A STAR IS BORN – ENCORE EDITION – VERSION LONGUE ET VERSION CINÉMA réalisé par Bradley Cooper, disponible en Blu-ray le 5 juin 2019 chez Warner Bros.
Acteurs : Lady Gaga, Bradley Cooper, Sam Elliott, Andrew Dice Clay, Rafi Gavron, Anthony Ramos, Dave Chappelle, Ron Rifkin…
Scénario : Eric Roth, Will Fetters, Bradley Cooper d’après l’histoire originale de William A. Wellman et Robert Carson
Photographie : Matthew Libatique
Musique : Julia Michels, Julianne Jordan, Lady Gaga
Durée : Version Cinéma – 2h15 & Version Longue – 2h28
Année de sortie : 2019
LE FILM
Star de country un peu oubliée, Jackson Maine découvre Ally, une jeune chanteuse très prometteuse. Tandis qu’ils tombent follement amoureux l’un de l’autre, Jack propulse Ally sur le devant de la scène et fait d’elle une artiste adulée par le public. Bientôt éclipsé par le succès de la jeune femme, il vit de plus en plus de mal son propre déclin…
CRITIQUE DE LA VERSION CINÉMA
Dans What Price Hollywood ?, une oeuvre méconnue et injustement oubliée dans la filmographie de George Cukor sortie sur les écrans en 1932, le réalisateur prenait pour cible les studios américains et la recherche de la célébrité, en n’épargnant personne et surtout pas le système hollywoodien et du vedettariat avec une sublime ironie. Le style Cukor y prenait alors son envol avec un rythme endiablé, des répliques qui fusent à cent à l’heure en se chevauchant. Considéré comme l’un des meilleurs films sur les coulisses de l’Age d’or d’Hollywood où les stars se font et disparaissent en un claquement de doigts, What Price Hollywood ? faisait découvrir au spectateur l’envers du décor en dévoilant ce qui se cache derrière le strass et les paillettes du cinéma américain. L’alcool est dévastateur, l’industrie (ennuyeuse) broie ses employés, les coups bas demeurent chroniques.
Rétrospectivement, What Price Hollywood ? apparaît presque comme un prologue à Une Etoile est née que William A. Wellman réalisera en 1937. Alors que George Cukor avait décliné la première version d’Une Etoile est née, il accepte d’en réaliser un remake en 1954 à travers un drame musical. Il en reprend la trame originale inspirée à l’époque de l’histoire du comédien John Barrymore, vedette déchue dont l’alcool ruina la carrière. Disposant de moyens conséquents, des stars James Mason et Judy Garland, de décors grandioses et du Technicolor flamboyant, ce grand classique hollywoodien n’a certes pas la même force que le film original, mais demeure un grand et beau divertissement. Parallèlement, Une Etoile est née signait le grand retour de Judy Garland devant la caméra après de nombreux ennuis de santé, plusieurs dépressions nerveuses, des sautes d’humeur, de multiples hospitalisations, un divorce difficile, une dépendance aux médicaments et à l’alcool qui l’avait conduite à une tentative de suicide en 1950. Malgré toute la bonne volonté du monde, la chanteuse et comédienne apparaît fatiguée dans le film de George Cukor. Ses chorégraphies demeurent lourdes, comme si l’actrice était lestée de poids dont elle n’arrivait pas à se débarrasser. Finalement, Une Etoile est née vaut encore aujourd’hui beaucoup plus pour son histoire dramatique, liée de manière troublante au parcours de la comédienne, que pour ses scènes chantées et dansées, qui arrivent souvent comme un cheveu sur la soupe et restent surtout trop longues. James Mason parvenait sans mal à lui voler la vedette en livrant une prestation extraordinaire.
En 1976, Frank Pierson réalise un autre remake éponyme avec Barbra Streisand et Kris Kristofferson dans les rôles principaux, sur lequel nous ne nous attarderons pas. C’est alors que ressurgit à Hollywood l’idée d’un nouveau remake de A Star is Born en 2011. Clint Eastwood est longtemps associé au projet, pour lequel il envisage de diriger Beyoncé Knowles. Cette dernière tombe enceinte. Le réalisateur rencontre plusieurs acteurs supposés donner la réplique à la chanteuse. Leonardo DiCaprio, Will Smith, Christian Bale, Tom Cruise et Johnny Depp refusent la proposition. En 2012, Beyoncé se retire du projet, tandis que Bradley Cooper entre en scène et sa partenaire envisagée Esperanza Spalding. Trois ans plus tard, coup de théâtre. Beyoncé revient dans la partie, Clint Eastwood est parti vaquer à d’autres occupations, tandis que Bradley Cooper y voit l’occasion de faire ses premiers pas devant la caméra. Un an plus tard, nous voilà donc rendus en 2016, Stefani Germanotta alias Lady Gaga est retenue pour tenir le rôle-titre. La production du film est enfin lancée, Bradley Cooper sera à la fois le metteur en scène et partagera l’affiche avec sa partenaire.
Alors certes, cette nouvelle version de A Star is Born ne rivalise jamais avec la mise en scène fluide, aérienne, souvent inspirée et sophistiquée de George Cukor (qui en était quand même à son 37e film et son premier en couleur par ailleurs), Bradley Cooper n’a d’ailleurs jamais eu cette prétention de rivaliser avec les précédentes moutures. Toutefois, cette version 2018 est une belle et grande réussite. Le nouveau réalisateur a visiblement bien appris auprès de Clint Eastwood (attaché finalement à la production) et de David O. Russell. Son premier long métrage est élégant, lent, mais le rythme est maîtrisé et surtout le cinéaste fait la part belle aux comédiens qui l’entourent. S’il est impeccable lui-même face à la caméra, y compris en jouant de la guitare et en poussant la chansonnette, l’immense révélation du film reste bien évidemment Lady Gaga. Enfin révélation façon de parler puisque « incarnant » déjà un personnage sur scène, nous savions déjà que Stefani Germanotta était déjà une grande comédienne. Débarrassée de son maquillage derrière lequel elle s’efface habituellement, tout comme de ses costumes outranciers (y compris à base de viande), Lady Gaga crève l’écran. Son immense sensibilité, son charisme, sa voix, bref sa présence est incroyable. Bradley Cooper ne s’est pas trompé en lui confiant ce rôle, par ailleurs très proche de ce que l’interprète a réellement vécu. L’alchimie des deux acteurs est indéniable.
Certes, tout n’est pas parfait loin de là dans A Star is Born. On préférera la première heure centrée sur la rencontre entre les deux personnages principaux, les débuts sur scène d’Ally avec Jackson, puis sur ses premiers succès, plutôt que le reste avec cette ascension trop fulgurante d’Ally à notre goût, grâce à ses musiques et chansons qui laissent franchement dubitatifs. Le personnage d’Ally passe alors au second plan et le récit se recentre sur la déchéance de Jackson. Heureusement, Bradley Cooper, formidable acteur, campe un personnage bouleversant et signe une de ses meilleures prestations. Mention spéciale également à Sam Elliott, superbe dans le rôle du frère de Jackson.
Produit pour un budget « modeste » de 35 millions de dollars, A Star is Born a été un triomphe dans le monde entier. Plus de deux millions de spectateurs français se sont rendus dans les salles, tandis que le tiroir-caisse de la Warner a engrangé près de 450 millions de dollars. Le film a ensuite été récompensé plus de soixante fois, y compris par l’Oscar et le Golden Globe de la meilleure chanson pour le désormais incontournable Shallow. Ça y est, vous l’avez à nouveau dans la tête.
LE BLU-RAY
Quatre mois après son édition en DVD, Blu-ray et 4K, A Star is born fait déjà son retour dans les bacs en version longue. Devant le succès monstre du film et son Oscar pour la Meilleure chanson originale Shallow, Warner Bros. a décidé de sortir cette édition Encore, qui comprend le film de Bradley Cooper dans son montage cinéma, ainsi qu’une version allongée de 13 minutes. Le montage Encore est uniquement disponible en Blu-ray. Le menu principal est fixe et musical.
En toute honnêteté, la nouvelle mouture est destinée aux fans purs et durs de A Star is born. Les minutes en plus sont dispersées ici et là avec notamment une version allongée de la séquence d’introduction Black Eyes, même chose pour la version a cappella de Shallow par Ally. Nous trouvons également la performance intégrale sur la chanson Clover (2’40), une conversation plus étendue entre Noodles et Jack, une très belle scène où Jack s’entretient avec un interprète admiratif de son travail. Donc non, ces séquences supplémentaires ne sont pas uniquement musicales et demeurent franchement anecdotiques.
Cette édition ne reprend pas les suppléments de la première édition, que nous disséquons ici https://homepopcorn.fr/test-blu-ray-a-star-is-born-realise-par-bradley-cooper/. L’éditeur se contente ici d’un montage regroupant tous les moments musicaux du film, soit 36 minutes de chansons, un bonus qui devrait ravir les amoureux du film, qui passeront ainsi d’un morceau à l’autre en appuyant sur une seule touche.
L’Image et le son
On ne saurait faire mieux. Pour son premier long métrage, Bradley Cooper a jeté son dévolu sur le talentueux et éclectique chef opérateur Matthew Libatique (Tigerland, Gothika, les deux premiers Iron Man, The Fountain, Black Swan). Les partis pris esthétiques originaux sont magnifiquement rendus à travers ce Blu-ray d’une folle élégance avec des couleurs saturées. Le piqué est affûté, les contrastes fabuleusement riches, les détails sont abondants aux quatre coins du cadre large comme sur les gros plans, tandis que le codec AVC consolide l’ensemble avec fermeté, y compris sur les très nombreuses scènes se déroulant dans la pénombre ou en intérieur.
Comme pour l’image, l’éditeur a soigné le confort acoustique et livre deux mixages Dolby Atmos particulièrement bluffants, surtout dans les scènes chantées, mais également dans les séquences plus calmes. En fait, toutes les scènes peuvent compter sur une balance impressionnante des frontales comme des latérales, avec des effets qui environnent le spectateur. Les effets annexes sont présents et dynamiques. De son côté, le caisson de basses souligne efficacement chacune des actions au moment opportun. La spatialisation est en parfaite adéquation avec le ton du film. Etonnamment, la version française l’emporte systématiquement sur son homologue. Cela est valable également pour les deux pistes DTS-HD Master Audio, certes moins percutantes, mais qui assurent du début à la fin. La version Encore est uniquement disponible en anglais, les sous-titres français étant bien entendu de la partie.