Test Blu-ray / Ariane, réalisé par Billy Wilder

ARIANE (Love in the Afternoon) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD, Blu-ray et Édition Coffret Ultra Collector – Blu-ray + DVD + Livre 18 novembre 2020 chez Carlotta Films.

Acteurs : Gary Cooper, Audrey Hepburn, Maurice Chevalier, John McGiver, Van Doude, Lise Bourdin…

Scénario : Billy Wilder & I.A.L. Diamond d’après le roman Ariane, jeune fille russe de Claude Anet (1924)

Photographie : William C. Mellor

Musique : Franz Waxman

Durée : 2h10

Date de sortie initiale : 1957

LE FILM

À Paris, le détective privé Claude Chavasse est spécialisé dans les affaires d’adultère. Sa fille, Ariane, est fascinée par son travail et plus particulièrement par le cas du playboy Frank Flannagan. Lorsqu’Ariane surprend un client de son père menaçant de tuer Flannagan, elle court prévenir ce dernier du danger qui l’attend. Quand le client jaloux débarque à l’hôtel, il trouve le millionnaire en compagnie d’Ariane et non de sa femme infidèle. Intrigué, Flannagan organise un rendez-vous avec elle le lendemain après-midi…

ArianeLove in the Afternoon n’est certes pas un chef d’œuvre comme le seront les films à venir de Billy Wilder, mais son treizième long-métrage annonce en grande pompe la deuxième partie de la carrière hollywoodienne du cinéaste basée sur l’affrontement des sexes, le politiquement incorrect, l’apologie du mensonge, avec une joie communicative de jouer avec la censure. En 1957, trois ans après le succès international de Sabrina, Billy Wilder fait à nouveau appel à Audrey Hepburn pour Love in the Afternoon, plus connu par le prénom du personnage principal, Ariane. En signant ce remake du film éponyme de Paul Czinner réalisé en 1931, lui-même tiré du roman de Claude Anet, Ariane, une jeune fille russe, Billy Wilder souhaite rendre hommage au cinéma de sa jeunesse ainsi qu’à son mentor Ernst Lubitsch. Les succès de Boulevard du crépuscule (1950), Stalag 17 (1953), Sabrina (1954) et Sept ans de réflexion (1955), permettent à Billy Wilder d’être l’auteur complet d’Ariane. Il est ainsi scénariste (pour la première fois avec I.A.L. Diamond), producteur et réalisateur, il choisit lui-même ses comédiens et se place en tant qu’auteur à part entière à l’intérieur même du système hollywoodien. Avec Ariane, il impose le N&B renvoyant à ses premiers films, témoigne de son amour pour Ernst Lubitsch avec qui il fit ses premières armes, choisit Paris comme lieu d’action et impose encore un rythme et des thèmes qui deviendront récurrents dans ses œuvres ultérieures comme La Garçonnière, Irma la Douce et Avanti!.

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Test Blu-ray / Uniformes et jupon court, réalisé par Billy Wilder

UNIFORMES ET JUPON COURT (The Major and the Minor) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray 4 novembre 2020 chez Rimini Editions.

Acteurs : Ginger Rogers, Ray Milland, Rita Johnson, Robert Benchley, Diana Lynn, Edward Fielding, Frankie Thomas, Raymond Roe…

Scénario : Charles Brackett & Billy Wilder d’après la pièce de Edward Childs Carpenter et l’histoire de Fannie Kilbourne

Photographie : Leo Tover

Musique : Robert Emmett Dolan

Durée : 1h36

Date de sortie initiale : 1942

LE FILM

Après avoir tenté sa chance à New York, Susan Applegate souhaite rentrer chez elle dans l’Iowa. Afin de bénéficier d’un billet de train à prix réduit, elle se fait passer pour une adolescente. Traquée par les contrôleurs, elle trouve refuge auprès du major Philip Kirby, qui, persuadé qu’elle est mineure, décide de lui venir en aide.

Contrairement à ce que l’on a souvent pensé, Uniformes et jupon courtThe Major and the Minor (1942) n’est pas le premier long-métrage mis en scène par Billy Wilder (1906-2002). En effet, son premier coup d’essai derrière la caméra demeure Mauvaise graine, interprété par la jeune Danielle Darrieux, qu’il co-réalise à Paris avec Pierre Mingand en 1934, juste après avoir fui l’Allemagne nazie et dans lequel on retrouvait déjà moult motifs qui caractériseront son œuvre à venir, notamment une mise en scène constamment inventive et un rythme trépidant. Mauvaise graine n’était qu’une étape, une escale, puisque Billy Wilder parvient à s’envoler pour les Etats-Unis sous les conseils et avec l’aide du cinéaste Joe May (La Maison aux sept pignons, pionnier du cinéma allemand). Sur le sol de l’Oncle Sam, Billy Wilder, bien qu’ayant encore du mal avec la langue anglaise, devient scénariste. Outre Musique dans l’airMusic in the Air de Joe May qui lui a permis de laisser l’Europe derrière lui, il s’associe avec Charles Brackett et signent tous les deux l’histoire de La Huitième Femme de Barbe-BleueBluebeard’s Eighth Wife d’Ernst Lubitsch en 1938. C’est une révélation et les deux hommes ne se quitteront plus jusqu’à Boulevard du crépusculeSunset Boulevard (1950). Après Cet âge ingratThat Certain Age (1938) d’Edward Ludwig, La Baronne de minuit Midnight (1939) de Mitchell Leisen, Ninotchka (1939) d’Ernst Lubitsch, What a Life (1939) de Theodore Reed, Éveille-toi mon amour Arise, my love (1940) de Mitchell Leisen, Boule de feuBall of Fire (1941) de Howard Hawks et Par la porte d’orHold Back the Dawn (1941) de Mitchell Leisen, Billy Wilder obtient le feu vert pour mettre en scène son premier long-métrage américain, Uniformes et jupon court, pour lequel il demande une fois de plus à son complice Charles Brackett d’écrire le scénario avec lui, en s’inspirant d’une pièce d’Edward Childs Carpenter. C’est un petit coup de maître, un film matriciel, celui d’où l’une des plus grandes filmographies de l’histoire cinéma américain est partie. Si rétrospectivement The Major and the Minor apparaît subsidiaire, cette comédie n’en reste pas moins corrosive et culottée, puisque pour reprendre les mots de Billy Wilder lui-même « il s’agit du premier film américain qui traite clairement de pédophilie », où suite à un quiproquo, un homme de 35 ans se trouve sexuellement attiré par ce qu’il pense être une jeune fille de 12 ans…Contre toute attente, Billy Wilder est passé à travers les mailles du filet de la censure du tristement célèbre Code Hays qui faisait de ravages, en misant avant tout sur le caractère divertissant d’un vrai postulat de vaudeville, tout en faisant confiance à l’intelligence des spectateurs qui n’y verront avant tout qu’une confusion de la part de protagonistes idiots qui entourent le personnage principal. Toujours est-il qu’Uniformes et jupon court est une comédie truculente, dans laquelle brille Ginger Rogers, le véritable premier astre de la carrière cinématographique de Billy Wilder, définitivement lancé dans l’arène des cinéastes hollywoodiens.

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Test Blu-ray / Spéciale première, réalisé par Billy Wilder

SPÉCIALE PREMIÈRE (The Front Page) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray le 16 septembre 2020 chez Rimini Editions.

Acteurs : Jack Lemmon, Walter Matthau, Vincent Gardenia, Susan Sarandon, Allen Garfield, Charles Durning, Austin Pendleton, Carol Burnett…

Scénario : Billy Wilder, I.A.L. Diamond d’après la pièce The Front Page de Ben Hecht & Charles MacArthur

Photographie : Jordan Cronenweth

Durée : 1h44

Date de sortie initiale : 1974

LE FILM

Rédacteur en chef d’un journal, Walter Burns est en colère contre Hildy Johnson, son meilleur journaliste, qui, absent, risque de lui faire manquer l’exécution d’un dangereux assassin. Mais le reporter désire abandonner le journalisme et toute recherche de scoop, et préfère se marier. Walter va tout faire pour qu’Hildy revienne sur sa décision.

Quatre ans après le rejet total de La Vie privée de Sherlock HolmesThe Private Life of Sherlock Holmes et deux ans après l’accueil tiède d’Avanti !, aussi bien de la part de la critique que du public, Billy Wilder, qui a illuminé le cinéma américain pendant près de vingt ans, sent le vent tourner. Pourtant, le cinéaste ne souhaite pas se laisser emporter par cette nouvelle vague qui secoue l’industrie hollywoodienne depuis l’arrivée sur les écrans d’Easy Rider de Peter Fonda à la fin des années 1960. Curieusement, il jette son dévolu sur une commande (rejetée par Joseph L. Mankiewicz), une nouvelle adaptation de la pièce The Front Page de Ben Hecht et Charles MacArthur, écrite près de cinquante ans auparavant et qui avait déjà connu deux adaptations au cinéma. La première, The Front Page réalisée en 1931 par Lewis Milestone, la seconde en 1940 par Howard Hawks, La Dame du vendrediHis Girl Friday, mettant en vedette Cary Grant dans le rôle de Walter et Rosalind Russell. Billy Wilder y a certainement vu une aubaine pour se refaire une santé au box-office, tout en sachant que la mouture d’Howard Hawks, déjà considérée comme un classique, suffisait largement. Néanmoins, le réalisateur se plonge dans son scénario avec l’aide de son acolyte – depuis Certains l’aiment chaud – I.A.L. Diamond, qui avait d’ailleurs écrit Chérie, je me sens rajeunirMonkey Business (1952) du même Howard Hawks. S’il apparaît complètement anachronique quand il fait son apparition au milieu des années 1970, Spéciale première n’a cessé d’être redécouvert. Certes, The Front Page de Billy Wilder n’est pas un chef d’oeuvre et quoi qu’on en dise restera toujours un film mineur dans sa carrière, mais cette comédie trépidante n’est pas un film raté comme il a été trop longtemps considéré. Billy Wilder y retrouvait le tandem Jack Lemmon – Walter Matthau pour la seconde fois huit ans après La Grande combineThe Fortune Cookie et sept ans avant leur ultime collaboration avec Victor la gaffeBuddy Buddy, impensable remake de L’Emmerdeur d’Edouard Molinaro avec lequel le cinéaste allait tirer sa révérence. Dans l’état, Spéciale première, l’antépénultième long-métrage de Billy Wilder, demeure un divertissement de haute volée, magistralement interprété et qui rappelle parfois les anciens typhons comiques de son auteur.

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Test Blu-ray (édition Rimini Editions) / Avanti !, réalisé par Billy Wilder

AVANTI ! réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray le 17 mars 2020 chez Rimini Editions.

Acteurs : Jack Lemmon, Juliet Mills, Clive Revill, Edward Andrews, Gianfranco Barra, Franco Angrisano, Pippo Franco…

Scénario : Billy Wilder, I.A.L. Diamond

Photographie : Luigi Kuveiller

Musique : Carlo Rustichelli

Durée : 2h15

Date de sortie initiale : 1972

LE FILM

Riche homme d’affaires américain, Wendell Armbruster III débarque sur l’île d’Ischia, en Italie, pour y récupérer la dépouille de son père. Il découvre que celui-ci avait une maîtresse, qu’il retrouvait chaque été depuis dix ans, et dont la fille Pamela loge dans le même hôtel que lui. Wendell souhaite à tout prix éviter le scandale que provoquerait une telle révélation.

Considéré à juste titre comme l’un des plus grands réalisateurs du cinéma américain, Billy Wilder excelle dans la comédie, utilisant un ton moraliste et caricatural. Il n’hésite pas à insérer des sujets audacieux, qu’il traite avec légèreté. Il signe des chefs d’œuvre tels que Sept ans de réflexion, Certains l’aiment chaud, La Garçonnière, Un, deux, trois, Irma la Douce, Embrasse-moi idiot ou encore La Grande Combine.

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Test Blu-ray / La Valse de l’empereur, réalisé par Billy Wilder

LA VALSE DE L’EMPEREUR (The Emperor Waltz) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray le 19 novembre 2019 chez Rimini Editions

Acteurs : Bing Crosby, Joan Fontaine, Roland Culver, Lucile Watson, Richard Haydn, Harold Vermilyea, Sig Ruman, Julia Dean, Bert Prival…

Scénario : Charles Brackett, Billy Wilder

Photographie : George Barnes

Musique : Victor Young

Durée : 1h46

Date de sortie initiale : 1948

LE FILM

Virgil Smith, voyageur de commerce, parcourt les routes d’Autriche en compagnie de son chien Buttons. Il espère y vendre des phonographes, et aimerait compter l’Empereur François-Joseph parmi ses clients. Le hasard met sur son chemin la comtesse Johanna von Stulzenberg, dont le caniche mord Buttons. Smith exige des excuses, qui lui sont refusées…

La Valse de l’empereurThe Emperor Waltz est comme qui dirait le vilain petit canard dans la filmographie de Billy Wilder. Renié par le réalisateur et son coscénariste Charles Brackett, le film apparaît après Death Mills, documentaire sur la découverte des camps de concentration nazis par les Alliés en 1945, où la famille de Billy Wilder a été exterminée, et Le Poison, drame psychologique prenant et difficile, réaliste et viscéral sur l’alcoolisme, sorti la même année. Comme s’il avait cherché malgré lui à s’échapper dans un univers diamétralement opposé, on le retrouve aux manettes d’une comédie-musicale qui prend la forme d’une opérette viennoise. Enorme meringue aux couleurs étincelantes (le premier film en couleur du réalisateur), La Valse de l’empereur a beau être parfois marqué par quelques touches ironiques et cyniques emblématiques de son auteur, il n’en demeure pas moins franchement anecdotique dans la carrière du maître. Mais le spectacle est bel et bien assuré.

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Test Blu-ray / Le Poison, réalisé par Billy Wider

LE POISON (The Lost Weekend) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray le 1er octobre 2019 chez Rimini Editions

Acteurs : Ray Milland, Jane Wyman, Phillip Terry, Howard Da Silva, Doris Dowling, Frank Faylen, Mary Young, Anita Sharp-Bolster…

Scénario : Billy Wilder, Charles Brackett d’après le roman de Charles R. Jackson

Photographie : John F. Seitz

Musique : Miklós Rózsa

Durée : 1h41

Date de sortie initiale : 1945

LE FILM

Incapable d’écrire une ligne depuis des années, l’écrivain Don Birman noie son chagrin dans la boisson. Il doit partir en week-end avec son frère Wick et sa fiancée. Mais la perspective de passer quelques jours sans une goutte d’alcool lui est insupportable…

Le PoisonThe Lost Weekend n’est que le quatrième long métrage de Billy Wilder, après Mauvaise graine (1934), réalisé en France avec Danielle Darrieux, Uniformes et jupons courts (1942), Les Cinq Secrets du désert (1943) et l’immense Assurance sur la mort (1944). En 1945, le cinéaste met en scène un court-métrage Death Mills, pour le compte de la U.S. Army Signal Corps, un documentaire sur la découverte des camps de concentration nazis par les Alliés à la fin de la guerre. La même année sort aux Etats-Unis Le Poison, d’après le roman The Lost Weekend écrit en 1944 par Charles R. Jackson. Tout d’abord peu confiant en raison des catastrophiques projections test durant lesquelles les spectateurs ont rejeté le film en masse, le cinéaste est finalement rassuré devant l’engouement de la critique et du box-office qui s’affole. The Lost Weekend n’est pas une comédie et ne possède pas ce ton grinçant qui fera la marque de fabrique de son auteur dans les années à venir, mais il s’agit bel et bien d’un drame psychologique prenant et difficile, réaliste et viscéral sur l’alcoolisme. Billy Wilder est le premier à aborder ce sujet comme une maladie et offre au comédien britannique Ray Milland (1907-1986) l’un des plus grands rôles de sa vie.

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Test Blu-ray / Un, Deux, trois, réalisé par Billy Wilder

UN, DEUX, TROIS (One, Two, Three) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray le 4 juin 2019 chez Rimini Editions

Acteurs : James Cagney, Horst Buchholz, Pamela Tiffin, Arlene Francis, Howard St. John, Hanns Lothar, Leon Askin, Liselotte Pulver…

Scénario : Billy Wilder, I.A.L. Diamond d’après la pièce de théâtre de Ferenc Molnár

Photographie : Daniel L. Fapp

Musique : André Previn

Durée : 1h48

Date de sortie initiale : 1961

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Test Blu-ray / Témoin à charge, réalisé par Billy Wilder

TÉMOIN À CHARGE (Witness for the Prosecution) réalisé par Billy Wilder, disponible en DVD et Blu-ray le 5 février 2019 chez Rimini Editions

Acteurs : Tyrone Power, Marlene Dietrich, Charles Laughton, Elsa Lanchester, John Williams, Torin Thatcher, Una O’Connor, Henry Daniel, lIan Wolfe…

Scénario : Billy Wilder, Harry Kurnitz, Lawrence B. Marcus d’après la nouvelle et la pièce de théâtre d’Agatha Christie

Photographie : Russell Harlan

Musique : Matty Malneck

Durée : 1h56

Date de sortie initiale : 1957

LE FILM

A peine remis d’une crise cardiaque, Sir Wilfrid Robarts, brillant avocat londonien, accepte de défendre Leonard Vole, accusé d’avoir assassiné une riche veuve. Elément accablant : Vole est l’unique destinataire de l’héritage de la victime. Seule l’épouse de Vole, une mystérieuse allemande, pourrait le disculper. Elle va se révéler être un témoin à charge…

Quelle claque ! La filmographie de l’immense Billy Wilder regorge de titres exceptionnels, de films cultes, de chefs d’oeuvre, de grands moments et rares sont les opus moins inspirés, à part évidemment dans la dernière partie de sa carrière. Malgré son triomphe à sa sortie, Témoin à chargeWitness for the Prosecution n’en demeure pas moins méconnu et souvent dissimulé derrière des titres emblématiques comme Boulevard du crépuscule, Sept ans de réflexion et Certains l’aiment chaud tournés durant la même décennie. Si elle n’est pas l’oeuvre la plus représentative du réalisateur, Témoin à charge est pourtant un film de procès sensationnel, merveilleusement interprété par Charles Laughton, Marlene Dietrich et Tyrone Power, mis en scène avec virtuosité et une fluidité remarquable jusqu’au dénouement qui fait partie des plus grands twists de l’histoire du cinéma.

Sir Wilfrid Robarts, un brillant et expérimenté avocat spécialiste des causes perdues, sort d’un séjour prolongé à l’hôpital des suites d’un infarctus qui a failli le terrasser et doit, pour préserver sa santé, renoncer à s’occuper d’affaires criminelles trop stimulantes. C’est à ce moment que Leonard Vole, accusé du meurtre de madame French, vient demander son aide à ce ténor du barreau. Bien que l’affaire paraisse passionnante, Sir Wilfrid refuse de s’en occuper et conseille un autre avocat, Brogan-Moore, un de ses anciens élèves. Après le départ de Leonard Vole du bureau de Wilfrid, Christine Vole, la femme de Leonard, fait son apparition. Elle est son seul alibi pour le soir du meurtre. Son attitude très froide et désinvolte, ainsi que son rôle crucial dans l’affaire font changer Wilfrid d’avis, qui décide malgré les recommandations des médecins de s’occuper de cette affaire qui le fascine. Pensant qu’elle pourrait desservir son client, Wilfrid décide de ne pas faire témoigner Christine au procès, mais c’est l’accusation qui la fait témoigner. Elle explique alors qu’elle a menti aux policiers lors de son audition pour protéger son mari, et donne alors des éléments accablant ce dernier. À la suite de ces révélations, tout semble perdu pour Leonard.

A la base de Témoin à charge, il y a une nouvelle éponyme d’Agatha Christie publiée en 1925, adaptée en 1948 pour la BBC, avant de devenir une pièce de théâtre en 1953 que l’auteure transpose elle-même. Suite au succès gigantesque rencontré par Témoin à charge sur les planches (645 représentations rien qu’aux USA), les studios hollywoodiens s’arrachent les droits pour le cinéma. United Artists remporte la partie (contre une somme record) et confie la transposition à Billy Wilder. Ce dernier se fait plaisir derrière la caméra, mais aussi avec les « monstres » qu’il dirige. Charles Laughton (1899-1962) est fabuleux dans le rôle de sir Wilfrid Robarts. Le comédien britannique, qui avait d’ailleurs campé Hercule Poirot sur scène dans la pièce Alibi, démontre une fois de plus son talent immense pour composer des personnages inoubliables comme précédemment dans L’Île du docteur Moreau d’Erle C. Kenton, L’Extravagant Mr Ruggles de Leo McCarey, Quasimodo de William Dieterle et bien sûr Le Procès Paradine d’Alfred Hitchcock dans lequel il interprétait le juge Lord Thomas Horfield. Le premier tiers du film est centré uniquement sur lui, sur ses manies (l’utilisation du reflet dans le monocle en guise de lampe d’interrogatoire), son addiction pour les cigares (dissimulés dans sa canne) et l’alcool, ses répliques cyniques et ironiques, ainsi que sur sa relation avec l’infirmière (Elsa Lanchester, la véritable épouse de l’acteur) qui le surveille depuis son attaque cardiaque, au point de lui avoir fait installer un fauteuil-ascenseur pour l’économiser. Les dialogues, abondants, sont admirables, drôles et percutants, tandis que la mise en scène parvient à aérer ce quasi-huis clos à travers un sens étudié du cadre.

Si Tyrone Power est impeccable et ambigu dans le rôle de Leonard Vole, c’est Marlene Dietrich, impériale et qui intervient au bout de trente minutes qui retient l’attention après Charles Laughton. Dans un rôle finalement proche de celui qu’elle campait dans La Scandaleuse de Berlin (une scène de flashback reprend d’ailleurs une séquence de chant qui lui fait écho) presque dix ans auparavant, déjà sous la direction de Billy Wilder, Marlene Dietrich livre l’une de ses prestations les plus originales et énigmatiques. La moitié du film se déroule dans un tribunal, incroyablement reconstitué par le grand Alexandre Trauner, qui devient alors propice à d’éblouissants numéros d’acteurs. Billy Wilder filme ses personnages plongés dans un jeu sous tension, où se joue la vie d’un homme. Le stress et la réflexion se lisent sur le visage en sueur de Robarts, sur sa façon d’aligner ses cachets sur son pupitre, tandis qu’il écoute bien sagement l’accusation.

Que ce soit à la photographie (Russell Harlan), au montage (Daniel Mandell), à la musique (Many Malneck) et à la mise en scène proprement dite, Témoin à charge, nommé à six reprises aux Oscars et à cinq aux Golden Globes, est une nouvelle leçon de cinéma concoctée par Billy Wilder.

LE BLU-RAY

Le Blu-ray de Témoin à charge, disponible chez Rimini Editions, repose dans un boîtier classique de couleur bleue, glissé dans un surétui très élégant. Le menu principal est animé sur la scène d’ouverture du film en version française. N’oublions pas le livret de 32 pages concocté par Marc Toullec, qui propose un excellent retour sur la nouvelle et la pièce de théâtre d’Agatha Christie, puis l’adaptation de Billy Wilder, sa production, ses comédiens et la sortie du film.

Comme ils l’ont fait précédemment sur les autres titres de Billy Wilder sortis en DVD et Blu-ray chez Rimini Editions (La Grande combine, Embrasse moi, idiot, Irma la douce, La Garçonnière), Mathieu Macheret (Le Monde) et Frédéric Mercier (Transfuge) proposent une présentation et une analyse pertinente de Témoin à charge (40’). Face à face, les deux journalistes-critiques cinéma croisent le fond et la forme du film de Billy Wilder, en le replaçant tout d’abord dans la carrière du maître. Puis, les interventions des deux confrères se complètent parfaitement, l’un et l’autre rebondissant sur les arguments avancés, sans aucun temps mort. La genèse du film, l’écriture du scénario, les thèmes explorés, les partis pris, les intentions, le casting, la psychologie des personnages principaux, les décors d’Alexandre Trauner et bien d’autres sujets sont abordés avec une passion contagieuse !

On pensait que l’éditeur avait fait le tour des documentaires sur Billy Wilder, mais c’était sous-estimer Rimini ! Et quel plaisir de (re)découvrir le film Portrait d’un homme à 60% parfait (56’), réalisé par Michel Ciment et Annie Tresgot en 1980 ! Le journaliste rencontre le cinéaste, chez lui et dans son bureau à Los Angeles. Billy Wilder évoque sa jeunesse et sa carrière de journaliste à Vienne puis à Berlin (photos à l’appui), sa fuite à l’arrivée de Hitler, son travail de scénariste, la naissance de l’Hollywood classique, ses rencontres marquantes (Fitzgerald, Faulkner, Lubitsch, Trauner…), son amour pour la peinture. Les comédiens Jack Lemmon et Walter Matthau, ainsi que le scénariste I.A.L. Diamond interviennent également et racontent quelques anecdotes truculentes. Ce documentaire se clôt sur la désormais célèbre tirade de Billy Wilder s’adressant à Michel Ciment « Je déteste de n’être pas pris au sérieux, mais plus encore d’être pris trop au sérieux ».

L’interactivité se clôt sur la bande-annonce originale, durant laquelle Charles Laughton s’adresse directement aux spectateurs pour leur signaler de ne pas dévoiler le dénouement du film après l’avoir vu. A l’instar des Diaboliques d’Henri-Georges Clouzot et de Psychose d’Alfred Hitchcock, un panneau d’avertissement indique également que les spectateurs devront attendre la fin de la séance précédente avant d’être placé dans la salle.

L’Image et le son

S’il n’est pas mirifique, le master HD (1080p, AVC) de Témoin à charge ne démérite pas et offre aux spectateurs un joli confort de visionnage. Le N&B est plus que correct avec des contrastes équilibrés, une palette de gris assez riche et une texture argentique bien gérée. Quelques poussières et tâches diverses subsistent, ainsi qu’une poignée de plans plus abîmés et de sensibles décrochages sur les fondus enchaînés, mais la copie est propre, la stabilité est de mise et les gros plans sont peu avares en détails. Aux oubliettes le DVD édité par MGM en 2004 !

La version originale DTS-HD Dual Mono est très propre et se révèle nettement plus ardente et fluide que la piste française, au doublage obsolète, centrée essentiellement sur les voix, au détriment des effets annexes. Le changement de langue n’est pas verrouillé en cours de visionnage et les sous-titres français non imposés.

Crédits images : © MGM / Rimini Editions / Captures Blu-ray : Franck Brissard pour Homepopcorn.fr