ORCA réalisé par Michael Anderson, disponible en Blu-ray le 27 mai 2020 chez Studiocanal.
Acteurs : Richard Harris, Charlotte Rampling, Will Sampson, Bo Derek, Keenan Wynn, Robert Carradine, Scott Walker, Peter Hooten…
Scénario : Luciano Vincenzoni, Sergio Donati
Photographie : J. Barry Herron, Ted Moore
Musique : Ennio Morricone
Durée : 1h32
Date de sortie initiale : 1977
LE FILM
Rachel Bedford, biologiste, se consacre à la protection du monde sous-marin. Le Capitaine Nolan veut attraper un épaulard pour toucher de l’argent. Malgré les protestations de Rachel qui le met en garde, il blesse une femelle orque. Le compagnon de l’animal n’aura de cesse de se venger de lui, et le poursuivra impitoyablement, provoquant la mort de plusieurs personnes.
Le réalisateur britannique Michael Anderson (1920-2018), solide technicien, demeure célèbre pour Tour du monde en quatre-vingts jours – Around the World in Eighty Days et de 1984, adaptés de Jules Verne et de George Orwell, tous deux réalisés en 1956, mais aussi L’Âge de cristal – Logan’s Run (1976) et Chroniques martiennes – The Martian Chronicles, minidsérie créée en 1980. Orca (1977) reste son film le plus diffusé à la télévision française. Grand succès dans l’Hexagone avec près d’1,5 million d’entrées, Orca a toujours été chéri par les spectateurs et connaît depuis quelques années un regain de reconnaissance de la part de la critique. Porté par le couple Richard Harris, animal sauvage qui cache ses blessures, et Charlotte Rampling, beauté féline et insaisissable qui foudroie par son regard électrique, Orca est un vrai classique du cinéma d’aventure doublé d’un drame passionnel dont le troisième sommet du triangle n’est autre qu’un épaulard prêt à tout pour venger la mort de celle qu’il aimait.
Terre-Neuve. Le capitaine Nolan est un pêcheur qui vend ses plus grosses prises aux aquariums les plus offrants. Un jour, il croise la route de Rachel, une biologiste marine, sur le point de se faire attaquer par un grand requin blanc. Nolan fait monter Rachel à bord de son bateau, mais Ken, son assistant, tombe à l’eau. Sur le point de se faire dévorer par le requin, Ken est sauvé in extremis par une orque qui attaque et tue le requin. Nolan s’intéresse de plus en plus aux orques et décide d’en capturer une afin de la revendre à prix d’or à un aquarium. Malgré les arguments de Rachel quant à l’intelligence des orques et leur instinct, proche de celui de l’homme, Nolan tente de capturer une femelle. Il y parvient, mais l’événement tourne au drame. Hissée à bord, blessée, la femelle met bas et le nouveau-né meurt sur le pont du bateau. L’épaulard mâle assiste à la scène en hurlant de douleur. Le soir, le mâle commence à traquer Nolan et son équipage.
L’ombre des Dents de la mer – Jaws (1975) plane évidemment sur Orca, produit par le nabab Dino De Laurentiis, qui n’était pas le dernier pour surfer sur les succès et les modes du moment. Un an après avoir ressuscité King Kong, l’immense producteur commandent un scénario à ses compatriotes Luciano Vincenzoni (La Grande guerre, Séduite et abandonnée, Le Bon, la Brute et le Truand, Il était une fois… la révolution) et Sergio Donati (Et pour quelques dollars de plus, Il était une fois dans l’Ouest), deux gigantesques pointures du cinéma transalpin, dans lequel un animal marin pourrait rivaliser avec le requin de Steven Spielberg. Les deux auteurs transposent pour ainsi dire un récit de série B, une histoire de vengeance traditionnelle, mais vue du point de vue d’un des plus imposant mammifères marins du monde, l’orque. Resserrée sur 90 minutes, l’intrigue d’Orca va droit à l’essentiel, même si les deux scénaristes nourrissent progressivement la psychologie du personnage principal interprété par Richard Harris. Entre Le Pont de Cassandra – The Cassandra Crossing (1976) de George Pan Cosmatos et Les Oies sauvages – The Wild Geese (1978) de Andrew V. McLaglen, le comédien promenait son charisme buriné de série B en série B, avec toujours autant de talent.
Si Nolan semble tout d’abord immature et seulement intéressé par l’argent qu’il pourra se faire avec ses proies capturées dans les océans, il apparaît petit à petit comme étant le reflet de l’orque, animal à sang chaud doté d’une intelligence hors normes et de sentiments, qui le poursuit et avec lequel il se découvre de nombreux et troublants points communs. Nolan est en réalité un homme brisé, qui a perdu femme et enfant, et qui n’a jamais pu faire réellement son deuil, en allant se perdre continuellement en mer. Ce face-à-face inattendu va non seulement le confronter à la plus grande force physique qui soit, mais aussi face à lui-même.
Lorsqu’elle tourne Orca, Charlotte Rampling est alors une des actrices les plus demandées du monde. Un taxi mauve (1977) d’Yves Boisset, Stardust Memories (1980) de Woody Allen, Le Verdict (1982) de Sidney Lumet, On ne meurt que deux fois (1985) de Jacques Deray, Max mon amour (1986) de Nagisa Oshima et Angel Heart (1987) de Alan Parker composeront entre autres sa filmographie les dix années suivant Orca, un C.V. pour le moins impressionnant. Dans le film de Michael Anderson, elle incarne une biologiste qui saura amadouer Nolan, celle qui va découvrir ce qu’il dissimule et semble fuir, tout en lui faisant prendre conscience qu’un nouvel amour est possible, ainsi que la rédemption et une nouvelle vie.
Entre Les Dents de la mer et Moby Dick, Orca déroule son intrigue en trouvant le parfait équilibre entre réflexion, émotions et scènes impressionnantes, comme celle où l’épaulard attaque le port de pêche, coulant ainsi plusieurs bateaux, en épargnant celui de Nolan, avant de s’en prendre à la maison sur pilotis de ce dernier, où est présente la jeune Annie (Bo Derek, dans sa première apparition au cinéma), un des membres de l’équipage de Nolan. C’est après ce drame, que face à l’agressivité de l’orque et à la pression des habitants de la ville, que Nolan décidera de sortir en mer afin d’affronter l’épaulard.
Enfin, la réussite d’Orca ne serait pas entière sans la splendide composition d’Ennio Morricone. La séquence d’ouverture qui montre l’amour et la plénitude du couple d’orque, nageant et se frôlant dans les eaux, sur fond de coucher de soleil, le tout bercé par la musique édénique du maestro, est déjà un des moments inoubliables de ce très grand film.
LE BLU-RAY
Longtemps attendu par les très nombreux fans du film, Orca débarque ENFIN en BLU-RAY chez Studiocanal. Dommage que ce titre soit finalement relégué en fond de catalogue chez l’éditeur, puisqu’il s’agit ici d’une sortie comme qui dirait technique. Le menu principal est par exemple fixe et muet, d’un autre temps, et la jaquette peu représentative (euphémisme) du film de Michael Anderson.
Aucun supplément n’est proposé. Pourtant, il y avait sûrement quelques spécialistes pour parler d’Orca.
L’Image et le son
Il y a du bon et du moins bon. Il y a eu restauration certes, mais au final celle-ci semble avoir été peu poussée. De nombreux points blancs et des tâches noires subsistent tout du long, ainsi que de légers fourmillements. Par rapport à l’édition Standard, qui remonte déjà à 2003, les couleurs sont rafraîchies, les contrastes raffermis et la gestion du grain plus équilibrée, même si certaines séquences à effets spéciaux sont cette fois encore plus altérées avec une texture argentique plus chancelante, comme lors de la scène finale étonnamment plus grumeleuse. Mais dans l’ensemble ce Blu-ray s’en sort bien.
Les versions anglaise et française sont présentées en DTS-HD Master Audio Stéréo. Celles-ci remplissent leur office, sans se forcer, avec suffisamment d’efficacité, même si la partition d’Ennio Morricone aurait mérité un meilleur traitement et un coffre digne de ce nom. Le doublage français est très réussi avec notamment la voix de William Sabatier pour Richard Harris et celle de Charlotte Rampling qui assure sa propre post-synchronisation. Les sous-titres français sont imposés sur la piste anglaise, et le changement de langue est verrouillé à la volée.