DÉSIRÉE réalisé par Henry Koster, disponible en DVD et Blu-ray le 18 juin 2019 chez ESC Editions
Acteurs : Marlon Brando, Jean Simmons, Merle Oberon, Michael Rennie, Cameron Mitchell, Elizabeth Sellars, Charlotte Austin, Cathleen Nesbitt, Evelyn Varden, John Hoyt, Alan Napier…
Scénario : Daniel Taradash d’après une histoire originale d’Annemarie Selinko
Photographie : Milton R. Krasner
Musique : Alex North
Durée : 1h50
Année de sortie : 1954
LE FILM
Lorsque, en 1794, il rencontre Désirée Clary à Marseille, Napoléon Bonaparte n’est encore qu’un général sans le sou à la merci des dernières convulsions de la Révolution. S’ils se jurent un amour éternel et le mariage, les événements les séparent vite. Pour des raisons politiques, Napoléon épouse Joséphine de Beauharnais tandis que, désespérée, Désirée pense à un suicide dont la sauve le général Bernadotte. De batailles en conquêtes, de la victoire à la défaite, désormais empereur, jamais Napoléon n’oubliera Désirée que le destin conduit sur le trône de Suède…
Réalisé en 1954 par Henry Koster (1905-1988), Désirée est une biographie romancée de Désirée Clary, première fiancée de Napoléon, qui devint plus tard reine de Suède et de Norvège. Le réalisateur, de son vrai nom Herman Kosterlit, est né en Allemagne, pays qu’il a préféré fuir suite à l’arrivée d’Hitler au pouvoir. Après plusieurs étapes, en France puis en Hongrie, il s’installe avec sa femme à Hollywood où il signe un contrat avec Universal à la fin des années 1930. Malgré sa difficulté à parler et à comprendre l’anglais, Henry Koster parvient à convaincre le studio de mettre en scène Trois jeunes filles à la page – Three Smart Girls qui contre toutes attentes est un immense succès et parvient même à sauver Universal de la banqueroute. Sa carrière est alors lancée. Il se spécialise dans les films musicaux et destinés à la famille, passant ensuite à la MGM, puis à la Fox. En 1950, il réalise un de ses films les plus connus, Harvey avec James Stewart, d’après la pièce de théâtre de Mary Chase. Immense succès et film culte aux Etats-Unis. Après un formidable segment pour le film à sketches de La Sarabande des pantins (1952) où il dirige Charles Laughton, puis La Tunique (1953), triomphe international avec Richard Burton et l’un des premiers films en CinemaScope, Henry Koster se voit proposer Désirée, une superproduction avec la nouvelle star Marlon Brando, dans le rôle de Napoléon Bonaparte, qui donne la réplique à la merveilleuse Jean Simmons. En résulte un grand spectacle en cadre large qui revisite l’Histoire à travers une histoire d’amour à la Sissi Imperatrice, dans lequel Marlon Brando étonne par son mimétisme et compose un personnage au premier abord peu sympathique, mais sans cesse troublant. Un être humain pris au piège par le monstre qu’il a lui-même créé.
Depuis sa rencontre avec Joseph Bonaparte à Marseille jusqu’à son accession au trône de Suède, le destin de Désirée Clary a constamment suivi ceux de son amant Napoléon et de son mari Bernadotte. À chaque instant, la petite demoiselle a dû choisir entre les deux hommes de sa vie, sans pour autant y parvenir entièrement. Surtout, elle n’a jamais réussi à accorder leurs deux caractères qui, pourtant, étaient plus proches qu’il n’y paraissait peut-être.
Marlon Brando vient à peine d’exploser aux yeux du monde. Désirée n’est que son sixième film, mais l’acteur vient alors d’enchaîner Un tramway nommé Désir, Viva Zapata ! et Sur les quais d’Elia Kazan, L’Équipée sauvage de László Benedek et Jules César de Joseph Mankiewicz. Bien que plus large et plus grand que Napoléon Bonaparte, le comédien se fond dans la peau de son personnage et adopte certaines de ses postures emblématiques, avec un regard froid et déterminé. Si Jean Simmons est sublime et crève une fois de plus l’écran, Marlon Brando emporte la mise à chaque apparition, finalement en pointillés. Le reste du temps, Henry Koster soigne sa mise en scène, s’inspire du mélodrame autrichien à la Ernst Marischka et croise à la fois la petite et la grande histoire, dans le but de divertir le plus grand nombre.
Hormis quelques longueurs et passages obligés pour recentrer l’intérêt sur la romance principale, puisque les deux personnages se trouvent séparés par les intérêts personnels (Napoléon rompt ses fiançailles en épousant Joséphine de Beauharnais) et le destin (Désirée, rongée de chagrin, se console en convolant avec le général Bernadotte et devient reine de Suède et de Norvège), Désirée n’a absolument rien perdu de son charme et certaines séquences, à l’instar du sacre de Napoléon 1er (inspirée de l’oeuvre de Jacques-Louis David exposée au musée du Louvre) et le dernier face à face sont vraiment marquantes. Le film sera un immense succès. Enfin, signalons que le sujet de cette épopée historique et romanesque avait déjà été abordé par Sacha Guitry en 1942 dans Le Destin fabuleux de Désirée Clary.
LE BLU-RAY
Désirée avait déjà fait l’objet d’une édition en DVD en 2008 chez Opening, aujourd’hui épuisée. Mais heureusement, ESC Distribution est passé par là et via la bannière Movinside, propose non seulement à nouveau le film de Henry Koster en édition standard, mais aussi et surtout en Haute-Définition ! Le menu principal est ici animé et musical. Le visuel est très élégant, emblématique de la collection chez l’éditeur.
Patrick Brion est dans la place mesdames et messieurs ! L’historien du cinéma présente ici Désirée (19’) de Henry Koster, en croisant à la fois le fond et la forme, tout en proposant un tour d’horizon de la filmographie du réalisateur. Vous saurez tout sur la genèse de Désirée, qui était prévu à l’origine pour Laurence Olivier et Vivien Leigh. Patrick Brion ne manque pas d’arguments pour défendre ce film « tout à fait convaincant et très attachant ».
L’Image et le son
Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette édition HD ressuscite Désirée, qui bénéficie d’une restauration solide. Ce Blu-ray ne déçoit pas et profite de l’apport de la Haute-Définition avec d’emblée un générique d’ouverture qui illumine les rétines. Les couleurs explosent à l’écran comme un feu d’artifice, le codec AVC stabilise l’image à la perfection, le grain original est respecté, la profondeur de champ est évidente et le cadre large n’est pas avare en détails. La propreté demeure impressionnante tout du long, le piqué est joliment acéré, la copie demeure flatteuse et stable, la luminosité des séquences en extérieur est superbe. Malgré de légers décrochages sur les fondus enchaînés, ainsi que deux ou trois plans plus troubles et aux teintes fanées, l’ensemble reste d’un haut niveau et l’on redécouvre avec bonheur le film de Henry Koster.
La version originale bénéficie d’un remixage Dolby Digital 5.1. Cette option acoustique séduisante permet à la composition d’Alex North de mieux plonger le spectateur dans l’atmosphère du film, d’autant plus qu’elle provient des quatre pistes Stéréo d’époque. Evidemment, tout est relatif et l’écoute est essentiellement frontale. La balance frontale assure de son côté le spectacle acoustique, riche et dynamique. Mais que les puristes se rassurent, un excellent mixage anglais LPCM 2.0 est également disponible. Cette piste se révèle d’ailleurs plus percutante et propre que son homologue. La version française s’en sort très bien. Les sous-titres ne sont pas imposés.