POISSONSEXE réalisé par Olivier Babinet, disponible en DVD le 6 janvier 2021 chez Rezo Films.
Acteurs : Gustave Kervern, India Hair, Ellen Dorrit Petersen, Okinawa Valérie Guerard, Alexis Manenti, Sofian Khammes, Jean-Benoît Ugeux, Edson Anibal…
Scénario :Olivier Babinet, David Elkaïm & Julie Peyr
Photographie : Timo Salminen
Musique : Jean-Benoît Dunckel
Durée : 1h25
Année de sortie : 2020
LE FILM
Alors que Miranda, la dernière baleine au monde, fait la une des journaux, Daniel, physicien obstiné, tente de redonner aux poissons l’envie de copuler. Célibataire désabusé, il est lui-même hanté par le désir d’être père et compte bien traiter ce problème scientifiquement. Le hic c’est qu’à Bellerose il y a seulement 3 femmes en âge de procréer, soit une chance sur 6232,33 de rencontrer la mère de ses futurs enfants. Pourtant un jour, en sauvant de la noyade un étrange poisson à pattes, Daniel va réapprendre à tomber amoureux.
Olivier Babinet, le coréalisateur – avec le photographe Fred Kihn – du très remarqué Robert Mitchum est mort (2010) et metteur en scène du documentaire non-moins acclamé Swagger (2016) est de retour avec un film quasi-inclassable, dont le titre est tout autant énigmatique, Poissonsexe, récompensé par la mention spéciale au Festival International du film indépendant de Bordeaux. Comédie-romantique teintée de dystopie, cette fable douce-amère franco-belge est véritablement à part dans le panorama cinématographique actuel, sort constamment des sentiers battus et ne craint pas d’avoir recours à la poésie pour dresser le portrait de personnages rongés par la solitude, qui dans un contexte social, politique et économique peu reluisant, vont néanmoins apprendre à se connaître mieux et créer un lien social. Poissonsexe est assurément l’un si ce n’est le film le plus original de 2020.
Mademoiselle Walberg, impérieuse et asociale, est un nez qui a eu son heure de gloire autrefois, Guillaume Favre un chauffeur de maître au bout du rouleau : lorsque la première fait appel aux services du second par l’intermédiaire de l’agence qui l’emploie, tout semble mal parti entre les deux. Pourtant…
En 2012, sort un tout petit film charmant et très attachant, qui passe malheureusement complètement inaperçu, L’Air de rien, coécrit et coréalisé par Grégory Magne et Stéphane Viard. Dans ce premier long-métrage, comme dans un monde parallèle à la Jean-Philippe, les deux réalisateurs imaginaient un Michel Delpech qui aurait arrêté la chanson au top de sa popularité à la fin des années 70, qui se retrouverait criblé de dettes et tenu de trouver une issue avec les huissiers. Et pourquoi pas un retour sur scène ? Pour cela, les deux metteurs en scène s’étaient attachés les services du chanteur populaire, dont le charisme à l’écran se révélait indéniable, dont le naturel et le talent avaient déjà pu être appréciés devant la caméra dans Les Bien-aimés de Christophe Honoré. Mais ce qui se détachait de ce film, c’était sa sincérité, sa tendresse, sa douce mélancolie et l’on y découvrait surtout un brillant comédien, Grégory Montel. Huit ans après L’Air de rien, les deux Grégory se retrouvent pour Les Parfums, brillante comédie-dramatique, leur deuxième association et le premier film réalisé en solo pour Grégory Magne. Si certains s’en souviendront comme étant l’un des premiers films proposés après le premier confinement (il aura d’ailleurs réussi à attirer plus de 250.000 spectateurs durant cette délicate période), Les Parfums est avant tout un merveilleux film dont on retrouve la grande sensibilité du cinéaste, dans lequel Grégory Montel (la série Dix pour cent) crève l’écran une fois de plus et tient la dragée haute à l’excellente Emmanuelle Devos. Un vrai petit bijou.
I FEEL GOOD réalisé par Benoît Delépine & Gustave Kervern disponible en DVD et Blu-ray le 5 février 2019 chez Ad Vitam
Acteurs : Jean Dujardin, Yolande Moreau, Jo Dahan, Jean-Benoît Ugeux, Jana Bittnerova, Elsa Foucaud, Marius Bertram, Joël Séria…
Scénario : Benoît Delépine, Gustave Kervern
Photographie : Hugues Poulain
Musique : Motivés
Durée : 1h33
Date de sortie initiale : 2018
LE FILM
Monique dirige une communauté Emmaüs près de Pau. Après plusieurs années d’absence, elle voit débarquer son frère, Jacques, un bon à rien qui n’a qu’une obsession : trouver l’idée qui le rendra riche. Plus que des retrouvailles familiales, ce sont deux visions du monde qui s’affrontent.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le cinéma de Benoît Delépine et de Gustave Kervern se porte admirablement bien. Leur huitième long métrage en commun, I Feel Good, est une savoureuse comédie, interprétée par un Jean Dujardin métamorphosé et que l’on a plaisir à redécouvrir aussi spontané, impliqué, vraiment très drôle et excellemment dirigé. Trois ans après le génial Saint-Amour, l’un de leurs meilleurs opus, Benoît Delépine et Gustave Kervern tournent cette fois leur caméra vers le cinégénique village Emmaüs de Lescar-Pau situé dans les Pyrénées-Atlantiques, théâtre idéal pour plonger un personnage odieux, arriviste, qui ne pense qu’à faire du fric, au grand désespoir de sa sœur Monique, incarnée par l’indispensable, intense et authentique Yolande Moreau, qui voit la communauté troublée par les projets de son frangin Jacques. Ou comment vouloir changer l’eau en Château Pétrus et multiplier les pains Poilâne, en partant de rien.
Ce dernier a une idée pour devenir riche, très riche, immensément riche. Après avoir disparu pendant trois ans, Jacques, inspiré par Bernard Tapie et Bill Gates, persuadé que le but du jeu est de faire bosser les autres et ne pas travailler soi-même, a enfin trouvé la solution. Il va créer une société de chirurgie esthétique low cost en Bulgarie ! Egalement inspiré par la réussite d’un ancien camarade de classe qui a baptisé sa villa « I Feel Good », Jacques emprunte ce nom pour sa société et commence à ratisser le village Emmaüs afin de trouver de potentiels clients susceptibles d’être intéressés pour se faire faire un lifting, une liposuccion, une vaginoplastie ou autres. Jacques a foi dans le système libéral. Le problème c’est qu’il n’a pas d’argent pour lancer son entreprise. Alors il démembre sa voiture pour revendre les pièces détachées sur Ebay. Et quitte à travailler, Jacques préfère être dans le haut du panier de crabes. De son côté, Monique surveille son petit frère, tout en veillant à la tranquillité des compagnons d’Emmaüs.
Jean Dujardin est parfait du début à la fin et se fond complètement dans l’univers décalé poético-politico-social, humaniste et punk, tendre et anar, des deux scénaristes-réalisateurs. Avec ses cheveux probablement coupés lui-même, son peignoir et ses sandales (on pense à Jean-Paul Belmondo dans L’Incorrigible), sa bedaine, son dos voûté, son bronzage artificiel ou bien avec ses costumes trop grands, le comédien retrouve une fraîcheur bienvenue, comme si son jeu se trouvait libéré des gros budgets portés ces dernières années. A l’instar de Gérard Depardieu dans Mammuth et Saint-Amour, Jean Dujardin est comme « rebooté » par ses metteurs en scène.
I Feel Good témoigne également de la maturité du cinéma de Benoît Delépine et de Gustave Kervern. Loin de leurs premières œuvres comme Aaltra et Avida, ce huitième film apparaît très abouti sur la forme avec notamment une photographie signée Hugues Poulain, chef opérateur attitré et complice des cinéastes, lumineuse et chatoyante. Si I Feel Good peut parfois manquer de rythme, l’excellence des dialogues, le burlesque assumé de certaines situations (le renvoi de crachat, secondé par des effets visuels) et son festival de tronches d’acteurs non-professionnels renvoie au cinéma italien des années 1970. Le film est rempli de petits détails cocasses, comme un petit sapin CGT accroché au rétroviseur de la vieille Simca familiale, plus de 500.000 kilomètres au compteur, où les cendres des parents reposent dans la boîte à gants et dans le vide-poche.
L’intérêt peut s’émousser quelque peu dans le dernier acte qui voit certains « élus » de Jacques prendre la route vers la Bulgarie, mais I Feel Good vaut largement le détour pour ses comédiens pétillants, ses situations qui prennent la forme d’une succession de vignettes multicolores proches de la bande dessinée, ainsi que pour l’ironie mordante et jubilatoire de son épilogue.
LE BLU-RAY
Le test du Blu-ray de I Feel Good, disponible chez Ad Vitam, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.
En prolongement du film, l’éditeur nous gratifie d’un excellent documentaire intitulé Parlons utopie (1h15), réalisé par Dominique Gautier. Le Village Emmaüs Lescar-Pau accueille depuis plus de trente-six ans les exclus de l’économie libérale et les déçus de cette économie qui cherchent une autre voie. Fidèle à l’esprit de l’abbé Pierre ce village vit et se développe uniquement grâce à son travail, sans aucune aide ou subvention.Avec les témoignages d’habitants du Village et d’intervenants extérieurs, économistes, militants, sociologues, politologues, écrivains, journaliste, élus locaux, ce film montre comment une micro-société composée d’environ 150 personnes, compagnes et compagnons, salariés, bénévoles, organisée autour de la récupération et la valorisation des déchets, peut créer un véritable système économique et social alternatif, un vrai projet de vie collectif. Et à partir de ses activités et son engagement politique, comment ce village utopique s’est imposé dans le paysage régional et au-delà, qu’il soit social, politique, économique, agricole, culturel. Ce documentaire montre également quelques images du tournage de I Feel Good, ainsi que les interventions des deux réalisateurs.
L’interactivité se clôt
sur trois teasers et la bande-annonce.
L’Image et le son
Bravo à Ad Vitam qui livre un magnifique Blu-ray et permet aux spectateurs de revoir cette fantaisie dans les plus belles conditions techniques. La colorimétrie est vive et flamboyante dès le début, la luminosité est aveuglante, le piqué constamment acéré et les contrastes denses. Si la réalisation parfois à la volée occasionne quelques pertes des détails ainsi que des flous involontaires, la copie demeure immaculée, le cadre est superbe et la profondeur de champ fort appréciable. Un transfert full HD qui en met plein les yeux.
Le mixage DTS-HD Master Audio 5.1 exploite magnifiquement chacune des enceintes et délivre un lot impressionnant d’effets en tous genres. Les voix sont exsudées avec force par la centrale, les latérales sont intelligemment mises à contribution à l’instar des bruits constants de la circulation. A ce stade, la piste DTS-HD Master Audio Stéréo devient anecdotique mais se révèle largement suffisant pour ceux qui ne seraient pas équipés sur les enceintes arrière. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.