VENDETTA (The Corsican Brothers) réalisé par Gregory Ratoff, disponible en combo Blu-ray+DVD le 21 août 2018 chez Rimini Editions
Acteurs : Douglas Fairbanks Jr., Ruth Warrick, Akim Tamiroff, J. Carrol Naish, H.B. Warner, John Emery…
Scénario : George Bruce, Howard Estabrook d’après le roman Les Frères corses d’Alexandre Dumas
Photographie : Harry Stradling Sr.
Musique : Dimitri Tiomkin
Durée : 1h51
Année de sortie : 1941
LE FILM
Au XIXè siècle, en Corse. Alors que sa femme est sur le point d’accoucher, le comte Franchi est assassiné par le baron Colonna, qui fait exécuter toute sa famille et détruire son château. Seuls survivants : les bébés siamois qui viennent de naître, et qui sont aussitôt séparés par un chirurgien hors pair, ami du comte. L’un d’eux, Mario, est envoyé à Paris pour être élevé par une riche famille. Le second, Lucien, reste en Corse et devient un bandit. Les années passent, les deux frères grandissent en ignorant l’existence l’un de l’autre.
Réalisé en 1941, Vendetta – The Corsican Brothers est l’adaptation du roman Les Frères corses d’Alexandre Dumas publié en 1844. Suite au succès de L’Homme au masque de fer (1939) de James Whale et du Fils de Monte-Cristo (1940) de Rowland V. Lee, le producteur Edward Small a de la suite dans les idées et jette à nouveau son dévolu sur l’un des écrits d’Alexandre Dumas père. Alors qu’il refusait jusqu’alors les films de cape et d’épée afin de ne pas être comparé à son illustre père, Douglas Fairbanks Jr. (1909-2000) accepte le rôle principal de Vendetta, ou plutôt le double-rôle principal puisque le comédien vu dans La Patrouille de l’aube d’Howard Hawks et Le Petit César de Mervyn LeRoy incarne à l’écran deux frères jumeaux. Le film conserve un charme fou, désuet certes, mais où la magie opère grâce à l’interprétation endiablée d’un Douglas Fairbanks Jr. bourré de charisme, bondissant et magnifique dans les scènes de duel. Escrimeur émérite, l’acteur fait autant preuve de dextérité et de talent en maniant le sabre qu’en donnant une personnalité spécifique à chacun de ses personnages.
S’il demeure assez méconnu dans nos contrées, ce court roman d’Alexandre Dumas père est pourtant très prisé dans les pays anglo-saxons. Décliné au théâtre, il reste également le premier livre de l’écrivain transposé au cinéma dès 1898 et compte à ce jour près d’une quinzaine d’adaptations. Tout Dumas y est. Le scénariste George Bruce parvient à restituer les rebondissements, les enjeux et l’atmosphère du roman original, tout en respectant cette ambiance quasi-fantastique et surnaturelle qu’affectionnait particulièrement Dumas. Vendetta est d’ailleurs un film étonnant, puisqu’il demeure l’un des premiers à montrer des frères siamois à l’écran. En effet, à leur naissance les frères Franchi naissent liés par l’abdomen. Leur père décide de tenter une opération destinée à les séparer. C’est un succès. Seulement les frères restent connectés « par l’âme » et quand l’un est blessé ou ressent une vive émotion, l’autre la ressent de son côté. Séparés et élevés en ignorant l’existence de l’autre suite à l’assassinat de leur père, Lucien et Mario grandissent différemment. Le premier en devenant un bandit en Corse, le second en menant une vie de mondain à Paris. Mais ce lien télépathique unique est encore là, chacun ayant des visions de l’autre. Jusqu’au jour où le destin les réunit enfin et où ils décident de venger la mort de leur père.
Douglas Fairbanks Jr. est fabuleux dans ce double-rôle, qui a depuis inspiré moult films du genre, y compris Double Impact (1991) de Sheldon Lettich avec Jean-Claude Van Damme et Double Dragon (1992) de Tsui Hark et Ringo Lam avec Jackie Chan ! Dédoublé grâce aux effets spéciaux – comme Robert Donat en 1935 dans le succulent Fantôme à vendre de René Clair – plutôt dingues pour l’époque et qui sont encore aujourd’hui très réussis, Douglas Fairbanks Jr. crève l’écran en aventurier romantique et sensible, mais aussi fougueux et déterminé. Vendetta sera son baroud d’honneur avant de partir à la guerre. Il ne reviendra au cinéma qu’en 1947 avec Sinbad le marin de Richard Wallace. Les séquences d’affrontements s’enchaînent sur un rythme trépident, la mise en scène de Gregory Ratoff est sans cesse inventive, à l’instar du duel final et de la poursuite à cheval. Le spectacle est encore garanti !
LE BLU-RAY
Un peu plus d’un an après son édition en DVD, Vendetta est de retour chez Rimini Editions en Blu-ray avec des suppléments inédits. Ce combo Blu-ray+DVD est disponible dans un boîtier Amaray classique de couleur noire, glissé dans un surétui cartonné. La jaquette est estampillée Collection Alexandre Dumas. Le menu principal est quant à lui animé et musical.
Le premier bonus de cette édition (17’30) croise les interventions d’Odile Bordaz (docteur en Histoire de l’art), Christophe Champclaux (historien du cinéma) et Michel Olivier (maître d’armes). L’historien du cinéma se taille la part du lion en replaçant Vendetta dans la filmographie de Douglas Fairbanks Jr., tout en revenant longuement sur le roman d’Alexandre Dumas, ses thèmes et ses diverses déclinaisons au théâtre et au cinéma. La participation de Michel Olivier est un peu plus anecdotique. Odile Bordaz aborde de son côté la part fantastique de quelques œuvres de l’écrivain. Si les propos sont souvent pertinents, le montage laisse à désirer.
Le second module (6’) donne à nouveau la parole à Michel Olivier. Dans son costume d’époque, le maître d’armes présente Les Lames sur Seine, association d’Escrime Artistique et de Spectacle de Neuilly-sur-Seine, agréée Jeunesses et Sports, également une école de formation et un Centre de création de spectacles d’Escrime Artistique. L’Escrime Artistique fait revivre la pratique de l’escrime à travers toutes les époques, de l’Antiquité au début du XXème siècle, en passant par le Grand Siècle et le Siècle des Lumières. L’occasion de découvrir quelques extraits de représentations au Château de Breteuil.
L’interactivité se clôt sur une présentation des quatre visuels des éditions de la collection Alexandre Dumas disponible chez Rimini.
L’Image et le son
Il serait difficile de faire mieux. Ce nouveau master Haute-Définition (1.33) permet de découvrir ou de revoir Vendetta dans de formidables conditions techniques. La propreté est éloquente, les contrastes maîtrisés, le N&B élégant et lumineux, le piqué impressionnant et le relief indéniable. Le grain est certes parfois trop lissé, les plans où apparaissent deux Douglas Fairbanks Jr. sont sensiblement plus altérés et les fondus enchaînés entraînent divers décrochages, mais le confort de visionnage est appréciable. Une restauration et un lifting de premier ordre pour le film de Gregory Ratoff.
Privilégiez évidemment la version originale, restaurée, fluide, sans souffle et dynamique. En revanche, la piste française (absente de l’ancienne édition DVD) grésille et les dialogues sont souvent couverts.
Crédits images : © Impex Films / Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr