PASSEUR D’HOMMES (The Passage) réalisé par J. Lee Thompson, disponible en DVD et Blu-ray le 3 novembre 2020 chez Sidonis Calysta.
Acteurs : Anthony Quinn, James Mason, Malcolm McDowell, Patricia Neal, Kay Lenz, Christopher Lee, Michael Lonsdale, Marcel Bozzuffi…
Scénario : Bruce Nicolaysen d’après son roman
Photographie : Michael Reed
Musique : Michael J. Lewis
Durée : 1h38
Date de sortie initiale : 1979
LE FILM
Le professeur Bergson, savant précieux pour les Allemands en guerre, pourchassé par Von Derko, officier SS, trouve d’abord refuge dans les greniers d’une maison close, à Toulouse. Un montagnard basque, sollicité par Perea et Renoudot, membres de la Résistance, accepte de faire passer la frontière espagnole au professeur. Lorsqu’il se rend compte qu’il est accompagné de ses deux enfants et de sa femme malade, le Basque veut refuser. Mais il est déjà trop tard pour réfléchir.
Passeur d’hommes – The Passage est peut-être l’un des films les plus méconnus de J. Lee Thompson (1914-2002), réalisateur britannique de son vrai nom John Lee Thompson, passé à la postérité avec Les Canons de Navarone (1961) et Les Nerfs à vif (1962), tous deux avec Gregory Peck. Excellent technicien et ayant dirigé les plus grands acteurs, on lui doit également Tarass Boulba (avec Tony Curtis et Yul Brynner), ainsi que moult longs métrages avec Charles Bronson, avec lequel il s’associera sur près d’une dizaine de films dont le désormais culte (malgré-lui) Le Justicier braque les dealers (1987). Avec Passeur d’hommes, le cinéaste clôt une décennie marquée surtout par les deux opus, La Conquête de la planète des singes – Conquest of the Planet of the Apes (1972) et La Bataille de la planète des singes – Battle for the Planet of the Apes (1973). J. Lee Thompson retrouve pour la troisième et dernière fois Anthony Quinn (même si le rôle a semble-t-il été envisagé pour Charles Bronson), qu’il avait dirigé dans Les Canons de Navarone près de vingt ans auparavant et L’Empire du grec – The Greek Tycoon. Immédiatement après ce dernier, les deux complices remettent le couvert avec un film de guerre, conspué par la critique, encore aujourd’hui d’ailleurs, qui s’avère pourtant un grand divertissement, porté par un casting exceptionnel et merveilleusement photographié par Michael Reed (La Gorgone, Au service secret de sa Majesté).
La France occupée par le Troisième Reich, deux résistants demandent à un berger d’escorter le Professeur Bergson et sa famille en Espagne, un pays neutre dans une Europe en guerre. Appelé le Basque, celui-ci accepte cette mission particulièrement périlleuse. Périlleuse parce que lui et les fugitifs doivent non seulement franchir les Pyrénées en plein hiver, mais surtout échapper à Von Berkow, un officier SS de la pire espèce, prêt à mettre la région à feu et à sang pour les arrêter…
Habituellement, la presse et les spectateurs ne sont pas tendres avec Passeur d’hommes. S’il apparaît effectivement comme un film de guerre « tardif », il s’agit aussi d’un film d’aventures, d’action et d’un drame familial, très efficacement mis en scène par un vieux briscard de 65 piges. Avec son béret vissé sur la tête, son visage de granite et sa voix rocailleuse, Anthony Quinn crève toujours autant l’écran de son charisme. Il donne la réplique à un autre monstre du cinéma, James Mason, dans l’un de ses derniers rôles au cinéma, qui venait de tourner Ces garçons qui venaient du Brésil – The Boys from Brazil de Franklin J. Schaffner et Les Loups de haute mer – North Sea Hijack d’Andrew McLaglen. Prolifique et éclectique, le comédien est bouleversant dans Passeur d’hommes, scientifique que les nazis voudraient utiliser pour perfectionner leurs machines de guerre, qui a fui l’Allemagne avec sa famille, sa femme (Patricia Neal, Le Jour où la Terre s’arrêta – The Day the Earth Stood Still de Robert Wise), fragile, et dont le voyage pourrait lui être fatal, son fils et sa fille. Dans le rôle de Leah, la fille de Bergson, les cinéphiles reconnaîtront la superbe Kay Lenz, immortalisée par Clint Eastwood dans Breezy (1972), dans lequel elle tenait le rôle-titre. Le reste du générique est du même acabit avec Christopher Lee, impeccable dans le rôle du chef des gitans avec sa grosse moustache, les deux français Michael Lonsdale et Marcel Bozuffi et surtout Malcolm McDowell, explosif dans le rôle du taré Von Berkow, SS lancé à la poursuite de Bergson. La même année que le Caligula de Tinto Brass, le légendaire Alex DeLarge d’Orange mécanique de Stanley Kubrick retrouve la folie de ce personnage et s’en donne à coeur joie dans l’uniforme et le string à svastika, dont la performance semble avoir inspiré celle de Christoph Waltz alias le sadique colonel SS Hans Landa, dit « le Chasseur de Juifs » d’Inglourious Basterds de Quentin Tarantino, qui une fois de plus n’avait rien inventé. Impossible de ne pas rire devant le cabotinage de génie de Malcolm McDowell, y compris dans la scène pourtant terrifiante dans laquelle il « cuisine » au sens propre comme au figuré le personnage de Michael Lonsdale.
Sur un scénario de Bruce Nicolaysen, d’après son roman Perilous Passage, J.L. Thompson livre un long-métrage tout à fait honorable, tourné dans de magnifiques décors naturels (l’acte final dans les Hautes-Pyrénées), une course-poursuite originale menée tambour battant, bourrée de rebondissements, de violence et d’action, qui n’oublie pas l’émotion et la psychologie des personnages, le tout bercé par la composition de Michael J. Lewis. Une série B très réussie quoi qu’on en dise (à part une scène nawak dans le final), qui n’est pas sans lorgner sur les films d’exploitation transalpins, ce qui n’est pas pour nous déplaire.
LE BLU-RAY
Près de six ans après sa première édition en DVD, Passeur d’hommes revient dans les bacs, toujours sous les couleurs de Sidonis Calysta et en édition Standard, mais aussi et surtout en Haute-Définition ! Le menu principal est animé et musical.
Même visuel, mais aussi mêmes suppléments que l’ancienne édition DVD ! L’éditeur reprend ainsi que le documentaire intitulé Anthony Quinn, un original (1990, 58’), présenté en version française (avec les voix qui se superposent sur les propos originaux), composé d’interviews d’amis, de membres de la famille et de collaborateurs du comédien. Se succèdent ainsi, Gina Lollobrigida, Stanley Kramer, J.Lee Thompson, Lorenzo et Valentina (les enfants d’Anthony Quinn), Martin Ritt, Federico Fellini, Giulietta Masina, Giancarlo Giannini et d’autres, qui partagent de nombreux souvenirs intimes ou liés à divers tournages. Entouré de ses peintures, Anthony Quinn, âgé ici de 75 ans, revient avec franchise sur sa très prolifique carrière et même s’il indique avoir tourné 260 films (il en rajoute en fait une centaine…), l’acteur indique être fier de tout ce qu’il a fait et qu’il a toujours donné le meilleur de lui-même. A noter que ce documentaire était déjà présent sur le Blu-ray de Barrabas, disponible chez Sidonis Calysta.
La présentation de Patrick Brion (6’30) donne peu d’informations sur le film et l’historien du cinéma se contente d’indiquer que J. Lee Thompson était capable du meilleur comme du pire, tout en parlant des lieux de tournage et surtout de l’interprétation de Malcolm McDowell.
L’interactivité se clôt sur la bande-annonce.
L’Image et le son
Voici un nouveau master HD qui s’avère très agréable pour les mirettes. Tout n’est pas parfait, mais le film retrouve un certain éclat qui lui manquait sur le DVD de 2015, surtout au niveau des couleurs. Si la photo demeure froide et hivernale (et moins bleue qu’en DVD), l’ensemble est beau, de bonne tenue, la copie est stable et propre et les séquences sombres qui posaient problème sur l’édition Standard sont ici plus détaillées et surtout visibles. La texture argentique est bel et bien présente, solidement gérée, et la profondeur de champ est éloquente. Le Blu-ray est au format 1080p.
La version française est plutôt sourde, manque d’ardeur et s’avère incomplète avec quelques passages qui passent automatiquement en VOST. En revanche, la piste anglaise DTS-HD Master Audio 2.0 s’en tire bien avec une clarté des dialogues, des effets solides et une belle restitution de la musique. Les sous-titres français ne sont pas imposés.