Test Blu-ray / La Montagne du dieu cannibale, réalisé par Sergio Martino

LA MONTAGNE DU DIEU CANNIBALE (La Montagna del dio cannibale) réalisé par Sergio Martino, disponible en Combo Blu-ray + DVD le 1er octobre 2024 chez Artus Films.

Acteurs : Ursula Andress, Stacy Keach, Claudio Cassinelli, Antonio Marsina, Franco Fantasia, Lanfranco Spinola, Carlo Longhi, Luigina Rocchi…

Scénario : Sergio Martino & Cesare Frugoni

Photographie : Giancarlo Ferrando

Musique : Guido & Maurizio De Angelis

Durée : 1h39 (version intégrale)

Date de sortie initiale : 1978

LE FILM

Accompagnée par son frère Arthur, Susan Stevenson arrive en Nouvelle-Guinée et y organise une expédition afin de retrouver son mari disparu en pleine jungle. Elle obtient l’aide d’Edward Foster, un guide réputé. Ils vont devoir se rendre sur l’île de Roka où le mari de Susan était parti à la recherche de la mythique montagne Rarami, laquelle, selon les légendes, servirait de repère à la tribu cannibale des Pouka.

Contrairement à ce que beaucoup de spectateurs pensent, La Montagne du dieu cannibaleLa Montagna del dio cannibale ne surfe pas sur le succès international de Cannibal Holocaust de Ruggero Deodato, puisque tout simplement le film de Sergio Martino est sorti sur les écrans deux ans avant. Néanmoins, le sieur Deodato avait déjà tourné Le Dernier monde cannibaleUltimo Mondo Cannibale l’année précédente, tandis qu’en 1972, Umberto Lenzi signait le film précurseur avec Cannibalis : Au pays de l’exorcismeIl Paese del sesso selvaggio. Rendons donc à César (à Cesare devrait-on dire) ce qui lui appartient. La Montagne du dieu cannibale sort en 1978, quelques mois après Emanuelle et les derniers cannibalesEmanuelle e gli ultimi cannibali de Joe d’Amato, avec lequel il partage de nombreux points communs. Rétrospectivement, La Montagna del dio cannibale est assurément l’un des meilleurs opus du genre, Sergio Martino étant un metteur en scène plus « rigoureux » qu’Umberto Lenzi et moins rentre-dedans que Ruggero Deodato et Joe d’Amato. Par ailleurs, en dehors de quelques scènes totalement gratuites et infectes, montrant le sacrifice de véritables animaux (on assiste malheureusement à la mort insoutenable d’un singe, avalé par un python, à l’éventration d’un iguane…), reniées par le cinéaste par la suite, La Montagne du dieu cannibale apparaît avant tout comme un film d’aventure à part entière durant près d’une heure. Bénéficiant d’un casting haut de gamme, mêlant Ursula Andress, Stacy Keach, Claudio Cassinelli et Antonio Marsina, Sergio Martino ne plonge pas ses stars internationales dans le gore, mais crée un survival non seulement très bien mis en scène, mais aussi et surtout prenant, passionnant à suivre et beau à regarder. Évidemment, le dernier tiers, quasi-muet, compile les séquences « attendues » avec une castration filmée en gros plan, un repas placé sous le signe du steak tartare (viande allant directement du producteur au consommateur), tandis qu’Ursula Andress, nous gratifie de sublimes plans topless (ainsi que d’un full frontal) et qui à 41 ans avait de quoi faire des envieuses. Bref, La Montagne du dieu cannibale est un savoureux tour de force, un divertissement réservé à un public averti, qui fonctionne encore aujourd’hui à plein régime. Une grande référence, un mètre étalon.

Dans la jungle de la Nouvelle-Guinée, Susan Stevenson essaie de retrouver son époux Henry, un anthropologue de renommée internationale qui a disparu depuis trois mois. Dans ce but elle et son frère Arthur s’assurent les services du professeur Edward Foster, qui pense que son mari pourrait s’être dirigé vers une montagne située juste au large de la côte sur l’île de Roka. Les gens du pays croient que la montagne est maudite et les autorités n’y permettent pas d’expéditions. C’est pourquoi ils se glissent furtivement dans la jungle pour voir si c’est là qu’il est allé. Finalement ils se rendent sur l’île et, après avoir affronté l’hostilité d’anacondas, d’alligators et de tarentules, ils rencontrent un autre explorateur du nom de Manolo, qui demeure dans le camp d’une mission d’exploration proche et qui accepte de se joindre à eux dans leur expédition. L’affaire se complique pourtant, quand il apparaît bientôt que chacun d’entre eux a ses raisons à lui de venir dans l’île…

La Nouvelle-Guinée, un des derniers territoires largement inexplorés, enrobés de mystère et où la vie est restée à l’état primitif. À l’aube de l’ère spatiale, il semble inimaginable de trouver à vingt heures d’avion de Londres, un monde sauvage et vierge. Ce film témoigne de cette réalité.

Le twist fonctionne, quand on apprend que Susan a un autre projet en tête que celui de retrouver son époux. En effet, avec l’aide d’Arthur, elle avoue être secrètement à la recherche des gisements d’uranium, tandis que Foster révèle qu’il n’est venu là que pour exterminer – s’ils existent – les derniers membres de la tribu des Pukas, primitifs cannibales, qui l’avaient fait prisonnier quelques années auparavant et dont il avait réussi à échapper aux griffes. Sergio Martino n’a pas ménagé son équipe, y compris sa distribution, en les promenant du Sri Lanka jusqu’en Malaisie, dans quelques coins reculés, difficilement accessibles à une équipe de cinéma, afin de profiter de décors naturels peu vus à l’écran, voire inédits, afin d’apporter un cachet réaliste à son film.

L’exposition est claire, ainsi que la présentation des personnages, qui se retrouvent très vite au milieu de nulle-part, de la faune qui peut s’avérer mortelle à chaque pas et de la flore qui se referme sur eux, sans l’espoir d’être secouru si besoin. Le réalisateur, habitué à changer de genre (ce qu’il fera durant toute sa carrière) est à son affaire et entame ici une trilogie « exotique » qui sera constituée de La Montagne du dieu cannibale (1978), inspiré du roman Les Mines du roi Salomon de Henry Rider Haggard, Le Continent des hommes-poissonsL’Isola degli uomini pesce (1979) et Le Grand AlligatorIl Fiume del grande caimano (1980), avant d’aller tâter essentiellement de la comédie au cours de la décennie suivante. Le cinéaste s’en sort à merveille, installe une atmosphère trouble et inquiétante, grâce à un montage percutant et lisible (avec le chef monteur Eugenio Alabiso à la barre), une photographie soignée (Giancarlo Ferrando, Mort suspecte d’une mineure, Toutes les couleurs du vice), ainsi qu’une bande originale toujours inspirée des frères Guido et Maurizio De Angelis.

Sergio Martino étonne par la rupture brutale qui sépare la première partie (celle consacrée à la recherche du mari de Susan) et celle qui plonge les spectateurs dans l’horreur pure et dure, quand l’équipe est capturée par les indigènes. C’est là que certains spectateurs se cacheront peut-être les yeux, quand les primitifs – en adoration devant les restes d’Henry, dont le compteur Geiger affolé et placé sur la poitrine de la dépouille leur font croire que son coeur bat encore, faisant de lui un dieu – se régalent de chair humaine et de celle de reptiles. Ah oui, on y croise aussi une indigène se masturbant, tandis qu’un autre se tape un porc. À l’épouvante succède l’un des plus beaux plans de Sergio Martino, celui d’Ursula Andress (alors dans sa période italienne, collaborant avec Lucidi, Di Leo, Tessari, Castallari…) entièrement nue et attachée les mains en l’air, recouverte d’un onguent, photogramme qui a ensuite donné naissance à de nombreux visuels d’exploitation du film dans le monde entier.

Encore interdit au début des années 2000 au Royaume-Uni en raison de sa violence graphique, La Montagne du dieu cannibale est l’un des plus beaux fleurons du cinéma Bis italien.

LE COMBO BLU-RAY + DVD

Ce n’était qu’une question de temps pour que La Montagne du dieu cannibale fasse son apparition en Blu-ray et c’est Artus Films qui décroche la timbale ! Après une première apparition en DVD chez Grenadine (il y a vingt piges), puis en 2006 chez Neo Publishing, place à la Haute-Définition chez l’ours fièrement dressé ! Les deux disques reposent dans un sublime Digipack à deux volets, glissé dans un fourreau cartonné du plus bel effet. Le menu principal est fixe et musical. Notons qu’Artus a sorti une édition très limitée (200 exemplaires) arborant un visuel différent et plus explicite quant à l’apparition d’Ursula Andress…

Vous êtes prêts ? C’est parti ! On démarre les suppléments par la présentation du fidèle Curd Ridel (19’30). Indiquant d’emblée qu’il est particulièrement gêné par les scènes gratuites du meurtre des animaux, l’auteur de bande dessinée et expert en cinéma d’exploitation déclare que La Montagne du dieu cannibale demeure tout de même un bon divertissement. Il passe longuement en revue le casting (surtout la carrière et la vie privée d’Ursula Andress) et la carrière du réalisateur Sergio Martino. Curd Ridel lance un appel aux éditeurs, que l’un d’eux sortent La Dernière chanceL’Ultima chance de Maurizio Lucidi, poliziottesco avec Ursula Andress, Fabio Testi, Barbara Bach, Eli Wallach et Massimi Girotti. À bon entendeur !

On enchaîne avec une rencontre avec l’opérateur Claudio Morabito (12’30), qui s’exprime sur les difficiles conditions de tournage, qui ne laissait aucun répit à l’équipe technique et aux comédiens. Il partage aussi une anecdote où l’acteur Claudio Cassinelli (son grand ami, disparu tragiquement en 1985 sur le tournage d’Atomic Cyborg et dont il se souvient avec beaucoup d’émotion) a sauvé la vie d’Ursula Andress, en repoussant un cobra qui se tenait dans son dos, grâce aux conseils d’un dresseur qui l’avait conseillé pour une scène où il simule la même chose. Les lieux des prises de vue, l’utilisation récurrente du zoom et la distribution sont passés au peigne fin.

Place à Sergio Martino (né en 1938 et toujours bon pied bon œil), qui se remémore et partage ses souvenirs liés au tournage (exténuant) de La Montagne du dieu cannibale (24’). Celui-ci parle de sa carrière (« prolifique, où j’ai toujours cherché à changer de genre ») et y replace le film qui nous intéresse aujourd’hui. Sergio Martino passe en revue les repérages des lieux de prises de vue, l’implication d’Ursula Andress dans les scènes physiques, Stacy Keach (« qui se sentait un peu à l’étroit dans son rôle »), les lieux de tournage (essentiellement dans le jardin botanique de Kandy au Sri Lanka), sans oublier LA scène polémique, celle où un singe a été sacrifié dans la gueule d’un python. Sergio Martino indique regretter cette séquence, ajoutant qu’au départ l’animal devait être sauvé par le technicien en charge du tournage, ce qui n’a pas pu être fait à temps. Enfin, le cinéaste déclare qu’il est bien plus connu dans son pays pour ses comédies que pour son travail dans le genre, qu’il a pourtant fait avec plus d’enthousiasme.

On termine avec un très long entretien avec Antonello Geleng (près de 52’), chef décorateur sur La Montagne du dieu cannibale. Beaucoup de souvenirs de tournage sont entendus à travers cette interview, évidemment passionnante, malgré quelques redites. Geleng parle de ses débuts dans le cinéma (auprès de Federico Fellini), de sa rencontre avec Sergio Martino, jusqu’à ses vrais débuts comme architecte à la décoration. Si certains propos font écho à ce qui a déjà été entendu dans les autres bonus, il serait dommage de passer à côté de cette intervention extrêmement riche en anecdotes, puisqu’Antonello Geleng apparaît comme étant une vraie mémoire vivante d’un cinéma aujourd’hui complètement disparu.

L’interactivité se clôt sur une galerie de photos et d’affiche d’exploitation, ainsi que sur la bande-annonce (anglaise).

L’Image et le son

La restauration est éloquente, impressionnante et redonne un sacré coup de jeune à La Montagne du dieu cannibale, tout en conservant, heureusement, son grain argentique. Les couleurs retrouvent également une certaine vivacité. Les détails sont étonnants, à l’instar de la transpiration sur les visages. La propreté est de mise, la copie est stable, le piqué aiguisé et le tout flatte constamment les mirettes. Blu-ray au format 1080p.

La version française vaut le coup « d’oreille » (ça se dit ? Non ? Pas grave…) pour son doublage, même si la piste reste parfois légèrement couverte avec des dialogues chuintants. Mais rien ne vaut la piste italienne et même la langue anglaise, sur laquelle sont d’ailleurs réalisés les sous-titres français. La musique s’en tire excellemment bien, avec une belle délivrance et quelques pics dynamiques sur les scènes plus agitées. C’est propre, sans aucun souffle. Impeccable donc.

Crédits images : © Artus Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

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