Test Blu-ray / Willard, réalisé par Daniel Mann

WILLARD réalisé par Daniel Mann, disponible en DVD et Blu-ray le 17 mars 2020 chez ESC Editions.

Acteurs : Bruce Davison, Elsa Lanchester, Ernest Borgnine, Sondra Locke, Michael Dante, Jody Gilbert, William Hansen, John Myhers…

Scénario : Gilbert Ralston d’après le roman “Ratman’s Notebooks” de Stephen Gilbert.

Photographie : Robert B. Hauser

Musique : Alex North

Durée : 1h35

Date de sortie initiale : 1971

LE FILM

Willard est un jeune homme plutôt asocial, sans amis, vivant avec une mère envahissante dans une vieille demeure, humilié par son patron dans une entreprise au sein de laquelle aucun des employés ne le respecte. Alors qu’un jour il quitte furieux un repas d’anniversaire, il va tomber nez à nez avec un rat dans une partie calme de son jardin. Après s’être montré incapable de se débarrasser des rats qui vivent là, il va se lier d’amitié avec l’un d’entre eux qu’il va surnommer Socrate. Willard va par la suite utiliser une véritable armée de rats pour se venger de ses humiliations, mais une confrontation entre lui et un des rats, Ben, va également survenir…

Avant Soudain…les monstres (1976) de Bert I. Gordon, D’origine inconnue (1983) de George P. Cosmatos et Les Rats de Manhattan (1984) de Bruno Mattei, la grande référence du film d’horreur mettant en scène des rats demeure Willard, réalisé en 1971 par Daniel Mann. Le cinéaste américain, né Daniel Chugerman (1912-1991), révélé avec Reviens petite ShebaCome Back, Little Sheba (1952), Prix d’interprétation féminine au Festival de Cannes 1953 pour Shirley Booth, qui remporte également l’Oscar de la meilleure actrice, soigne sa mise en scène comme à son habitude. Egalement connu pour La Rose tatouée (1955) d’après Tennessee Williams, La Vénus au vison (1960) avec Elizabeth Taylor et le légendaire Notre homme Flint (1966), le cinéaste fait une nouvelle démonstration de son immense bagage technique. Film d’épouvante certes, mais avant tout drame psychologique, Willard dresse le portrait d’un jeune homme perturbé, formidablement interprété par Bruce Davison, acteur prolifique aux près de 300 films, téléfilms et séries télévisées, dans sa quasi-première apparition à l’écran. Atypique, Willard, adapté du roman Ratman’s Notebooks de Stephen Gilbert, est rapidement devenu un film culte, qui a engendré une très mauvaise suite l’année suivante intitulée Ben, réalisé par Phil Karlson, ainsi qu’un remake éponyme en 2003, mis en scène par Glen Morgan, qui vaut essentiellement pour l’interprétation de l’étonnant Crispin Glover.

Willard Stiles est un jeune homme solitaire incapable d’avoir des relations normales avec les autres personnes, particulièrement avec sa mère âgée et infirme (Elsa Lanchester, éternelle Fiancée de Frankenstein) ainsi qu’avec son patron, Al Martin, qui a volé l’entreprise à son père il y a déjà quelques années. Au bureau, il se fait constamment harceler et critiquer par M. Martin, qui finit par engager une secrétaire, Joan Simms, pour l’aider et surtout le surveiller. À la maison, sa mère est toujours sur son dos, lui demandant constamment ce qu’il est en train de faire. Un jour, elle lui commande de tuer les rats qui semblent s’être établis dans le jardin. Au moment où il va les noyer dans la fontaine, il arrête le processus et tente de communiquer avec eux. Bientôt, ils deviennent ses compagnons qu’il dresse et installe dans la cave de la maison. Son rat préféré est un albinos qui se nomme Socrate qu’il emmène même jusqu’à sa chambre mais il y a également l’énorme Ben qui s’incruste partout et lui désobéit souvent. Après la mort et les obsèques de sa mère, Willard apprend qu’il n’a hérité que de dettes et le notaire lui conseille vite de vendre la maison. Pendant ce temps, les rats se reproduisent à une vitesse stupéfiante, tandis que Willard commence à comprendre le pouvoir qu’il détient sur les rongeurs.

Contrairement à sa suite qui abusera des effets visuels, Willard privilégie l’attente, le réalisme, la suggestion. Daniel Mann contente certes les amateurs d’émotions fortes en multipliant l’apparition des rats et leurs attaques à mesure que le récit avance, mais son film reste toujours concentré sur son personnage principal, sorte de cousin éloigné de Norman Bates, qui vit reclus dans sa grande maison et subissant la folie de sa mère castratrice. L’ombre d’Alfred Hitchcock plane constamment sur Willard, où les rats remplaceraient les fameux oiseaux qui attaquaient la ville de Bodega Bay.

Humilié, rabroué, le jeune Willard subit constamment les moqueries, sans oser répliquer. Jusqu’à ce que le contact avec Socrate (le rat blanc) et Ben (le rat noir), Yin et Yang, ou même ange et démon, lui donne confiance en lui. Bruce Davison est mémorable dans le rôle titre, très attachant et hyper-sensible, un grand enfant innocent – certains diront niais – qui se rendra compte trop tard de l’emprise exercée par les rats sur sa personne, alors qu’il pensait contrôler la situation. Sa rencontre avec la jolie Joan (Sondra Locke qui faisait ses débuts au cinéma) va également lui donner l’espoir d’une nouvelle vie, normale et équilibrée, avant d’être finalement rattrapé par les « monstres » qu’il a créés. En parlant de monstre, l’autre créature que Willard doit affronter chaque jour est son boss, incarné par l’immense Ernest Borgnine, qui crève l’écran une fois de plus dans la peau d’une ordure qui prend un malin plaisir à écraser ses subordonnés. C’est par lui que la colère, jusqu’alors ravalée et enfouie de Willard, finira par refaire surface, jusqu’au point de non-retour.

Référence du film d’horreur « animalier », Willard n’oublie jamais ses personnages en cours de route pour se laisser aller à la facilité et multiplier les effets gratuits dans le seul but d’offrir aux spectateurs ce qu’ils sont venus chercher. C’est ce qui fait encore et toujours aujourd’hui son immense réussite.

LE BLU-RAY

Willard intègre la collection « Trésors du fantastique », anciennement éditée par ESC Distribution sous la bannière de Movinside. ESC Editions est ici l’éditeur à part entière. Le visuel est soigné et le menu principal animé sur une séquence du film.

Un Marc Toullec plus prolixe que d’habitude (16’30) nous présente Willard. Même s’il est indéniable que le journaliste est définitivement plus à l’aise (et passionnant) à l’écrit qu’à l’oral, nous apprenons pas mal de choses ici sur les rats dans le cinéma d’épouvante, sur la production du film, le réalisateur Daniel Mann et le casting.

Mais le supplément le plus sympathique et le plus intéressant reste l’entretien avec le comédien Bruce Davison (2017-12’30), qui revient sur les conditions de tournage avec les rongeurs, le travail avec Daniel Mann et l’ensemble de ses partenaires à l’écran.

L’interactivité se clôt sur un spot TV et la bande-annonce.

L’Image et le son

Voilà une bien belle surprise ! Entièrement nettoyée, la copie présentée par ESC Editions est immaculée, superbe, propre comme un sou neuf. Le master HD est clair, les couleurs souvent lumineuses, le grain argentique préservé et équilibré et les détails toujours appréciables.

Privilégiez évidemment la version originale, non seulement plus dynamique et fluide, mais aussi et surtout complète, puisque la piste française passe de temps en temps en V.O. sous-titrée. Cette dernière est d’ailleurs nettement plus sourde et manque de peps. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © ESC Editions / ESC Distribution / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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