L’ORIGINE DU MONDE réalisé par Laurent Lafitte, disponible en DVD et Blu-ray le 19 janvier 2022 chez Studiocanal.
Acteurs : Laurent Lafitte, Karin Viard, Vincent Macaigne, Hélène Vincent, Nicole Garcia, Pauline Clément, Luca Malinowski, Christine Beauvallet…
Scénario : Laurent Lafitte, d’après la pièce de Sébastien Thiery
Photographie : Axel Cosnefroy
Durée : 1h40
Date de sortie initiale : 2021
LE FILM
Un jour, sans crier gare, le coeur de Jean-Louis s’arrête de battre. Jean-Louis devrait être mort mais il parle, marche, vit sa vie comme si de rien n’était. Affolé, il demande son avis à Michel, son ami vétérinaire qui bien sûr ne parvient pas à expliquer ce phénomène étrange. Valérie, son épouse qui n’a aucune connaissances médicales, n’est d’aucune aide. Désespéré, le couple tente de trouver des réponses auprès de Margaux, la coach de vie de Valérie, un peu guérisseuse et en lien avec les forces occultes…
S’il apparaît sur les écrans depuis les années 1990 dans les séries du style Premiers baisers et Classe mannequin, Laurent Lafitte (né en 1973), commence de plus en plus à se faire remarquer au cinéma dans les années 2000 dans des seconds rôles. On le voit tour à tout chez Mathieu Kassovitz (Les Rivières pourpres), Guillaume Canet (Mon idole, Ne le dis à personne), Lionel Delplanque (Président), Claude Miller (Un secret)… Puis, après le triomphe des Petits mouchoirs, tout s’accélère et le comédien accède désormais en haut de l’affiche. C’est le cas pour De l’autre côté du périph de David Charhon, Les Beaux Jours de Marion Vernoux, 16 ans… ou presque de Tristan Séguéla, Elle l’adore de Jeanne Herry et Papa ou maman (et sa suite) de Martin Bourboulon qui sont tous des succès. Parallèlement, après son one-man show Laurent Lafitte, comme son nom l’indique, qui a fait salle comble au Palais des glaces en 2008, le pensionnaire de la Comédie-Française, révèle une face plus sombre dans quelques films dramatiques, dans Boomerang de François Favrat, Elle de Paul Verhoeven, K.O. de Fabrice Gobert, Paul Sanchez est revenu de Patricia Mazuy, Au revoir là-haut d’Albert Dupontel et L’Heure de la sortie de Sébastien Marnier, dans lesquels il est chaque fois remarquable. Bref, Laurent Lafitte est un acteur fabuleux, virtuose dans tous les genres. On attendait de pied ferme ses débuts à la mise en scène avec L’Origine du monde, l’adaptation de la pièce de théâtre du même nom de Sébastien Thiéry, gros carton du théâtre du Rond-Point en 2013. Et cette fois encore, Laurent Lafitte se surpasse, en signant tout simplement LA comédie de l’année 2021. Politiquement incorrect, osé, couillu même, L’Origine du monde est un film qui nous emmène là où on s’y attendait le moins. S’il s’accompagne forcément de son essence théâtrale originale, comme c’était aussi le cas pour Le Dîner de cons de Francis Veber et Le Prénom d’Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte, ce premier film se démarque par son humour anglo-saxon qui viendrait parasiter un vaudeville bien de chez nous, le tout marqué par l’élégance habituelle de son réalisateur et de formidables numéros d’acteurs. Ça fait un bien fou !
Jean-Louis réalise en rentrant chez lui que son cœur s’est arrêté. Plus un seul battement dans sa poitrine, aucun pouls, rien. Pourtant, il est conscient, il parle, se déplace. Est-il encore vivant ? Est-il déjà mort ? Ni son ami vétérinaire Michel, ni sa femme Valérie ne trouvent d’explication à cet étrange phénomène. Alors que Jean-Louis panique, Valérie se tourne vers Margaux, sa coach de vie, un peu gourou, pas tout à fait marabout, mais très connectée aux forces occultes. Et elle a une solution qui va mettre Jean-Louis face au tabou ultime…
Laurent Lafitte retrouve Vincent Macaigne, son complice de Tristesse Club (2014) de Vincent Mariette, avec lequel l’alchimie est évidente. Les deux comédiens partagent ce goût pour l’humour décalé et même le jusqu’au-boutisme, présent du début à la fin dans L’Origine du monde. Karin Viard, qui a déjà montré à plusieurs reprises que rien ne lui faisait peur à l’écran, se joint joyeusement à la partie. LA scène centrale du film, qui fera date sans doute, qui est complètement inattendue, qui peut mettre mal à l’aise également, est un monument à elle-seule. Mieux vaut en savoir le moins possible d’ailleurs afin d’en préserver l’éclat (de rire) et la redoutable efficacité. Mais L’Origine du monde ne tourne pas uniquement autour de cette séquence. C’est aussi le portrait d’un couple (trop) bien installé, qui s’emmerde royalement dans son appartement de luxe, qui ne sait plus vraiment communiquer, doublé de celui d’un homme, Jean-Louis, qui perd les pédales, paumé en pleine crise existentielle, qui n’a quasiment plus aucun contact avec sa mère. Alors, quand son coeur a décidé de ne plus battre, Jean-Louis commence comme qui dirait un petit peu à s’inquiéter.
Sur ce postulat de départ on ne peut plus original, Laurent Lafitte entraîne le spectateur dans son sillage, dans quelques aventures loufoques et singulières, quasi-inclassables et totalement inédites. Sur l’irrésistible tandem qu’il forme avec Karin Viard, qui se mute alors en triplette avec l’arrivée de l’incroyable Vincent Macaigne (toutes ses répliques sont hilarantes), se greffent les Stradivarius, Nicole Garcia et Hélène Vincent, explosives. Au-delà de son humour percutant, L’Origine du monde est parcouru d’une certaine gravité, ou quand le mensonge peut non seulement gangrener une famille, mais aussi avoir de lourdes répercussions sur les individus et leur émancipation. Le dernier acte, quand la mère de Jean-Louis enchaîne les révélations, on ne peut pas s’empêcher de penser à Jacques Villeret alias François Pignon dans Le Dîner de cons encore une fois, Laurent Lafitte trouve ce parfait équilibre entre le rire, inévitable, mais également le malaise, qui mine de rien s’instaure dès que le trio décide de tendre un piège à leur proie.
L’Origine du monde est une comédie grave ou un drame comique absolument phénoménal, vraiment très drôle, qui bouscule sans arrêt les spectateurs. C’est rare, immensément réussi, audacieux et à revoir sans modération.
LE BLU-RAY
230.000 entrées ! On espérait tellement plus pour L’Origine du monde, mais le film de Laurent Lafitte trouvera sûrement son public dans un second temps. Toujours est-il que celui-ci bénéficie d’une sortie en DVD et Blu-ray chez Studiocanal. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation. Tout comme le menu principal, fixe et musical.
Aucun supplément…quel dommage…
L’Image et le son
L’apport HD pour L’Origine du monde peut d’abord paraître limité. Mais c’était sans compter sur les quelques scènes en extérieur. Le relief est indiscutable, la texture flatteuse et la colorimétrie pimpante. Après, il est vrai que l’action se situe dans l’appartement des Bordier ou dans celui de la mère, et qu’aucune profondeur de champ n’est révélée. Mais le cinéaste a opté pour le cadre large et le spectateur aura l’impression d’être plongé au beau milieu de cette famille en crise. Les contrastes sont au beau fixe, le piqué ciselé comme la lame d’un scalpel. C’est très beau et élégant.
L’Origine du monde repose en grande partie sur les dialogues. Comme les 3/4 du film se déroulent en intérieur, la piste DTS-HD Master Audio 5.1 laisse reposer les latérales, tandis que la centrale à fort à faire. Mais comme pour l’image, les rares séquences en extérieur bénéficient d’une ampleur musicale superbe et immersive. Les enceintes se réveillent momentanément à l’arrière, le caisson de basses distille ses effets avec efficacité et les ambiances se révèlent solides. La piste Stéréo est tout aussi pointilleuse en ce qui concerne la délivrance des dialogues mais nous y perdons du point de vue spatialisation musicale. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.
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