Test Blu-ray / Détour, réalisé par Edgar G. Ulmer

DÉTOUR (Detour), disponible le 12 septembre 2023 en DVD et Combo Blu-ray + DVD chez Elephant Films.

Acteurs : Tom Neal, Ann Savage, Claudia Drake, Edmund MacDonald, Tim Ryan, Esther Howard, Pat Gleason…

Scénario : Martin Mooney & Martin Goldsmith, d’après le roman de Martin Goldsmith

Photographie : Benjamin H. Kline

Musique : Leo Erdody

Durée : 1h08

Année de sortie : 1945

LE FILM

Un pianiste de bar va, malgré lui, usurper l’identité d’un automobiliste qui l’a pris en stop mais qui meurt subitement. Le propriétaire de la voiture, que sa famille n’a pas revu depuis des années, était l’héritier d’un millionnaire agonisant…

Détour, ou tout simplement Detour (sans accent) en version originale, est un de ces films qui font l’unanimité depuis sa sortie, autrement dit depuis 75 ans, qui n’a eu de cesse d’être mis en avant par les historiens ou les experts du cinéma, à l’instar de Martin Scorsese et de David Lynch, ce dernier ayant rtoujours avoué s’en être inspiré pour Lost Highway et Mulholland Drive. Tourné en seulement six jours avec un budget restreint de 100.000 dollars (le film est d’ailleurs considéré comme le premier film indépendant de l’histoire du cinéma américain), Détour, adapté du roman Detour : An Extraordinary Tale de Martin Goldsmith (qui transpose lui-même son livre sorti en 1939), est l’une des plus grandes références de la série B, où l’on retrouve à la barre l’un des spécialistes en la matière, Edgar Georg Ulmer (1904-1972). Metteur en scène, scénariste, producteur et directeur de la photographie américain d’origine austro-hongroise, ancien comédien et décorateur, celui que l’on connaît plus communément sous le nom d’Edgar G. Ulmer est l’auteur de moult films chéris par les spectateurs. L’ancien assistant de F.W. Murnau, Robert Siodmak, Billy Wilder et Fred Zinnemann, vient de mettre en scène L’Ile des péchés oubliés (1943) et Barbe Bleue (1944) quand il entreprend Détour, qui restera son chef d’oeuvre, sélectionné par la Bibliothèque du Congrès parmi le premier groupe de cent films américains méritant un effort particulier de conservation. C’est dire l’importance de cet éminent film noir, sec, resserré sur une durée de 68 minutes, frontal, violent, où les archétypes s’inversent et où l’urgence du tournage se reflète constamment sur l’atmosphère et les personnages.

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Test DVD / Le Démon de la chair, réalisé par Edgar G. Ulmer

LE DÉMON DE LA CHAIR (The Strange Woman) réalisé par Edgar G. Ulmer, disponible en DVD le 1er décembre 2020 chez Artus Films.

Acteurs : Hedy Lamarr, George Sanders, Louis Hayward, Gene Lockhart, Hillary Brooke, Rhys Williams, June Storey…

Scénario : Herb Meadow, Hunt Stromberg & Edgar G. Ulmer d’après le roman de Ben Ames Williams

Photographie : Lucien Andriot

Musique : Carmen Dragon

Durée : 1h36

Année de sortie : 1946

LE FILM

Dans le Maine du XIXème siècle, à Bangor, une femme fatale sème la mort autour d’elle, n’hésitant pas à demander à son soupirant de tuer son père s’il veut qu’elle cède à ses avances, et fait ainsi basculer le destin de trois hommes amoureux d’elle.

Edgar Georg Ulmer (1904-1972) est un cinéaste que les cinéphiles n’ont cessé de redécouvrir depuis sa mort. Metteur en scène, scénariste, producteur et directeur de la photographie américain d’origine austro-hongroise, ancien comédien et décorateur, celui que l’on connaît plus communément sous le nom d’Edgar G. Ulmer est l’auteur de moult films chéris par les spectateurs. Assistant de F.W. Murnau, Robert Siodmak, Billy Wilder, Fred Zinnemann, il passe à la mise en scène dans les années 1930 et signe notamment Le Chat noirThe Black Cat (1934) avec Boris Karloff et Bela Lugosi. Suivront plus tard, pêle-mêle, L’Ile des péchés oubliés (1943), Barbe Bleue (1944) avec John Carradine, Detour (1945), Les Pirates de Capri (1951), L’Homme de la planète X (1951) qui reflètent l’éclectisme et le caractère prolifique du réalisateur. Edgar G. Ulmer a alors près de quarante films et documentaires à son actif quand il entreprend Le Démon de la chairThe Strange Woman (1946), film noir et drame psychologique adapté d’un roman de Ben Ames Williams, produit et interprété par la sublimissime Hedy Lamarr, femme fatale, vénéneuse et à se damner dans un rôle taillé sur mesure, dans lequel elle enflamme l’écran et les sens.

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Test DVD / Le Bandit, réalisé par Edgar G. Ulmer

LE BANDIT (The Naked Dawn) réalisé par Edgar G. Ulmer, disponible en DVD le 23 mai 2019 chez Sidonis Calysta

Acteurs : Arthur Kennedy, Betta St. John, Eugene Iglesias, Charlita, Roy Engel, Tony Martinez, Francis McDonald…

Scénario : Julian Zimet

Photographie : Frederick Gately

Musique : Herschel Burke Gilbert

Durée : 1h19

Date de sortie initiale : 1955

LE FILM

Son complice abattu lors du hold-up d’un wagon de marchandises, Santagio trouve refuge dans une ferme isolée du Haut-Mexique. Si Manuelo Lopez, le fermier, projette de le tuer pour s’emparer du butin, il y renonce après que le bandit en fuite lui a sauvé la vie. Pendant ce temps, sa femme, Maria, fatiguée d’une vie de labeur et de misère, supplie le fugitif de l’emmener aussi loin que possible. Bientôt, au moment de son départ, Santagio voit arriver Gunt, son receleur, accompagné de policiers…

De l’avis quasi-unanime, Le BanditThe Naed Dawn est le chef d’oeuvre du cinéaste Edgar George Ulmer (1904-1972). D’origine autrichienne, ancien comédien et décorateur, assistant de F.W. Murnau, Robert Siodmak, Billy Wilder, Fred Zinnemann, il passe à la mise en scène dans les années 1930 et signe notamment Le Chat noirThe Black Cat (1934) avec Boris Karloff et Bela Lugosi. Suivront plus tard, pêle-mêle, L’Ile des péchés oubliés (1943), Barbe Bleue (1944) avec John Carradine, Detour (1945), Les Pirates de Capri (1951), L’Homme de la planète X (1951) qui reflètent l’éclectisme et le caractère prolifique du réalisateur. Edgar G. Ulmer a alors plus de quarante films et documentaires à son actif quand il entreprend Le Bandit. Un western qui n’en est pas vraiment un, mais plutôt un drame psychologique, très littéraire voire théâtral, qui renvoie aux œuvres de Tennessee Williams. Et c’est immense. Le Bandit n’a beau durer que 78 minutes, chaque seconde, chaque réplique, chaque séquence foudroient le spectateur. Pas étonnant que la critique européenne et les cinéphiles purs et durs comme François Truffaut et Bertrand Tavernier aient rapidement élevé ce film comme l’un des plus fondamentaux, riches et passionnants des années 1950.

Au Mexique, deux paysans, Santiago et Vicente, désillusionnés par la révolution, deviennent bandits et dévalisent un wagon de marchandises stationné en gare de Matamoros. Vicente est, néanmoins, mortellement atteint par un veilleur de nuit. Santiago assomme celui-ci et fuit avec son complice. Il demeure auprès de Vicente jusqu’à son ultime soupir, se comportant auprès de lui comme son confesseur. Il finit par trouver refuge chez un couple de jeunes fermiers, Manuel et Maria. Aidé de Manuel, Santiago délivre le butin – quatre caisses de montres-bracelets – à Guntz, un agent des douanes corrompu, et qui refuse de lui donner la part dévolue à Vicente. Plus tard, Maria est victime des brutalités de son époux, attiré par l’argent de Santiago. Elle cherche alors à fuir avec le bandit.

D’entrée de jeu, Edgar G. Ulmer s’éloigne de tous les stéréotypes liés au western. Si son personnage principal est mexicain et arbore un sombrero, tous les décors qui l’entourent contrastent avec les clichés habituels. Si les chevaux sont présents, les vieilles bagnoles au capot poussiéreux sont là aussi. Les armes apparaissent, mais pas de duel au soleil ici, la loi de l’Ouest a laissé la place à la loi de la jungle. Santiago, merveilleusement interprété par le grand et trop souvent oublié Arthur Kennedy (Les Affameurs d’Anthony Mann, L’Ange des maudits de Fritz Lang) passe de tableau en tableau, comme de scène en scène avec une dimension quasi-théâtrale, principalement en huis clos, qui reflète l’enfermement irrémédiable du personnage (ou comment Ulmer use du Technicolor comme du N&B au temps de l’expressionnisme allemand), malgré ses désirs de liberté.

Le premier acte détonne puisque Santiago se démarque des bandits typiques du western en soutenant son camarade Vicente dans sa lente agonie. En soutenant délicatement son complice et ami jusqu’à son dernier souffle, allant même lui chercher une couverture pour le réconforter et lui apporter une dernière once de chaleur, Santiago est montré comme un être généreux, humain. Vicente mourra en souriant, sur une lyrique partition d’Herschel Burke Gilbert. Dans la seconde partie, Santiago rencontre Manuel et Maria, jeune couple qui tente de survivre grâce à leur petit lopin de terre. Manuel est un homme faible et frustré, qui s’en prend violemment à sa femme. Cette dernière, « donnée » à son époux, rêve de s’enfuir et d’échapper à cette vie monotone, qui la condamne à s’occuper de la cuisine, du ménage. Sachant que la naissance d’un enfant enterrerait définitivement ses espoirs d’évasion, Maria – magnifique Betta St John – s’éprend rapidement de Santiago, qui représente à ses yeux la liberté et l’indépendance dont elle rêve. Edgar G. Ulmer instaure alors une tension sexuelle palpable, en jouant sur les corps fiévreux et en sueur, à l’instar d’Elia Kazan dans Un tramway nommé désir (1951).

Ce qu’il y a de remarquable dans Le Bandit, c’est la densité de son sujet, la richesse de ses thématiques, le tout exploré, trituré et analysé durant seulement 1h20. Roller-coaster d’émotions, Le Bandit joue avec l’empathie des personnages. Ni forcément sympathiques, ni détestables, les trois protagonistes sont montrés de façon brute, dans leur complexité, avec leurs bons comme leurs mauvais côtés. Quitte à vivre, les personnages le souhaitent de la meilleure façon possible, le pardon est accessible et s’il faut mourir, que cela se fasse de la façon la plus douce possible, peut-être même secrètement, au pied d’un arbre.

Le final, somptueux, inattendu, poétique, mais pourtant inévitable, clôt cette tragédie dans une explosion de sérénité. Immense chef d’oeuvre absolu de tous les temps.

LE DVD

Le test du DVD du Bandit, disponible chez Sidonis Calysta, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Le Bandit était déjà sorti en 2013 dans la collection spécialisée de Sidonis Calysta. L’éditeur reprend les mêmes interventions proposées alors sur la galette éditée il y a six ans. Toutefois, celle de Bertrand Tavernier, qui durait alors 13 minutes, est ici rallongée de 25 minutes ! Cela permet donc au réalisateur et historien du cinéma, de s’étendre plus sur ce film qu’il adule et dont il se remémore la découverte au cinéma à l’occasion d’une ressortie dans une salle parisienne, Le Floride, film qu’il était retourné voir plusieurs fois la même semaine. Son engouement est réel, toujours aussi enthousiaste et ses propos reflètent une passion ici débordante de sincérité. Bertrand Tavernier revient en détails sur ses longues recherches effectuées pour trouver qui était ce fameux Julian Zimet, qui avait écrit ce western singulier. Puis, le fond et la forme se croisent jusqu’à la dernière seconde de cette intervention, durant laquelle Bertrand Tavernier passe également en revue le casting.

Avec sa présentation de huit minutes, Patrick Brion a évidemment peu le temps de nous donner quelques propos inédits sur Le Bandit. L’historien du cinéma est certes aussi passionné par le film d’Edgar G. Ulmer que son confrère, mais en dehors de quelques redites sur les sujets abordés dans Le Bandit, il n’y a ici rien de particulièrement intéressant.

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce et une galerie de photos.

L’Image et le son

Authoring différent, mais master identique ! On retrouve donc les spécificités de l’ancienne copie, à savoir une colorimétrie fanée, bleutée, un piqué complètement émoussé, des poussières, des griffures, des plans flous et une gestion des contrastes totalement aléatoire qui dénaturent toutes les séquences sombres. En revanche, le 16/9 est enfin disponible alors que le format n’était disponible qu’en 4/3 sur l’édition 2013.

La version française est couverte, lourde, étouffée, accompagnée d’un souffle omniprésent du début à la fin. Tendez bien l’oreille si vous avez opté pour cette option. La piste anglaise est heureusement plus claire avec des dialogues distincts et des effets plus vifs. Les sous-titres français ne sont pas imposés.

Crédits images : © Sidonis Calysta / Universal Pictures / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr