Test DVD / Les Chatouilles, réalisé par Andréa Bescond & Eric Métayer

LES CHATOUILLES réalisé par André Bescond et Eric Métayer, disponible en DVD le 14 mars 2019 chez Orange Studio

Acteurs : Andréa Bescond, Karin Viard, Clovis Cornillac, Pierre Deladonchamps, Grégory Montel, Carole Franck, Gringe, Ariane Ascaride…

Scénario : Andréa Bescond, Eric Métayer

Photographie : Pierre Aïm

Musique : Clément Ducol

Durée : 1h38

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Odette a huit ans, elle aime danser et dessiner. Pourquoi se méfierait-elle d’un ami de ses parents qui lui propose de « jouer aux chatouilles » ? Une fois devenue adulte, Odette libère sa parole, et se plonge corps et âme dans sa carrière de danseuse, dans le tourbillon de la vie…

Il est temps de parler, de s’ouvrir, d’exploser pour le personnage principal des Chatouilles. Odette, la trentaine, ne peut plus contenir ce qu’elle a gardé dans sa tête et dans son corps depuis plus de vingt ans. Cette histoire, c’est celle d’Andréa Bescond, danseuse, comédienne, metteuse en scène, scénariste et réalisatrice. Après l’avoir interprété au théâtre dans la pièce autobiographique Les Chatouilles (ou la danse de la colère) mise en scène par Eric Métayer et jouée au Petit Montparnasse, ce qui lui a valu le Molière seule en scène en 2016, Andréa Bescond transpose son « personnage » au cinéma. Résultat, près de 400.000 entrées dans les salles en novembre 2018, le César de la meilleure actrice dans un second rôle pour Karin Viard et celui de la meilleure adaptation pour Andréa Bescond et Eric Métayer. Les Chatouilles est une œuvre solaire et optimiste sur un sujet pourtant très grave et délicat, celui de la pédophilie et du trauma des victimes. Egalement Prix Nouveau Talent Théâtre SACD et Prix Jeune Talent Théâtre de l’Académie française, ce premier long métrage empli de sensibilité, étonne par ses partis pris poétiques et ambitieux, qui reflètent le traumatisme d’une jeune femme violée par un ami de la famille de ses parents, mais aussi et surtout son désir de s’en sortir et d’embrasser la vie.

Victime de violences sexuelles durant son enfance, Andréa Bescond a tout mis dans Les Chatouilles. Elle se livre corps et âme, danse pour (sur)vivre, pour trouver l’énergie nécessaire et la force pour enfin parler à ses parents sur ce qui se passait dans sa chambre à l’insu de tous. La réalisatrice endosse elle-même le rôle d’Odette adulte. Au-delà de sa performance faite d’énergie et de fureur, la ressemblance de la comédienne avec Karin Viard ajoute une authenticité inattendue. Cette dernière trouve l’un de ses meilleurs rôles depuis quinze ans et le troisième César de sa carrière n’est pas usurpé. La dernière séquence fait d’ailleurs froid dans le dos et s’imprime dans les mémoires. De son côté, Clovis Cornillac signe une prestation bouleversante dans le rôle du père d’Odette. L’excellent Pierre Deladonchamps endosse le personnage de l’ogre du film, monstrueux avec sa voix douce qui terrifie Odette. C’est aussi l’occasion d’évoquer l’actrice Carole Franck, dont le nom n’évoque peut-être pas grand-chose, mais dont la présence est pourtant toujours très appréciée. Vue chez Abdellatif Kechiche, Cédric Klapisch, Mia Hansen-Løve, Michael Haneke, François Ozon, Jacques Maillot et Albert Dupontel, Carole Franck interprète ici la psychologue qui aidera Odette à trouver les mots, le moment et à canaliser sa force.

Certaines idées oniriques de mise en scène peuvent paraître déplacées ou inappropriées, à l’instar de l’envol de la danseuse sur fond de Lac des Cygnes. Pourtant ces fantasmes qui s’immiscent dans la vie d’Odette, avec les souvenirs qui prennent forme, qui mutent, qui sont triturés par la conscience qui préfèrent enjoliver quelque peu un récit sordide, témoignent de la volonté d’Odette de trouver un moyen de se libérer de ses chaînes, tout comme celle de la réalisatrice de proposer aux spectateurs une expérience de cinéma. Sensible, à fleur de peau, fragile comme du cristal, Les Chatouilles foudroie par son désir de communiquer sur un sujet qui dérange, sans aucun pathos. Lumineux, solaire même, ce film indispensable montre ce besoin irrépressible pour les victimes de parler, sous peine de se noyer et de perdre pied, de trouver le bon interlocuteur, de faire la ou les bonnes rencontres, pour s’extirper de l’obscurité et des enfers où ils ont été plongés.

Les Chatouilles est un témoignage viscéral, qui espérons-le, saura donner confiance à celui ou à celle qui aurait subi pareilles ignominies, mais aussi encourager les autres à être attentif face à ce fléau omniprésent (plus de 150.000 enfants violés chaque année en France), tout comme à prêter une oreille attentive à la personne qui voudrait bien se confier à eux.

LE DVD

Le test du DVD des Chatouilles, disponible chez Orange Studio, a été réalisé à partir d’un check-disc. Le menu principal est animé et musical.

Malheureusement, nous ne disposons que d’un minuscule module de 5 minutes, réalisé à l’occasion de la présentation des Chatouilles au Festival de Cannes. D’un côté, Karin Viard et Clovis Cornillac s’expriment sur le film, et de l’autre Andréa Bescond et Eric Métayer évoquent les thèmes et l’accueil des Chatouilles, les larmes aux yeux. Quelques images de la montée des marches viennent illustrer l’ensemble.

L’Image et le son

Si le rendu n’est pas optimal en raison d’une définition moins ciselée sur les scènes en intérieur, le master SD des Chatouilles ne manque pas d’attraits… La clarté est bienvenue, la colorimétrie chatoyante, et le piqué affûté sur toutes les séquences en extérieur. Remarqué par ses photographies des films de Mathieu Kassovitz (La Haine, Assassin(s)) ou bien encore Polisse, le chef opérateur Pierre Aïm voit ses partis pris esthétiques savamment respectés via un DVD de haute volée. Le cadre fourmille de détails, les contrastes affichent une constante solidité et l’encodage emballe solidement l’ensemble.

Les Chatouillesrepose essentiellement sur les dialogues. La piste Dolby Digital 5.1 distille les voix des comédiens avec efficacité, tandis que les latérales s’occupent de la musique du film. Une spatialisation concrète, immersive et efficace, à l’instar des séquences de musique urbaine et des percussions tribales qui réveillent le caisson de basses . Une version Stéréo, ainsi qu’une piste Audiodescription et des sous-titres français destinés au public sourd et malentendant sont également disponibles.

Crédits images : ©
Stéphanie Branchu – Les Films du Kiosque / Orange Studio / Captures DVD : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr

Test DVD / Guy, réalisé par Alex Lutz

GUY réalisé par Alex Lutz, disponible en DVD le 9 janvier 2019 chez Studiocanal

Acteurs : Alex Lutz, Tom Dingler, Pascale Arbillot, Brigitte Roüan, Dani, Nicole Calfan, Élodie Bouchez, Bruno Sanches…

Scénario : Alex Lutz, Thibault Segouin, Anaïs Deban

Photographie : Mathieu Le Bothlan

Musique : Vincent Blanchard, Romain Greffe

Durée : 1h37

Date de sortie initiale : 2018

LE FILM

Gauthier, un jeune journaliste, apprend par sa mère qu’il serait le fils illégitime de Guy Jamet, un artiste de variété française ayant eu son heure de gloire entre les années 60 et 90. Celui-ci est justement en train de sortir un album de reprises et de faire une tournée. Gauthier décide de le suivre, caméra au poing, dans sa vie quotidienne et ses concerts de province, pour en faire un portrait documentaire.

C’est la grande surprise de la fin d’été 2018. Guy, second long métrage réalisé par Alex Lutz est un documenteur passionnant, troublant, fascinant et surtout merveilleusement interprété. Né à Strasbourg en 1978, Alexandre Lutz aka Alex Lutz, fait ses débuts au cinéma en 2008 dans Les Femmes de l’ombre de Jean-Paul Salomé. Parallèlement à son succès sur scène, il apparaît dans OSS 117 : Rio ne répond plus (2009), puis dans moult comédies pas franchement réussies (euphémisme) comme La Croisière, Bowling, Turf, Les Visiteurs : La Révolution, Les Aventures de Spirou et Fantasio. Pourtant, malgré la qualité « relative » de ces films, Alex Lutz a toujours brillé à chaque apparition. Pour son spectacle sobrement intitulé Alex Lutz, il se voit récompenser par le Molière de l’humour en 2016. A la télévision, depuis 2012 sur Canal+, il interprète la blonde du tandem Catherine et Liliane, aux côtés de son comparse l’excellent Bruno Sanches, dans la revue de presse du Petit Journal de Yann Barthès. En 2015, il passe tout naturellement de l’autre côté de la caméra avec sa première mise en scène, Le Talent de mes amis, qui passe complètement inaperçu. Trois ans plus tard, débarque ce Guy dont on n’attendait rien ou pas grand-chose, et qui pourtant s’impose comme une très grande réussite. En reprenant le personnage d’un de ses sketchs joué à la cérémonie des Molières, Alex Lutz explose littéralement à l’écran. Un rôle qui le place en grand favori pour le César du meilleur acteur. Le film est d’ailleurs nommé dans trois autres catégories, meilleur réalisateur, meilleur film et meilleur scénario original.

Après avoir vu le film, le personnage de Guy nous accompagne. Son lent débit, ses doigts qui tiennent une cigarette fine, son regard qui semble toujours perplexe, sa bouche souvent ouverte (on a l’impression de voir André Dussollier), ses gestes ralentis, ses tâches de vieillesse (incroyable maquillage qui nécessitait plus de 4 heures pour transformer Alex Lutz), son dos courbé, ses cheveux blancs qui volent au vent. Guy c’est l’incarnation d’une idole qui a vieilli en même temps que ses fans. Si le film est souvent ponctué de répliques drôles et vachardes, Guy est une œuvre furieusement mélancolique. La tirade finale sur le temps qui passe, sur la postérité, sur le souvenir et la transmission foudroie le spectateur en plein coeur et il est alors difficile de retenir ses larmes.

Sous couvert d’un vrai documentaire sur une fausse star de la chanson française (inspiré d’Herbert Léonard, Guy Marchand, Michel Delpech, Julien Clerc, Frank Michael et bien d’autres), Alex Lutz, également auteur avec Vincent Blanchard et interprète des chansons originales créées spécialement pour le film (un vrai répertoire), s’interroge sur la brièveté de l’existence, en nous donnant envie de profiter au maximum du peu de temps qui nous est imparti. Film étonnamment riche et complexe, Guy délivre son message de façon subliminale, tandis que nous admirons le jeu d’Alex Lutz, qui nous fait croire à ce personnage, y compris une fois le film terminé. L’acteur-réalisateur s’entoure de solides comédiens, la géniale et trop rare Pascale Arbillot dans le rôle de la compagne dévouée et qui équilibre son compagnon, Tom Dingler qui incarne Gauthier, dont le spectateur adopte le point de vue du début à la fin, celui d’un fils qui découvre son père (qui ne sait rien de cette paternité), qui l’observe, qui le découvre, qui apprend à l’aimer. Nicole Calfan, Dani, Elodie Bouchez, Brigitte Roüan, Bruno Sanchez, ainsi que quelques vedettes de la radio et de la télévision participent à l’authenticité du film, tout comme les reconstitutions des shows à la Maritie et Gilbert Carpentier façon Podium.

Guy est le portrait d’un artiste quelque peu oublié des médias, qui n’a pourtant jamais cessé de travailler. C’est aussi une déclaration d’Alex Lutz envers son public, puisqu’on y ressent une envie folle d’aimer et d’être aimé. Pour résumer, Guy, présenté à la Semaine de la Critique du festival de Cannes, est un vrai petit miracle, un futur film culte et probablement le meilleur biopic jamais consacré à un artiste français.

LE DVD

Guy s’est malheureusement soldé par un échec dans les salles, d’où l’absence d’édition HD pour ce titre. Le DVD repose dans un boîtier Amaray classique de couleur noire. La jaquette reprend le visuel de l’affiche. Le menu principal est fixe et musical.

Pas grand-chose en guise de suppléments…quatre teasers d’une minute chacun, qui font également office de scènes coupées avec Guy à la radio, avec ses fans, avec Sophie et avec son webmaster.

L’Image et le son

A l’instar d’un réel documentaire ou d’un reportage pris sur le vif, le film d’Alex Lutz est la plupart du temps filmé à l’épaule. La copie est quasi exempte de défauts. Le piqué est constamment acéré sur les plans rapprochés, la colorimétrie est vive, la clarté fort agréable. Seules les séquences tournées en basse lumière apparaissent moins définies. Les contrastes sont soignés, le relief est indéniable et les séquences diurnes n’ont rien à envier à un transfert HD traditionnel.

Contrairement à ce que l’on pouvait attendre, la piste Dolby Digital 5.1 instaure quelques petites ambiances latérales au moment des séquences de concert ou même en extérieur. Les dialogues sont clairs et se détachent sans mal sur la centrale. La stéréo est également de fort bon acabit et dynamique à souhait. L’éditeur joint également les sous-titres français destinés au public sourd et malentendant, ainsi qu’une piste Audiodescription.

Crédits images : © Apollo Films / Studiocanal / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr