UN MARTEAU POUR LES SORCIÈRES (Kladivo na carodejnice) réalisé par Otakar Vávra, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 4 octobre 2022 chez Artus Films.
Acteurs : Vladimír Smeral, Elo Romancik, Josef Kemr, Sona Valentová, Blanka Waleská, Lola Skrbková, Jirina Stepnicková, Marie Nademlejnská…
Scénario : Otakar Vávra & Ester Krumbachová, d’après le roman de Václav Kaplický
Photographie : Josef Illík
Musique : Jirí Srnka
Durée : 1h42
Date de sortie initiale : 1970
LE FILM
Moravie, 1670. Pour avoir dérobé une hostie, croyant soigner sa vache ne donnant plus de lait, une vieille femme se fait accuser de sorcellerie. Le seigneur du pays fait alors venir un tribunal de l’Inquisition pour la juger. L’inquisiteur, Boblig von Edelstadt, s’appuie sur le célèbre manuel Malleus Maleficarum pour mener les interrogatoires. Mais, très vite, les tortures vont succéder aux dénonciations, et les bûchers vont s’allumer, toujours plus nombreux.
Si Un Marteau pour les sorcières – Kladivo na čarodějnice était sorti en 2022, il trônerait largement sur la première place du podium des films d‘horreur. Pourtant, celui-ci est bel et bien sorti il y a plus de quarante ans et n‘a rien perdu de son efficacité. On doit ce film au tchèque Otakar Vávra (1911-2011), dont la longue, prolifique et éclectique carrière s‘étendra sur plus de soixante-dix ans, une cinquantaine de courts et longs-métrages, sans oublier le documentaire, genre dans lequel il s‘est également illustré. Il adapte ici le roman Kladivo na čarodějnice de Václav Kaplický, publié en 1963 et en tire un magnifique objet de cinéma, à la fois intense film dramatique et éprouvant opus horrifique. Ancien adhérent du Parti communiste, Otakar Vávra n‘y va pas de main-morte dans Un marteau pour les sorcières, oeuvre engagée, pour dénoncer l‘Eglise ainsi que les méthodes expéditives des régimes autoritaires, et signe un chef d‘oeuvre anxiogène, qui repose sur les véritables textes issus des procédures, repris des registres authentiques des audiences d‘inquisition lors des procès de Losiny et Sumperk de 1678 à 1695.
Dans les années 1670 en Moravie, un enfant de chœur remarque qu’une femme âgée dissimule le pain donné pendant la communion et en informe le prêtre, qui questionne la vieille femme. Elle admet qu’elle a pris le pain pour le donner à une vache afin de réactiver sa production de lait. Le prêtre rapporte l’incident au seigneur local qui, à son tour, en appelle à un inquisiteur spécialisé dans les procès de sorcellerie, Boblig von Edelstadt. Boblig s’inspirant du livre Malleus Maleficarum (Marteau des sorcières), instruit une série de procès sans cesse plus nombreux, utilisant la torture dans ses interrogatoires. Cependant, un prêtre, Krystof Lautner, critique ces méthodes inhumaines, et un autre membre du clergé découvre qu’un grand nombre des femmes accusées de sorcellerie et brûlées vives sur le bûcher sont en fait innocentes, et prie ouvertement pour que cessent ces procès. Boblig se met à craindre Lautner, et l’une des accusées témoigne alors contre Lautner et sa cuisinière, Zuzana. Lautner est accusé d’avoir une cuisinière et de jouer du violon, deux pratiques non conventionnelles pour un ecclésiastique.
Un marteau pour les sorcières est une implacable réaction en chaîne, un mortel engrenage où chaque nouvelle personne accusée en vient à dénoncer d‘autres individus (principalement des femmes), après avoir subi moult tortures et l‘interrogatoire du sadique, insidieux, cruel, machiavélique et fanatique inquisiteur (pléonasme) Boblig, incarné par le sensationnel Vladimìr Smeral (vu dans Alouettes, le fil à la patte de Jiří Menzel), impérial du début à la fin. Le spectateur prend un malin plaisir à le voir se complaire à humilier les femmes (jeunes et âgées, peu importe), sans scrupule ni morale, au cours de procès de pacotille en sorcellerie. La femme c‘est le péché, le diable apparaît souvent cette forme, dont toutes les femmes sont potentiellement possédées et donc forcément dangereuses.
Solidement épaulé par le chef opérateur Josef Illík, Otakar Vávra plonge l‘audience au XVIIème siècle, dans un petit village morave, dans lequel va se dérouler le petit théâtre de l’horreur et voir les bûchers se dresser, s’enflammer et se multiplier. Boblig, homme envieux, agit uniquement dans son intérêt, dans le but de s’accaparer les richesses et d’éliminer ses ennemis. Usant de ce stratagème, il va également tenter d‘éliminer son principal adversaire, Lautner (superbe Elo Romancik), représentant du clergé de la ville, qui reste persuadé que la superstition et l‘ignorance entraînent la mise à mort d‘innocentes.
Le reste du temps, on festoie, on ripaille, on joue de la musique, on fait quelques allusions grivoises (une tension sexuelle se fait souvent ressentir), tandis que les victimes s‘enchaînent les unes à la suite des autres après que celles-ci aient été torturées et avoué (ou non d‘ailleurs, car cela revient au même) leur culpabilité. On ressort littéralement lessivé d‘Un marteau pour les sorcières, sublimement photographié, magistralement écrit (les dialogues sont complètement dingues) et qui joue avec les nerfs sans discontinuer.
LE COMBO BLU-RAY + DVD
Un marteau pour les sorcières débarque dans les bacs français chez Artus Films, sous la forme d‘un magnifique Combo Blu-ray + DVD. Un digipack à deux volets renferme les deux disques, soigneusement glissé dans un fourreau cartonné très élégant. Le menu principal est fixe et musical.
En guise de bonus, nous ne trouvons qu‘un Diaporama d‘affiches et de photos…étonnant de ne pas trouver une présentation du film.
L‘Image et le son
Quelques petits défauts de pellicule, des rayures, des poussières et des raccords de montage encore visibles (malgré une évidente restauration 2K), mais dans l‘ensemble, la copie présentée par Artus Films tient solidement la route avec des contrastes bien marqués, des noirs denses, des gris riches, une stabilité rarement démentie, une texture argentique bien équilibrée et une luminosité de tous les instants. Les conditions de visionnage sont confortables et permettent de (re)découvrir Un marteau pour les sorcières.
Version originale uniquement. Rien à redire sur l’acoustique. L’écoute est propre et dynamique, les dialogues bien posés et l’environnement musical appréciable. Pas de souffle parasite, ni de craquements. Les sous-titres ne sont pas imposés.