FANATIC réalisé par Silvio Narizzano, disponible en Édition Blu-ray + DVD + Livret le 3 décembre 2019 chez ESC Editions
Acteurs : Tallulah Bankhead, Stefanie Powers, Peter Vaughan, Maurice Kaufmann, Yootha Joyce, Donald Sutherland, Gwendolyn Watts, Robert Dorning, Philip Gilbert…
Scénario : Richard Matheson d’après le roman Nightmare d’Anne Blaisdell
Photographie : Arthur Ibbetson
Musique : Wilfred Josephs
Durée : 1h38
Date de sortie initiale : 1965
LE FILM
Patricia Carroll, une jeune américaine, vient en Angleterre pour se marier avec Alan Glentower, mais avant de retrouver ce dernier elle décide d’aller rendre visite à la mère de son ancien fiancé décédé, Stephen Trefoile. Madame Trefoile vit dans un château isolé et délabré avec son domestique excentrique, sa servante malveillante et son jardinier simple d’esprit. Madame Trefoile se révèle fanatique religieuse et enferme dans son château Patricia afin de la purifier…
Après Maniac et Paranoïaque, voici Fanatic, réalisé en 1965 par un certain Silvio Narizzano (1927-2011). Ce nom ne vous dit peut-être rien, mais ce cinéaste a connu son heure de gloire en 1966 avec le film Georgy Girl, avec James Mason et Alan Bates, comédie nommée dans quatre catégories aux Oscar et aux BAFTA, récompensée aux Golden Globes pour l’interprétation de Lynn Redgrave. Mais pour l’heure, Fanatic marque ses débuts au cinéma après avoir fait ses classes à la télévision. Si Fanatic est quelque peu oublié dans l’immense liste des productions de la Hammer Films, il n’en demeure pas moins intéressant à plus d’un titre. Tout d’abord pour son scénario écrit par Richard Matheson (Je suis une légende, L’Homme qui rétrécit) d’après un roman d’Anne Blaisdell. Un quasi-huis clos anxiogène teinté d’humour très noir. Ensuite, Fanatic confie l’un des deux rôles principaux à la comédienne Tallulah Bankhead, grande tragédienne, célèbre pour ses frasques et ses sautes d’humeur imbibées d’alcool sur les plateaux. Elle est ici la grande attraction du film, le monstre terrifiant. Durant cette période, la Hammer va livrer quelques comédies sombres à la frontière du film d’épouvante en prenant des personnages de femmes âgées comme élément central du récit. A l’instar de Bette Davis dans Confession à un cadavre – The Nanny (1965) de Seth Holt et The Anniversary (1967) de Roy Ward Baker, Tallulah Bankhead livre une prestation hors-normes face à la jeune Stefanie Powers, qui deviendra célèbre grâce à la série culte Pour l’amour du risque (1979-1984) dans laquelle elle incarnera Jennifer Hart, justicière milliardaire aux côtés de Robert Wagner. Ce petit thriller très drôle au demeurant, marque également l’une des premières apparitions au cinéma du comédien Donald Sutherland. Raison de plus pour accueillir les bras ouverts cet excellent opus de la Hammer.
Une Américaine, Patricia Carroll, arrive à Londres pour épouser son amant Alan Glentower. Avant de se marier, Patricia souhaite rendre visite à Mme Trefoile, la mère de Stephen, son fiancé décédé dans un accident de voiture quelques mois auparavant. Trefoile réside dans une maison isolée à l’orée d’un village anglais. Elle voue sa vie à Dieu et à la prière, et incite son entourage à faire de même, allant même jusqu’à les menacer s’ils refusent. Très vite, la vieille femme blâme Patricia pour la mort de son fils. Lorsque Patricia lui révèle qu’elle n’a jamais eu l’intention d’épouser Stephen, Mme Trefoile fait appel à ses serviteurs, Harry et Anna, pour maintenir Patricia en captivité afin qu’elle puisse exorciser son âme.
Dans Fanatic, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle fout la trouille Mme Trefoile ! La soixantaine entamée, les yeux rougis par la bibine, la voix grinçante puant le tabac, Tallulah Bankhead crève l’écran. Vue dans Lifeboat (1944) d’Alfred Hitchcock et Scandale à la cour (1945) d’Otto Preminger, l’actrice signait ici son grand retour au cinéma après plus de dix ans passés sur scène et à la télévision. Elle est aussi phénoménale que flippante dans Fanatic, par ailleurs son dernier baroud d’honneur au cinéma. La victime est également impeccablement interprétée par la belle Stefanie Powers, très investie et ici bien malmenée par sa partenaire et ses complices à l’écran. Entre Anna,la bonne effacée mais qui obéit au doigt et à l’oeil à la maîtresse de maison, Harry son mari qui attend patiemment que la vieille claque pour pouvoir hériter de sa fortune, le libidineux Harry qui n’attend que le bon moment pour pouvoir sauter – sur – la jeune femme et un jardinier neuneu qui ne comprend rien à ce qui se passe, Patricia va devoir redoubler de patience et de force pour encaisser les coups, les brimades et les humiliations.
Concernant la mise en scène, Silvio Narizzano utilise brillamment les contre-plongées et crée un véritable climat d’angoisse, avec en parallèle une certaine légèreté à la limite de la bande dessinée. La composition de Wilfred Josephs apporte un contraste et un décalage qui ne peut que faire sourire malgré la méchanceté du récit.
Egalement connu sous le titre Die ! Die ! My Darling !, Fanatic remplit donc facilement son contrat avec une bonne dose d’émotions fortes, tout en jouant avec les spectateurs en lui faisant comprendre tout du long que tout ceci n’est qu’une grande blague…réservée à un public averti certes, mais où il n’est pas interdit de rire !
LE BLU-RAY
Fanatic rejoint la collection « British Terrors » chez ESC Editions/Distribution, bien au chaud aux côtés de The Maniac, Le Caveau de la terreur, Le Train des épouvantes, Asylum, Les Contes aux limites de la folie, Histoires d’outre-tombe, Les Deux visages du Dr Jekyll, La Maison qui tue, La Revanche de Frankenstein, Hurler de peur… Cette édition Mediabook se compose du DVD et du Blu-ray du film, ainsi que d’un livret rédigé par Marc Toullec. Le menu principal est animé et musical.
ESC a confié la présentation de la Hammer à l’éminent Nicolas Stanzick, auteur du livre Dans les griffes de la Hammer : la France livrée au cinéma d’épouvante. Dans un module de 13 minutes, le journaliste nous raconte l’histoire du mythique studio Hammer Film Productions. Comment le studio a-t-il fait sa place dans l’Histoire du cinéma, comment le studio a-t-il réussi l’exploit de susciter un véritable culte sur son seul nom et surtout en produisant de vrais auteurs ? Comment les créateurs du studio ont-ils pu ranimer l’intérêt des spectateurs pour des mythes alors tombés en désuétude ou parfois même devenus objets de comédies ? Nicolas Stanzick, érudit, passionnant, passe en revue les grands noms (Terence Fisher bien évidemment, Christopher Lee, Peter Cushing) qui ont fait le triomphe de la Hammer dans le monde entier, mais aussi les grandes étapes qui ont conduit le studio vers les films d’épouvante qui ont fait sa renommée. Voilà une formidable introduction !
Erwan Le Gac est le co-éditeur de Dans les griffes de la Hammer, ainsi que le partenaire de Nicolas Stanzick sur l’intégrale de Midi-Minuit fantastique (Rouge Profond, 2014 – 2017). Ses propos complètent parfaitement ceux de son associé, puisque Erwan Le Gac propose un beau tour d’horizon des thrillers psychologiques produits par la Hammer Films (19’), dont le film qui nous intéresse aujourd’hui, largement abordé et ponctué d’anecdotes de tournage. Certains thrillers de la Hammer évoqués sont déjà sortis en DVD et Blu-ray en France, d’autres se font attendre, et on espère sincèrement les voir débarquer un jour chez ESC ! Notons également les belles transitions animées qui illustrent cette présentation.
L’Image et le son
A l’exception d’une première bobine marquée par des poussières, des points et des griffures divers et variés, l’ensemble du master demeure très plaisant pour les mirettes. Les couleurs semblent ravivées dès la fin du générique d’ouverture, la clarté est éloquente, le patine argentique élégante et heureusement préservée. Les fondus enchaînés s’accompagnent de décrochages chromatiques et l’étalonnage peut varier au cours d’une même séquence, mais rien de rédhibitoire. Belle gestion des contrastes, y compris sur les scènes sombres et tamisées. Le piqué est aussi étonnant sur les gros plans, très détaillés.
Seule la version originale est proposée en DTS-HD Master Audio 2.0. Aucun souffle, craquement, ni fluctuations ne sont à déplorer, le confort acoustique est clair, net, précis tout du long. Les sous-titres français ne sont pas imposés.