Test Blu-ray / Dans les replis de la chair, réalisé par Sergio Bergonzelli

DANS LES REPLIS DE LA CHAIR (Nelle pieghe della carne) réalisé par Sergio Bergonzelli, disponible en DVD et Blu-ray chez Frenezy.

Acteurs : Eleonora Rossi Drago, Pier Angeli, Fernando Sancho, Alfredo Mayo, Emilio Gutiérrez Caba, María Rosa Sclauzero, Giancarlo Sist, Gaetano Imbró, Luciano Catenacci, Bruno Ciangola…

Scénario : Sergio Bergonzelli & Fabio de Agostini

Photographie : Mario Pacheco

Musique : Jesús Villa Rojo

Durée : 1h32 (version intégrale)

Date de sortie initiale : 1970

LE FILM

Lucile est gouvernante dans une grande villa. Elle y vit avec son neveu et la fille de l’ancien propriétaire, disparu en mer 13 ans auparavant dans des circonstances jamais vraiment élucidées. Quiconque essaie de s’immiscer dans ce cercle familial en paie les lourdes conséquences.

Le gros plan d’une tête coupée reposant sur le sol après avoir été arrachée au reste du corps d’un homme, ouvre le film, l’ancrant dès les premières secondes dans le genre de l’horreur. Mais attention : l’horreur cérébrale, semble annoncer Sergio Bergonzelli dans le carton inaugural affichant rien moins qu’une citation (prétendument) empruntée à Sigmund Freud. Ce qui a été, restera – gravé dans le cerveau et dans les replis de la chair, nous explique-t-il. Voilà qui en dit long sur les aspirations du cinéaste, qui parsèmera son long-métrage d’autres références plus ou moins pertinentes au mathématicien et philosophe Pascal, ou encore aux écrivains Raymond Radiguet et T.S. Eliot. D’un point de vue strictement cinématographique, c’est surtout à Alfred Hitchcock qu’il se réfère. Dans l’entretien avec l’historien du cinéma Rosario Tronnolone disponible en bonus (lire ci-dessous), on apprend sans surprise que Sergio Bergonzelli ambitionnait d’être considéré comme un grand artiste et non comme un « simple » artisan, ce qui explique ce déferlement de citations prestigieuses. C’est au fond, ce qui rend si précieux ce film étrangement claudiquant qu’est Dans les replis de la chair. Car Bergonzelli n’a pas les moyens de ses prétentions (ni financiers, ni artistiques), mais l’ardeur et la sincérité manifeste qu’il y insuffle forcent une certaine tendresse doublée d’un amusement de chaque instant à traquer la réplique ridicule, l’incohérence de trop, l’approximation de jeu, la fausse note dans le cadrage.

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Test Blu-ray / Le Retour de Ringo, réalisé par Duccio Tessari

LE RETOUR DE RINGO (Il Ritorno di Ringo) réalisé par Duccio Tessari, disponible le 4 juin 2019 en Édition Collector Blu-ray + DVD + Livre chez Artus Films

Acteurs : Giuliano Gemma, Fernando Sancho, George Martin, Lorella De Luca, Susan Scott, Nieves Navarro, Antonio Casas, Manuel Muñiz…

Scénario : Fernando Di Leo, Duccio Tessari

Photographie : Francisco Marín

Musique : Ennio Morricone

Durée : 1h36

Année de sortie : 1965

LE FILM

De retour de la guerre de Sécession, Ringo retrouve sa ville sous la coupe réglée de bandits mexicains. Au milieu des habitants terrorisés et du shérif impuissant, il voit sa femme aux côtés du chef des bandits. À lui seul, Ringo va entreprendre la reconquête de la ville.

1964, avec Pour une poignée de dollars, Sergio Leone lance la vague du Western européen. Plus de 700 films vont être produits. Le moins que l’on puisse dire, c’est que Le Retour de Ringo Il Ritorno di Ringo, un temps envisagé sous le titre L’Odyssée des longs couteaux, est un des meilleurs fleurons du genre !

En 1965, Giuliano Gemma (1938-2013), vu dans Angélique, Marquise des anges de Bernard Borderie dans lequel il interprète Nicolas, explose dans Un pistolet pour RingoUne Pistola per Ringo. La même année, le comédien et culturiste tourne Merveilleuse Angélique, mais également la suite du western qui l’a rendu célèbre dans le monde entier, toujours sous la direction de Duccio Tessari (1926-1994), avec qui il tournera huit films et qui lui avait offert son premier grand rôle dans le péplum Les TitansArrivano i titani en 1962. Giuliano Gemma devient alors un des comédiens les plus populaires du cinéma italien et deviendra un des acteurs européens les plus connus à l’étranger, comme au Japon où il est une véritable icône au même titre qu’Alain Delon. Athlète émérite, l’acteur s’impose dans Le Retour de Ringo, vraie fausse suite d’Un pistolet pour Ringo. S’il ne réalise pas d’acrobaties à la Buster Keaton complètement dingues comme ce sera le cas dans Mort ou vif…De préférence mort, Giuliano Gemma crève l’écran avec son charisme animal, sa présence naturelle, son aisance dans les séquences d’action, tout comme dans les scènes dramatiques.

Sur un canevas plutôt classique, mais inspiré par un épisode de L’Odyssée d’Homère, qui montre également une fois de plus qu’un certain Quentin Tarantino n’a absolument rien inventé, mais qu’il s’est toujours contenté de recycler le cinéma qu’il aimait, Le Retour de Ringo est un western pur et dur. Une histoire de vengeance sèche et violente, où chose amusante le personnage interprété par Giuliano Gemma, que tout le monde appelle Ringo, s’appelle en fait Montgomery Brown, surnom adopté par l’acteur pour l’exploitation internationale de ses films. Il reprend donc le rôle de Ringo, mais dans un second opus différent par rapport à Un pistolet pour Ringo, qui comportait beaucoup d’humour et une direction plus légère.

Dans Le Retour de Ringo, l’atmosphère est plus poussiéreuse et crasseuse, rude, tandis que le personnage revient de la guerre avec un trauma visible et palpable. Alors, quand il comprend que la population de sa ville natale est terrorisée par des bandits mexicains à la tronche patibulaire, et que sa propre femme se trouve au bras de l’un d’entre eux, son sang ne fait qu’un tour. Malin et calculateur, sombre, Ringo décide de sauver la ville, de reconquérir son épouse et de venger ceux tombés sous les balles de cette bande de malfrats. Quelques touches d’humour tout de même avec ce croque-mort/fleuriste improbable (Manuel Muñiz), que l’on croirait inspiré du Professeur Tournesol, et qui s’appelle d’ailleurs Myosotis.

Western dit spaghetti, mais en réalité hispano-italien, Le Retour de Ringo fait partie des meilleures réussites d’un genre alors en pleine explosion, principalement fait d’ersatz. Si l’excellente partition du maestro Ennio Morricone fait le lien avec la première aventure de L’Homme sans nom, Pour une poignée de dollars, Duccio Tessari, désireux d’aborder le genre sous un angle différent par rapport à son œuvre précédente, s’inscrit sur la voie tracée par Sergio Leone, tout en trouvant un ton qui lui est propre, avec un cadre constamment soigné. Le Retour de Ringo est un divertissement de haute volée, une série B de grande qualité, une référence (l’assaut final face au truculent Fernando Sanco est phénoménal), qui n’a souvent rien à envier aux opus plus reconnus. Un vrai bijou.

LE MEDIABOOK

Revoilà l’ours d’Artus Films avec un magnifique et luxueux Mediabook estampillé « Western Européen », destiné à mettre en valeur le meilleur western de Duccio Tessari, Le Retour de Ringo. Artus Films a cette fois encore concocté un visuel clinquant. Cette édition se compose du Blu-ray et du DVD, ainsi que d’un incroyable livre de 64 pages (Les Grandes tragédies dans le western européen), réalisé sous la direction de Lionel Grenier (rédacteur en chef du site luciofulci.fr), avec la participation de Guillaume Flouret, Vincent Jourdan et Gilles Vannier. Vous y trouverez de fabuleux visuels, photos et affiches, et surtout un essai passionnant sur l’influence la tragédie grecque dans le western. Artus Films livre un vrai et grand travail éditorial et a mis toute sa passion pour le genre dans ce Mediabook, sans oublier l’incroyable beauté de la copie HD. Le menu principal est fixe et musical.

Le Retour de Ringo s’accompagne d’une présentation du film par le dessinateur et expert en cinéma de genre Curd Ridel (13’). Au cours de ce segment, notre interlocuteur, confortablement installé au coin du feu, dresse un portrait et la biographie du comédien principal Giuliano Gemma (1938-2013), tout en passant en revue quelques-uns des films les plus marquants. Les autres acteurs du film et le réalisateur Duccio Tessari (le cinéaste à l’oeillet rouge à la boutonnière, son porte-bonheur) sont également évoqués. Curd Ridel n’oublie pas d’aborder le film qui nous intéresse et qu’il adore, tout en croisant, bien que trop rapidement, le fond et la forme à travers un exposé passionné.

Nous retrouvons ensuite un entretien croisé du caméraman Sergio D’Offizi et de la comédienne Lorella De Luca. Le premier aborde Le Retour de Ringo d’un point de vue plutôt technique, tandis que la seconde, également la compagne du cinéaste, revient sur la genèse et le tournage de cette fausse suite d’Un pistolet pour Ringo (25’).

L’interactivité se clôt sur un diaporama de photos et d’affiches d’exploitation, ainsi que sur la bande-annonce.

L’Image et le son

Hormis un générique aux fourmillements épars et un grain argentique très appuyé, ce nouveau master HD du Retour de Ringo ne déçoit pas avec une propreté quasi-irréprochable et surtout une palette chromatique étincelante. Le cadre large est habilement restitué avec une profondeur de champ idéale, un piqué étonnant et une restauration soignée.

Deux options acoustiques au choix. On sélectionnera évidemment en priorité la version originale aux dialogues plus imposants et aux effets naturels, le vent notamment, plus percutants. La VF vaut le coup pour son doublage old-school et soigné. Dans les deux cas, les pistes LPCM Audio 2.0 sont suffisamment dynamiques et propres.

Crédits images : © Artus Films / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr