QUELQUES JOURS PAS PLUS réalisé par Julie Navarro, disponible en DVD le 7 août 2024 chez M6 Vidéo.
Acteurs : Benjamin Biolay, Camille Cottin, Amrullah Safi, Makita Samba, Saadia Bentaïeb, Loula Bartilla Besse, Olivier Charasson, Andranic Manet, Hippolyte Girardot…
Scénario :Julie Navarro et Marc Salbert, d’après le roman de ce dernier, De l’influence du lancer de minibar sur l’engagement humanitaire
Photographie : Sylvestre Dedise
Musique : Arnaud Rebotini
Durée : 1h39
Date de sortie initiale : 2024
LE FILM
Arthur Berthier, critique rock relégué aux informations générales après avoir saccagé une chambre d’hôtel, découvre que le journalisme est un sport de combat. Envoyé à l’hôpital par un CRS en couvrant l’évacuation d’un camp de migrants, il tombe sous le charme de Mathilde, la responsable de l’association Solidarité Exilés et accepte, pour quelques jours croit-il, d’héberger Daoud, un jeune Afghan.
Oui bon d’accord, le cinéma français bien-pensant blabla, les bobos de cinquante piges, les écouteurs vissés sur les oreilles en train d’écouter The Kinks ou The Zombies, confortablement installés dans leur 50m² à Barbès (car ils aiment le melting-pot), en train de découvrir le monde (les migrants quoi), qui se découvrent une âme de militant (par hasard, après avoir reçu un coup sur la tronche ici) et qui décident (malgré eux) de recueillir un demandeur d’asile. C’est Quelques jours pas plus, premier long-métrage écrit et réalisé par Julie Navarro, ancienne assistante de Véra Belmont, Jean-François Davy, Jean-Marc Vallée et ancienne directrice de la distribution (sur La Science des rêves, Mariage à Mendoza, Hippocrate, Médecin de campagne…). Cependant, si le pitch peut effectivement faire peur, Quelques jours pas plus est une première œuvre extrêmement attachante et contre toute attente, on suit le cheminement de son protagoniste, critique musical qui commence à avoir de la bouteille et qui semble revenu de tout, qui se retrouve embringué dans le quotidien d’une association caritative, spécialisée dans l’accueil des migrants et réfugiés à Paris. Ce dernier est en outre interprété par Benjamin Biolay, qui mine de rien s’est construit une vraie filmographie depuis une quinzaine d’années. Depuis ses débuts devant la caméra de Vincent Dietschy (dans Didine), l’interprète multi-récompensé de Comment est ta peine ? n’a eu de cesse d’enchaîner les rôles (une bonne cinquantaine désormais), en prenant petit à petit une véritable épaisseur et un charisme qui s’est encore plus sculpté avec les années. Après Pourquoi tu pleures ? de Katia Lewkowicz, Personal Shopper d’Olivier Assayas, Irréprochable de Sébastien Marnier, Les Apparences de Marc Fitoussi (pour ne citer que ceux-là), Benjamin Biolay trouve incontestablement l’un de ses meilleurs personnages dans Quelques jours pas plus (adaptation du roman de Marc Salbert, compagnon de la metteuse en scène, dénommé De l’Influence du lancer de minibar sur l’engagement humanitaire publié en 2015 sous Le Dilettante), dans lequel il est criant de vérité. Un joli film sincère, émouvant, drôle aussi, à la frontière du documentaire, qui ne tombe pas dans le piège du message enfoncé à coups de marteau dans le crâne des spectateurs, mais qui lui expose des faits, sans en rajouter. Une belle découverte.
La presse de droite et surtout d’extrême-droite s’est fait un malin plaisir de défoncer Quelques jours pas plus, forcément, évidemment, c’était trop tentant. Mais contrairement à un film où rien ne pouvait être sauvé comme Avant que les flammes ne s’éteignent, le film de Julie Navarro (aucun lien avec Antoine, commissaire de renom et meneur de mulets) fait preuve d’une grande sensibilité, d’une envie de cinéma aussi bien sûr. Comme la plupart des premières œuvres, Quelques jours pas plus contient beaucoup de choses, trop sans doute la réalisatrice ayant profité de cette occasion pour non seulement montrer ce qu’elle avait sous le capot, mais aussi pour parler de divers sujets, de la société, d’engagements, d’investissements, de musique, de liens familiaux, de déracinement, du deuil…Cela fait beaucoup et Julie Navarro brasse de multiples éléments simultanément, sans forcément trouver un équilibre du début à la fin, même si cela n’empêche pas Quelques jours pas plus de fonctionner.
Le spectateur scrute le dénommé Arthur, journaliste spécialisé dans la musique, critique qui se prend parfois pour une rock-star en retournant toute sa chambre d’hôtel (incident occasionné par une demoiselle russe bien imbibée) comme le montre l’excellente scène d’exposition, quand le critique doit expliquer à son rédac-chef (génial Hippolyte Girardot) les 11.000 euros de frais que tout cela a engendré. Pour faire bonne figure (et aussi parce qu’il n’a pas vraiment le choix), il accepte de couvrir sur le terrain un reportage sur l’évacuation d’un camp de migrants à Paris. Il tombe alors instantanément amoureux de Mathilde, avocate reconvertie dans l’humanitaire et accepte d’accueillir le jeune afghan Daoud (Amrullah Safi, lui-même réfugié, cuisinier et donc comédien non-professionnel), 24 ans, qui désire se rendre en Angleterre où l’attendent son frère et leur père en fin de vie. Arthur, jeune quinqua fatigué, picolant bien, séparé de la mère de sa lycéenne de fille Emily (Loula Bartilla Besse, jolie révélation), va voir son quotidien être bouleversé progressivement, même s’il pensait au début que cette situation n’allait rien changer à son train-train hoquetant.
Quelques jours pas plus repose aussi sur Camille Cottin, qui une fois de plus illumine l’écran, comme encore dernièrement dans Toni, en famille de Nathan Ambrosioni. Pas étonnant que le coup de foudre s’abatte sur Arthur quand il découvre Mathilde à l’oeuvre auprès de Daoud et des autres venus d’ailleurs. S’il décide de s’investir en premier lieu pour la séduire et donc dans un but totalement égoïste, Arthur va découvrir un monde qu’il ne soupçonnait pas, celui qui l’entoure, lui qui était alors en apnée musicale permanente.
Beaucoup de bons sentiments certes, le dernier acte n’y allant d’ailleurs pas de main-morte, mais Quelques jours pas plus, Swann d’Or du Meilleur Premier Film au Festival du Film de Cabourg, possède un charme indéniable, dévoile une vraie sensibilité, un œil, un univers et on est curieux de découvrir ce que Julie Navarro nous proposera par la suite.
LE DVD
Après une carrière on ne peut plus timide dans les salles (50.000 entrées seulement), Quelques jours pas plus apparaît dans les bacs, uniquement en DVD, chez M6 Vidéo. Édition simple, sortie standard, menu fixe et musical…
Et aucun supplément par-dessus-ça…
L’Image et le son
L’éditeur se rattrape sur la qualité technique et force est de constater que le rendu du master est superbe ! La colorimétrie est froide, élégante, le piqué est acéré. Le cadre fourmille de détails, l’on se régale des séquences extérieures d’une belle clarté. Relief, précision, richesse des contrastes, un vrai sans-faute.
La piste DD 5.1 offre un large confort suffisant pour un film de cet acabit. Un mixage très convaincant par la spatialisation de la musique et une délivrance des dialogues dynamique. Les ambiances naturelles ne sont pas oubliées. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.