Test DVD / Mes trésors, réalisé par Pascal Bourdiaux

MES TRÉSORS réalisé par Pascal Bourdiaux, disponible en DVD le 24 mai 2017 chez M6 Vidéo

Acteurs : Jean Reno, Reem Kherici, Camille Chamoux, Bruno Sanches, Pascal Demolon, Jean Reynès, Natalia Verbeke, Alexis Michalik

Scénario : Juliette Sales, Fabien Suarez, Carole Giacobbi, Michèle Giacobbi

Photographie : Vincent Gallot

Musique : Sinclair

Durée : 1h27

LE FILM

Carole est une informaticienne introvertie qui vit encore chez sa mère.
Caroline est une pickpocket rebelle qui écume les grands hôtels de la côte d’Azur.
Les deux jeunes femmes ne se connaissent pas et n’ont rien en commun. Rien, sinon leur père, envolé avant leur naissance et qu’elles n’ont jamais vu.
Jusqu’au jour où… Patrick ressurgit !
Ce voleur international recherché par toutes les polices a frôlé la mort, et décide de rattraper le temps perdu en réunissant ses deux filles autour d’un but commun : le casse d’un Stradivarius à 15 millions d’euros…
Entre les bourdes, l’amateurisme et les chamailleries de ses deux filles, Patrick comprend vite que ce braquage ne va pas être une promenade de santé…

L’année 2017 n’a pas été simple pour le réalisateur Pascal Bourdiaux ! Deux échecs commerciaux et critiques très importants avec Mes trésors en janvier et Boule & Bill 2 en avril ! Avant de mettre en scène son premier long métrage en 2010, Le Mac, 1,5 millions d’entrées, Pascal Bourdiaux a d’abord fait ses classes sur la shortcom Un gars, une fille en réalisant près de 500 épisodes ! Il était aussi l’un des premiers à offrir à Kev Adams la tête d’affiche d’un film avec Fiston, dans lequel le jeune comédien donnait la réplique à Franck Dubosc. Porté par une critique positive et un bon bouche à oreille, près de deux millions de spectateurs avaient accueilli favorablement cette très bonne comédie. Pour Mes trésors, c’est une autre affaire.

S’il pouvait être judicieux d’associer les deux actrices au tempérament volcanique Reem Kherici (Fatal, Paris à tout prix) et Camille Chamoux (Les Gazelles, Maman a tort) avec le vieux briscard Jean Reno, on déchante rapidement. D’une part parce que ce dernier, qui n’a jamais brillé par son jeu d’acteur, apparaît ici comme dans le dernier Visiteurs, très fatigué, figé, pouvant à peine marcher et essoufflé à la moindre réplique, d’autre part en raison du manque d’alchimie entre les comédiennes. Si Reem Kharici s’avère plutôt bonne (on parle de sa performance hein, même s’il est indéniable que…), Camille Chamoux énerve à maintes reprises et en fait des tonnes dans le rôle de la nana coincée. Ne pouvant s’empêcher de grimacer, sa prestation a rapidement raison de notre patience. De plus, il faut bien l’avouer, le scénario un rien paresseux ne fait rien pour arranger les choses. Autant le dire, rien ne fonctionne dans cette comédie sur fond de casse voulue rocambolesque.

Le scénariste de Stars 80 (bah oui) tente d’insuffler un rythme nécessaire à ce genre de comédie, mais rien n’y fait. A part une introduction chic et sympathique qui faire penser à un Mission : Impossible franchouillard, dans laquelle Jean Reno usurpe l’identité d’un violoniste virtuose grâce à un masque caractéristique de la série américaine pour mieux lui dérober son précieux instrument, Mes trésors se met ensuite en mode pilotage automatique. Les scènes s’enchaînent à la va-comme-je-te-pousse, en cumulant les gags mous, les dialogues au rabais, l’action de pacotille et une mise en scène fonctionnelle sur un score pourtant inspiré de Sinclair. On pense alors au Ca$h d’Eric Besnard, sorti en 2008, dans lequel Jean Dujardin affrontait…Jean Reno. De là à croire que Pascal Bourdiaux ait voulu jouer sur une impression de déjà-vu…

Au milieu de tout ce marasme, Bruno Sanches (le comparse d’Alex Lutz dans Catherine et Liliane) et l’excellent Pascal Demolon parviennent à tirer leur épingle du jeu, le premier dans le rôle de l’amoureux timide, le second, toujours classe, dans celui de l’adversaire de Jean Reno, qui tombe sous le charme du personnage joué par Camille Chamoux. Certes, Mes trésors n’a aucune autre prétention que de divertir les spectateurs, mais le film est si poussif que rien ou presque ne fait rire. Et ce n’est pas de voir Jean Reno se trémousser sur Treasure de Bruno Mars qui arrange les choses.

LE DVD

Le DVD de Mes trésors, disponible chez M6 Vidéo, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé, sobre et musical. Pour cette sortie dans les bacs, le visuel a été repensé par rapport à l’affiche originale, en jouant notamment sur un côté OSS 117 qui n’a aucune raison d’être, et en y rajoutant Pascal Demolon et Bruno Sanches.

Suite à ses 140.000 spectateurs, l’éditeur a jugé bon de ne pas sortir Mes trésors en Blu-ray. Pour accompagner cette sortie en DVD, M6 Vidéo livre quelques entretiens croisés de Camille Chamoux, Reem Kharici et de Jean Reno (11’). En pleine promo, les trois comédiens expliquent ce qui les a séduit dans le scénario, le travail avec le réalisateur et la bonne ambiance sur le plateau.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Le piqué est aléatoire et la gestion des contrastes parfois légère. Les quelques séquences sombres manquent de définition et les détails font cruellement défaut. Heureusement, ça se rattrape un peu sur les scènes diurnes au relief certain, à la luminosité plaisante. La colorimétrie est à l’avenant et le cadre large retrouve enfin une profondeur de champ inespérée. Notons néanmoins quelques légers fourmillements et des noirs inégaux.

Ne vous attendez pas à un déluge d’effets surround si votre choix s’est portée sur la Dolby Digital 5.1, mais la spatialisation est plus que convenable avec de belles ambiances naturelles et un environnement musical fort plaisant. Mes trésors ne se prêtant évidemment pas aux exubérances sonores, le principal de l’action se trouve canalisé sur les frontales où les dialogues ne manquent pas d’intelligibilité. De son côté, la stéréo s’avère ardente et dynamique. Un parfait confort acoustique. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste en Audiodescription.

Crédits images : © Eric TRAVERS – Radar Films / SND / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Phantasm, réalisé par Don Coscarelli

PHANTASM réalisé par Don Coscarelli, disponible en DVD et combo DVD/Blu-ray le 6 juin 2017 chez ESC Editions & Sidonis Calysta

Acteurs : A. Michael Baldwin, Reggie Bannister, Angus Scrimm, Bill Thornbury, Kathy Lester, Terrie Kalbus, Kenneth V. Jones, Susan Harper, Lynn Eastman-Rossi

Scénario : Don Coscarelli

Photographie : Don Coscarelli

Musique : Fred Myrow, Malcolm Seagrave

Durée : 1h29

LE FILM

Le jeune Mike, treize ans, assiste en cachette à l’enterrement d’un ami. Après la cérémonie, il voit un colosse s’emparer du cercueil, qu’il soulève comme une plume. Le soir venu, Mike s’introduit dans le grand bâtiment au centre du cimetière et y découvre des activités déconcertantes. Il fait part de ses soupçons à son grand frère Jody, qui retourne avec lui au mausolée. Les deux frères acquièrent la conviction que des forces inconnues s’emparent des défunts dans un but innommable.

Phantasm est l’oeuvre de toute une vie, celle du scénariste et réalisateur américain Don Coscarelli. Né en 1954 à Tripoli, le cinéaste signe d’abord deux longs métrages en 1976, Jim the World’s Greatest, sur lequel il rencontre le comédien Angus Scrimm, puis Kenny & Company. Passionné par le cinéma d’horreur, Don Coscarelli se lance dans l’écriture d’un film de genre en s’isolant au milieu de nulle part, une situation qui lui permet de coucher ses peurs et ses névroses sur le papier. La suite appartient à la légende. Phantasm est un chef d’oeuvre du film fantastique et d’épouvante de la fin des années 1970, un succès qui engendrera quatre suites (1988, 1994, 1998, 2015), dont trois mises en scène par Don Coscarelli lui-même. S’il est également célèbre pour avoir réalisé Bubba Ho-tep en 2002 avec Bruce Campbell dans le rôle d’Elvis qui combat les momies, le cinéaste – qui compte aujourd’hui dix longs métrages à son actif – demeure avant tout le créateur de cette saga mythique.

Egalement producteur, monteur et directeur de la photographie, Don Coscarelli crée un monde foisonnant et virtuose, peuplé de nains dissimulés sous des capuches, un boogeyman gigantesque au teint blafard et à la force herculéenne, un monde parallèle au ciel embrasé, du sang jaune, des doigts coupés qui s’agitent seuls, des mouches géantes, une sphère métallique volante qui se plante dans la tête de la victime et qui la perce à l’aide d’un foret pour y pomper le cerveau. Tout cela pourrait facilement tomber dans l’absurde, mais Don Coscarelli embrasse son sujet avec autant de sérieux que d’humour et parvient à rendre son histoire réaliste et donc emphatique. Plusieurs choses viennent immédiatement en mémoire quand on évoque ce grand classique qu’est Phantasm, mais parmi ce kaléidoscope d’images inoubliables, c’est bel et bien la figure du Tall Man qui vient à l’esprit. Incarné par Lawrence Rory Guy, plus connu sous le nom d’Angus Scrimm (1926-2016), ce croquemitaine ou ce croque-mort plutôt, s’inscrit parmi les personnages les plus emblématiques et énigmatiques du genre aux côtés de Michael Myers, Freddy Krueger, Leatherface et Pinhead. Sa démarche, ses regards, son costume et sa voix (« Booooooy ? ») ont fait de lui une icône de l’épouvante.

Parallèlement à ce boogeyman, Phantasm s’avère un vrai film dramatique qui parle du deuil impossible d’un jeune adolescent pour ses parents et pour son frère aîné. Près de 40 ans après le film nous pouvons nous permettre de dévoiler que le film se révèle être une plongée dans l’imaginaire (quoique…) de Mike. A l’instar du merveilleux film de J.A. Bayona sorti début 2017, Quelques minutes après minuit, Phantasm s’attache à un jeune homme plongé malgré lui dans un monde cauchemardesque pour pouvoir, sans doute, affronter la réalité. Comme dans le Bayona dans lequel un jeune garçon avait recours malgré lui au pouvoir de l’imaginaire pour pouvoir admettre la mort prochaine de sa mère et à préparer son deuil, celui de Phantasm erre dans un cauchemar dans lequel il affronte un croquemitaine aux côtés de son frère aîné Mike. L’épilogue joue alors la carte de la frontière fragile entre le rêve et la réalité, quand les deux mondes rentrent en collision au point de se fondre l’un dans l’autre. La fin reste ouverte et de nombreuses questions en suspens. Si Don Coscarelli n’avait peut-être pas l’intention d’y répondre, du moins immédiatement puisque le second opus ne sera réalisé que dix ans après, on plonge à fond dans cet univers riche et singulier, unique, qui n’a de cesse de surprendre, animé par une passion contagieuse pour le genre, qui enchaîne les scènes anthologiques comme des perles sur un collier en se permettant même quelques soupapes d’humour noir, sans omettre l’émotion.

On ne peut s’empêcher de penser à certaines œuvres de Stephen King, à tel point que si Phantasm avait été une adaptation d’un livre de l’auteur de Carrie, le film se classerait parmi les meilleures transpositions d’une de ses œuvres au cinéma. En s’inscrivant pleinement dans le surréalisme et parfois le macabre diurne (ce qui est assez rare), Phantasm n’est pas sans rappeler Un chien andalou de Luis Buñuel, non seulement en raison de son atmosphère onirique, mais également par son montage de scènes étranges qui fait penser à un puzzle pour lequel chacune des pièces serait caractérisée par un mauvais rêve. Un jeu éclaté et pourtant conduit de main de maître du début à la fin, tandis que l’envoûtante musique de Fred Myrow et Malcolm Seagrave berce les spectateurs comme une comptine entêtante.

A sa sortie, Phantasm est un succès critique et commercial. Le film rapporte près de 12 millions de dollars au box-office nord-américain et attire plus de 500.000 spectateurs en France où il obtient également le prix spécial du jury au Festival international du film fantastique d’Avoriaz. Le budget de 300.000 dollars est donc largement rentabilisé. Toutefois, Don Coscarelli ne reviendra à Phantasm qu’en 1988, réalisant entre-temps un film d’heroic fantasy, Dar l’invincibleThe Beastmaster.

LE BLU-RAY

C’est un grand jour pour les cinéphiles ! ESC Editions et Sidonis Calysta s’associent pour nous offrir le tant attendu Phantasm en Haute-Définition ! Le film est disponible en DVD, mais aussi en combo Blu-ray/DVD (édition limitée), disposés dans un boîtier métal avec effet arrondi en 3D. Le menu principal est élégant, animé sur des images du film et son célèbre thème principal.

Le premier supplément disponible sur cette édition est une interview croisée (21’) de Guy Astic (Directeur des éditions Rouge Profond, corédacteur en chef de la revue de cinéma Simulacres, parue de novembre 1999 à mai 2003) et de Julien Maury (scénariste et réalisateur, A l’intérieur). Cette présentation souvent passionnante de Phantasm vaut essentiellement pour l’intervention de Guy Astic, qui convoque à la fois le fond et la forme du film de Don Coscarelli, tandis que Julien Maury, qui introduit et clôt ce module, partage surtout ses souvenirs liés à la découverte de ce grand classique quand il était adolescent. Guy Astic revient sur les débuts de Don Coscarelli, sur les partis pris, les intentions du réalisateur, sa façon d’aborder le fantastique, les thèmes (Astic rapproche également Phantasm de Quelques minutes après minuit de J.A. Bayona), la figure du Tall Man, les effets visuels, la séquence de la sphère métallique. Si les propos de Julien Maury s’avèrent donc plutôt anecdotiques bien que passionnés, ceux de Guy Astic méritent l’attention des cinéphiles et des passionnés du genre.

Le supplément suivant est un document d’archives, avec son image vidéo typique de l’époque. Invités sur le plateau d’une émission réalisée pour une chaîne de télévision en Floride, le réalisateur, scénariste, monteur et producteur Don Coscarelli et le comédien Angus Scrimm répondent aux questions de l’animateur George Capwell (28’). Alors que Phantasm vient tout juste de sortir dans les salles, les deux intervenants réalisent la promotion du film. Le réalisateur aborde la genèse du projet, les conditions de production et de tournage (Coscarelli a été obligé d’emprunter de l’argent à son père), son amour pour les films d’horreur, comment le film a ensuite été acheté, les origines du titre. De son côté, en mode Tall Man, Angus Scrimm raconte l’histoire à sa manière, ses débuts au théâtre et au cinéma, mais aussi comment il a créé son personnage grâce à son costume (plus large que sa morphologie), des chaussures compensées, le maquillage et sa voix.

Angus Scrimm est de retour dans le bonus suivant dans lequel le comédien intervient à la convention Fangoria en 1989, un an après la sortie de Phantasm 2 (10’). A la manière de Gollum qui discute avec Sméagol, Angus Scrimm laisse parfois le Tall Man prendre le dessus, quand il ne dialogue tout simplement pas avec lui-même, pour le plus grand plaisir des spectateurs hilares. Entre deux délires très réussis, Angus Scrimm s’exprime sur ce rôle, celui de sa vie et s’amuse du peu de dialogues qu’il possède dans les deux films. Par ailleurs, il reprend chaque réplique déclamée sur le ton de son personnage, cinq pour Phantasm et dix pour sa suite. Booooooooy ????!!!!

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale et une galerie de photos.

Dommage de ne pas retrouver les commentaires audio du réalisateur accompagné de ses acteurs d’un côté et des producteurs de l’autre, les scènes coupées et le module sur les effets spéciaux pourtant présents sur l’édition américaine. Mais ce serait faire la fine bouche, car notre édition est vraiment formidable.

Egalement au programme mais non reçu pour ce test, vous trouverez un livret de Marc Toullec intitulé « Au coeur du Phantasm », réalisé à l’occasion de cette édition.

L’Image et le son

ESC Editions / Sidonis Calysta nous livre la tant attendue nouvelle copie tirée d’un master restauré en 4K par Bad Robot, la société de production de J.J. Abrams. Alors, si les puristes risquent de tiquer devant le lissage parfois excessif du grain original, force est de constater que Phantasm renaît bel et bien de ses cendres ! Totalement invisible en France depuis une vingtaine d’années, le film de Don Coscarelli bénéficie enfin d’une édition digne de ce nom. La propreté du master est ébouriffante. Toutes les scories, poussières, griffures ont été purement et simplement éradiquées grâce au scalpel numérique. Ce Blu-ray au format 1080p (AVC) s’avère tout autant saisissant dans son rendu des scènes diurnes que pour les séquences sombres, l’image est souvent éclatante avec un piqué inédit, une profondeur de champ impressionnante et un relief des textures que nous n’attendions pas. Les couleurs retrouvent une deuxième jeunesse, à tel point que l’on pourrait même distinguer le maquillage outrancier du Tall Man. Hormis le manque de patine argentique sur certains plans qui pourrait parfois donner un côté artificiel à l’entreprise (même si on a déjà vu bien pire dans le genre), l’élévation HD pour Phantasm est indispensable et le lifting de premier ordre.

La version originale bénéficie d’un remixage DTS-HD Master Audio 5.1. Au premier abord on pouvait craindre le pire. Il n’en est rien, bien au contraire. Cette option acoustique séduisante permet à la composition enivrante de Fred Myrow et Malcolm Seagrave d’environner le spectateur pour mieux le plonger dans l’atmosphère du film. Les effets latéraux ajoutés ne tombent jamais dans la gratuité ni dans l’artificialité. De plus, les dialogues ne sont jamais noyés et demeurent solides, la balance frontale assurant de son côté le spectacle acoustique, riche et dynamique. Les fans de la version française devront se contenter d’une piste mono DTS-HD Master Audio. Cette version se révèle assez percutante et propre, mais certains dialogues s’avèrent sensiblement grinçants. Les sous-titres ne sont pas imposés sur la version originale. Aucun souffle constaté.

Crédits images : © ESC Editions / Sidonis Calysta / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Tropique du Cancer, réalisé par Edoardo Mulargia et Giampaolo Lomi

TROPIQUE DU CANCER (Al Tropico del Cancro) réalisé par Edoardo Mulargia et Giampaolo Lomi, disponible en combo DVD/Blu-ray le 1er avril 2017 chez Le Chat qui fume

Acteurs : Anthony Steffen, Anita Strindberg, Gabriele Tinti, Umberto Raho, Stelio Candelli, Gordon Felio, Kathryn Witt

Scénario : Anthony Steffen, Giampaolo Lomi, Edoardo Mulargia

Photographie : Marcello Masciocchi

Musique : Piero Umiliani

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Vivant depuis de nombreuses années à Port-au-Prince, le Docteur Williams traîne une réputation de fabricant de drogue. Sa dernière création est un puissant hallucinogène permettant de plonger dans un univers érotique ouvrant sur ses désirs les plus secrets. Peacock, énorme fortune de l’île, pédophile notoire, convoite la formule, tout comme un certain Murdock, fraîchement arrivé en ville. Après avoir caché son invention, Williams voit débarquer un vieil ami, Fred Wright et son épouse Grace. Commence alors une série de règlements de comptes de plus en plus violents, tandis que Grace, au son des tambours vaudous, découvre ses désirs enfouis.

Tropique du CancerAl Tropico del Cancro (1972), est un giallo à part. Alors que les films du genre se déroulent habituellement dans une ville (européenne), de nuit, éclairée froidement ou au contraire avec moult jeux de couleurs baroques, le film coréalisé – enfin c’est à voir, comme cela est expliqué dans les suppléments du Blu-ray – par Edoardo Mularcia (Creuse ta fosse, j’aurai ta peau, El Puro, la rançon est pour toi) et Giampaolo Lomi (assistant sur Les Négriers de Gualtiero Jacopetti et Franco Prosperi, déjà tourné à Haïti) se déroule sous la chaleur moite et le soleil éclatant d’Haïti. En plus de cette approche singulière et exotique, le giallo est lui-même parasité par un autre genre d’exploitation alors lancé depuis dix ans, le mondo. Ce qui caractérise le mondo est une approche semi-documentaire, proposant des images souvent très crues, destinées avant tout à choquer les spectateurs. Comme qui dirait l’ancêtre du found-footage, puisqu’il s’agit avant tout de renforcer l’immersion de l’audience. C’est donc à la lisière de ces deux genres qu’apparaît Tropique du Cancer.

Le Docteur Williams (Anthony Steffen aka Antonio De Teffè, également coscénariste) vit à Port-au-Prince depuis plusieurs années et semble se consacrer à son travail à l’hôpital. En réalité, Williams s’adonne à des recherches et même à la fabrication de substances illicites. Le scientifique solitaire et misanthrope a mis au point un puissant hallucinogène à haute teneur érotique, ayant pour conséquence de rendre réaliste les fantasmes de celui ou celle qui le respire. La découverte de Williams, aidé dans ses travaux par deux assistants, est parvenue jusqu’aux oreilles d’individus peu scrupuleux, qui souhaitent acquérir la formule par tous les moyens possibles. C’est alors que débarquent Fred (Gabriele Tinti, le « vrai » Don Cesar de La Folie des grandeurs) et son épouse Grace (Anita Strindberg), visiblement pour essayer de relancer leur couple en crise. Tandis que cette dernière tombe immédiatement sous le charme de l’île et de ses habitants, un en particulier, la visite de Fred, ancien ami de Williams, ne semble pas innocente. Pendant ce temps, les deux assistants du docteur se font assassiner. Se pourrait-il que le meurtrier soit le dénommé Peacock, un obèse pédophile qui a la mainmise sur l’île grâce à son argent ? Ou bien encore un certain Murdock, qui vient tout juste d’arriver dans la capitale accompagné d’un homme de main ? Malgré les tensions, Williams ne souhaite pas vendre son invention et l’a dissimulée. Mais les menaces se multiplient.

Tropique du Cancer est plus un film d’ambiances et d’atmosphère qu’un véritable thriller proprement dit, même si les meurtres réalisés par un tueur aux gants de cuir s’enchaînent – en caméra subjective bien entendu – et s’avèrent de plus en plus sauvages. En situant le récit à Port-au-Prince, dans un climat étouffant et anxiogène, les deux réalisateurs créent un malaise constant et inquiétant, d’autant plus qu’ils marquent le film de brisures documentaires, notamment quelques transes, rituels et pratiques vaudou organisés pour les moyens du tournage, mais bel et bien réels, non mis en scène, y compris le sacrifice d’un taureau dont on recueille le sang après égorgement, comme plus tard lors d’une visite d’abattoirs. Sous ce climat lourd et suffocant, nous suivons la course à un aphrodisiaque puissant et révolutionnaire. Là encore, c’est moins cet aspect « espionnage » – à la résolution très décevante il faut bien l’avouer – que le réveil du désir d’une femme qui s’avère le plus intéressant, d’autant plus quand celle-ci est interprétée par la sublime actrice suédoise Anita Strindberg !

Dès l’arrivée de Grace sur le sol de Port-au-Prince, la jeune femme remarque un des employés de l’hôtel où elle a posé ses valises. On sent Grace bouleversée par ce qui lui arrive et cet habitant, lui-même peu indifférent, semble réveiller chez elle quelques fantasmes sexuels jusqu’alors refoulés. Sentiments qui conduisent à la séquence la plus célèbre du film, quand Grace, sous le charme de l’aphrodisiaque distillé à son insu, plonge dans un rêve peuplé de jeunes éphèbes noirs, nus, qui tentent de l’agripper dans un couloir couleur rouge-sang, jusqu’à ce qu’elle tombe dans les bras de celui sur qui elle fantasme depuis son arrivée, le tout bercé par la superbe partition de Piero Umiliani. Magnifique scène graphique qui n’est évidemment pas sans rappeler l’ouverture du Venin de la peur de Lucio Fulci, également interprété par Anita Strindberg.

Film pluriel, à la croisée des genres, à la lisière du fantastique, Tropique du Cancer est finalement un film inclassable et sensuel, curieux, atypique et ambitieux, à la fois divertissant et réflexion sur la sexualité féminine. De grandes qualités qui font oublier les quelques facilités et l’aspect parfois décousu du scénario.

LE BLU-RAY

Le Chat qui fume a mis le turbo depuis la sortie en Blu-ray du Venin de la peur en octobre 2015 ! Après les sublimes éditions HD La Nuit des diables, Exorcisme tragique, La Soeur d’Ursula et Terreur sur la lagune, le félin sort les griffes à nouveau ! C’est au tour de Tropique du Cancer d’arriver dans l’escarcelle – ou la gamelle – du Chat noir. L’objet est magnifique.

Le combo Digipack à trois volets de ce nouveau titre « Exploitation italienne », renferme à la fois le DVD du film, celui alloué aux suppléments et le Blu-ray qui reprend le tout. Sur le verso des volets, nous trouvons trois affiches originales du film. L’ensemble se glisse dans un étui cartonné du plus bel effet, au visuel superbe et attractif. Cette édition limitée à 1000 exemplaires s’avère un véritable objet de collection. Le menu principal est animé et musical. Un service princier.

Comme d’habitude pour ses éditions HD, Le Chat qui fume a mis le paquet concernant les suppléments avec plus d’1h45 de bonus à se mettre sous la dent !

On commence par l’entretien avec le coréalisateur Giampaolo Lomi (32’). Né en 1930 et ne comptant que deux films à son actif en tant que metteur en scène, Tropique du Cancer en 1972 et I Baroni en 1975, Giampaolo Lomi explique que l’idée d’Al Tropico del Cancro vient de lui et de son désir de retravailler en Haïti, où il a vécu 1 an et demi et où il a surtout servi d’assistant-réalisateur sur Les Négriers de Gualtiero Jacopetti et Franco Prosperi. Dans un deuxième temps, Lomi insiste sur le fait qu’on lui ait imposé de réaliser Tropique du Cancer en binôme avec Edoardo Mulargia en raison de son manque d’expérience dans le domaine de la fiction. Mais l’argument est aussitôt démenti par l’intéressé qui indique que Mulargia, qui était chargé à la base de superviser le tournage, préférait aller à la plage en lui faisant confiance. Lomi s’accapare donc l’entière paternité du film, sur lequel il revient ensuite plus longuement, les conditions de tournage – en Arriflex 9mm – des scènes de vaudou, le travail avec les comédiens, Anthony Steffen qu’il qualifie de voleur de gros plans et qui s’est imposé pour écrire également le scénario, sans oublier Anita Strindberg, dont il se souvient surtout de la poitrine refaite qu’il a essayé de dissimuler à l’image. Après être revenu sur les personnages et la représentation de l’homme de couleur dans Tropique du Cancer, Lomi aborde un sujet épineux, ses rencontres avec le dictateur François Duvalier ou Papa Doc, qu’il considère comme l’un des chefs d’état les moins cruels « dans le genre » et tente de démontrer ce qu’il a fait pour Haïti, en permettant à la population d’avoir accès à la nourriture. Damn !

Tout ce qui est dit par Lomi est en quelque sorte démenti par le second réalisateur de Tropique du Cancer dans le supplément suivant. Contrairement au module précédent, le document présenté est composé d’entretiens audio avec Edoardo Mulargia (décédé en 2005), ainsi que des propos face caméra du journaliste Davide Pulci, du réalisateur Roger A. Fratter et des comédiens Robert Woods et Marc Fiorini (18’). Dans son interview à l’enregistrement grinçant, Edoardo Mulargia annonce de son côté être l’auteur du film en avançant que Giampaolo Lomi « s’est uniquement occupé de tourner quelques scènes secondaires, mais pas grand-chose […] il n’a pas grand-chose à y voir, même si le film est sorti sous nos deux noms ». Ce sur quoi les autres intervenants réagissent en allant dans ce sens, en expliquant que Lomi s’est probablement occupé de la partie « documentaire » du film, à savoir les scènes de vaudou, alors que Mulargia s’est chargé de tout le reste, autrement dit de la partie fictive et du travail avec les acteurs. Tropique du cancer est ensuite un peu abordé sur la forme et sur le fond, même si ce module s’égare ensuite sur le travail d’acteur de Anthony Steffen avec les interventions de deux comédiens qui lui ont donné la réplique. Dans la dernière partie de ce documentaire, l’intérêt se recentre sur la fin de carrière de Mulargia, placée sous le signe de films érotiques, ce que l’intéressé dément dans son entretien. Plus critique, Davide Pulci indique que Mulargia « était un réalisateur qui n’avait pas vraiment de style notable et ses films sans particularité artistique ou technique ».

C’est ensuite au tour du journaliste Francis Barbier du site DeVilDead.com de prendre la parole pour une analyse indispensable de Tropique du Cancer (27’). Comme il l’indique d’entrée de jeu, ce module contient des spoilers et n’est donc à visionner qu’après avoir vu le film. Outre son attachement pour la belle Anita Strindberg (« avec son corps qui capte le soleil… ») et sa pique sur « cette espèce de vieux con d’Eastwood » quand il aborde le thème du racisme, Francis Barbier croise habilement le fond et la forme du film qui nous intéresse en revenant sur son caractère singulier et transgenre, entre giallo et mondo, sans oublier une touche de blaxploitation. La scène d’hallucination est passée au crible, tout comme le travail des deux réalisateurs, le cadre, l’espace et l’homme de couleur dans le cinéma italien.

Dernier entretien de cette interactivité avec celui du scénariste Fathi Beddiar (25) qui nous présente ses trois gialli préférés. Visiblement peu habitué à l’exercice, l’intéressé s’embrouille quelque peu dans ses propos qui manquent de construction, même si l’ensemble est malgré tout sympathique et intéressant. L’auteur du très bon Colt 45, qu’il a néanmoins renié avec le réalisateur Fabrice Du Welz en raison d’une production catastrophique, essaye tout d’abord de donner sa propre définition du giallo, avant de livrer son top constitué de Gente di rispetto de Luigi Zampa (1975), Le Corps et le Fouet et 6 Femmes pour l’assassin de Mario Bava (1963 et 1964), ainsi que Les Frissons de l’angoisse de Dario Argento (1975). Si Fathi Beddiar s’égare quelque peu, au moins l’intéressé fait preuve de grandes connaissances du giallo (et du cinéma en général) et son intervention ne manque pas d’attraits.

Egalement au programme, à la fois sur le DVD consacré aux bonus et sur cette édition HD, nous trouvons Tropique du Cancer proposé en mode VHS, en version française et encodé en 1080i sur le Blu-ray. Outre la fibre nostalgique titillée, c’est aussi l’occasion de voir tout le travail effectué du point de vue de la restauration !

Cette section se clôt sur un lot de bandes-annonces de films, celle de Tropique du Cancer, mais aussi celles de films prochainement disponibles chez Le Chat qui fume dont La Longue nuit de l’exorcisme de Lucio Fulci !

Une des éditions indispensables et incontournables de ce premier semestre 2017 sur laquelle devraient se ruer tous les cinéphiles !

L’Image et le son

Une fois passé le générique grumeleux et marqué par quelques rayures verticales, la Haute-Définition prend son envol devant nos yeux sans cesse flattés. Le Blu-ray édité par Le Chat qui fume restitue habilement les volontés artistiques originales en conservant heureusement le précieux grain cinéma ainsi que les couleurs chaudes et clinquantes (voir les carrosseries rutilantes des voitures). Les contrastes sont léchés et le relief étonnamment palpable, tandis que le piqué demeure acéré. Ces partis pris entraînent certes une image parfois plus douce, une sensible perte de la définition sur les nombreux zooms, mais la compression AVC consolide l’ensemble avec brio, les détails sont légion sur le cadre large, les noirs denses et la copie éclatante. Quant à la restauration, elle est souvent sidérante.

Propre et dynamique, le mixage italien DTS HD Master Audio Mono 2.0 ne fait pas d’esbroufe et restitue parfaitement les dialogues, laissant une belle place à la musique de Piero Umiliani (Le Pigeon, A cheval sur le tigre). A titre de comparaison, elle demeure la plus dynamique et la plus riche du lot, à tel point que l’on parvient à entendre les maracas jouées par un musicien au fond de l’image. La version française DTS-HD Master Audio Mono 2.0, au doublage particulièrement raté (donc amusant), apparaît plus grinçante, même si comme son homologue, elle apparaît dépourvue de souffle parasite. Le changement de langue est verrouillée à la volée et les sous-titres français imposés sur la version originale.

Crédits images : © Le Chat qui fume / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test Blu-ray / Monster Cars, réalisé par Chris Wedge

MONSTER CARS (Monster Trucks) réalisé par Chris Wedge, disponible en DVD et Blu-ray le 2 mai 2017 chez Paramount Pictures

Acteurs : Lucas Till, Jane Levy, Thomas Lennon, Barry Pepper, Rob Lowe, Danny Glover, Amy Ryan, Holt McCallany

Scénario : Derek Connolly, d’après une histoire originale de Matthew Robinson, Jonathan Aibel, Glenn Berger

Photographie : Don Burgess

Musique : David Sardy

Durée : 1h45

Date de sortie initiale : 2016

LE FILM

Monster Cars nous embarque pour vivre l’incroyable aventure d’un garçon ordinaire, Tripp, se liant d’amitié avec un adorable monstre, Creech.
Pour échapper à la vie trop tranquille de sa ville natale, Tripp, un lycéen passionné de voiture, construit une « Monster Car », 4X4 surpuissant et surdimensionné, dans le but de partir un jour à l’aventure ! À la suite d’un accident près d’un site de forage pétrolier, il fait la rencontre de Creech, une créature souterraine étrange qui a un goût certain pour le pétrole et un talent pour la vitesse. Pour protéger Creech de l’entreprise de forage qui tente de dissimuler l’incident au grand public, Tripp cache le monstre sous le capot de sa Monster Car, la transformant ainsi en un bolide super-puissant ! Aidés par la jolie Meredith, Ils vivront une expérience inoubliable pour que Creech puisse retrouver sa famille et son habitat naturel.

C’est l’une des plus grandes catastrophes industrielles de ces dernières années. Monster Trucks aka Monster Cars dans nos contrées n’était même pas encore sorti dans les salles, que la Paramount annonçait déjà que le studio serait déficitaire de plus 115 millions de dollars ! Pour son premier film mis en scène en live action, le réalisateur Chris Wedge, Oscar du meilleur court-métrage d’animation en 1999 pour Bunny, puis responsable de l’horrible franchise L’Age de glace, n’a pas été gâté. Tourné en 2014, Monster Cars n’a eu de cesse de voir sa sortie initiale – alors prévue au mois d’août 2015 – reportée finalement jusqu’à Noël 2016, la Paramount ne sachant pas comment vendre ce projet qui lorgne sur les films familiaux des années 1980-90, alors que le studio espérait également vendre des millions de jouets et autres produits dérivés. Le budget estimé à plus de 120 millions de dollars a littéralement été englouti dans la titanesque postproduction. Pourtant, rien ne distingue ce film à effets spéciaux des autres, d’autant plus que Monster Cars s’avère un film bien sage, pour ne pas dire avare sur les scènes d’action et que ses monstres tout moches manquent singulièrement d’âme.

Nous n’arrivons pas à comprendre comment des millions de dollars ont pu être dépensés pour un film de cet acabit, visiblement sorti de l’imagination d’un gamin de quatre ans. Ceci est véridique. A l’instar de Robert Rodriguez et ses Aventures de Shark Boy et Lava Girl en 2005, il semblerait que le fils d’Adam Goodman, l’ancien boss de la Paramount Pictures, ait eu cette idée innocente de mettre des monstres à tentacules dans la carcasse d’une voiture, remplaçant ainsi le moteur. Les membres de la créature étant dotée de roulements à billes (!), la voiture, en l’occurrence un 4X4, bénéficie alors de la force du grand poulpe aux dents acérées pour être lancée à fond sur l’asphalte et sur les chemins les plus impraticables. « Et pourquoi pas lui faire franchir des murs papa ? » « Oh ouais, c’est une super idée ça fiston ! Aller hop, je suis le patron, je lance le film et j’engage quatre scénaristes (dont Derek Connolly, le responsable du calamiteux Kong: Skull Island) pour écrire ce qu’il faut d’histoire et la saga Transformers n’a qu’à bien se tenir ! Ah, mais c’est vrai que Transformers c’est moi aussi ! Pas grave, ça nous fera deux franchises lucratives ». C’est peu dire que l’engouement est vite retombé.

Si on a déjà vu bien pire dans le genre divertissement niais, Monster Cars ne s’adresse en réalité à personne. Les enfants peuvent s’amuser un temps devant cette bestiole pathétique, mais comme elle disparaît la plupart du temps sous la carrosserie, leur patience sera mise très vite à rude épreuve. Quant aux spectateurs plus âgés…S’il y a indéniablement un parfum rétro qui peut parfois titiller la fibre nostalgique, le récit demeure tellement poussif et sans enjeux, sans parler de l’interprétation tout en dents UltraBrite du jeune comédien Lucas Till (vu dans les affreux derniers X-Men et dans le rôle principal du reboot de la série MacGyver), sorte de version live du prince Très Très Charmant de Shrek 2, ou d’une jeune pousse d’endive avec des cheveux devant les yeux, que cela irrite d’entrée de jeu. Sa partenaire Jane Levy, déjà appréciée dans Evil Dead (version 2013) et Don’t Breathe : La Maison des ténèbres, réalisés par Fede Alvarez, illumine un petit peu ce film extrêmement paresseux. Amy Ryan, Danny Glover, Barry Pepper et Rob Lowe viennent payer leurs impôts en espérant peut-être intégrer une prochaine saga lucrative.

Il n’y a aucun potentiel dans Monster Cars, film qui se mord la queue, ou le tentacule plutôt, dont le message écolo extrêmement maladroit, pour ne pas dire irresponsable, s’est retourné contre le film qui utilise des monstres, des animaux donc, pour pouvoir faire fonctionner des 4X4. Moteur faussement hybride donc puisque le monstre en question raffole du pétrole qu’il engloutit avec gourmandise, afin de se donner plus de force pour propulser l’énorme véhicule – ici sublimé, autre paradoxe – à tout berzingue. C’était une fausse bonne idée. Cela peut arriver. Sauf qu’il s’agit d’une centaine de millions de dollars ici. Monster Cars reste et restera un film malade, étrange, singulier, ennuyeux, qui se voit comme une curiosité ou à titre d’expérience.

LE BLU-RAY

Monster Cars déboule en Blu-ray chez Paramount Pictures. Le menu principal est fixe et musical. La jaquette, glissée dans un boîtier classique de couleur bleue, reprend l’un des visuels français. Une petite plaquette comprenant des autocollants est également insérée dans le boîtier. Conservez-les ! Ça peut devenir collector ! Pourquoi riez-vous ?

Afin de lui donner une seconde chance, la Paramount Pictures accompagne Monster Cars de suppléments sympathiques, environ 45 minutes au total.

Les trois premiers modules (Qui conduit les Monster Trucks ? – 7’, Le Monstre dans le 4X4 – 5’, Création du Monster Truck – 6’30) convient les comédiens, le réalisateur, les responsables des effets visuels, les animateurs, le scénariste et les producteurs pour promouvoir le film avec une bonne humeur innocente, sans penser à la galère monstre (c’est le cas de le dire) dans laquelle allait être précipité le film. Si rien n’est dit quant à la genèse du projet, on s’amusera de l’intervention de Danny Glover (« Ça va être palpitant ! »), les yeux éteints, qui semble crier intérieurement « Je suis une célébrité, sortez-moi de là ! ». Seuls les plus jeunes comédiens semblent y croire à fond, tandis que l’on nous présente l’histoire, les cascades et la création des images de synthèse. Des images du tournage et du plateau illustrent cet ensemble.

S’ensuit un journal de la production (10’) composé d’une dizaine de featurettes d’une minute. Celles-ci reprennent de nombreuses images issues des suppléments précédents avec les mêmes intervenants. Mais comme cela va très vite, ça peut passer.

En plus d’un bêtisier amusant (5’), l’éditeur joint enfin quelques scènes coupées (9’), qui prolongent essentiellement les cours de soutien en biologie de Meredith à Tripp (avec quelques sous-entendus à caractère sexuel, ce qui expliquerait l’éviction de cette séquence) et les diverses poursuites avec une mention spéciale pour le changement de roue réalisé à fond la caisse.

L’Image et le son

Si vous en avez la possibilité, découvrez Monster Cars en Haute définition. Les effets numériques sont magnifiquement incrustés dans les véritables paysages, le piqué est ciselé (surtout sur les scènes diurnes), les couleurs impressionnantes. Seules quelques séquences plus agitées apparaissent parfois moins nettes et occasionnent quelques pertes de la définition. Il n’empêche que les contrastes sont léchés, les noirs denses et la profondeur de champ omniprésente. Les détails sont légion à l’avant comme à l’arrière-plan, le relief ne cesse d’étonner et le rendu des textures, notamment des carrosseries des engins, est subjuguant. Une nouvelle réussite technique pour Paramount Pictures.

Le mixage français Dolby Digital 5.1 laisse pantois par sa pauvreté acoustique. Aucune dynamique, soutien classique des latérales, basses légères. Elle n’arrive évidemment pas à la cheville de l’explosive piste anglaise Dolby Atmos – ou Dolby TrueHD 7.1 pour les non équipés – avec ses dialogues remarquablement placés sur la centrale, les frontales saisissantes, les effets et ambiances riches et explosives (surtout lors de la poursuite finale), les enceintes arrière instaurent constamment un environnement musical, tout comme le caisson, mis à rude épreuve, qui n’en finit pas de marteler les séquences les plus mouvementées ou même quand les véhiculent ne font que rouler tranquillement. Un grand spectacle acoustique.

Crédits images : © Paramount Pictures. All Rights Reserved. / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

 

Test Blu-ray / A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, réalisé par J.A. Bayona

QUELQUES MINUTES APRÈS MINUIT (A Monster Calls) réalisé par J.A. Bayona, disponible en DVD et Blu-ray le 9 mai 2017 chez Metropolitan Vidéo

Acteurs : Lewis MacDougall, Sigourney Weaver, Felicity Jones, Toby Kebbell, Ben Moor, James Melville

Scénario : Patrick Ness, d’après son roman « Quelques minutes après minuit » (A Monster Calls)

Photographie : Oscar Faura

Musique : Fernando Velázquez

Durée : 1h48

Date de sortie initiale : 2017

LE FILM

Conor a de plus en plus de difficultés à faire face à la maladie de sa mère, à l’intimidation de ses camarades et à la fermeté de sa grand-mère. Chaque nuit, pour fuir son quotidien, il s’échappe dans un monde imaginaire peuplé de créatures extraordinaires. Mais c’est pourtant là qu’il va apprendre le courage, la valeur du chagrin et surtout affronter la vérité…

Juan Antonio García Bayona est un génie et le mot n’est pas galvaudé. Ces dix dernières années, moult réalisateurs ont été qualifiés de « nouveau Spielberg », notamment Jeff Nichols, mais s’il y a bien un cinéaste, qui allie à la fois le coeur, l’âme et la virtuosité comme l’auteur d’E.T. l’extra-terrestre, c’est bel et bien le cinéaste et scénariste espagnol né en 1975 à Barcelone. Lauréat du Goya du meilleur nouveau réalisateur en 2008 pour son premier film, le chef d’oeuvre L’OrphelinatL’Orfanato, J.A. Bayona a ensuite confirmé avec son second long métrage The Impossible, pour lequel il bénéficiait des stars Naomi Watts et Ewan McGregor comme têtes d’affiche. Avec A Monster Calls – Quelques minutes après minuit, le réalisateur clôt une trilogie sur le rapport mère-fils avec des personnages pris dans une situation anxiogène et sur lesquels plane l’ombre de la mort.

Conor, 13 ans, souffre beaucoup de voir sa mère affaiblie par le cancer. Alors que celle-ci vient de commencer un nouveau traitement, l’adolescent redoute la nuit et ses cauchemars. Harcelé à l’école, délaissé par un père absent et habitant aux Etats-Unis, il subit également l’autorité de sa grand-mère. A minuit sept, un monstre, qui a l’apparence d’un if gigantesque, vient le voir. Grâce au monstre, Conor gagne en maturité, apprend le courage, à dépasser son chagrin et à affronter la cruelle vérité. A l’origine, A Monster Calls – Quelques minutes après minuit est un roman inachevé de l’auteure britannique Siobhan Dowd, décédée des suites d’un cancer en 2007. L’écrivain anglo-américain Patrick Ness, spécialisé dans la littérature pour enfants, s’est vu proposer de reprendre cette histoire. C’est d’ailleurs ce dernier qui adapte le récit pour le cinéma. Porté par un casting exceptionnel, de Sigourney Weaver (la classe absolue) en passant par Felicity Jones (sublime), Toby Kebbell, Liam Neeson, qui prête non seulement sa voix au monstre, mais également sa prestation physique grâce à la motion-capture, sans oublier la performance de la grande révélation du film, le jeune Lewis MacDougall, vu dans Pan de Joe Wright dans lequel il interprétait le personnage de Nibs, le troisième film de J.A. Bayona subjugue par sa beauté plastique et foudroie par son ouragan d’émotions.

Comment rester de marbre devant cette histoire universelle magnifiquement interprétée, réalisée, écrite, photographiée et narrée ? Le deuil est personnel, unique, propre à chaque individu. De quelle façon aborder ce sujet à travers les yeux d’un enfant qui n’est pas encore entré dans le monde adulte ? Grâce à la force et au pouvoir de l’imagination, du conte, de l’animation, du dessin, de la création. A Monster Calls – Quelques minutes après minuit use du fantastique pour faire avancer Conor lancé malgré lui dans son premier parcours initiatique. Refusant de voir la vérité en face, il préfère convoquer indirectement un monstre-arbre grâce à la pointe de son fusain. Débarquant un soir de la colline voisine sur laquelle il surplombe le cimetière d’une petite ville, cet if géant entreprend de lui raconter trois contes (superbe animation) afin de l’aider à affronter la réalité, la vérité, sa propre vérité : accepter de laisser partir sa mère, tout en disant adieu au monde innocent de l’enfance.

Avec ce drame intimiste sur la transmission, J.A. Bayona touche au sublime. Pudique et extrêmement délicat, complexe et psychologique, passionnant, envoûtant et déchirant, A Monster Calls – Quelques minutes après minuit fait oublier la semi-déception du Bon Gros Géant de Steven Spielberg en 2016 avec lequel il partage beaucoup d’éléments – décidément les deux metteurs en scène sont liés – et s’inscrit directement parmi les plus grandes réussites de ces quinze dernières années. Le final, bouleversant, vous fera pleurer toutes les larmes de votre corps et s’inscrira définitivement dans vos mémoires. Reste à espérer que le talent de J.A. Bayona ne soit pas trop parasité par Hollywood, puisque le cinéaste espagnol prépare actuellement Jurassic World 2 !

LE BLU-RAY

Le test du Blu-ray de Quelques minutes après minuit, disponible chez Metropolitan Vidéo et rebaptisé A Monster Calls – Quelques minutes après minuit pour sa sortie dans les bacs, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est sobrement animé et musical.

La section des suppléments s’ouvre sur un formidable commentaire audio du réalisateur J.A. Bayona, disponible en espagnol sous-titré en français. Pendant près de deux heures, le cinéaste aborde à la fois le fond et la forme de son œuvre, sans aucun temps mort. Malin, J.A. Bayona donne de nombreuses indications pour aider les spectateurs à mieux comprendre son film, tout en dissimulant quelques éléments afin de laisser leur imagination faire le reste. Le casting, le livre original et son adaptation par Patrick Ness lui-même, la mise en scène, les thèmes, les partis pris, le travail de Liam Neeson en motion-capture, les effets visuels, l’animation, la psychologie des personnages, la photo, la musique, tout y est posément analysé. Un commentaire indispensable.

Dommage que l’éditeur n’ait pas sous-titré le commentaire du scénariste et écrivain Patrick Ness ! Réservé uniquement aux plus anglophiles.

S’ensuivent diverses séquences coupées (6’), très réussies, mais qui s’avèrent sans doute redondantes ou inutiles au récit. C’est le cas de la scène de Connor et de son père qui partent de la fête foraine sous un ciel gris, ou bien celle de la grand-mère encore sous le choc après avoir découvert sa maison saccagée par Connor, et qui ne lui adresse plus la parole en l’emmenant à l’école. La plus belle scène laissée sur le banc de montage demeure celle de Connor avec sa mère, qui préparent le petit-déjeuner, avant que celle-ci lui indique sa grand-mère viendra habiter chez eux quelques jours.

L’éditeur joint également un making of traditionnel – en fait plusieurs featurettes mises bout à bout – composé de nombreuses images du tournage et d’interviews de toute l’équipe (20’). Nous en avions déjà appris beaucoup en écoutant le commentaire audio de J.A. Bayona et ce documentaire met ces propos en images.

Dans l’atelier des effets spéciaux et de la capture de mouvements, les animatroniques et les maquettes sont dévoilés, tandis que les comédiens, le scénariste, les producteurs et le cinéaste présentent le film et ses enjeux.

Avant de terminer par des liens internet et un lot de bandes-annonces, n’oubliez pas de visionner le module intitulé Le Dessous des contes (8’), un remarquable montage qui dissèque les différentes phases de l’animation créée par les studios GlassWorks, afin d’illustrer les contes narrés à Conor par le Monstre.

L’Image et le son

Tourné grâce aux caméras numériques Arri Alexa XT, A Monster Calls – Quelques minutes après minuit doit se voir ou se revoir en Haute définition. Les effets numériques sont ahurissants de beauté, le piqué est affûté comme la lame d’un scalpel, les couleurs impressionnantes, les contrastes léchés, les noirs denses et la profondeur de champ omniprésente. Les détails sont légion à l’avant comme à l’arrière-plan, de jour comme de nuit, le relief ne cesse d’étonner et le rendu des textures est subjuguant. Le nec plus ultra pour apprécier toute la richesse de la photographie du chef opérateur surdoué Oscar Faura, à qui l’on doit les images des précédents films de J.A. Bayona. Quant aux séquences réalisées en animation, elles sont tout simplement stupéfiantes et élèvent cette édition HD au rang de disque de démonstration. Nous l’avons déjà dit, mais nous le répétons, Métropolitan Vidéo demeure sur la première marche des éditeurs français.

Les versions française et anglaise sont proposées en DTS-HD Master Audio 5.1. Dans les deux cas, les dialogues y sont remarquablement exsudés par la centrale (la voix de Liam Neeson en particulier), les frontales sont saisissantes, les effets et ambiances riches (les grincements et craquements des branches de l’arbre), les enceintes arrière instaurent constamment un environnement musical, tout comme le caisson de basses qui se mêle habilement à l’ensemble, notamment quand le géant se déplace. Un grand spectacle acoustique !

Crédits images : © Metropolitan Vidéo / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr