LA DEUXIÈME FEMME (The Second Woman) réalisé par James V. Kern, disponible en DVD le 3 décembre 2019 chez Artus Films
Acteurs : Robert Young, Betsy Drake, John Sutton, Florence Bates, Morris Carnovsky, Henry O’Neill, Jean Rogers, Raymond Largay…
Scénario : Mort Briskin, Robert Smith
Photographie : Hal Mohr
Musique : Joseph Nussbaum
Durée : 1h27
Date de sortie initiale : 1950
LE FILM
Ellen Foster rend visite à sa tante sur la côte californienne et rencontre un voisin nommé Jeffrey Cohalan, un homme séduisant vivant dans une bâtisse à l’architecture futuriste perchée au sommet d’un pic rocheux. Ellen se sent irrésistiblement attirée par ce solitaire frappé trop régulièrement par des accidents inexplicables qui affectent son quotidien. Ces évènements sont-ils liés à la mort de sa fiancée survenue quelques années auparavant dans un mystérieux accident de voiture ?
Il y a parfois des petits films dont nous n’attendons forcément pas grand-chose au départ, et qui s’avèrent au final bien plus divertissants que certaines grosses productions qui ne tiennent pas du tout leurs promesses. C’est le cas de La Deuxième femme – The Second Woman, réalisé en 1950 par un certain James V. Kern (1909-1966), petit thriller largement influencé par Rebecca d’Alfred Hitchcock sorti dix ans auparavant. C’est aussi l’occasion de revoir une actrice méconnue, pourtant talentueuse et pleine de grâce, Betsy Drake (1923-2015), dont la carrière a quelque peu été éclipsée par son mariage avec Cary Grant. Elle vole ici la vedette avec son joli minois qui rappelle parfois celui d’Audrey Hepburn. Drame psychologique, La Deuxième femme enchaîne les rebondissements et les fausses pistes, frôle parfois le genre fantastique et se révèle être un petit modèle de série B bien sympathique.
De James V. Kern, l’histoire n’aura finalement retenu que son long travail pour la télévision sur diverses séries qui auront fait le bonheur des familles américaines telles que I Love Lucy, Date with the Angels, My Three Sons, The Joey Bishop Show, Maverick et bien d’autres. Pourtant, le réalisateur aura bien commencé sa carrière au cinéma avec quelques comédies, Ne dites jamais adieu (1946) avec Errol Flynn et April Showers (1948) avec Jack Carson. James V. Kern, ancien comédien et scénariste, fait partie de ces artisans qui pouvaient s’adapter à n’importe quel genre, en respectant le budget qui lui était confié, sans dépasser le planning prévu par le studio. La Deuxième femme rend compte du solide bagage technique du metteur en scène. Le film est joliment réalisé avec une photographie sombre et contrastée signée du grand chef opérateur Hal Mohr, dont le travail aura largement contribué à la réussite de L’Equipée sauvage (1953) de László Benedek, Le Droit de tuer (1948) de Michael Gordon, et L’Ennemi Public (1957) de Don Siegel. Quelques séquences renvoient également au Soupçons (1941), toujours d’Alfred Hitchcock, notamment celle où la caméra suit Jeff Cohalan dans l’escalier, jusque dans la chambre d’Ellen.
D’autres éléments singuliers, le cheval blessé, l’empoisonnement du chien (très impressionnant et réaliste), cet étrange tableau dont les couleurs s’effacent progressivement jouent intelligemment avec les nerfs des spectateurs. Jeffrey provoque-t-il lui-même tous ces malheurs qui s’accumulent dans sa vie ? Le trauma entraîné par la mort de son épouse un an auparavant le rend-il victime d’un dédoublement de la personnalité ? Là encore, le réalisateur James V. Kern laisse planer le doute du début à la fin.
The Second Woman ne révolutionne sans doute pas le thriller, mais sa sobriété, la beauté des décors avec cette étrange maison ultramoderne posée au sommet d’une falaise, l’élégance de l’interprétation où trônent donc Betsy Drake (La Course au mari, La Blonde explosive) et Robert Young (Feux croisés d’Edward Dmytryk), ainsi que son ambiance mystérieuse en font un très bon film et une savoureuse curiosité.
LE DVD
Deuxième femme, mais aussi deuxième titre issu de la dernière vague éditée par Artus Films ! Après Les Mains d’un étranger, nous nous penchons aujourd’hui sur The Second Woman de James V. Kern. Edition minimaliste, mais élégante. Le visuel de la jaquette est attractif et l’ensemble glissé dans un boîtier Amaray classique. Le menu principal est fixe et musical.
Aucun supplément.
L’Image et le son
Pour ceux qui s’en souviennent, le master 1.33 original respecté – 4/3 de La Deuxième femme, tombé dans le domaine public, rappelle un peu le Ciné Vieux de Grolandsat. Si la copie est stable, elle reste très souvent marquée par des griffures, des points, des tâches et des raccords de montage. La gestion des contrastes est totalement aléatoire, les noirs bouchés et la définition des séquences sombres laisse parfois à désirer. Ajoutez à cela des décrochages sur les fondus enchaînés, un piqué émoussé, un manque flagrant de détails sur les gros plans. Bref, ce DVD n’a rien de miraculeux, mais a au moins le mérite d’exister et nous permet de découvrir ce bon petit film de James V. Kern.
Point de version française sur cette édition. L’écoute est souvent parasitée par quelques menus craquements, des échanges plus sourds et des fluctuations. La piste Dolby Digital 2.0 fait ce qu’elle peut et en dépit d’un bruit de fond persistant se révèle au final suffisante. Les sous-titres français ne sont pas imposés.
Critique très pertinente, merci de votre travail !