COURS APRÈS MOI, SHÉRIF ! (Smokey and the Bandit) réalisé par Hal Needham, disponible en DVD et Blu-ray, depuis le 19 janvier 2022 chez BQHL Éditions.
Acteurs : Burt Reynolds, Sally Field, Jack Reed, Mike Henry, Paul Williams, Pat McCormick, Alfie Wise, George Reynolds…
Scénario : James Lee Barrett, Charles Shyer & Alan Mandel, d’après une histoire originale de Hal Needham & Robert L. Levy
Photographie : Bobby Byrne
Musique : Bill Justis & Jerry Reed
Durée : 1h36
Date de sortie initiale: 1977
LE FILM
Surnommé le Bandit, le routier Bo Darville relève le défi que lui fixe le millionnaire Enos Burdette : transporter, sous quarante-huit heures, 400 caisses de bière entre le Texas et la Géorgie. Une activité illégale, considérée comme de la contrebande. Son ami Snowman à la manœuvre dans la cabine du semi-remorque chargé à bloc, Darville ouvre la route au volant de sa Pontiac survitaminée. Le plan se déroule sans incident jusqu’à ce qu’il tombe sur une jeune mariée en fuite qu’il décide d’aider. Une rencontre qui va générer de nombreux problèmes, le shérif Buford T. Justice n’appréciant guère de voir son fils soudainement plaqué par sa fiancée le jour de ses noces.
Quand Cours après moi, shérif ! – Smokey and the Bandit est sur le point de débouler au cinéma, la renommée de Burt Reynolds est telle que la Fox décide d’avancer la sortie de Star Wars de deux jours, pensant qu’il ne fera qu’une bouchée de cette aventure intergalactique sur laquelle personne ne mise, encore moins le studio. Découvert dans Navajo Joe (1966) de Sergio Corbucci, le comédien devient une star internationale trois ans plus tard grâce au triomphe de Délivrance – Deliverance de John Boorman. Il incarnera désormais le charme macho et velu à l’américaine, la moustache fringante, l’oeil rieur et passera d’un univers à l’autre, chez Woody Allen (Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe sans jamais oser le demander), Joseph Sargent (Les Bootleggers – White Lightning), Richard C. Sarafian (Le Fantôme de Cat Dancing – The Man Who Loved Cat Dancing), Robert Aldrich (Plein la gueule – The Longest Yard et La Cité des dangers – Hustle), Peter Bogdanovich (Enfin l’amour – At Long Last Love et Nickelodeon) et bien d’autres. Tout le monde s’arrache ce bloc de virilité d’1m80. 1977, nous voici rendus à Cours après moi, shérif ! qui est donc le plus grand succès commercial de l’illustre carrière de Burt Reynolds, ayant rapporté près de 130 millions de dollars à sa sortie, soit l’équivalent d’un demi-milliard de dollars d’aujourd’hui (rien que sur le sol américain)…Cela laisse rêveur, surtout quand on sait que le budget global n’était que de quatre millions. Bref, on imagine encore mal le phénomène Burt Reynolds et de cet opus, qui allait engendrer deux suites au cinéma (Tu fais pas le poids, shérif ! et Cours après moi, shérif ! 3) et quatre téléfilms jusqu’en 1994, et inspirer la série Shérif, fais-moi peur – The Dukes of Hazzard dès 1979. Culte on vous dit !
Le riche texan Big Enos Burdette et son fils Little Enos ont parrainé un coureur de la Southern Classic d’Atlanta et veulent célébrer sa victoire. Ils recherchent un chauffeur prêt à prendre en charge la bibine à Atlanta, prévue pour la fête. Ils s’adressent à la légende locale Bo « Bandit » Darville et lui offrent 80 000 $ pour transporter 400 caisses de Coors de Texarkana (l’endroit le plus proche où il pourrait être vendu légalement à ce moment-là) à Atlanta en 28 heures. Bandit prend le pari, tout en sachant la tâche risquée et inédite, recrute son partenaire Cledus « Snowman » Snow pour conduire le camion, tandis que lui conduira une Pontiac Trans Am noire achetée d’avance aux Burdette, dans le but de détourner l’attention du camion et de sa cargaison illégale. Ils arrivent à Texarkana et chargent le camion, mais sur le chemin du retour, Carrie, une mariée en fuite, arrête Bandit et saute dans sa voiture, faisant de lui involontairement une cible indirecte du shérif texan Buford T. Justice, homme de loi dont le fils abruti Junior devait épouser Carrie. Le père et le rejeton, ignorent leur propre juridiction et poursuivent obstinément Bandit jusqu’en Géorgie pour mettre la main sur Carrie, tandis que divers incidents provoquent la désintégration progressive de leur véhicule. De son côté, Bandit se dirige vers Atlanta avec la bière de contrebande et peut compter en route sur l’aide de nombreux admirateurs et amis, contactés via la radio CB.
Après la présentation rapide des protagonistes et des « enjeux » (Burt Reynolds lui-même avouait qu’il n’y avait pas de scénario), Cours après moi, shérif ! est une course-poursuite de quasiment 90 minutes, menée en toute décontraction par un casting de fou. Burt Reynolds crée alors le personnage qui lui collera à la peau avec son chapeau de cowboy vissé sur la tête (il ne le retire qu’à une seule occasion, on devine laquelle), la mâchoire s’acharnant sur un chewing-gum, le rire franc, le paquet bien moulé dans son jean patte d’eph bien ajusté. Rien ne peut l’arrêter ou se mettre en travers de son chemin quand il se retrouve à bord de sa Pontiac Trans Am noire, avec laquelle il enflamme l’asphalte sur 1500 kilomètres dans le cadre d’un pari fou. Mais comme l’indique les chansons country qui soulignent l’action jusqu’à la dernière image, entonnées par Jerry Reed, guitariste chanteur, auteur-compositeur et qui interprète Cledus Snow aka Snowman, l’acolyte de Bandit, la légende de ce dernier est non seulement connue dans tout le Sud des États-Unis, mais elle est aussi toujours en train de se nourrir de nouveaux exploits.
À la barre de Cours après moi, shérif !, on retrouve un cascadeur de renom, Hal Needham, ami et collaborateur de Burt Reynolds, actif dans le monde du cinéma depuis la fin des années 1950, qui aura fait à de très nombreuses reprises l’acteur occasionnel (chez Burt Kennedy, Andrew V. McLaglen, Paul Newman, John Frankenheimer) et qui aura réalisé quelques perles de la série B de luxe, La Fureur du danger – Hooper (1978) et L’Équipée du Cannonball – The Cannonball Run (1981) et sa suite en 1984, toujours avec Burt Reynolds donc, sans oublier Cactus Jack – The Villain (1979) interprété par Kirk Douglas, Arnold Schwarzenegger et Ann-Margret, ainsi que le nanar Megaforce (1982). Autant dire que le réalisateur s’y connaît dans le domaine de l’action et Cours après moi, shérif ! demeure un modèle d’efficacité. Pas un seul temps mort, les scènes de poursuites sont lisibles, agréables à suivre, impressionnantes et spectaculaires.
Mais il n’y a évidemment pas que cela dans Smokey and the Bandit, il y a aussi et surtout l’exceptionnelle alchimie entre Burt Reynolds et la divine Sally Field, qui tombaient alors amoureux sur le plateau comme à l’écran et dont la relation très médiatisée allait contribuer au succès du film aux États-Unis. Apparue jusqu’à présent dans La Route de l’Ouest – The Way West (1967) d’Andrew McLaglen, le magnifique Le Privé – The Long Goodbye (1973) de Robert Altman et le formidable Stay Hungry (1976) de Bob Rafleson et deux ans avant d’exploser littéralement avec Norma Rae de Martin Ritt, l’actrice âgée de trente ans s’en donne à coeur joie dans Cours après moi, shérif ! et l’on comprend pourquoi le personnage de Bo (et le comédien lui-même aussi) craque complètement pour ce petit bout de femme au caractère bien trempé et au sourire dévastateur. Le grand adversaire de Bandit est quant à lui incarné par Jackie Gleason (L’Arnaqueur – The Hustler de Robert Rossen) qui trouve ici ce qu’on pourrait appeler le rôle de sa vie, devenant une icône reconnaissable entre toutes chez l’Oncle Sam et l’archétype du shérif bouseux, même s’il rappelle beaucoup celui du Sheriff J.W. Pepper, interprété par Clifton James, dans Vivre et laisser mourir et L’Homme au pistolet d’or, sortis en 1973 et 1974.
Cascades à foison, misogynie réjouissante, succession de tôles froissées, histoire d’amour qui rappelle la screwball comedy des années 1930-40, Smokey and the Bandit est et demeure un immense divertissement destiné aux spectateurs (même Alfred Hitchcock disait qu’il faisait partie de ses films préférés), dans le seul et unique but de lui faire oublier tous les soucis du quotidien. C’est bien simple, 45 ans après sa sortie, on le regarde encore avec un sourire jusqu’aux oreilles du début à la fin, et même bien après. Suite à ce raz-de-marée au box-office, toute l’équipe se réunira à nouveau trois ans après pour Tu fais pas le poids, shérif !.
LE BLU-RAY
Les éditeurs sont parfois étranges…Alors que certains s’étaient précipités sur l’édition 40e anniversaire Blu-ray sortie chez Universal en juin 2021, BQHL proposait le film de Hal Needham à son tour en Haute-Définition six mois plus tard. Nous ne possédons pas la précédente édition pour vous proposer un comparatif, mais il est fort probable que le master soit identique. Le boîtier classique de couleur bleue présente une jaquette au visuel plus attractif que sur le Blu-ray Universal. Le menu principal est animé et musical.
Précipitez-vous sur la présentation du journaliste Jean-François Dickeli (Culturopoing). Durant 42 minutes, ce dernier passera en revue tous les aspects de Cours après moi, shérif ! (« un croisement entre le retour aux mythes fondateurs croisés avec les idées libertaires de l’époque »), mais aussi de sa suite Tu fais pas le poids, shérif !, en croisant constamment le fond et la forme des deux opus. Sont ainsi abordés la place des deux films dans la carrière de Burt Reynolds et du réalisateur Hal Needham (« alors que le Nouvel Hollywood touchait à sa fin et que le cinéma dit popcorn remplissait à nouveau les salles »), dans le genre du road movie (puisqu’il s’agit d’une relecture des codes habituels), la représentation d’un nouveau genre de héros viril, les autres collaborations Reynolds-Needham, le casting, la musique, la dimension cartoonesque du second épisode (un budget multiplié par quatre, un remake déguisé du précédent, un fourre-tout comique), les modèles des véhicules utilisés, la sortie triomphale du premier volet, les suites (il y en aura six au total), etc…Un supplément très complet, informatif et excellemment construit.
BQHL reprend le making of de 2006, probablement réalisé à l’occasion du trentième anniversaire du film (20’), composé d’interviews de Burt Reynolds (d’archives et de 2006 donc), Hal Needham, Jackie Gleason (en 1976) et Paul Williams. Tout ce beau monde s’exprime sur la genèse et le tournage de Cours après moi, shérif !, à travers moult anecdotes. Burt Reynolds déclare qu’il s’agit « d’un film à classer dans la catégorie pour samedi après-midi pluvieux, qui te fait te sentir bien, comme le sexe ». Le metteur en scène et son acteur principal avouent qu’il n’y avait pour ainsi dire pas de scénario et que de nombreux dialogues (et situations) ont été improvisés, comme c’est le cas pour 80 % des scènes de Jackie Gleason. On apprend qu’Universal ne voulait pas de Sally Field, considérant qu’elle n’était pas sexy, mais que Burt Reynolds a fini par l’imposer. Ce dernier revient aussi sur le triomphe remporté par la Pontiac Trans Am, dont le modèle était à peine sorti quand le film a été tourné, mais dont les ventes ont ensuite augmenté de 700 %.
Le dernier bonus donne la parole à Steve – Big Dog – Cronin, routier-camionneur, qui parle de son métier et surtout de l’utilisation de Cibi, moyen de communication immortalisé par Burt Reynolds et ses acolytes dans Cours après moi, shérif ! (8’). Ce dernier apparaît aussi pour évoquer le jargon des routiers.
L’Image et le son
Cours après moi, shérif ! revient dans les bacs en HD, six mois après l’édition 40e anniversaire Universal. Changement de crèmerie donc, puisque le film de Hal Needham débarque cette fois chez BQHL. Cette édition Blu-ray au format 1080p (AVC) nous propose des couleurs étincelantes, un piqué vif, des contrastes très élégants et une remarquable stabilité. L’élévation HD n’est pas négligeable pour un titre comme celui-là, loin de là. Saluons avant tout l’impeccable étalonnage qui rend justice aux tonalités originelles du film. L’image retrouve son caractère fluide et naturel, notamment au niveau des splendides décors, paysages et longues routes de l’Amérique profonde, mais également au niveau des visages. Le cadre est riche en détails. Chaque plan ou sujet d’arrière-plan est d’une qualité et d’une profondeur séduisantes. Aucune tâche ou défaut n’est constatable, si ce n’est quelques troubles et sensibles pertes de la définition sur les scènes sombres. Que les puristes soient rassurés, le superbe grain de la photo est savamment restitué. Smokey and the Bandit retrouve un éclat fantastique et la restauration demeure impressionnante.
Rien à redire à propos des pistes anglaise et française LPCM 2.0, amplement suffisantes et accompagnant élégamment le film. En revanche, nous n’avons pas pu vérifier, mais il est probable que les options acoustiques sur le Blu-ray Universal étaient au format DTS-HD Master Audio. Aucun souffle constaté sur les deux pistes ici présentes et les dialogues restent très clairs tout du long, même si beaucoup moins en VF. La musique tient également une place prépondérante et aucun accroc ne vient perturber sa restitution.
Le Blu ray Universal proposait une VO en DTS 5.1 en plus du DTS 2.0 MONO.
L’édition BQHL a du LPCM 2.0 mais c’est mono ou stéréo?
Le test ne le précise pas alors que ça a son importance.