FÊTE DE FAMILLE réalisé par Cédric Kahn, disponible en DVD le 15 janvier 2020 chez Le Pacte
Acteurs : Catherine Deneuve, Emmanuelle Bercot, Vincent Macaigne, Cédric Kahn, Luàna Bajrami, Laetitia Colombani, Isabel Aimé González-Sola, Alain Artur…
Scénario : Cédric Kahn, Fanny Burdino, Samuel Doux
Photographie : Yves Cape
Musique : Grégoire Hetzel
Durée : 1h37
Date de sortie initiale : 2019
LE FILM
« Aujourd’hui c’est mon anniversaire et j’aimerais qu’on ne parle que de choses joyeuses. » Andréa ne sait pas encore que l’arrivée « surprise » de sa fille aînée, Claire, disparue depuis 3 ans et bien décidée à reprendre ce qui lui est dû, va bouleverser le programme et déclencher une tempête familiale.
Famille je vous hais. En fait, oui et non. Il y a de l’amour dans cette famille, mais comme bien souvent, on ne sait pas comment l’exprimer. Mais le plus intéressant dans Fête de famille, le onzième long métrage de Cédric Kahn, c’est de montrer comment une famille parvient à trouver un équilibre quand elle sacrifie un de ses membres, quand elle oublie que ce dernier ne va pas bien, ce qui est encore mieux quand cette personne habite d’ailleurs de l’autre côté de l’Atlantique. Le problème, c’est quand celle-ci fait son retour parmi les siens et que tout ce qui avait été tu ou oublié volontairement revient instantanément. Les murs de cette charmante maison et ce jardin magnifique renferment en réalité une origine mouvementée. La bande-annonce de Fête de famille pouvait en fatiguer plus d’un. Pourtant, le film est tout autre. Derrière l’apparence d’un énième film français avec ses personnages à la situation financière confortable, qui dansent le Madison, qui cuisinent tous ensemble en refaisant le monde, se dissimule une œuvre dramatique fine et intelligente sur une famille dysfonctionnelle, avec un poil de perversité grinçante. Ce cheveu sur la soupe, c’est Claire, magnifiquement interprétée par Emmanuelle Bercot, qui trouve ici un rôle dans la veine de Mon roi de Maïwenn, qui lui avait valu le Prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes en 2015. C’est par elle que le scandale arrive, ou plutôt revient parmi les siens.
Le jour de l’anniversaire d’Andréa (Catherine Deneuve en matriarche qui fait le lien avec Un conte de Noël d’Arnaud Desplechin), sa fille aînée Claire, disparue depuis trois ans, fait une soudaine réapparition, décidée à reprendre ce qui lui appartient. Ce comeback va bouleverser la famille et raviver les tensions. Ses deux demi-frères Romain (Vincent Macaigne) et Vincent (Cédric Kahn, pour la première fois acteur dans un de ses films), fils de Jean (Alain Artur) le compagnon d’Andréa, sont présents. Le premier, réalisateur miteux est accompagné de sa nouvelle copine Rosita, et a pour projet de filmer cette journée d’anniversaire pour en faire le sujet de son nouveau métrage. Vincent est venu avec sa femme Marie (Laetitia Colombani) et leurs deux fils Milan et Solal. En partant à Los Angeles, Claire avait laissé sa fille Emma (Luàna Bajrami, révélation de L’Heure de la sortie de Sébastien Marnier), devenue une adolescente rebelle, dont le petit ami Julien est aussi convié au repas. Tout ce beau petit monde s’installe tranquillement à la table de jardin fraîchement dressée, quand soudain Claire demande à récupérer son héritage légué par son père décédé durant son enfance. En effet, légataire universel, Claire avait hérité d’une somme d’argent conséquente, qui avait été « empruntée » par Andréa pour racheter la maison. Alors, quand Claire met les pieds dans le plat et aborde LE sujet qui fâche, ce microcosme explose.
C’est vrai que les premières images pouvaient laisser à désirer et l’on se demandait quelle mouche avait pu piquer Cédric Kahn (Roberto Succo, Une vie meilleure, La Prière) pour livrer un film insignifiant en apparence, qui se coulait dans le moule de la comédie toute faite, reposant uniquement sur son casting et son décor chaleureux. Il faut donc aller au-delà des apparences, puisque tout ce petit théâtre n’est que vernis, même si la tendresse est heureusement présente à plusieurs reprises, caractérisée par l’utilisation de la chanson L’amour, l’amour, l’amour de Mouloudji, qui a bercé la fratrie dans un lointain passé. L’arrivée inopinée de Claire va mettre à mal cette représentation. En grattant ce revêtement, cette dernière va dévoiler ce qui est pourri au sein de cette famille, mais que l’on a préféré planquer pour pouvoir vivre pleinement.
Andréa, le personnage interprété par Catherine Deneuve, est essentiellement la grande fautive de cette histoire, puisque c’est elle qui avait pris la décision « d’emprunter » l’héritage de sa fille. Claire, très perturbée et qui a visiblement une vie difficile (elle a déjà été internée), déboule alors au moment le plus inattendu. Le vilain petit canard de la famille fait «tache» au milieu de cette famille, puisque sa douleur et son mal-être sont bien visibles, et c’est là que Cédric Kahn joue habilement avec les clichés de la pub de l’ami Ricoré. La fin est sur ce point parfaitement ironique, puisque Claire étant à nouveau absente, chacun peut – comme dans une sitcom ou un vaudeville sans intérêt – reprendre une activité normale et jouer à nouveau et tranquillement le rôle qui lui a été dévolu.
Fête de famille a été mal vendu. Pourtant, le film s’intègre parfaitement dans la filmographie de Cédric Kahn, dont les œuvres sont la plupart du temps animées par une furieuse envie de vivre, de lutter contre les injustices, de se rebeller. Au spectateur d’aller plus loin de ce qui lui a été mal présenté, car Fête de famille propose une profonde réflexion sur la complexité des liens du sang.
LE DVD
Pas d’édition Blu-ray pour Fête de famille, disponible uniquement en DVD chez Le Pacte. Disque, simple, tout comme le menu principal animé et musical.
On espérait retrouver un petit making of ou quelques interviews…il faudra se contenter de la vidéo en intégralité du film tourné par le personnage de Vincent Macaigne avec sa sœur Claire, qui clôt Fête de famille. Quelques délires (7’) où les comédiens ont l’air de réellement s’amuser.
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.
L’Image et le son
Le Pacte prend soin du film de Cédric Kahn et livre un service après-vente tout ce qu’il y a de plus solide. Les partis-pris esthétiques du chef opérateur Yves Cape (Holy Motor, White Material) sont respectés et la colorimétrie habilement restituée. La clarté est de mise, tout comme des contrastes fermes, un joli piqué et des détails appréciables. Notons de sensibles pertes de la définition, qui n’altèrent cependant en rien le visionnage. Un master SD élégant.
L’éditeur joint une piste Dolby Digital 5.1 qui instaure une spatialisation délicate, mais anecdotique. Les ambiances naturelles et les effets annexes sont plutôt rares et la scène acoustique reste essentiellement frontale, sauf sur les séquences où les personnages écoutent la chanson de Mouloudji et celle où la famille danse le Madison. De ce point de vue il n’y a rien à redire, les enceintes avant assurent tout du long, les dialogues étant quant à eux exsudés avec force par la centrale. La Stéréo n’a souvent rien à envier à la DD 5.1. Les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également de la partie, ainsi qu’une piste en Audiodescription.