
LA RÈGLE DU JEU réalisé par Jean Renoir, disponible en Édition collector – 4K Ultra HD + Blu-ray + Blu-ray bonus + Livre depuis le 4 juin 2025 chez Rimini Éditions.
Acteurs : Roland Toutain, Nora Gregor, Marcel Dalio, Jean Renoir, Paulette Dubost, Mila Parély, Julien Carette, Gaston Modot…
Scénario : Jean Renoir & Carl Koch
Photographie : Jean Bachelet
Musique : Joseph Kosma
Durée : 1h47
Date de sortie initiale : 1939
LE FILM
En 1939, à Paris et en Sologne, un aviateur amoureux d’une femme du monde, ne respecte pas la règle du jeu qui consiste à sauver les apparences dans une société où maîtres et domestiques ont la même nature, de chaque côté de la barrière des classes.

Incompris lors de sa sortie en 1939, La Règle du jeu de Jean Renoir, son 24e long-métrage, est aujourd’hui considéré comme l’un des films les plus importants de l’histoire du cinéma. Encensé par tous les réalisateurs du monde entier, Bertrand Tavernier, Peter Bogdanovich, Alain Resnais, Robert Altman, Olivier Assayas, mais aussi en particulier par François Truffaut qui lui vouait un véritable culte (« le crédo des cinéphiles de sa génération » disait-il), le chef d’oeuvre de Jean Renoir, le plus grand « drame fantaisiste » de tous les temps ne peut laisser indifférent et s’avère une étape indispensable pour tous les cinéphiles du monde entier. Dense, passionnant, remarquablement mis en scène et interprété par toute une ribambelle d’extraordinaires comédiens qui campent TOUS le rôle principal, La Règle du jeu est un film exceptionnel (dont Jean Renoir lui-même dans la peau d’Octave), magistralement photographié par Jean Bachelet (Nous, les gosses), qui comme la plupart des films de Jacques Tati est encore de nos jours passionnant à analyser, tant sur le fond que sur la forme.



Une nuit, l’aviateur André Jurieux atterrit à l’aéroport du Bourget. Il vient de battre le record de traversée de l’Atlantique. Il est accueilli par une foule en liesse, à travers laquelle son ami Octave arrive à se frayer un chemin. Octave apprend au héros du jour que la femme pour laquelle il avait entrepris son raid n’a pu venir. À la journaliste de radio qui lui tend son micro, l’aviateur laisse éclater son amertume en la qualifiant de « déloyale ». Celle-ci n’est autre que la belle Christine de La Chesnaye, d’origine autrichienne. Dans son luxueux appartement, elle écoute l’émission radiophonique consacrée à l’exploit mais éteint rapidement l’appareil. Christine est mariée depuis trois ans au marquis Robert de La Chesnaye. Sa femme de chambre, Lisette, a épousé il y a deux ans Édouard Schumacher. C’est le garde-chasse du domaine de La Colinière, luxueuse résidence de campagne que possède le couple en Sologne. Une discussion entre Christine et le marquis nous apprend qu’il connaît la relation ambiguë de son épouse avec André. Mais le mari semble pardonner à sa femme et rejette la faute sur l’aviateur, qu’il juge trop naïf. Tout semble rentrer dans l’ordre. Robert s’absente un instant afin de téléphoner. Il désire rencontrer sa maîtresse, Geneviève de Marras, pour mettre un terme à leur relation. Dès le lendemain, Robert et Geneviève se retrouvent. Le marquis n’arrive pas à rompre. Trop faible, il se rend aux arguments de Geneviève et l’invite à un week-end de chasse.


Si vous n’avez jamais eu l’honneur de voir La Règle du jeu, alors précipitez-vous dessus. Quant aux autres, vous êtes en territoire conquis et vous l’avez sûrement vu à plusieurs reprises dans votre vie de passionnés du septième art. S’il est difficile de résumer l’histoire, on se souvient de scènes, de séquences, de moments, courts ou longs, d’impressions, de ressentis, de rires, de sourires, d’un goût de fer qui a pu apparaître dans la bouche devant l’amertume de certains échanges ou actions des personnages. On se souvient aussi de Marceau le braconnier (Julien Carette, tout un poème…), qui a pris un lapin dans un collet et qui sympathise contre toute attente avec le marquis Robert de La Chesnaye alors agacé par la prolifération de ces animaux à longues oreilles. Pour le récompenser de son action (illégale), il lui procure un emploi de domestique. Dès son arrivée au château, Marceau courtise Lisette (la légendaire Paulette Dubost), qui ne se montre pas insensible à ses avances.


Les souvenirs liés à La Règle du jeu apparaissent ainsi dans la mémoire. Par enchaînement systématique. Là-dessus arrivent les invités à la chasse qui appartiennent à l’aristocratie et à la grande bourgeoisie. Christine accueille Jurieux en leur présence. Sauvegardant les apparences, elle met en avant leur amitié. Le marquis décide d’organiser une fête costumée en l’honneur de l’aviateur. La chasse débute. Les participants abattent un grand nombre de gibier. Puis le marquis entraîne Geneviève à l’écart pour lui annoncer son intention de rompre. Celle-ci lui réclame un baiser d’adieu. Au moyen d’une petite lunette, Christine surprend fortuitement ce baiser. Elle se méprend sur sa signification et désire se venger de son mari.


Jean Renoir défie justement toutes les règles du jeu cinématographique. Marqué par un tournage quelque peu chaotique, prenant un retard considérable, dépassant le budget prévu à l’origine, Jean Renoir sait que son film n’est pas comme les autres, d’autant plus qu’il s’amuse à dépeindre (comme un autre Renoir) ses contemporains, alors que la Seconde Guerre mondiale est sur le point d’éclater. Le ton s’assombrit. Au château, Schumacher se lance à la poursuite de Marceau et tente de le tuer à coups de pistolet après l’avoir surpris en train de fricoter avec sa femme. Christine décide de tromper son époux avec Saint-Aubin, un aristocrate. Mais Jurieux les surprend et rosse Saint-Aubin. Seule avec André, Christine lui avoue son amour mais l’aviateur n’a pas la réaction attendue : il ne veut pas partir tout de suite, soucieux de convenances et désireux d’avertir le marquis. On est au boulevard, mais le vaudeville dissimule difficilement une noirceur qui devient de plus en plus profonde. La poursuite entre Marceau et Schumacher fait surgir André et Christine devant le marquis. Les deux hommes se battent violemment. Une balle tirée par Schumacher les interrompt et ils finissent par se réconcilier. Octave constate qu’il n’est qu’un parasite et un raté. Christine lui déclare ne plus être certaine de ses sentiments pour André. Schumacher et Marceau sont renvoyés du château et se réconcilient.


D’autres se déclarent leur amour et prennent même le risque de s’enfuir ensemble. Mais il y a toujours quelqu’un d’autre pour observer la scène, même si la réalité n’est pas celle à laquelle ils croient et ce en raison d’un vêtement (pour ne pas dire un costume) emprunté à un/e autre. La méprise entraîne alors le drame. Mais ce n’est qu’un accident sans doute. Vous ne croyez pas ?


Échec fracassant tant du côté du public (furieux par cette peinture des mœurs, au point de fracasser des fauteuils dans certaines salles ou même d’y mettre le feu) que de la critique (déconcertée par le mélange des genres), La Règle du jeu deviendra un film maudit, sera mutilé par Jean Renoir lui-même, qui avait déjà précipité sa sortie au cinéma en raison du manque d’argent (le cinéaste était d’ailleurs obligé de vendre les toiles de son père reçues en héritage, pour pouvoir financer ses films) et de temps. Il faudra attendre 1958 et la passion de deux cinéphiles, Jean Gaborit et Jacques Durand, pour que La Règle du jeu ressuscite de ses cendres, soit reconstitué (presque) comme il était auparavant, pour enfin exploser aux yeux des spectateurs des salles internationales. Le succès de ce « drame gai » ne s’est depuis jamais démenti.



LE 4K UHD
Revoilà La règle du jeu dans les bacs français. Mais cette fois, « c’est la bonne » on va dire. Le chef d’oeuvre de Jean Renoir s’est promené d’un éditeur à l’autre et ce depuis 1999, année du premier DVD sorti aux Éditions Montparnasse, qui allaient proposer une édition collector dès 2005, puis un premier Blu-ray en 2011. Six ans plus tard, Movinside le proposait à son tour dans les deux formats…complètement dépourvus de suppléments ! Cela nous amène à 2021 où La Règle du jeu débarque chez ESC Films en Blu-ray, puis en 2022 en 4K UHD, avec un seul bonus, par ailleurs inédit. Juin 2025, Rimini Éditions va calmer tout le monde avec ce qui apparaît d’emblée comme étant l’édition définitive de La Règle du jeu en France. Voilà désormais une Édition collector limitée contenant le 4K Ultra HD du film, le Blu-ray du film, un Blu-ray de bonus (et il y a de quoi faire, vous allez voir!), le livre « La Règle du jeu – Le Dessous des cartes » rédigé par Charlotte Garson des Cahiers du Cinéma (64 pages), ainsi que 4 reproductions d’affiches format cartes postales. Ce boîtier monocuvette est à l’image du film, suprêmement élégant et s’impose immédiatement comme un élément indispensable à toute DVD-Blu-raythèque digne de ce nom. Les trois disques reposent dans un boîtier Digipack à trois volets, magnifiquement illustrés, sur lesquels on retrouve aussi une critique du Chicago Tribune. Quant au livre, plongez dedans immédiatement après avoir revu La Règle du jeu et visionné tous les bonus. Charlotte Garson, qui avait déjà participé au livre de la superbe édition Blu-ray du Journal d’une femme de chambre chez Sidonis, et qui intervient aussi régulièrement dans les livrets des éditions Tamasa, fournit ici un travail de titan à travers son livre qui compile un retour sur le parcours de Jean Renoir et plus spécifiquement sur les années 1930, une immersion au coeur de La Règle du jeu (sa portée sociale, ses liens avec le théâtre, les choix esthétiques et narratifs), une analyse de cinq scènes spécifiques, un focus sur la distribution, ainsi que l’avis de dix personnalités (François Truffaut, Alain Resnais, Bertrand Tavernier, Philippe Le Guay, Gilles Deleuze, Claude Mauriac, Arnaud Desplechin, Laurent Cantet, Pascale Ferran…et Jean Renoir lui-même) sur le film qui nous intéresse aujourd’hui. Mentionnons aussi les illustrations comme d’habitude parfaite, marquée par des photogrammes, des affiches, ainsi que des photos de tournage. Le menu principal du Blu-ray et du 4K est identique, animé et musical.

Pour son édition, Rimini Éditions reprend tout d’abord cinq bonus déjà présents sur l’ancien Blu-ray sorti aux Éditions Montparnasse, à savoir :
Jean Renoir présente La Règle du jeu (1962-6’) : Visionnez cette introduction avant le film car le réalisateur, confortablement installé, s’adresse directement à vous pour resituer La Règle du jeu dans son contexte tout en expliquant pourquoi ce film a été son plus gros « insuccès », qui lui a d’ailleurs valu la plus belle volée de bois vert de sa carrière. Le cinéaste évoque ses intentions, celle « de faire un film agréable mais qui soit en même temps une critique de la société résolument pervertie », mais aussi ses influences (de Musset avec Les Caprices de Marianne). Notre interlocuteur ne cache pas sa joie de présenter la version reconstituée de La Règle du jeu grâce à laquelle il savoure la douce revanche sur les injures reçues dans la figure en 1939.

« Ma » Règle du jeu (2005-16’) Le cinéaste, critique de cinéma et journaliste N.T. Binh s’entretient avec le réalisateur Claude Chabrol, la comédienne et réalisatrice Noémie Lvovsky, le chef opérateur Eduardo Serra et le chef décorateur Guy-Claude François sur leur liens avec le film de Jean Renoir. Tous se rappellent la première fois qu’ils ont découvert La Règle du jeu, certains avouent y être « revenus » pour mieux l’apprécier (comme Eduardo Serra et Guy-Claude François), quand d’autres ont immédiatement adhéré au ton du film (Noémie Lvovsky et Claude Chabrol). Les analyses sur le fond et la forme se croisent habilement, les propos tenus demeurent captivants tout du long.




Commentaire audio par Olivier Curchod : Un commentaire audio conçu et dit par ce spécialiste de Jean Renoir, qui s’attache à cerner la place et le rôle de chaque personnage dans la conduite de la dramaturgie, dans le maelström visuel et sonore de La Règle du jeu. Bien préparé à l’avance, ne vous attendez surtout pas à un commentaire spontané, mais plutôt à une analyse souvent redondante, parfois intéressante, de temps en temps difficile à suivre, racontée sur un ton monocorde qui a souvent du mal à retenir l’intention, on ne va pas vous le cacher. Le moins que l’on puisse dire, c’est que notre interlocuteur ne s’arrête pas une seconde et aurait gagné à proposer un commentaire plus aéré, plus fluide et moins pompeux dans son traitement puisque nous avons ici plutôt l’impression d’écouter une piste audiodescription destinée au public aveugle ou malvoyant. De plus, la plupart des arguments entendus ici (les rapports entre les personnages, leur psychologie, le montage, la mise en scène, les séquences coupées en 1939 réintroduites ici) sont entendus dans les autres segments de cette lourde interactivité alors n’hésitez pas à zapper ce commentaire à moins d’être un réel mordu du film, dans ce cas-là vous n’y échapperez pas. Cela d’autant plus que les éléments à retenir sont en gros repris dans la section « Oliver Curchod présente La Règle du jeu ».

Olivier Curchod présente La Règle du jeu (2005-28’) : Revoilà l’historien du cinéma et spécialiste de Jean Renoir. Comme nous vous l’indiquions précédemment, c’est ici qu’il faudra vous diriger pour une synthèse complète sur tout ce qui concerne la genèse, la mise en chantier, les recherches formelles, la postproduction, l’accueil et la ressortie de La Règle du jeu dans sa version reconstituée de 1959. Écouter ce module permet d’éviter les redondances du commentaire audio et tout ce qui est dit ici s’avère passionnant et indispensable pour tout cinéphile qui se respecte. Les thèmes abordés, l’inspiration, le casting, les difficiles conditions de tournage, l’échec de la sortie du film en 1939, le contexte socio-politique de l’époque, les coupes sévères au montage, cet entretien dense et complet, mené et réalisé par N.T. Binh est l’une des pièces maîtresses de cette interactivité.




Jean Renoir, le patron : La Règle et l’exception (49’) : Tirée d’une série de trois émissions télévisées produites par Jeanine Bazin et André S. Labarthe, et réalisées par Jacques Rivette en 1966, cette interview exceptionnelle de Jean Renoir fait partie des must de la collection « Cinéastes de notre temps ». Le cinéaste âgé de 70 ans répond avec entrain et revient avec délectation sur le découpage de La Règle du jeu, l’usage de la profondeur de champ, l’improvisation, ses influences, l’évolution des personnages, la performance de ses comédiens, le tout enrichi de souvenirs précis du tournage. Nous trouvons aussi des retrouvailles de Marcel Dalio et de Jean Renoir qui partagent leurs souvenirs de tournage sur les marches du château de La Ferté Saint-Aubin où a été tourné le film.



Place ensuite aux nouveaux bonus :
Reconstituer La Règle du jeu (1965-10’) : Ce document extrait de l’émission Les Écrans de la ville, donne la parole à Jacques Durand et Jean Gaborit, grâce à qui La Règle du jeu a pu être « reconstitué » au moyen d’une dizaine de copies retrouvées et qui ne possédaient pas forcément le même montage, suite aux très nombreuses coupes que le film avait subi. Les deux cinéphiles expliquent en détail comment ils s’y sont pris (« un travail long et compliqué »), indiquant qu’une copie supposée être la plus complète, avait été projetée en présence de François Truffaut…et qui s’est avérée atrocement mutilée ! Le négatif original ayant brûlé suite à un bombardement durant la guerre, retrouver des copies de La Règle du jeu devenait miraculeux. C’est alors que d’autres morceaux de bobines sont découverts, éléments pour ainsi dire inédits (qu’ils ne connaissaient pas eux-mêmes) qui leur permettront de peaufiner leur montage quasi-définitif de cette « Bible » des amoureux du septième art et chef d’oeuvre maudit de Jean Renoir.



La Règle du jeu par François Truffaut (23-1972) : Dans le cadre de l’émission Grand Écran, le réalisateur de La Peau douce est invité à venir présenter son film préféré (« ainsi que celui de ma génération » dit-il) et commence tout d’abord à le situer dans la carrière de Jean Renoir. Là-dessus François Truffaut explique la genèse et le tournage compliqué de La Règle du jeu, « qui s’est soldé sur un échec critique et commercial épouvantables », interdit par la censure car jugé démoralisant, ce qui allait entraîner de multiples coupes. Des versions tronquées et variables ont donc commencé à circuler après la guerre, période où les cinéphiles deviennent « fanatiques » du film. François Truffaut parle ensuite de la reconstitution de La Règle du jeu, un montage qui a pu ensuite ressortir au cinéma en 1965. Après la projection du film, François Truffaut est accompagné par la comédienne Alexandra Stewart, du scénariste et auteur Jean-Loup Dabadie et la journaliste-critique Yvonne Baby. Tous les quatre discutent de l’importance de La Règle du jeu dans leur vie personnelle et d’artiste, tout en donnant leur impression, leur interprétation de certaines scènes et de la motivation des personnages.







On passe à un dialogue entre Jean Douchet et Arnaud Desplechin, enregistré à la Cinémathèque Française en novembre 2014 (48’). Bon, nous avons déjà déclaré à plusieurs reprises que nous n’avons jamais été friands des analyses et interventions de l’éminent critique de cinéma disparu en 2019. Ce face-à-face avec le réalisateur de Rois et Reine – mis en place après la projection de La Règle du jeu – s’avère décevant, car Jean Douchet monopolise souvent la prise de parole, laissant quelques miettes à Arnaud Desplechin (pourtant un immense fan du film, qu’il a peut-être vu une quarantaine de fois), d’autant plus que Jean-François Rauger, présent dans la salle, donne également son avis. Les quelques informations glanées ici et là ont déjà été entendues dans les autres bonus, notamment sur les conditions de prises de vue et l’échec cinglant du film à sa sortie. Le naturel revient vite au galop quand Jean Douchet se lance dans quelques interprétations de son cru, qui laissaient de multiples spectateurs sur le carreau.

Ce à quoi Rimini ajoute un nouvel entretien, produit à cette occasion :
Philippe Roger, maître de conférence en études cinématographiques, propose une filmanalyse de La Règle du jeu (39’). Un supplément pour le moins original, puisque le chef d’oeuvre de Jean Renoir est abordé sous le prisme de la musique, d’où la présence de spoilers, comme l’indique un carton en introduction. Pourquoi selon-lui, Jean Renoir est-il un cinéaste de la musicalité, au même titre que Jean Grémillon (« Lumière d’été est d’ailleurs une réponse au film de Jean Renoir ») et Max Ophüls ? « L’image est musique » dans La Règle du jeu et cette intervention développe de façon pointue cet argument.

L’interactivité se clôt sur l’enregistrement inédit d’un extrait symphonique de l’opéra-comique Le Déserteur (4’30), écrit par Pierre-Alexandre Monsigny, que l’on peut entendre à la fin de La Règle du jeu. Une pièce composée en 1769 et dont l’enregistrement présent date de 1946.
L’Image et le son
Rimini Éditions présente une nouvelle version de La Règle du jeu, restauré en 2021 par La Cinémathèque Française et Les Grands Films Classiques, en collaboration avec The Criterion Collection / Janus Films et la Cinémathèque suisse. Un carton indique : Les négatifs ont été détruit lors de la Seconde Guerre mondiale par des bombardements alliés. Les travaux de restauration numérique ont été réalisés en s’appuyant sur la reconstitution complexe menée en 1959 par Les Grands Films Classiques, approuvés par Jean Renoir. La restauration 4K de l’image et l’étalonnage ont été menés au laboratoire TransPerfect Media (ex-Hiventy) à partir d’un contretype composite, en grande paertie nitrate, déposé par les Grands Grands Films Classiques au CNC. Nous n’avions jamais vu La Règle du jeu dans de telles conditions, cette mouture 4K enterrant bel et bien celle sortie précédemment chez ESC, puisque l’éditeur s’est tourné vers le laboratoire TCS pour un complément de restauration. Les contrastes affichent d’emblée une densité inédite, les noirs sont profonds, la palette de gris riche et les blancs lumineux. La texture argentique est présente, préservée, même si étonnamment moins organique qu’attendue (cela étant imputable au nouveau lifting TCS, comme sur 1984 et Les Cavaliers), les arrière-plans sont stables, le piqué ahurissant et les détails regorgent sur les visages des comédiens. Avec tout ça, on oublierait presque de parler de la restauration du film. Celle-ci se révèle extraordinaire, aucune scorie n’a survécu au scalpel numérique. De jour (merveilleusement lumineux) comme de nuit, toutes les scènes sont logées à la même enseigne. La photo du chef opérateur Jean Bachelet n’a jamais été aussi resplendissante, le cadre brille de mille feux (quand bien même de menus défauts subsistent et ne sauraient être corrigés, comme certains flous) et l’on retrouve enfin la profondeur de champ chère à Jean Renoir. HDR/Dolby Vision.

Le son a été restauré par le studio L.E. Diapason, à partir d’un contretype son nitrate incomplet et du négatif issu du mixage de 1959. Le film de Jean Renoir bénéficie d’un écrin acoustique DTS-HD Master Audio 2.0 qui, sans surprise, met en valeur à la fois les magnifiques dialogues du film. Les effets sont précis, un très léger souffle demeure, mais rien de grave et les plages de silence sont limpides. En revanche, point de sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ni de piste piste Audiodescription.



Crédits images : © Rimini Éditions / Les Grands Films Classiques / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr