
MONTE WALSH réalisé par William A. Fraker, disponible en DVD & Combo Blu-ray + DVD le 18 septembre 2025 chez Sidonis Calysta.
Acteurs : Lee Marvin, Jeanne Moreau, Jack Palance, Mitch Ryan, Jim Davis, G.D. Spradlin, John Hudkins, Raymond Guth…
Scénario : David Zelag Goodman & Lukas Heller, d’après le roman de Jack Schaefer
Photographie : David M. Walsh
Musique : John Barry
Durée : 1h39
Date de sortie initiale : 1970
LE FILM
Les temps changent dans l’Ouest américain. Monte Walsh et Chet Rollins, deux cow-boys au passé mouvementé, se retrouvent au chômage et seuls. Ils acceptent de petit jobs au gré de leur vagabondage. Ils épousent respectivement une prostituée et la veuve d’un quincaillier. Alors que plus personne n’a besoin du travail des cow-boys, ils vont devoir trouver leur place dans le monde…

C’est la fin d’un siècle, d’une ère, d’un monde. Monte Walsh est un western crépusculaire adapté d’un roman de Jack Schaefer (La Loi de la prairie de Robert Wise, L’Homme des vallées perdues de George Stevens) et réalisé par William A. Fraker (1923-2010). Sil s’agit de son premier long-métrage comme metteur en scène, celui-ci n’est pas un inconnu, puisqu’il est avant tout le directeur de la photographie de plusieurs classiques du cinéma comme Rosemary’s Baby de Roman Polanski, Bullitt de Peter Yates, et plus tard de 1941 de Steven Spielberg, Les Aventures d’un homme invisible – Memoirs of an Invisible Man de John Carpenter et même de – accrochez-vous – de Street Fighter – L’ultime combat de Steven E. de Souza. Autant dire que le bonhomme a un œil. En 1970, il devient donc réalisateur, s’empare d’un scénario en or coécrit par David Zelag Goodman (Les Yeux de Laura Mars, L’âge de cristal) et Lukas Heller (Les Douze Salopards, Le Vol du Phénix, Chut…chut, chère Charlotte) et livre un magnifique western (tardif), qui peut à la fois se voir comme une parabole sur la fin d’un genre à part entière, mais aussi sur celle d’un cinéma révolu, qui a alors laissé sa place au Nouvel Hollywood, avant l’arrivée du premier blockbuster représenté par Les Dents de la mer – Jaws de Steven Spielberg qui pointera son museau cinq ans plus tard. Mais on peut aussi y déceler un fabuleux portrait de Lee Marvin, qui tient le rôle-titre, représentant, figure, gueule de tout un univers. Durant les années 1960, le comédien aura tout de même collaboré avec Michael Curtiz, John Ford (à plusieurs reprises), Don Siegel, Elliot Silverstein, Stanley Kramer, Richard Brooks, Robert Aldrich et John Boorman. Un C.V. qui ferait plus d’un envieux et dans lequel il n’y a absolument rien à jeter. La cinquantaine en ligne de mire, Lee Marvin commence à se diriger vers les rôles de vétérans et Monte Walsh est assurément un film pivot dans son illustre carrière. À ne rater sous aucun prétexte.


Tandis que les ranchs ferment, que la prairie se couvre de barbelés et que la clientèle des saloons se fait rare, trois cow-boys recherchent un travail qui leur permette de survivre. Si Chet Rollins manifeste de réelles ambitions, son ami Monte Walsh préfère s’adonner aux plaisirs faciles. Quant à Shorty Austin , il envisage de s’engager sur le tard dans la voie du crime. Dans la localité d’Harmony, Monte Walsh retrouve Martine Bernard, une séduisante entraîneuse sur le point de quitter la ville pour s’installer dans une cité plus prospère. Au moment où Chet Rollins se marie avec la veuve d’un quincaillier dont il reprend la boutique, Austin le braque…


« Tant qu’il y aura un cowboy et une vache, c’est pas fini ! »
Il y a quelque chose qui rappelle le splendide Will Penny, le solitaire de Tom Gries, sorti peu de temps auparavant. Sans doute parce que les scénaristes et cinéastes sentaient qu’une page se tournait et qu’il fallait donc prendre en compte la psychologie des cowboys, qui n’avaient plus leur place dans le Far West à l’aube du vingtième siècle, ou au cinéma où les chevaux ont été remplacés par les motos d’Easy Rider. Monte Walsh est une plongée dans des décors délabrés, qui prennent l’eau après le passage d’une pluie diluvienne, où l’on s’arrache les derniers petits boulots, en échange d’un lit de fortune et de repas gluants. On s’entraide, mais on n’hésite pas non plus à passer devant l’autre si l’on peut lui prendre son job. Tout n’est qu’une question de survie et la loi de la jungle est toujours en vigueur.


Lee Marvin, dans un rôle proche de celui qu’il campera dans le méconnu et tout aussi réussi Du sang dans la poussière – The Spikes Gang de Richard Fleischer, observe ce qui l’entoure avec résignation, mais continue d’avancer et de bosser dans un ranch. « Si seulement je savais faire autre chose » dit-il à Martine (superbe Jeanne Moreau), prostituée d’un âge avancé, pour laquelle « les temps sont durs ». Les deux se rendent à l’évidence, ils ne rajeunissent pas et il est alors peut-être temps de raccrocher, et pourquoi pas de se marier. Mais c’était sans compter la violence qui va rattraper Monte, d’autant plus que cette fois, son meilleur ami Chet (Jack Palance, impérial et doux comme un agneau) va en payer les frais. Le sang appelle la violence et Monte va devoir remettre ses projets à « plus tard ».


Malgré quelques pointes d’humour savoureuses, des bastons homériques (« Cela fait des mois que je ne m’étais pas senti aussi bien » dit Monte), de l’action (des troupeaux déchaînés, le dressage du cheval sauvage qui entraîne la destruction d’une grande partie de la ville), Monte Walsh est un film profondément mélancolique. Tout s’efface autour du personnage principal, ses amis disparaissent, son amour fout le camp (et bientôt de façon définitive), les baraques s’effondrent, les saloons sont déserts, les ranchs sont faméliques, mais ceux qui restent sont encore debout et comptent bien le rester encore le plus longtemps possible.


Un grand et remarquable western (qui connaîtra un remake TV avec Tom Selleck), où l’envoûtante composition de John Barry arrache les larmes.
LE BLU-RAY
Précédemment sorti en DVD chez Koba Films (en 2012, puis en 2017), Monte Walsh intègre tout naturellement la collection Silver chez Sidonis Calysta. Très beau visuel. Le film est disponible en DVD, ainsi qu’en Combo Blu-ray + DVD. Le menu principal est animé et musical.

On démarre les bonus avec une intervention de Noël Simsolo (19’30). Comme souvent, le critique et historien du cinéma raconte une petite histoire personnelle liée au film qu’il présente. Il se souvient de la sortie de Monte Walsh à Paris en 1971, qui avait eu un accueil très mitigé en Europe, mais remporté un grand succès aux États-Unis. Noël Simsolo revient sur le parcours de William A. Fraker, sur le roman de Jack Schaefer, avant d’analyser le fond et la forme de Monte Walsh, qu’il qualifie de « presque chef d’oeuvre ». La mélancolie du récit est mise en avant et Noël Simsolo rapproche le film des westerns des années 1920. Le casting est aussi passé au peigne fin.

Le plus gros morceau de cette section n’est autre qu’un formidable documentaire consacré à Lee Marvin, présenté par son ami John Boorman et réalisé en 1998 (49’). Le cinéaste anglais, qui a dirigé Lee Marvin dans Le Point de non-retour – Point Blank (1967) et Duel dans le Pacifique – Hell in the Pacific (1968), se lance dans une quête pour comprendre l’homme qui a eu un effet si profond sur sa propre vie et son travail. Un fabuleux portrait se dessine, le tout composé d’entretiens divers (avec Jim Jarmusch, William Hurt, la veuve de l’acteur), beaucoup d’extraits illustrent l’ensemble, ainsi que diverses images de tournage. Les fans de Lee Marvin vont être aux anges.











L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.
L’Image et le son
Présenté au format 2,35:1, encodé en MPEG-4 AVC et bénéficiant d’un transfert 1080p, Monte Walsh. Une très belle restauration, qui fait la part belle à la palette chromatique, quand bien même quelques plans s’avèrent un peu plus abîmés, avec l’apparition de griffures et de poussières. La luminosité est éloquente, les détails appréciables, le piqué convaincant et la texture argentique conservée. Certaines scènes se déroulant dans la pénombre dont sans doute moins bien définies, mais cela reste anecdotique.

Cette édition Blu-ray comporte deux pistes, anglaise et française, en DTS-HD Master Audio 2.0. La version originale est sans surprise la plus dynamique du lot, avec une belle restitution de la partition de John Barry et un meilleur équilibre au niveau des aigus. Même en poussant le volume de votre système un peu plus fort que d’habitude, vous ne remarquerez aucune anomalie liée à l’âge du film, pas même un souffle quelconque. Le doublage français s’en sort pas trop mal avec à la barre André Valmy (Lee Marvin), Georges Atlas (Jack Palance), tandis que Jeanne Moreau se double elle-même.


Crédits images : © Sidonis Calysta / Paramount Pictures / Captures du Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr