Test DVD / Pendant ce temps sur Terre, réalisé par Jérémy Clapin

PENDANT CE TEMPS SUR TERRE réalisé par Jérémy Clapin, disponible en DVD et Blu-ray le 5 novembre 2024 chez Diaphana.

Acteurs : Megan Northam, Sofia Lesaffre, Catherine Salée, Sam Louwyck, Roman Williams, Yoann Thibaut Mathias, Arcadi Radeff, Sabine Timoteo…

Scénario : Jérémy Clapin

Photographie : Robrecht Heyvaert

Musique : Dan Levy

Durée : 1h24

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Elsa, 23 ans, a toujours été très proche de son frère aîné Franck, spationaute disparu mystérieusement 3 ans plus tôt au cours d’une mission spatiale. Un jour, elle est contactée depuis l’espace par une forme de vie inconnue qui prétend pouvoir ramener son frère sur terre. Mais il y a un prix a payer…

Révélé en 2019 avec J’ai perdu mon corps, succès international, nommé et/ou récompensé à travers le monde (Grand prix de la Semaine de la critique à Cannes, nommé à l’Oscar du meilleur film d’animation), lauréat du César du meilleur long-métrage d’animation et de la meilleure musique originale, le réalisateur Jérémy Clapin (né en 1974) revient au cinéma avec Pendant ce temps sur Terre. Si nous retrouvons cette fois encore quelques séquences animées, qui représentent les souvenirs ou le dialogue intérieur du personnage principal avec son frère disparu, ce second long-métrage ne manque assurément pas d’ambition et s’avère même l’une des plus grandes expériences sensorielles de 2024. S’il a très divisé la critique et les spectateurs, Pendant ce temps sur Terre confirme pourtant l’immense talent de son metteur en scène, délicat conteur, qui explore à nouveau le thème du deuil impossible, ici la perte, non pas d’une main, mais celle d’un frère aîné, dont la disparition va évidemment bouleverser le quotidien, la vie d’Elsa. Un film redoutablement immersif et ce dès les premières notes de la musique planante et envoûtante signée Dan Levy (le groupe The Dø, déjà à l’oeuvre sur J’ai perdu mon corps), qui nous agrippe du début à la fin, nous happe et participe à l’impression d’hypnose qui nous bouleverse le coeur et l’âme durant 80 minutes. Si l’on ajoute à cela l’une des plus belles révélations de l’année en la présence de Megan Northam (aperçue dans Robuste de Constance Meyer, Les Passagers de la nuit de Mikhaël Hers et la série de Cédric Klapisch, Salade grecque), présente dans tous les plans, Pendant ce temps sur Terre impose définitivement Jérémy Clapin comme un auteur précieux à suivre de près.

La science-fiction hexagonale se porte bien. On ne peut mieux. Quand bien même Pendant ce temps sur Terre ne bénéficie pas d’un budget faramineux, le cinéaste use de moyens divers pour illustrer non seulement quelques bribes du voyage du frère d’Elsa, mais aussi le dialogue de cette dernière avec les extraterrestres, qui ont décidé de l’utiliser pour leur trouver des véhicules, autrement dit de nouveaux corps à habiter, moyens dont ils disposent pour vivre éternellement. Ces aliens présentent alors à Elsa leur plan, qu’elle ne pourra pas refuser, à l’issue duquel elle pourra retrouver son frère, qu’ils ont réussi à capturer dans l’espace. C’est là que Jérémy Clapin déjoue les attentes, flirte avec le film d’horreur au cours d’une séquence aussi inattendue que gore (avec une tronçonneuse bien placée), avant de suivre le cheminement intérieur de sa jeune héroïne, qui va devoir trouver une demi-douzaine de personnes à sacrifier, pour que son frère lui revienne.

Magistralement réalisé, certains plans sont particulièrement étourdissants, marqué par la photo splendide de Robrecht Heyvaert, chef opérateur des deux Bad Boys du tandem El Arbi/Fallah, mais aussi du très remarqué Revenge de Coralie Fargeat,Pendant ce temps sur Terre foudroie sans qu’on s’y attende. Rempli de symboles, le récit demande l’attention du spectateur, le caractère divertissant n’est jamais omis et s’équilibre parfaitement avec l’aspect réflectif, le travail sur le son est foudroyant, tous les sens sont mis à contribution. Jérémy Clapin dirige d’une main de maître un casting de qualité sur lequel trône donc la magnétique Megan Northam, accompagnée de l’excellente Catherine Salée (Un monde plus grand, Marvin ou la Belle Éducation, La Vie d’Adèle) et du génial Sam Louwyck (Keeper, L’Étrange Couleur des larmes de ton corps, Brimstone).

Fascinante introspection de l’âme humaine, portrait intime d’une femme face au deuil qui fait son chemin sur l’acceptation, dissection du sacrifice (on ne sort jamais indemne de la disparition d’un être que l’on a aimé et on y laisse toujours une part de soi), Pendant ce temps sur Terre se voit aussi comme l’illustration de la connexion entre le réel et l’imaginaire, entre celui des vivants et des morts, à l’instar de l’EHPAD où travaille d’ailleurs Elsa. S’il ne révèle pas tout au bout du chemin, ce qui pourra laisser quelques spectateurs quelque peu dubitatifs ou même déçus et frustrés, le film avec sa fin ouverte offre pourtant plusieurs possibilités possibles pour Elsa. Si nous ne les dévoilerons évidemment pas, espérons que son choix lui apporte enfin l’apaisement et la sérénité, pour pouvoir continuer à vivre. Même s’il s’agit d’un rêve. Ou pas. C’est à vous de voir, de ressentir.

LE DVD

Pendant ce temps sur Terre apparaît dans les bacs en DVD et Blu-ray chez Diaphana. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.

Le premier supplément est un commentaire audio de Jérémy Clapin. Posément, le réalisateur aborde les thématiques, les symboles, ses intentions et partis-pris durant 1h20. Sans aucun temps mort, le metteur en scène parle aussi du casting, de sa collaboration avec les comédiens et son équipe technique. Les lieux de tournage, les effets spéciaux, la musique, ainsi que la triple interprétation possible du dénouement sont aussi abordés. N’hésitez donc pas à revoir Pendant ce temps sur Terre en compagnie de Jérémy Clapin.

L’autre bonus est le merveilleux court-métrage d’animation de Jérémy Clapin, Skhizein (2008-13’). Que se passerait-il si une météorite de 150 tonnes vous tombait dessus ? C’est malheureusement ce qui vient d’arriver à Henri. Pourtant, il est toujours là. Enfin, pas tout à fait là, juste quelques centimètres plus loin, décalé de précisément 91 centimètres par rapport à l’endroit où il peut interagir avec le monde. S’il veut ouvrir une porte, s’asseoir, décrocher le téléphone, il devra le faire 91 centimètres plus loin. Aussi extraordinaire sur le fond que sur la forme, Skhizein regorge de trouvailles visuelles pour illustrer la psyché de son personnage, alors littéralement « à côté de ses pompes ». Une analyse percutante de la schizophrénie. Ce deuxième court-métrage du réalisateur a été nommé aux César en 2009.

Cette édition présente aussi un livret exclusif avec des extraits du storyboard, l’animation des personnages et des photos inédites du tournage.

L’Image et le son

Nous n’avons pas reçu l’édition HD de Pendant ce temps sur Terre. Néanmoins, cette édition standard s’avère de haut niveau et respecte les partis pris essentiellement nocturnes du directeur de la photographie Robrecht Heyvaert. Les contrastes sont fermes, le piqué acéré, les détails appréciables. Certaines petites baisses de la définition n’entament en rien le confort de visionnage.

La piste DTS-HD Master Audio 5.1 assure le spectacle acoustique. Dynamique et riche, l’écoute demeure immersive tout du long avec quelques pics particulièrement bluffants. La balance frontale est percutante, sans oublier l’usage probant des ambiances latérales. La musique profite également d’une belle délivrance, mettant toutes les enceintes à contribution, même à volume peu élevé. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont disponibles, ainsi qu’une piste Stéréo de fort bon acabit, sans oublier une piste Audiodescription destinées aux spectateurs aveugles et malvoyants.

Crédits images : © One World Films, Carcadice, France 3 Cinema, Auvergne-Rhône-Alpes Cinema / Diaphana / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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