Test Blu-ray / Juliette au printemps, réalisé par Blandine Lenoir

JULIETTE AU PRINTEMPS réalisé par Blandine Lenoir, disponible en DVD et Blu-ray le 15 octobre 2024 chez Diaphana.

Acteurs : Izïa Higelin, Sophie Guillemin, Jean-Pierre Darroussin, Noémie Lvovsky, Salif Cissé, Éric Caravaca, Leny Morand…

Scénario : Blandine Lenoir & Maud Ameline, d’après le roman graphique de Camille Jourdy

Photographie : Brice Pancot

Musique : Bertrand Belin

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 2024

LE FILM

Juliette, 35 ans, illustratrice de livres pour enfants, retourne dans le lieu où elle a grandi pour passer quinze jours en compagnie de ses proches : un père un peu lunaire, une sœur qui a d’autres chats à fouetter entre ses gosses, son boulot, son falot de mari et son amant, une mère aux abonnés absents et une grand-mère qui perd la tête. Souvenirs enfouis, non-dits et secrets de famille remontent à la surface…

Quand on découvre Juliette au printemps, on pense instantanément à un autre film, en l’occurrence Rosalie Blum de Julien Rappeneau, pépite sortie en 2015. Cela n’est pas anodin, puisque le quatrième long-métrage réalisé par Blandine Lenoir est aussi l’adaptation d’un roman graphique de Camille Jourdy (Juliette, les fantômes reviennent au printemps), dont on retrouve la même sensibilité et le même univers. Voici donc Juliette au printemps, merveilleuse comédie-dramatique, excellemment interprétée par une prestigieuse distribution, sur laquelle trône la lumineuse Izïa Higelin. Parallèlement à sa carrière musicale, la fille du grand Jacques n’a eu de cesse d’étonner au cinéma et ce depuis sa première apparition dans le très conseillé Mauvaise Fille de Patrick Mille en 2012. La comédienne a ensuite confirmé tout le bien que l’on pensait d’elle en apparaissant devant la caméra du tandem Nakache/Toledano (Samba), celle de Kervern et de Delépine (Saint Amour), mais aussi de Catherine Corsini (La Belle saison), Jacques Doillon (Rodin) et Louis Leterrier (le carton Netflix de Loin du périph). Juliette au printemps vaut aussi pour l’immense Jean-Pierre Darroussin, bouleversant dans le rôle du père qui n’a jamais su exprimer ses sentiments, mais dont le regard débordant d’amour et les gestes sans cesse esquissés et retenus émeuvent jusqu’aux larmes. La dépression a rarement été aussi poétique au cinéma et Juliette au printemps est ni plus ni moins l’un des meilleurs films français de l’année 2024. Un vrai coup au coeur.

Juliette, dessinatrice, revient passer du temps dans sa famille, dans une petite ville de l’Ain. Elle loge chez son père. Son séjour est l’occasion de renouer avec les membres de sa famille et de découvrir un secret de famille. Sa soeur Marylou, coiffeuse, est très stressée par sa charge mentale de mère de famille. Elle a un amant, qui travaille dans un magasin de déguisements et vient la voir chaque fois avec un accoutrement différent. Ils se retrouvent dans la serre du jardin. Les parents de Juliette et Marylou sont divorcés. Leur mère fait de la peinture, et les deux sœurs vont visiter une exposition de ses toiles. Leur grand-mère, Simone dite Nonna, vient d’être placée en EHPAD, en raison de sa santé mentale déclinante et ses tentatives de fugues intempestives. Juliette et Léonard culpabilisent un peu, mais pas Marylou, qui était en première ligne pour s’occuper de Nonna. Juliette, Léonard et Marylou vont vider la maison de Nonna en prévision d’une mise en vente, et Juliette sympathise avec Pollux, le sous-locataire. Ils se revoient et Pollux se met à rêver d’une relation plus poussée avec elle.

Outre le sujet de la dépression, Juliette au printemps aborde aussi les secrets de famille, le deuil impossible, la place de chacun dans une famille, la sexualité, l’incommunicabilité, l’épanouissement, la pudeur, la maternité, avec un optimisme que l’on pourrait qualifier de solaire et un humour aussi efficace qu’élégant. L’astre du film est magnifiquement incarné par Izïa Higelin, qui d’un sourire dévastateur nous fait immédiatement tomber amoureux de cette femme plongée dans un mal-être qui la pousse à revenir dans sa province natale. Là, elle retrouve son père (Jean-Pierre Darroussin), peu loquace, mais généreux, bienveillant, à l’écoute, mais peu habitué à donner des conseils. Juliette ne demande pas plus que rester un petit peu auprès de lui et ce sera l’occasion de revoir sa sœur Marylou (la sublime Sophie Guillemin), mariée, mère de famille, elle-même arrivée à un carrefour de sa vie puisqu’elle entretient une relation avec un commerçant, avec lequel l’osmose sexuelle est totale. Tout le monde semble au point mort, même si l’horizon n’est pas bouché. Le fait est que des décisions doivent être prises pour aller de l’avant, mais cela est bien plus facile à dire qu’à faire.

Blandine Lenoir avait déjà imposé une vision personnelle de la psyché humaine. Déjà dans Zouzou (où une mère sexagénaire annonçait à sa famille qu’elle avait un homme dans sa vie et une sexualité retrouvée), Aurore (dans lequel Agnès Jaoui se préparait à devenir grand-mère et retrouvait sa libido) et Annie colère (sur le choix d’avorter, avant la loi Veil), la réalisatrice se penchait sur des destins de femmes « comme les autres », marquées par la vie, qui en ont encore sous le capot et qui vont alors tout faire pour s’en sortir. L’existence n’est pas facile et Juliette, durant son séjour, affronter un drame que l’on a préféré taire, ou plutôt se diluer avec le temps.

Mais le trauma reste, les cicatrices demeurent et ont sûrement changé celles et ceux qui ont été témoins d’un événement survenu il y a plusieurs décennies. Durant cette parenthèse, Juliette va renouer avec ce qu’elle avait « mis de côté », mieux connaître son père (et comprendre pourquoi il n’exprime pas explicitement ce qu’il ressent), tout en se reconnectant avec propre corps.

On ressort subjugué, le coeur gros, les yeux mouillés, le sourire jusqu’aux oreilles et l’âme apaisée de Juliette au printemps, assurément l’un des plus beaux films français de l’année.

LE BLU-RAY

À l’instar d’Aurore et Annie colère, Juliette au printemps apparaît en DVD et Blu-ray chez Diaphana. Le visuel reprend celui de l’affiche d’exploitation. Le menu principal est animé et musical.

N’hésitez pas à visionner à nouveau Juliette au printemps en compagnie de Blandine Lenoir, qui a enregistré un commentaire audio sur son film. Les lieux de tournage, le casting, la transposition de l’oeuvre de Camille Jourdy, les partis-pris, ses intentions sont abordés par la réalisatrice. Un commentaire posé, sensible, instructif, un très beau moment.

Nous trouvons aussi près d’un quart d’heure de scènes coupées au montage, chacune étant introduite par un carton replaçant la dite séquence dans son contexte et la raison de son éviction. Un petit plus non négligeable, qui nous permet entre autres de découvrir plus longuement le bar (et sa faune) de la ville, lieu où se retrouvent les solitaires.

L’Image et le son

Diaphana comble les espérances en livrant un master HD somptueux. Le piqué affiche d’emblée une précision dantesque, les contrastes sont d’une densité éblouissante et la clarté est aveuglante. La profondeur de champ et le relief sont à l’avenant, la colorimétrie chaude et ambrée au top, les textures sont palpables et le cadre large fourmille de détails. Le nec plus ultra de la Haute-Définition.

Outre une piste Audiodescription et des sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, la version Dolby Digital 5.1 parvient sans mal à instaurer un indéniable confort phonique. Les enceintes sont toutes mises en valeur et spatialisent excellemment les effets, la musique et les ambiances. La piste Stéréo est de fort bon acabit et contentera largement ceux qui ne seraient pas équipés sur la scène arrière.

Crédits images : © Diaphana / Carole Bethuel / KARÉ PRODUCTIONS_FRANCE 3 CINÉMA_AUVERGNE RHÔNE ALPES CINÉMA / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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