des hommes et Bonnie et Clyde) et qui inspirera plus tard Martin Scorsese pour Raging Bull. Eddie est bien décidé à sauver la peau de Toro, malgré les menaces de Benko à son égard, avant que le supposé boxeur ne finisse dans le caniveau, la cervelle en bouillie, comme le montre cette séquence hallucinante de l’interview de l’ancien « champion » de boxe, devenu clochard, édenté et handicapé.

Divertissement passionnant doublé d’un pamphlet acide écrit par Philip Yordan, du moins ce que crédite le générique puisque Yordan a longtemps servi de prête-nom pour des auteurs victimes du Maccarthysme, d’après le roman éponyme de Budd Schulberg publié en 1947, Plus dure sera la chute rejoint ainsi les grandes réussites du genre sportif aux côtés de Nous avons gagné ce soir (1949) et Marqué par la haine (1956), tous deux réalisés par Robert Wise.

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Plus dure sera la chute, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé sur la musique du film.

Une fois n’est pas coutume, pas de Patrick Brion sur cette édition ! En revanche, Bertrand Tavernier et François Guérif ont répondu présent. Durant son intervention de 28 minutes, le premier indique d’emblée qu’il s’agit d’un des meilleurs films de Mark Robson et qu’il a eu un très grand plaisir à réévaluer. Après une rapide présentation du réalisateur et de ses films les plus célèbres, Bertrand Tavernier se penche longuement sur le cas du scénariste Philip Yordan.

Fils d’émigrants polonais, ce dernier demeure un mystère pour les spécialistes du cinéma puisque le scénariste en apparence « prolifique » a longtemps fait travailler d’autres écrivains à sa place et certains scénaristes inscrits sur la tristement célèbre liste noire lors du Maccarthysme. Un prête-nom avoué certes, mais Philip Yordan n’hésitait pas non plus à s’attribuer certains succès qu’il n’avait pas écrits. Pour Bertrand Tavernier, qui avait interviewé Philip Yordan (« j’ai rarement entendu autant de bobards de ma vie » dit d’ailleurs le réalisateur) c’est le cas pour Plus dure sera la chute, dont il attribue la paternité au romancier Budd Schulberg, qui avait adapté lui-même son livre en 1947, qui devait ensuite être mis en scène par Edward Dmytryk.

Le projet tombe à l’eau, mais la Columbia rachète le scénario à la RKO, qui atterrit ensuite sur le bureau de Philip Yordan. Bertrand Tavernier suppose que le scénario original a dû n’être que très légèrement retouché, Yordan y couchant ensuite sa signature. Bertrand Tavernier en vient au casting en revenant sur la dernière apparition d’Humphrey Bogart à l’écran, ainsi que sur le jeu de Rod Steiger, qui avait quelque peu décontenancé Bogey. L’historien du cinéma évoque deux points du récit qui le laissent quelque peu perplexe, mais loue la grande réussite de Plus dure sera la chute, encense la photo du chef opérateur Burnett Guffey, la mise en scène et le montage rapide, l’utilisation des décors et l’attention aux petits détails. Voilà une remarquable présentation !

De son côté, François Guérif peine évidemment à nous donner quelques indications supplémentaires, surtout en huit minutes. L’éditeur et passionné de film noir se concentre surtout sur le roman de Budd Schulberg et sa représentation du monde sportif dans Plus dure sera la chute où tous les personnages sont pourris et seulement intéressés par l’appât du gain.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos.

L’Image et le son

Ce master restauré au format respecté de Plus dure sera la chute, jusqu’alors inédit en France et présenté ici pour la première fois au monde en Haute-Définition, est on ne peut plus flatteur pour les mirettes. Tout d’abord, le splendide N&B de Burnett Guffey (Les Désemparés, Désirs humains) retrouve une densité inespérée dès l’ouverture. La restauration est indéniable, aucune poussière ou scorie n’a survécu au scalpel numérique, l’image est d’une stabilité à toutes épreuves. Les contrastes sont fabuleux et le piqué n’a jamais été aussi tranchant. Le grain original est présent, sans lissage excessif, ce qui devrait rassurer les puristes. Le cadre fourmille de détails, les fondus enchaînés n’entraînent pas de décrochages et cette très belle copie participe à la redécouverte de ce grand classique.

L’éditeur nous propose les versions anglaise et française de Plus dure sera la chute. Passons rapidement sur cette dernière, moins dynamique, qui a toutefois bénéficié d’un nettoyage aussi complet que son homologue. Evidemment, notre préférence va pour la version originale, plus homogène et naturelle, tout aussi propre, sans souffle parasite. Le confort acoustique est largement assuré. Les sous-titres français sont imposés sur la version originale et le changement de langue verrouillé.

Crédits images : © Columbia / Sidonis Calysta / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr