MÉANDRE réalisé par Mathieu Turi, disponible en DVD et Blu-ray le 8 septembre 2021 chez Blaq Out.
Acteurs : Gaia Weiss, Peter Franzén, Romane Libert, Frédéric Franchitti, Corneliu Dragomirescu, Eva Niewdanski…
Scénario : Mathieu Turi
Photographie : Alain Duplantier
Musique : Frédéric Poirier
Durée : 1h31
Année de sortie : 2020
LE FILM
Une jeune femme se réveille dans un tube rempli de pièges mortels. Pour ne pas mourir, elle devra constamment avancer…
Le réalisateur et scénariste Mathieu Turi (né en 1987) s’est fait connaître en 2018 avec son premier long-métrage Hostile, film d’horreur post-apocalyptique produit par Xavier Gens, présenté dans multiples festivals à travers le monde et déjà centré sur un personnage féminin. Doté d’un large bagage technique qu’il s’est entre autres forgé en tant qu’assistant auprès de Quentin Tarantino (Inglourious Basterds), Clint Eastwood (Au-delà), Guy Ritchie (Sherlock Holmes : Jeu d’ombres), Fred Cavayé (Mea Culpa) et Luc Besson (Lucy), le jeune metteur en scène peut désormais voler de ses propres ailes, ce qu’il fait avec son deuxième essai et coup de maître, Méandre. Pour ce second film, Mathieu Turi revient une fois de plus à la science-fiction matinée d’horreur en signant un tour de force, puisqu’il y dirige essentiellement une seule comédienne, Gaia Weiss, qui livre une performance exceptionnelle, tout en proposant aux spectateurs de vivre une véritable et anxiogène expérience de cinéma à laquelle on n’arrête pas de penser encore bien après.
Une jeune femme est allongée au milieu de la route lorsqu’une voiture s’approche. Avant qu’elle ne l’atteigne, elle se lève et s’écarte. Le véhicule s’arrête à côté d’elle et le conducteur lui propose de l’emmener. Ils se présentent comme Lisa et Adam. Elle remarque qu’il a un tatouage en forme de croix sur sa main. En discutant (difficilement), Lisa révèle que sa fille Nina est décédée et qu’aujourd’hui aurait été son neuvième anniversaire. Au bout d’un moment, Lisa allume la radio et entend l’annonce d’un double assassinat. Le rapport décrit un homme avec un tatouage spécifique sur la main. Lisa fait le lien, mais avant que celle-ci puisse réagir, Adam écrase la pédale de frein et Lisa percute le tableau de bord. Elle se réveille dans une petite pièce fermée avec des lumières étranges sur les murs et apparemment sans issue, un étrange appareil attaché à son poignet émettant une lumière jaune. Au bout d’un moment, un mur s’ouvre et révèle un tunnel étroit. Lisa s’y engouffre, tandis que l’ouverture se referme derrière elle. Une alarme se déclenche sur l’appareil fixé à son poignet avec une minuterie qui clignote brièvement indiquant un compte à rebours de 11 minutes. Lisa continue d’avancer en surmontant divers obstacles, un passage incroyablement étroit à travers lequel elle doit se faufiler, une plate-forme qui commence à s’élever lentement et l’écrase presque contre le plafond. Soudain, un corps en décomposition bloque son chemin. Il ne lui reste qu’une minute et sur les murs apparaissent des tubes qui semblent commencer à chauffer. Comment peut-elle s’en sortir et surtout où se trouve-t-elle ?
En fait, il y a peu de choses à dire sur Méandre, un film qui se « ressent » du début à la fin. L’auteur de ces mots aura éprouvé constamment un sentiment de claustrophobie. Mix entre Cube (1997) de Vincenzo Natali, Fort Boyard et de Ninja Warrior, Méandre place le spectateur en tant que témoin de la situation extraordinaire (et peu enviable) de Lisa, mais aussi comme acolyte, puisque l’audience aura continuellement l’impression de vivre les mêmes situations extrêmes du personnage. Entièrement immersif et sensoriel, le film de Mathieu Turi repose tout autant sur l’interprétation intense et habitée de sa tête d’affiche, que sur la beauté et la réussite des décors, sur celle de la partition de Frédéric Poirier (déjà à l’oeuvre sur Hostile), ainsi que sur celle de la photographie stylisée d’Alain Duplantier (L’Annulaire de Diane Bertrand, Pour elle de Fred Cavayé, Anna M. de Michel Spinosa). Cette combinaison de talents, couplée à celle du réalisateur, sans oublier un montage particulièrement soigné et un travail sur le son assez dingue, donne naissance à l’un des meilleurs films de genre hexagonaux que l’on ait pu voir depuis dix ou quinze ans.
Mais il faut bien avouer que malgré sa très grande prouesse technique, ce que l’on retient avant tout de Méandre, c’est bel et bien la prestation, le charisme et l’implication de Gaia Weiss. Découverte dans les navrants (euphémisme) La Légende d’Hercule – The Legend of Hercules (2014) de Renny Harlin et Les Profs 2 (2015) de Pierre-François Martin-Laval, la comédienne se fait ensuite remarquer dans les saisons 2 et 3 de la série Vikings, dans laquelle elle interprétait Porunn. Dans Méandre, elle trouve non seulement son plus grand rôle à ce jour, mais crève réellement l’écran pour la première fois.
Après, s’il faut pousser un peu plus la réflexion quant à la nature de ce labyrinthe tubulaire dans lequel est emprisonnée Lisa, rien n’est explicite, mais il est évident qu’il s’agit ici d’un purgatoire, où le personnage doit reprendre confiance en elle, mais aussi le contrôle son corps et de son esprit (ou comment survivre, malgré un deuil « impossible »), après de longues années – qu’on imagine – d’errance. Méandre peut faire penser à un jeu vidéo, de plateformes, où chaque niveau se révèle être plus difficile que le précédent, Lisa devant également faire fonctionner sa matière grise, de plus en plus et surtout plus rapidement. Plus l’issue semble se rapprocher, du moins l’imagine-t-elle, plus les dangers, obstacles et épreuves placés sur son chemin s’accentuent, une présence rampante notamment. Toujours est-il que Méandre surpasse en tout point Oxygène d’Alexandre Aja, auquel on ne peut s’empêcher de le comparer avec sa seule comédienne à l’écran et son concept d’enfermement.
A l’exception d’un dénouement forcément « décevant », puisque chaque spectateur aura tout envisagé et que la solution donnée n’a pas la puissance attendue ou n’est pas proportionnelle au suspense savamment entretenu durant 90 minutes, Méandre demeure assurément l’une des plus belles et grandes surprises de l’année 2021 au cinéma.
LE BLU-RAY
Méandre apparaît dans les bacs, en DVD et en Blu-ray, sous les couleurs de Blaq Out. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est fixe et musical.
Un seul supplément, mais très intéressant, le making of de Méandre (23’). Classique, ce documentaire donne néanmoins un réel aperçu du tournage, des conditions de prises de vue, des équipes techniques au boulot avec diverses images provenant des ateliers où sont créés les maquillages et les costumes. On y voit aussi Mathieu Turi avec ses collaborateurs et sa comédienne Gaia Weiss (dont le tournage n’a pas été de tout repos et surtout marqué par le froid), jusqu’à l’enregistrement de la musique de Frédéric Poirier.
L’Image et le son
Blaq Out soigne son master HD. Les contrastes sont d’une densité rarement démentie, y compris sur les très nombreuses séquences sombres, avec une image sans cesse affûtée. Le piqué est acéré, les gros plans riches, les contrastes denses et la colorimétrie reste chatoyante. Les détails sont légion aux quatre coins du cadre large et la copie restitue les volontés artistiques du chef opérateur Alain Duplantier. Ce Blu-ray offre d’excellentes conditions pour revoir le film de Mathieu Turi et profiter de la superbe photographie. L’apport HD sur ce titre est évidemment indispensable.
Versions française ou originale (mixant à la fois le français et un peu d’anglais) DTS-HD Master Audio 5.1.. Le confort acoustique est total avec une remarquable homogénéité des voix et des effets annexes. Le pouvoir immersif du mixage est fort plaisant. Toutes les enceintes sont intelligemment mises à contribution, les effets sont souvent percutants. La balance frontale et latérale est constante et riche, le caisson de basses souligne efficacement les séquences du film les plus agitées, tandis que les dialogues et commentaires restent fluides et solides. L’éditeur joint une piste Audiodescription, ainsi que les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant.